N° 765

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 juillet 2021

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) par la mission d'information sur la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC),

Par Mme Céline BOULAY-ESPÉRONNIER et M. Bernard FIALAIRE,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon , président ; M. Max Brisson, Mmes Laure Darcos, Catherine Dumas, M. Stéphane Piednoir, Mme Sylvie Robert, MM. David Assouline, Julien Bargeton, Pierre Ouzoulias, Bernard Fialaire, Jean-Pierre Decool, Mme Monique de Marco , vice-présidents ; Mme Céline Boulay-Espéronnier, M. Michel Savin, Mmes Marie-Pierre Monier, Sonia de La Provôté , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, Jérémy Bacchi, Mmes Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, Toine Bourrat, Céline Brulin, Nathalie Delattre, M. Thomas Dossus, Mmes Sabine Drexler, Béatrice Gosselin, MM. Jacques Grosperrin, Abdallah Hassani, Jean Hingray, Jean-Raymond Hugonet, Mme Else Joseph, MM. Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Michel Laugier, Mme Claudine Lepage, MM. Pierre-Antoine Levi, Jean-Jacques Lozach, Jacques-Bernard Magner, Jean Louis Masson, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Damien Regnard, Bruno Retailleau, Mme Elsa Schalck, M. Lucien Stanzione, Mmes Sabine Van Heghe, Anne Ventalon, M. Cédric Vial .

AVANT-PROPOS

Créée par la loi relative à l'orientation et à la réussite des étudiants dite « loi ORE » du 8 mars 2018, la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) est une taxe acquittée par les étudiants lors de leur inscription dans l'enseignement supérieur et affectée au financement d'actions visant à améliorer les conditions de la vie étudiante dans les campus.

En seulement trois années d'existence, la CVEC a déjà connu polémiques, critiques et rebondissements. Son plafonnement à 95 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2019, alors que les recettes de sa collecte s'étaient révélées plus dynamiques qu'escompté, a fait craindre une affectation du surplus au remboursement de la dette publique au lieu d'un investissement dans la vie étudiante, risque sur lequel la commission de la culture, de l'éducation et de la communication avait très vite alerté. Opposés dès l'origine au principe d'une taxe payée par les étudiants, leurs représentants élus dénoncent fréquemment le manque de transparence sur son utilisation. Dans les campus, force est en effet de constater que les étudiants peinent concrètement à voir où va l'argent dont ils s'acquittent. Le déficit d'information est aussi régulièrement pointé par la représentation nationale qui, taxe affectée oblige, ne peut pleinement contrôler son bon usage. Le retard de publication des données ministérielles sur les deux premières années de collecte n'est en outre pas de nature à apaiser le débat. L'irruption de la crise sanitaire en 2020 est venue à son tour bouleverser le déploiement de la CVEC qui, sur orientation ministérielle, a été fortement mobilisée pour venir en aide aux étudiants en difficulté financière et sociale.

C'est dans ce contexte mouvementé que la commission de la culture, de l'éducation et de la communication qui, chaque année, à l'occasion de l'examen du budget de l'enseignement supérieur, porte une attention particulière à la CVEC, a souhaité en dresser un premier bilan. La mission d'information qu'elle a confiée à Céline Boulay-Espéronnier et Bernard Fialaire se veut parfaitement complémentaire à la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante en France, dont les deux co-rapporteurs sont d'ailleurs membres. Ainsi, les constats et recommandations formulés dans le cadre de ces deux travaux de contrôle s'enrichissent mutuellement.

I. LA CONTRIBUTION DE VIE ÉTUDIANTE ET DE CAMPUS (CVEC) : MODE D'EMPLOI

A. UNE NOUVELLE CONTRIBUTION DESTINÉE À APPORTER DES FINANCEMENTS SUPPLÉMENTAIRES À LA VIE ÉTUDIANTE ET À LA VIE DE CAMPUS

1. Le contexte de la création de la CVEC

L'année 2017 a été marquée par deux étapes majeures pour l'enseignement supérieur : l'annonce du « Plan étudiants » en octobre et la présentation du projet de loi « Orientation et réussite des étudiants » en novembre.

Depuis plusieurs années déjà, deux phénomènes rendaient impérieuse la réforme du secteur : le dynamisme de la démographie étudiante (avec une augmentation de 30 000 étudiants supplémentaires chaque année en moyenne à l'entrée dans l'enseignement supérieur) et l'échec massif en licence qu'aucune mesure n'avait encore réussi à enrayer (moins de 30 % des inscrits en première année de licence obtenant leur diplôme en trois ans).

À la nécessité d'améliorer la réussite en premier cycle d'études supérieures, s'exprimait également le besoin d'une adaptation du système aux évolutions de la vie étudiante et de campus . De nombreuses enquêtes locales et nationales montraient en effet que l'augmentation des effectifs à l'entrée dans l'enseignement supérieur s'accompagnait d'une diversification du public étudiant, elle-même génératrice de modes de vie différents, d'attentes diverses, de rythmes universitaires pluriels... La vie étudiante apparaissait alors comme de plus en plus articulée aux temps, aux lieux et aux conditions d'études.

C'est dans ce contexte qu'est née l'idée de mettre en place un financement dédié à la vie étudiante et de campus , en partant d'un double constat : d'une part, le budget des établissements consacré à ce domaine pouvait parfois faire office de variable d'ajustement compte tenu de leurs contraintes financières, d'autre part, le système de financement de la vie étudiante était complexe et peu lisible. Parallèlement, se posait aussi la question du maintien de la sécurité sociale étudiante.

2. Un nouveau dispositif soutenu par la commission

Le projet de loi relatif à l'orientation et à la réussite des étudiants (dit « ORE »), présenté à l'automne 2017, a concrétisé ces réflexions en proposant :

- la suppression de la sécurité sociale étudiante et du paiement de la cotisation afférente 1 ( * ) , au bénéfice d'une affiliation automatique des étudiants au régime général ;

- l'instauration d'une contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) , en remplacement du paiement des droits de médecine préventive, de la contribution au Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes (FSDIE) et des cotisations pour les activités sportives et culturelles, dont s'acquittaient jusqu'alors les étudiants de manière segmentée. Le FSDIE est maintenu, mais est désormais alimenté par la CVEC 2 ( * ) .

Lors de l'examen du projet de loi, la commission , par la voix de son rapporteur Jacques Grosperrin, s'est prononcée en faveur de cette nouvelle contribution , estimant, tout d'abord, qu'elle permettrait d'améliorer la qualité de vie des étudiants, leur suivi médical ainsi que leur accès à des activités culturelles et sportives, considérant, ensuite, que la substitution d'une contribution unique à plusieurs droits épars représentait un effort de simplification appréciable pour l'ensemble des étudiants.

La commission a toutefois tenu à modifier les dispositions initiales du projet de loi portant sur la répartition du produit de la CVEC, en prévoyant que celle-ci ait pour fondement le nombre d'élèves inscrits (cf. infra ) et non ceux ayant effectivement acquitté la contribution. Elle a également souhaité élargir le périmètre des étudiants boursiers exonérés de son paiement.

3. Une contribution exclusivement fléchée sur l'amélioration des conditions de vie des étudiants

En application de l'article 12 de la loi « ORE » du 8 mars 2018, la CVEC est « destinée à favoriser l'accueil et l'accompagnement social, sanitaire, culturel et sportif des étudiants et à conforter les actions de prévention et d'éducation à la santé réalisées à leur intention » (article L. 841-5 du code de l'éducation).

Contribution affectée, la CVEC a pour objectif premier d'apporter des moyens financiers supplémentaires aux établissements d'enseignement supérieur, en plus des financements déjà mobilisés, pour améliorer et développer la vie étudiante .

La circulaire ministérielle n° 2019-029 du 21 mars 2019, qui en détaille les modalités d'utilisation, précise qu'elle « doit servir exclusivement à l'amélioration des conditions de vie des étudiants » - la participation au financement de la formation des étudiants est, par exemple, explicitement exclue - via le développement d'actions visant à :

- rénover la politique de prévention et améliorer l'accès aux soins des étudiants ;

- renforcer leur accompagnement social ;

- développer leur pratique sportive ;

- diversifier les projets et événements artistiques et culturels qui leur sont destinés ;

- améliorer leur accueil.

Le second objectif de la CVEC est de permettre le déploiement , à l'initiative des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous), de projets partenariaux en faveur de la vie étudiante avec les établissements d'enseignement supérieur, notamment ceux qui ne sont pas affectataires de la contribution (cf. infra ), et les collectivités territoriales.


* 1 Auparavant, les étudiants relevaient tous du régime de la sécurité sociale étudiante, régime géré par les mutuelles étudiantes pour les remboursements de base et éventuellement pour la partie complémentaire. Une cotisation spécifique était demandée (d'un montant de 217 euros) et les étudiants devaient faire une démarche d'affiliation spécifique.

* 2 Le FSDIE est dédié au financement :

- à titre principal (70 %), de projets portés par les associations étudiantes ;

- à titre secondaire (30 %), de l'aide sociale aux étudiants en difficulté.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page