B. MAINTENIR UN NIVEAU DE FINANCEMENT PUBLIC SATISFAISANT TOUT EN ENCOURAGEANT LA DIVERSIFICATION DES SOURCES DE FINANCEMENT DES STRUCTURES D'AIDE ALIMENTAIRE

1. Maintenir un niveau de financement public satisfaisant

Vos rapporteurs considèrent qu'il est essentiel de maintenir un niveau de financement public satisfaisant, que ce soit sur le plan national mais également européen , comme indiqué infra .

S'agissant des crédits budgétaires nationaux, leur montant doit être préservé ; la baisse des crédits constatée entre 2017 et 2018 est donc regrettable. Vos rapporteurs considèrent que le montant de ces crédits doit être en cohérence avec le nombre de bénéficiaires grandissant et tenir compte des difficultés financières auxquelles sont confrontées les associations . La suppression de la « réserve parlementaire » - compensée de manière insuffisante et insatisfaisante par le FDVA -, la baisse brutale des contrats aidés sont autant de facteurs de fragilisation financière des associations. Les associations doivent également supporter de nouvelles charges, notamment celles engendrées par le traitement des dons en nature qui sont en augmentation ; à savoir des coûts logistiques, de déploiement d'outils de gestion, de recherches de partenariat etc.

Vos rapporteurs seront ainsi attentifs à ce que ce financement national soit maintenu et demeure satisfaisant.

2. Encourager la diversification des sources de financement dans un contexte budgétaire tendu
a) Encourager le développement (en qualité et quantité) des ressources en provenance du gaspillage alimentaire

Les dons en nature - qui se sont développés notamment par la mise en oeuvre de la loi Garot - doivent être encouragés, en qualité et en quantité.

Comme vos rapporteurs ont pu l'indiquer, les associations constatent, dans certains territoires, une baisse de la qualité du don , qui se manifeste par une absence de tri des denrées de la part de la grande distribution ou par des denrées données à J-1 de leur date limite de consommation, alors que la loi impose un don à J-2. Vos rapporteurs considèrent ainsi comme essentielle la préservation de la qualité des dons , et souhaitent que les services de l'État veillent à son respect par la grande distribution et à l'application du décret d'application de la loi Garot. Vos rapporteurs proposent ainsi - reprenant une proposition du député Garot -afin d'inciter les supermarchés à trier les denrées - de lier les avantages de défiscalisation à la qualité des dons .

S'agissant des mesures fiscales, il pourrait également être envisagé une régularisation de la TVA déductible par les grandes et moyennes surfaces dès lors qu'elles détruisent leurs marchandises . L'article VI de l'article 207 de l'annexe II au CGI prévoit en effet actuellement l'exemption de régularisation de la taxe initialement déduite pour les marchandises détruites, alors que le principe prévoit un reversement en cas de disparition d'une marchandise. Selon les hypothèses retenues par vos rapporteurs, cette mesure fiscale générerait un gain pour les finances de l'État de 81 millions d'euros.

En parallèle de ces économies réalisées par l'État, il pourrait également être envisagé l'augmentation du plafond des réductions d'impôt pour les magasins entre 400 et 2 000 m² soumis à la loi Garot . En cas d'augmentation des dons à un niveau équivalent à 35 % de leurs invendus, les magasins - selon les simulations faites par vos rapporteurs - dépasseraient le plafond de 0,5 % du chiffre d'affaires HT. Cette mesure de relèvement du plafond fiscal représenterait un coût - selon les estimations de vos rapporteurs - de 33,7 millions d'euros.

Impact d'un relèvement du plafond fiscal au titre des dons des entreprises

Source : Commission des finances du Sénat

Vos rapporteurs sont par ailleurs favorables à l'élargissement du champ des réductions d'impôts afin de permettre aux producteurs de donner des fruits et légumes transformés et reconditionnés , prévu dans le cadre du deuxième pacte de lutte contre le gaspillage. Cette incitation peut aujourd'hui être utilisée pour les dons de lait, oeufs, fruits et légumes et pommes de terre à la suite des travaux menés dans le cadre du premier pacte de lutte contre le gaspillage alimentaire avec ces filières. La mise en place d'un dispositif pour étendre cette possibilité aux producteurs de viande est un des engagements du deuxième pacte lancé en 2017. Selon les informations transmises par la DGCS, des travaux sont en cours sur les dons de viandes de porc avec Inaporc et devraient permettre d'aboutir à un dispositif transposable à l'ensemble des viandes.

Outre le levier fiscal, vos rapporteurs considèrent le développement de structures intermédiaires comme Comerso ou Phénix comme un moyen intéressant permettant d'inciter la grande distribution à davantage donner aux associations . Vos rapporteurs estiment, toutefois, qu'il faut veiller à ce que le développement d'opérateurs économiques ne conduise pas au « détournement » des dons vers des activités lucratives au détriment des associations. Par ailleurs, ils jugent essentiel que les nouvelles « start-up » qui se développent dans le domaine du gaspillage alimentaire respectent les normes d'hygiène et de sécurité liées aux dons alimentaires aux associations.

Enfin, vos rapporteurs estiment qu'il convient d'encourager les dons ou achats provenant des circuits courts , et le développement des partenariats entre les associations et les producteurs de proximité, sur le modèle d'initiatives existantes (Solaal, Jardins de cocagne, Chantiers d'insertion ou jardins solidaires mis en oeuvre par les quatre associations principales).

b) Profiter de l'économie numérique pour diversifier les sources de financement

L'économie numérique doit également être considérée comme une source potentielle de diversification des financements pour les associations. Outre les applications mobiles développées par des entreprises intermédiaires, doivent être encouragées les initiatives existantes en la matière au sein des associations. Ainsi la Fédération des banques alimentaires a mis en oeuvre une plateforme numérique « Proxidon » - reposant sur la géolocalisation - afin de mettre en relation les banques alimentaires et les supermarchés de proximité.

La Fédération des banques alimentaires :
l'outil numérique au service de son financement

Dès 2016, la FFBA a mis en oeuvre l'application Proxidon et a développé, en 2017, un portail numérique afin de faciliter les flux de dons de denrées alimentaires, d'optimiser les autres catégories de dons et le management du bénévolat. Proxidon est une plateforme numérique qui permet aux commerces alimentaires de proximité de faire don de leurs invendus encore consommables aux associations situées aux alentours, grâce à un système d'échange simple associé à la géolocalisation. Lancée en 2016 à l'initiative de la Banque Alimentaire du Rhône, une autre Banque Alimentaire a rejoint le projet en 2017 (Bouches-du-Rhône) et d'autres vont suivre. En 2017, un beau succès sur Lyon et Marseille : 107 associations bénéficiaires, 133 commerçants donateurs, 118 tonnes de denrées alimentaires, 236 000 repas distribués.

Par ailleurs, a été mis en oeuvre en 2017 , un nouveau portail numérique avec pour objectif notamment de faciliter les flux des dons de denrées alimentaires pour le réseau avec le projet Clickdon.

Source : Rapport d'activité annuel 2017 de la Fédération française des banques alimentaires

Outre les applications permettant la mise en relation des distributeurs et associations, certaines associations - comme ANDES - ont recours aux plates-formes de financement participatif . Ainsi une campagne de financement participatif fut menée par des épiceries solidaires du réseau ANDES du 23 janvier au 9 mars 2018 sur la plateforme Kiss Kiss Bank Bank. 18 projets portés par des épiceries solidaires ont atteint leurs objectif de collecte (objectif de collecte maximum fixé à 3 500 euros par projet et par épicerie), 28 920 euros ont été collectés et 572 donateurs mobilisés.

Vos rapporteurs considèrent ainsi l'économie numérique comme un formidable levier à actionner en matière de générosité publique, en général, et dans le domaine de l'aide alimentaire en particulier .

Recommandation n° 6 : Maintenir un niveau de financement public satisfaisant tout en encourageant la diversification des sources de financement des structures d'aide alimentaire

- maintenir un niveau de financement public satisfaisant en cohérence avec l'augmentation du nombre de bénéficiaires ;

- encourager la diversification des sources de financement dans un contexte budgétaire tendu :

- encourager le développement (en qualité et quantité) des ressources en provenance du gaspillage alimentaire ;

- profiter du développement de l'économie numérique pour diversifier ces sources de financement.

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