B. LA TENSION DE LA CHAÎNE D'APPROVISIONNEMENT ET LES DANGERS DES EFFETS DOMINO

Une des clefs de l'avenir de la BITD se situe là : son écosystème est en danger. En se focalisant sur quelques grands groupes, l'opinion publique ne perçoit pas la multiplicité, la diversité et le caractère vital de l'écosystème de start-ups, de PME et d'ETI sans lesquelles les grands groupes n'existeraient pas.

Les auditions que nous avons menées ont permis d'évoquer plusieurs cas de PME ou d'ETI inconnue du grand public mais qui sont des fournisseurs critiques pour plusieurs des plus grands groupes de la BITD. Ces entreprises de taille moyenne ne retiennent pas l'attention du public, et le risque est donc réel qu'elles ne retiennent pas suffisamment l'attention des pouvoirs publics. Du reste, les grandes entreprises et les associations de filière (GIFAS, GICAT et GICAN) ont, elles, clairement conscience de ce sujet. Dans la crise actuelle, elles ont cherché à élaborer une cartographie des fournisseurs critiques, en portant une attention particulière à ceux qui étaient en difficulté.

Dans bien des cas, ce travail est mené de concert avec la DGA, au ministère des armées, et parfois avec la direction générale des entreprises (DGE), au ministère de l'économie et des finances.

Il est fondamental que l'opinion publique puisse percevoir que les contrats d'armement, au-delà des grands groupes qui en portent l'image, alimentent tout l'écosystème de la chaîne d'approvisionnement ( supply chain) . Ainsi, lorsque Thalès remporte un contrat, la valeur du produit qui correspond au fournisseur est en moyenne de 50 %. Dans certains cas, la valeur revenant aux sous-traitants peut atteindre 70 %.

Il s'agit là d'une médaille qui a un revers. On croit parfois que les grands groupes ont une assise qui les met à l'abri d'une crise conjoncturelle, même violente, et qu'en tout état de cause l'Etat viendrait à leur secours si elles étaient dans une impasse, selon l'adage du « too big to fail » . Mais la faillite n'est pas le seul risque qui guette les grands groupes. Si les maillons de leurs chaînes d'approvisionnement cassent, ils peuvent se retrouver en grande difficulté. C'est en cela que la notion de BITD est fondamentale : elle décrit un écosystème fait d'interactions innombrables. Comme c'est le cas pour la biodiversité, la disparition d'un élément fragilise tout l'ensemble, de façon presque invisible, jusqu'à ce que la survie de tout l'écosystème soit remise brutalement en question. C'est là ce qui va se jouer dans les cinq ans qui viennent : la survie d'un des derniers écosystèmes industriels français, qui a la particularité d'être indispensable à toute souveraineté, et à la protection des français.

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