LA POLITIQUE ÉNERGÉTIQUE
EN FAVEUR DES BIOCARBURANTS

Depuis deux décennies, la politique énergétique nationale en faveur des biocarburants (I), dont les contours sont largement façonnés par le droit de l'Union européenne (II), a permis d'atteindre des résultats tangibles (III).

I. LE CADRE D'INTERVENTION DES POUVOIRS PUBLICS

A. DES OBJECTIFS AMBITIEUX FIXÉS PAR LE LÉGISLATEUR ET LE POUVOIR RÉGLEMENTAIRE

La politique énergétique en faveur des biocarburants repose tout d'abord sur des objectifs généraux fixés par le législateur, dont les modalités d'action ont été précisées par le pouvoir règlementaire.

1. Les objectifs généraux fixés par le législateur

Des objectifs ambitieux, bien souvent quantifiés, ont été fixés par le législateur pour favoriser l'utilisation des biocarburants dans le secteur des transports.

En premier lieu, dès la loi dite « Grenelle I » du 3 août 2009 48 ( * ) , le législateur a conféré une définition juridique 49 ( * ) à la biomasse, entendue comme la « fraction biodégradable des produits, déchets et résidus provenant de l'agriculture, y compris les substances végétales et animales issues de la terre et de la mer, de la sylviculture et des industries connexes, ainsi que la fraction biodégradable des déchets industriels et ménagers » (article 19).

En ce qui concerne plus spécifiquement les biocarburants, il a prévu notamment que « l'effort de recherche nationale privilégiera les énergies renouvelables, notamment [...] les biocarburants de deuxième et troisième générations » (article 22) et que « la France soutiendra aux niveaux européen et international la mise en place d'un mécanisme de certification des biocarburants tenant compte de leur impact économique, social et environnemental » (article 21 50 ( * ) ).

En outre, depuis la loi dite de « Transition énergétique » du 17 août 2015 51 ( * ) (article 43), l'article L. 641-6 du code de l'énergie dispose que « l'État crée les conditions pour que la part de l'énergie produite à partir de sources renouvelables utilisées dans tous les modes de transport en 2020 soit égale à 10 % au moins de la consommation finale d'énergie dans le secteur des transports et à 15 % en 2030 » 52 ( * ) .

Cette même loi a prévu que la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) comprenne un objectif d'incorporation des biocarburants avancés, définis comme « des biocarburants qui doivent être produits à partir de matières premières qui ne compromettent pas la vocation alimentaire d'une terre et ne comportent pas ou peu de risques de changements directs d'affectation des sols » (article L. 661-1-1 du même code).

Enfin, et plus concrètement, cette loi (articles 175 et 197) a institué une « stratégie nationale de mobilisation de la biomasse » et des « schémas régionaux biomasse », destinés à déterminer des objectifs pour l'utilisation à des fins énergétiques de la biomasse (articles L. 211-8 du code de l'énergie et L. 222-3-1 du code de l'environnement).

Ce cadre juridique afférent aux biocarburants, déjà bien établi depuis maintenant une décennie, a été récemment consolidé à l'initiative de la commission des Affaires économiques du Sénat, à l'occasion de la loi dite « Énergie et climat » 53 ( * ) du 9 novembre 2019 (articles 1 er et 2).

En effet, cette loi a notamment :

- inscrit un objectif de « valorisation ... de la biomasse à des fins de matériaux et d'énergie » 54 ( * ) (article L. 100-2 du code de l'énergie) ;

- relevé à « au moins » 15 % en 2030 la part devant être atteinte par l'énergie produite à partir de source renouvelables dans la consommation finale de carburants (article L. 100-4 du même code) ;

- prévu que la « loi quinquennale », qui constituera, dès 2023 puis tous les cinq ans, l'horizon de notre politique énergétique nationale, comprenne un « objectif de développement des énergies renouvelables pour ... le carburant » (article L. 100-1 A du même code).

2. Les modalités d'action précisées par le pouvoir réglementaire

Hormis ces grands objectifs, des modalités d'action plus concrètes ont été précisées par le pouvoir règlementaire, dans le cadre des documents de planification énergétique et climatique existants.

Tout d'abord, le scenario de référence de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) 55 ( * ) , permettant d'atteindre la « neutralité carbone » à horizon 2050, évalue à 100 TWh les besoins en énergie finale qui pourraient être couverts par des biocarburants et à 140 TWh les ressources biomasses brutes qui devraient être mobilisées à cette fin.

À cette date, les biocarburants permettraient ainsi de couvrir 9,43 % des besoins en énergie finale (évalués à 1060 TWh), en valorisant entre 31,1 et 35 % des ressources biomasses brutes (comprises entre 400 et 450 TWh).

Le cadre stratégique déterminé par la SNBC a été complété par les PPE .

La PPE actuelle (établie sur la période 2016-2023) comprend ainsi des objectifs d'incorporation de biocarburants avancés s'élevant, pour l'essence, à 1,6 % en 2016 et 3,4 % en 2023 et, pour le gazole, à 1 % et 2,3 % 56 ( * ) .

Le projet de PPE en cours d'élaboration (prévue pour la période 2019-2028) prévoit pour sa part :

- pour les biocarburants conventionnels, de « maintenir un niveau de 7% sans le dépasser aux horizons 2023 et 2028 » ;

- s'agissant des biocarburants avancés, d'atteindre 1,8 % en 2023 et 3,8 % en 2028, pour l'essence, et 0,85 % et 3,2 % pour le gazole.

Au total, le projet de PPE indique que « la croissance de la part bio-sourcée dans les carburants se fait de façon exclusive par le développement des biocarburants avancés », en veillant à limiter « l'incorporation de biocarburants réalisés à partir de matières premières présentant un risque élevé d'induire des changements indirects dans l'affectation des sols » 57 ( * ) .


* 48 Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

* 49 Cette définition a été codifiée à l'article L. 211-2 du code de l'énergie par l'ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie.

* 50 Cet article a été abrogé depuis lors.

* 51 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

* 52 Corrélativement, l'article L. 100-4 du code de l'énergie prévoit de porter la part des énergies renouvelables à 15 % de la consommation finale de carburants en 2030.

* 53 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat.

* 54 Étant précisé que la valorisation de la biomasse doit intervenir « en conciliant cette valorisation avec les autres usages de l'agriculture et de la sylviculture, en gardant la priorité donnée à la production alimentaire ainsi qu'en préservant les bénéfices environnementaux et la capacité à produire, notamment la qualité des sols ».

* 55 Projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) 2019-2023 et 2024-2028, p. 18 et s.

* 56 Décret n° 2016-1442 du 27 octobre 2016 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie (Article 7).

* 57 Projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) 2019-2023 et 2024-2028, p. 84 et s.

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