B. UNE ACCÉLÉRATION DES DÉPLOIEMENTS, QUI S'INSCRIT NÉANMOINS DANS UNE TEMPORALITÉ LONGUE

1. Le premier bilan du New Deal est globalement positif et les objectifs sont atteints

Comme le relève la Cour dans son rapport, le premier bilan du New Deal mobile est « plutôt positif ». Sur les différents volets, les efforts des opérateurs ont été réels. En particulier, en matière de généralisation de la 4G sur les pylônes existants, l'évolution depuis 2018 a été très marquée. L'objectif de 100 % des pylônes équipés fin 2021 15 ( * ) devrait ainsi être atteint.

Évolution de la part des antennes équipée en 4G

(en points de pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données de l'ARCEP

Ainsi, la Cour relève que la couverture 4G du territoire dans son ensemble est ainsi passée de 45 % en janvier 2018 à 76 % en juillet 2020. Comme le montre la dernière carte mise en ligne par l'Arcep, pour le quatrième trimestre 2020, la zone couverte par la 4G est désormais particulièrement étendue.

Carte de la couverture mobile 4G
au quatrième trimestre 2020

Source : Arcep

La Cour évoque ainsi la « quasi-extinction des zones blanches 4G ces trois dernières années, même si cette difficulté n'est pas encore intégralement résolue. » 16 ( * ) . Le rapport souligne également le renforcement de la couverture minimale des départements les moins bien couverts en 2015. Celle-ci a en effet « nettement progressé en cinq ans . »

Cependant, ces différents constats ne sont pas toujours en phase avec le ressenti des acteurs sur le terrain . Pour un certain nombre d'entre eux, il reste encore beaucoup à faire pour faire converger les services dans les différents territoires.

Plusieurs personnes auditionnées par les rapporteurs ont en effet relevé d'importantes différences entre les cartes de l'Arcep, basées sur des modélisations théoriques en fonction des spécificités des antennes, et la réalité de la couverture sur le territoire.

En ce sens, les rapporteurs soutiennent les deux recommandations de la Cour visant à faciliter la réalisation de mesures ciblées de la qualité de service mobile et de définir une norme de très haut débit minimale, correspondant à une qualité d'internet mobile satisfaisante. Il est en effet indispensable de s'assurer de la réalité de l'accès à internet dans les territoires les moins denses.

Afin de permettre aux collectivités de participer à ces campagnes de mesures, les rapporteurs spéciaux recommandent de définir des standards communs entre l'Arcep, les opérateurs et les collectivités pour que les tests réalisés par ces dernières puissent être reconnus par l'ensemble des intervenants.

De plus, la validité des études radios préalables à l'implantation d'antennes est aujourd'hui trop limitée au regard de la fréquence des arrêtés . Ces études ne sont valables que 10 mois à compter de leur réalisation, les opérateurs arguant de ce que leur réseau mobile est en permanente mutation.

Les rapporteurs spéciaux estiment que le principe doit être renversé et que ces études doivent rester valables aussi longtemps que les opérateurs n'opposent pas une évolution de leur réseau de nature à en affecter la validité.

Recommandation n° 5 : fixer des standards communs à l'ensemble des acteurs pour la réalisation de campagnes de mesures de couverture et faire évoluer les règles de validité des études réseaux en les considérant comme dépassées au-delà de 10 mois uniquement lorsque les opérateurs font valoir des évolutions significatives de leur réseau.

Concernant le dispositif de couverture ciblée, la majorité des sites a été déployée dans les temps impartis . Ainsi, concernant le premier arrêté de juillet 2018, la Cour des comptes relève que 91 % des sites ont été mis en service dans les délais impartis.

D'après les réponses de l'Arcep à la Cour des comptes, les sites non déployés dans les délais s'expliquent par des oppositions de la part des riverains ou de la mairie, des refus administratifs ou encore des difficultés techniques de raccordement.

L'autorité de régulation a ainsi décidé, après instruction des situations individuelles, que les retards en question ne justifiaient pas de l'application de sanctions. La Cour des comptes recommande sur ce point de renforcer les opérations de contrôle et de sanctionner, sans délai, les retards.

Par ailleurs, lors des échanges avec les équipes projets départementales, il est apparu aux rapporteurs spéciaux que les différents volets du New Deal mobile n'étaient pas suffisamment coordonnés entre eux .

Ainsi, alors que les volets axes routiers prioritaires (ARP) ou le volet 4G fixe pourraient utilement se compléter avec le dispositif de couverture ciblé et permettre la couverture de certaines zones blanches, les retours de terrain semblent indiquer que cette coordination n'est pas faite, en partie du fait du secret des affaires dont se prévalent les opérateurs.

Les rapporteurs estiment par conséquent qu'il est nécessaire de permettre aux équipes projets départementales de disposer de l'ensemble des informations relatives aux différents volets et de prendre des décisions en conséquence.

Recommandation n° 6 : assurer une meilleure coordination entre les différents volets du New Deal mobile en renforçant les obligations de transparence des opérateurs vis-à-vis des équipes projets locales.

2. Cet effet de rattrapage ne doit pas masquer un ressenti de temps long

Alors que le ministre Julien Denormandie estimait, en novembre 2019, que « in fine , le seul juge de paix sera la perception de nos concitoyens, plus encore que l'Arcep » 17 ( * ) , force est de constater que le sentiment des acteurs rencontrés sur le terrain est celui d'un déploiement très progressif des antennes.

La mise en demeure anticipée des opérateurs de téléphonie mobile par l'Arcep, à l'été 2019, témoigne du sentiment partagé entre les acteurs que les opérateurs n'ont pas consacré tous leurs efforts pour assurer le déploiement rapide des pylônes.

En effet, d'après les auditions menées par les rapporteurs spéciaux, il est apparu que les chantiers de déploiement au titre du dispositif de couverture ciblée n'étaient pas traités comme prioritaires par les opérateurs. Ainsi, le délai de deux ans est souvent considéré comme une échéance qui n'a pas à être anticipée.

Le dispositif de couverture ciblée s'inscrit donc dans une temporalité longue. Les maires qui ont pu bénéficier des premiers arrêtés attendaient des antennes depuis déjà plusieurs années tandis que d'autres ont dû attendre plusieurs années pour être servis par les arrêtés ministériels, les dotations départementales étant limitées.

Ainsi, la demande des maires peut intervenir au moins un an avant que ne soit publié l'arrêté qui fait lui-même courir un délai de deux ans. Il leur faut donc souvent attendre trois ans avant que la promesse d'implantation d'un pylône ne se réalise concrètement.

De plus, il est apparu que les dotations départementales ne seraient pas suffisantes pour couvrir l'ensemble des zones blanches d'ici la fin du New Deal mobile .

Les rapporteurs spéciaux estiment que les dotations doivent pouvoir être renforcés dans les départements dans lesquels il reste des zones blanches . Des nouveaux engagements doivent être pris par les opérateurs pour que la fin du New Deal , qui doit intervenir en 2027, soit aussi la fin des zones blanches sur le territoire national.

Recommandation n° 7 : fixer un objectif de résorption complète des zones blanches à horizon 2027 et réévaluer les obligations des opérateurs pour garantir l'atteinte de cet objectif.


* 15 Y compris les anciennes zones blanches.

* 16 Rapport de la Cour, p. 115.

* 17 Intervention de Julien Denormandie lors de la table ronde organisée par la commission du développement durable, Couverture numérique du territoire : Les objectifs seront ils tenus ?, le 13 novembre 2019.

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