D. AU TOTAL, LE FNAP N'A PAS ENCORE ATTEINT L'OBJECTIF DE SÉCURISATION DES RESSOURCES

Le FNAP ne peut certainement pas, à lui seul, assurer l'atteinte des objectifs de production de logement fixés par le Gouvernement.

1. Une simplification et une stabilisation des règles inachevées

Si le regroupement des crédits budgétaires de l'État et des contributions des acteurs du logement social au sein d'un fonds à la gouvernance paritaire a constitué un progrès indéniable , cette transformation de gestion au niveau national ne s'est pas accompagnée d'une réforme des procédures de répartition au niveau local .

Votre rapporteur retient des auditions qu'il a conduites le sentiment que l'application des procédures consomme une grande énergie au point de limiter la créativité des agents, alors que l'expérimentation dans une région pourrait aussi profiter aux autres régions.

La simplification des procédures devrait donc être un objectif en soi , dans un esprit de recherche d'efficacité, mais aussi de réduction des coûts : la complexité des règles et la persistance de doublons administratifs constituent un facteur de coût en soi pour l'ensemble des acteurs.

De même l'instabilité des règles et des objectifs , qui sont modifiés chaque année, constituent une véritable difficulté pour les organismes qui souscrivent à des aides comme pour les services instructeurs, qui ont légitimement des difficultés à comprendre ce qui justifie des modifications aussi fréquentes des priorités de la politique de développement des logements sociaux.

Votre rapporteur souligne la nécessité d'éviter la « suradministration » et de favoriser la simplification et la stabilisation des règles et des objectifs en matière de logement social, surtout lorsque ceux-ci sont décidés au niveau national, donc loin du terrain.

2. Sécuriser la gestion des fonds en introduisant une pluriannualité

Votre rapporteur note également que l'objectif de sécurisation des fonds , promise lors de la création du FNAP, n'a pas été atteint .

L'année 2017 en a constitué un exemple avec l'annulation en cours d'année de plus de la moitié des crédits budgétaires promis en loi de finances.

Au-delà de cet épisode, plusieurs personnes auditionnées par votre rapporteur spécial ont fait part de la difficulté que représente le principe d'annualité des décisions d'attribution des fonds du FNAP.

Cette annualité résulte bien entendu du principe d'annualité budgétaire, les fonds transitant par le budget de l'État et le programme 135, mais les crédits d'État sont devenus minoritaires, voire résiduels, et la plus grande partie des ressources du fonds proviennent dorénavant des acteurs du monde du logement.

Votre commission défend régulièrement le principe d'annualité budgétaire, qui prévoit que « les lois de finances déterminent, pour un exercice, la nature, le montant et l'affectation des ressources et des charges de l'État, ainsi que l'équilibre budgétaire et financier qui en résulte » 61 ( * ) . Le respect de cette règle est indispensable pour le contrôle périodique et démocratique de l'usage des deniers publics, tel que l'effectue le Parlement et notamment la commission des finances tout au long de l'année.

La Cour des comptes 62 ( * ) fait toutefois observer que le principe d'annualité est « peu pertinent » pour le programme 135. En effet, l'exécution porte pour une partie significative sur la consommation des fonds de concours attribués l'année précédente et reportés en début de gestion. 123,71 millions d'euros de fonds de concours ont ainsi été reportés, en crédits de paiement, entre 2016 et 2017, de manière à assurer en début d'exercice le financement des opérations d'aides à la pierre.

En effet, les subventions portent pour l'essentiel sur des opérations de construction neuve, dont la durée totale atteint couramment six ans et plus. La perspective pluriannuelle s'impose d'ailleurs dans la gestion moderne où la conduite des projets ne peut reposer sur les ressources d'un seul acteur, mais requièrent un cofinancement de plusieurs acteurs, dans un esprit de contractualisation.

Sans remettre en cause le principe d'annualité qui s'applique au budget de l'État, une programmation des crédits du FNAP dans un cadre triennal permettrait de visibilité aux acteurs et les responsabiliserait. Elle permettrait de conclure les conventions de délégation, dont la durée est de six ans, en associant les moyens nécessaires pour la moitié de la durée de la délégation. La visibilité apportée aux programmes permettrait de renforcer leur soutenabilité.

Les aides à la pierre offrent d'ailleurs un terrain favorable à une démarche de pluriannualisation dans la mesure où elles viennent à l'appui de projets décidés en fonction des besoins de la population plus que de la conjoncture et qui sont donc peu susceptibles d'être remis en cause par un retournement de la situation économique à court terme. Les dépenses sociales, à l'inverse, varient considérablement selon la situation économique et ne pourraient donc pas être ainsi prévues à l'avance.

Votre rapporteur défend l'idée d'une programmation pluriannuelle de l'attribution des aides à la pierre, qui entrerait dans l'objectif de sécurisation des fonds poursuivi lors de la création du FNAP. Cette sécurisation pourrait passer par l'élaboration d'un document engageant l'État et les bailleurs sociaux vis-à-vis du FNAP, portant sur une période de trois ans.

Recommandation n° 6 : sécuriser les fonds sur le plan pluriannuel, simplifier et stabiliser les règles de répartition et d'utilisation.


* 61 Article 1 er de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

* 62 Note d'exécution budgétaire précitée de la mission « Égalité des territoires et logement » pour l'exercice 2017, p. 71.

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