PROPOSITIONS DE LA MISSION

Premier axe : Réaffirmer le rôle de pilotage du ministère de l'agriculture et établir un nouveau projet stratégique pour l'enseignement agricole.

Proposition n° 1 : réaffirmer la spécificité de l'enseignement agricole ainsi que le rôle de pilotage de l'enseignement agricole dévolu au ministère chargé de l'agriculture, en confortant son positionnement au sein de la maquette gouvernementale ;

Proposition n° 2 : exiger la participation du ministre chargé de l'agriculture aux débats au Parlement portant sur l'examen du budget de l'enseignement agricole, tant technique que supérieur ;

Proposition n° 3 : développer les moyens de pilotage du ministère en renforçant la cellule d'appui au pilotage au sein de la direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) ;

Proposition n° 4 : élaborer, en associant l'Éducation nationale, les régions et les branches professionnelles, un nouveau projet stratégique clair et ambitieux pour l'enseignement agricole pour la période 2022-2027, assorti d'indicateurs de suivi et de performance ;

Proposition n° 5 : inviter l'ensemble des régions et des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) à signer des protocoles d'accord pour valoriser l'enseignement agricole et à les décliner en contrats d'objectifs tripartite avec chaque établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricoles (EPLEFPA), mais aussi dans la mesure du possible avec les établissements de l'enseignement agricole privé ;

Proposition n° 6 : à titre conservatoire, annuler au titre de 2022 les suppressions d'emploi prévues dans le schéma prévisionnel d'emplois pluriannuel 2019-2022 ;

Proposition n° 7 : dans le cadre du nouveau projet stratégique et afin de renforcer son attractivité, réévaluer et augmenter les moyens humains de l'enseignement agricole ;

Proposition n° 8 : grâce aux nouveaux outils de suivi et de pilotage dont devra se doter la DGER, objectiver les coûts de fonctionnement des établissements d'enseignement agricole afin d'intégrer dans les coûts pédagogiques de fonctionnement d'un établissement l'ensemble des missions que leur confère la loi ;

Proposition n° 9 : mener, dans le cadre d'un étroit partenariat entre les autorités académiques, une politique offensive de développement et d'accompagnement des initiatives pour valoriser et consolider le maillage territorial de l'enseignement agricole.

Deuxième axe : Consolider les fondamentaux de l'enseignement agricole pour qu'il contribue à relever les défis de l'agriculture et des territoires ruraux.

Proposition n° 10 : simplifier et adapter la cartographie des formations proposées par l'enseignement agricole autour d'un tronc commun enrichi de spécialisations, afin de la rendre plus attractive et mieux en phase avec les attentes du monde agricole et, plus largement, des besoins des territoires ruraux ;

Proposition n° 11 : évaluer les demandes de reconversions professionnelles vers les métiers de l'agriculture et prévoir les moyens budgétaires nécessaires à l'accompagnement de ces futurs agriculteurs ;

Proposition n° 12 : revoir l'équilibre des référentiels de formation pour mieux valoriser les enseignements économiques et de gestion, mais aussi réglementaires et de santé-sécurité au travail ;

Proposition n° 13 : utiliser pleinement le bio et les autres pratiques agronomiques innovantes comme éléments de réflexion intégrés à un socle général de connaissances suffisant pour permettre aux futurs agriculteurs de choisir leur modèle et de s'adapter en cours de vie professionnelle ;

Proposition n° 14 : nommer un représentant des chambres d'agriculture au sein de la commission professionnelle consultative « agriculture, agroalimentaire et aménagement des espaces » (CPCAAA) ;

Proposition n° 15 : associer davantage les représentants des employeurs des entreprises de la transformation alimentaire à l'élaboration de la carte des formations, afin de mieux répondre à leurs besoins, et renforcer l'information autour des métiers proposés par la transformation agroalimentaire au sein de l'enseignement agricole ;

Proposition n° 16 : inciter les représentants professionnels participant aux instances consultatives nationales et locales relatives à l'enseignement agricole à mieux se coordonner pour peser davantage ;

Proposition n° 17 : renforcer les interactions entre organismes de recherche et établissements de l'enseignement supérieur agricole au travers de partenariats bilatéraux ou multilatéraux ;

Proposition n° 18 : expérimenter un enrichissement du rôle de l'alliance Agreenium d'une mission de coordination au niveau national entre la recherche, l'enseignement supérieur et l'enseignement technique agricole ;

Proposition n° 19 : renforcer les aides à la recherche en matière agronomique et agricole, notamment par la création de postes pérennes dans ce domaine ainsi que par des appels à projets de l'Agence nationale de la recherche (ANR) et à travers le dispositif « jeune chercheur-jeune chercheuse » ;

Proposition n° 20 : accroître la diffusion des pratiques innovantes dans les exploitations agricoles au sein des établissements d'enseignement agricole, en renforçant le dispositif de suivi de ces exploitations ;

Proposition n° 21 : mieux associer les instituts de recherche et les établissements d'enseignement supérieur à l'élaboration des référentiels de formation des enseignements techniques agricoles ;

Proposition n° 22 : valoriser le rôle de l'École nationale supérieure de formation de l'enseignement agricole (ENSFEA) pour mieux prendre en compte les spécificités de l'enseignement agricole dans la formation des enseignants et des personnels d'éducation, notamment dans la transposition de la loi pour une école de la confiance ;

Proposition n° 23 : au sein des réseaux mixtes technologiques, augmenter les moyens affectés aux tiers temps des enseignants y participant, en envisageant un passage à un mi-temps, ou en augmentant le nombre d'enseignants éligibles ;

Proposition n° 24 : poursuivre et renforcer la lutte contre les stéréotypes de genre sur la base des recommandations formulées par le Sénat dans son rapport « Femmes et agriculture : pour l'égalité des territoires » ;

Proposition n° 25 : envisager le recours à la voie Fontanet au sein des différentes écoles de l'enseignement supérieur agricole afin de permettre un accès pleinement diversifié aux cursus de l'enseignement agricole supérieur long ;

Proposition n° 26 : ajuster le nombre de vétérinaires formés aux besoins des territoires ; assurer le bon déploiement du dispositif d'incitation à l'installation dans les territoires ruraux adopté à l'initiative du Sénat, en veillant au respect des engagements pris ; mener systématiquement une étude auprès des sortants afin de mieux analyser les raisons de ces évolutions de carrière et d'être en mesure d'en tirer toutes les conséquences ;

Proposition n° 27 : Mobiliser l'enseignement agricole sur la thématique du bien-être de l'agriculteur.

Troisième axe : Renforcer l'attractivité de l'enseignement agricole pour les apprenants, pour les familles et pour les personnels.

Proposition n° 28 : renforcer l'information des enseignants sur le contenu des métiers proposés par l'enseignement agricole, y compris hors champ agricole, en prévoyant, par exemple une présentation systématique de l'enseignement agricole, voire en fonction des territoires, une association directe de l'enseignement agricole par le biais des conseils d'administration des collèges et lycées ;

Proposition n° 29 : prévoir en 4 ème et en 3 ème , dans le cadre des heures annuelles d'orientation, la venue d'un proviseur de lycée agricole et d'un directeur de maison familiale rurale devant les élèves des collèges relevant de l'Éducation nationale pour permettre une présentation de l'enseignement agricole ;

Proposition n° 30 : expérimenter une anticipation de cette présentation en 5 ème , dans le cadre d'un partenariat entre un rectorat et une DRAAF devant faire l'objet d'une évaluation circonstanciée ;

Proposition n° 31 : rapprocher la plateforme Chlorofil de la plateforme numérique de l'ONISEP, tel que préconisé par le CGAAER ;

Proposition n° 32 : utiliser pleinement l'obligation de stage en troisième pour mieux faire connaître les métiers du vivant et l'enseignement agricole, en proposant des stages de proximité aux élèves des collèges du bassin, en lien avec les chambres consulaires ;

Proposition n° 33 : développer un réseau « d'ambassadeurs métiers » ;

Proposition n° 34 : instaurer un correspondant de l'enseignement agricole à l'échelle du département pour faire pendant au DASEN ;

Proposition n° 35 : lancer une nouvelle campagne ambitieuse de promotion de l'enseignement agricole à destination du grand public, à l'image d'autres secteurs souhaitant recruter comme l'artisanat ou l'armée de terre, en tirant les leçons des résultats mitigés des campagnes précédentes et en tirant le meilleur parti des opportunités en cours d'année ;

Proposition n° 36 : faire des élèves, apprentis et étudiants de l'enseignement agricole des acteurs de la promotion de cette voie de formation (concours de promotion de l'enseignement agricole par exemple, recueil dynamique de témoignages...) ;

Proposition n° 37 : sanctuariser dans chaque DRAAF une enveloppe dédiée afin d'aider les établissements publics et privés sous contrat de l'enseignement agricole à se faire connaître des élèves, par exemple en leur apportant un soutien financier pour participer à un salon d'information et d'orientation ;

Proposition n° 38 : encourager les établissements agricoles à s'ouvrir au maximum au grand public (colonies de vacances dans les internats, visite des exploitations, fermes, filière hippique) ;

Proposition n° 39 : encourager les apprenants et les établissements de l'enseignement agricole à s'engager dans le service national universel (SNU) ;

Proposition n° 40 : renommer l'enseignement agricole « enseignement agricole, des sciences du vivant et des territoires » ;

Proposition n° 41 : revoir la dénomination des diplômes pour mettre fin à l'utilisation d'acronymes peu parlants et peu attractifs ;

Proposition n° 42 : augmenter le nombre d'options et de spécialités proposées dans les lycées agricoles, notamment par des coopérations avec les lycées de l'Éducation nationale du secteur et le développement de l'enseignement mixte (présentiel/visioconférence), tout en s'assurant de la qualité de l'enseignement ainsi délivrée ;

Proposition n° 43 : Engager une action au niveau des DRAAF afin de s'assurer de la correcte prise en compte des établissements d'enseignement agricole dans l'élaboration de la carte des transports scolaires et des horaires de desserte par les transports en commun ;

Proposition n° 44 : dans le respect de l'autonomie des collectivités territoriales, inviter celles-ci, et en particulier les régions, à mobiliser en faveur de l'enseignement agricole, à le soutenir, qu'il soit public ou privé, et à accroître le partage d'informations avec le ministère de l'agriculture afin d'éviter de trop grandes disparités entre les territoires ;

Proposition n° 45 : affirmer la nécessité de respecter le principe de parité salariale entre l'Éducation nationale et l'enseignement agricole posé par l'article L. 811-4 du code rural et de la pêche et revaloriser en particulier rapidement les auxiliaires de vie scolaire (AVS) et les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH).

I. L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE, UN OUTIL ESSENTIEL POUR PERMETTRE À L'AGRICULTURE DE RELEVER LES DÉFIS AUXQUELS ELLE EST CONFRONTÉE

A. UN ENSEIGNEMENT HISTORIQUEMENT SPÉCIALISÉ MAIS DÉSORMAIS DIVERSIFIÉ

1. Un enseignement professionnel spécifique, fruit de l'histoire
a) Un enseignement lié à l'ambition agricole de la France

L'enseignement agricole a près de 200 ans. Son histoire est liée à l'ambition économique et géopolitique de la France d'être la principale puissance agricole européenne.

Par-delà plusieurs expériences pré-révolutionnaires aboutissant à la création d'écoles spécialisées comme l'École nationale vétérinaire de Lyon ou l'École nationale vétérinaire d'Alfort, respectivement créées en 1761 et 1765, un débat traverse le courant républicain en 1792 sur l'opportunité de créer un enseignement agricole spécifique ou de l'intégrer pleinement au sein d'un grand ministère de l'éducation nationale.

C'est finalement le décret-loi du 3 octobre 1848 qui crée l'enseignement agricole au travers d'un système intégré à trois strates : des fermes écoles au niveau départemental, des écoles régionales et un institut national agronomique.

Comme le rappelait Charles Gilbert Tourret, ministre de l'agriculture et du commerce, en présentant le projet de décret, « cet enseignement, avons-nous dit, doit être en rapport avec les besoins de l'industrie rurale ; or, il faut à celle-ci, pour être prospère, 1° des travailleurs habiles ; 2° des chefs d'exploitation, propriétaires ou fermiers, moraux, capables et instruits ; 3° enfin des hommes qui, versés dans la science et la pratique agricoles, se vouent à la carrière de l'enseignement, et propagent, par la parole et par l'exemple, les hautes connaissances qu'ils auront acquises par l'expérience et le travail. -- Des fermes-écoles rempliront le premier but ; des écoles régionales répondront au second ; et le troisième enfin sera atteint par la création d'un Institut national agronomique, véritable école normale ou faculté de l'agriculture. 3 ( * ) »

Pour François Purseigle, professeur des universités, spécialiste du monde agricole, « l'enseignement agricole a été pensé et construit à la fin du XIX e siècle pour répondre à un triple projet. Un projet tout d'abord politique, car ce dispositif inédit visait à promouvoir un groupe social relativement homogène et numériquement important dans la société française de l'époque. Un projet professionnel ensuite, destiné à favoriser les mutations d'un secteur agricole appelé à se moderniser. Un projet social enfin, pour permettre aux familles rurales de bénéficier de l'effort global de scolarisation . 4 ( * ) »

Surtout, le décret confie la création de cet enseignement professionnel, ainsi que les crédits budgétaires en découlant, au ministre chargé de l'agriculture, reconnaissant ainsi pour la première fois la spécificité de cet enseignement : l'enseignement agricole devient le premier enseignement professionnel français . Sont ainsi connectées la politique agricole et la politique de formation des professionnels agricoles, afin de faciliter la modernisation et le développement du monde rural.

Cette spécificité est entérinée par la loi Debré-Pisani du 2 août 1960 5 ( * ) . Véritable « acte de naissance » de l'enseignement agricole moderne, à une époque où l'agriculture française doit entrer dans le Marché commun européen, cette loi rappelle, sans ambages, la spécificité de cet enseignement professionnel en établissant que « l'enseignement et la formation professionnelle agricoles relèvent du ministère de l'agriculture » (article 2). Le législateur souhaite alors promouvoir un enseignement attaché aux réalités territoriales : des comités de l'enseignement et de la formation professionnelle agricoles, au sein desquels siègent les représentants des organisations professionnelles, sont ainsi créés dans les départements ou les régions. Le contenu de l'enseignement est profondément revu pour promouvoir une pédagogie plus professionnalisante et moins générale, permettant en parallèle des passerelles vers l'ensemble des autres pans du système scolaire, dans le but de désenclaver l'enseignement agricole. L'enseignement agricole n'est plus uniquement réservé aux enfants d'agriculteurs mais ouvert à tous. Enfin, le rôle particulier, hérité de l'histoire, de l'enseignement privé dans le milieu agricole est pleinement reconnu.

Plus récemment les lois de 1984 portant organisation de l'enseignement agricole 6 ( * ) , dites « lois Rocard », ainsi que la loi d'orientation agricole de 1999 7 ( * ) ont confirmé ce rôle en conférant à l'enseignement agricole, au même titre que la mission de formation initiale scolaire, par apprentissage et continue, les missions d'animation du milieu rural, de coopération internationale, d'insertion scolaire des jeunes, sociale et professionnelle de ces derniers et des adultes, d'expérimentation, de recherche et de développement agricole.

La loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014 8 ( * ) a également mis l'accent sur l'importance de l'enseignement agricole comme « levier stratégique pour l'avenir de l'agriculture française » 9 ( * ) .

Ces grandes lois fondatrices de l'enseignement agricole interviennent à des moments charnières de l'histoire agricole de notre pays. Elles ont, en leur temps, été considérées comme une des principales réponses à la crise agricole contemporaine et comme le témoignage de la volonté politique de mieux adapter l'agriculture française aux nécessités de son temps. Elles illustrent, à bien des égards, le fait que la sortie de la crise agricole actuelle ne pourra se faire qu'avec l'appui de l'enseignement agricole.

b) Des missions identifiées et importantes
(1) Les cinq missions de l'enseignement technique agricole

Il résulte de cette sédimentation législative historique que l'enseignement technique agricole a pour objet, aux termes de l'article L. 811-1 du code rural et de la pêche maritime « d'assurer, en les associant, une formation générale et une formation technologique et professionnelle dans les métiers de l'agriculture, de la forêt, de l'aquaculture, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles ainsi que dans d'autres métiers concourant au développement de ceux-ci, notamment dans les domaines des services et de l'aménagement de l'espace agricole, rural et forestier, de la gestion de l'eau et de l'environnement. »

Ce même article fixe les cinq missions suivantes à l'enseignement technique agricole :

• assurer une formation générale, technologique et professionnelle initiale et continue ;

• participer à l'animation et au développement des territoires ;

• contribuer à l'insertion scolaire, sociale et professionnelle des jeunes et à l'insertion sociale et professionnelle des adultes ;

• contribuer aux activités de développement, d'expérimentation et d'innovation agricoles et agroalimentaires ;

• participer à des actions de coopération internationale, notamment en favorisant les échanges et l'accueil d'élèves, apprentis, étudiants, stagiaires et enseignants.

Lors des cinq déplacements effectués en Gironde, dans le Nord, dans la Drôme, dans le Puy-de-Dôme et à l'École nationale vétérinaire d'Alfort, ainsi que dans tous les établissements visités par ses membres, la mission d'information a pu constater l'attachement de l'ensemble de l'enseignement agricole à ces missions et les actions mises en place par chacun des établissements pour les faire vivre.

La rapporteure relève que la Cour des comptes, dans ses observations définitives sur les coûts et la performance de l'enseignement technique agricole 10 ( * ) , souligne la réalité du portage de ces missions par l'enseignement agricole, en indiquant que « les documents du ministère de l'agriculture et les visites de terrain effectuées par les rapporteurs confirment que les activités au titre de ces missions sont réelles et significatives » .

(2) Les dix missions de l'enseignement supérieur agricole long

Les missions de l'enseignement supérieur agricole long sont pour leur part précisées par l'article L. 812-1 du code rural et de la pêche, visant les établissements publics, qui sont une composante du service public de l'enseignement supérieur. Cet article dispose qu'il a pour objet d'assurer la formation d'ingénieurs, de vétérinaires, de paysagistes, de cadres spécialisés, d'enseignants et de chercheurs. Dix missions sont ainsi confiées à l'enseignement supérieur agricole long :

• dispenser des formations en matière de production agricole, forestière, aquacole et des produits de la mer, de transformation et de commercialisation de ces productions, d'industrie agroalimentaire et d'alimentation, d'industries liées à l'agriculture, de santé et de protection animales et végétales, d'hygiène, de qualité et de sécurité de l'alimentation, d'aménagement, de développement, de gestion et de protection de l'espace rural, de la forêt, de l'eau, des milieux naturels et du paysage ;

• contribuer à l'éducation à l'environnement et au développement durable et à la mise en oeuvre de ses principes ;

• participer à la politique de développement scientifique par des activités de recherche fondamentale, appliquée et clinique ;

• conduire des actions de recherche, d'innovation et d'ingénierie dans les domaines de l'éducation et de la formation ;

• contribuer, en collaboration avec les organismes compétents, à la veille scientifique et technique, à l'innovation technologique et au développement ainsi qu'à la valorisation des résultats de la recherche, en se fondant notamment sur des expérimentations conduites dans ses exploitations, centres hospitaliers universitaires vétérinaires et installations techniques et sur des travaux de recherche menés avec l'implication des partenaires ;

• participer à la diffusion de l'information scientifique et technique ;

• concourir à la mise en oeuvre de la coopération scientifique, technique et pédagogique internationale, notamment par la conclusion de conventions d'échanges d'étudiants, d'enseignants-chercheurs, d'enseignants et de chercheurs ;

• contribuer à la construction de l'espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche et à l'attractivité du territoire national, notamment par la conclusion de conventions ;

• promouvoir la diversité des recrutements et la mixité et contribuer à l'insertion sociale et professionnelle des étudiants ;

• assurer un appui à l'enseignement technique agricole, notamment par la formation initiale et continue de ses personnels et par le transfert des résultats de la recherche, en particulier dans le domaine de l'agro-écologie.

Devant la mission, Valérie Baduel, directrice générale de l'enseignement et de la recherche (DGER), a ainsi souligné que, « parmi les crédits consacrés à l'enseignement supérieur agricole, une grande partie finance des activités de recherche ». Elle précisait que ces crédits, inscrits sur le programme 142, s'élevaient à 225 millions d'euros pour 2 800 équivalents temps plein travaillé (ETPT) et, hors titre 2, à 135 millions d'euros, dont 25 millions d'euros destinés à l'enseignement supérieur agricole privé, 17 millions d'euros à l'aide sociale et 32 millions d'euros aux opérateurs de recherche.

Ainsi que l'a précisé la Fédération France Agro 3 à la mission d'information, les établissements associatifs (privés) d'enseignement supérieur agricole bénéficient d'une aide financière dès lors qu'ils souscrivent avec l'État, sur le fondement de l'article L. 813-1 du code rural, un contrat leur permettant de participer à l'exercice du service public de l'enseignement supérieur agricole. C'est le cas des écoles de France Agro 3 , tout comme d'UniLaSalle et de l'École supérieure du bois. Cette aide prend la forme d'une subvention financée par le programme 142 « enseignement supérieur et recherche agricoles ».

2. Une spécificité historique qui demeure mais qui intègre aussi de nouvelles aspirations et de nouveaux débouchés

L'enseignement agricole propose une large gamme de formations, en accueillant des jeunes allant de la 4 ème jusqu'au doctorat et en délivrant de nombreux diplômes et certifications : CAP agricoles ; bacs professionnels, technologiques et généraux ; BTS agricoles ; licences professionnelles, masters, diplômes d'ingénieurs ou de vétérinaires et doctorats.

Fidèle à sa vocation historique, l'enseignement agricole est le sas de formation principal des nouveaux agriculteurs, leur proposant des formations adaptées pour préparer et réaliser leur installation dans les meilleures conditions.

Toutefois, cette spécificité historique de l'enseignement agricole a été bousculée, ces dernières années, par un triple phénomène.

Les formations initiales suivies par les jeunes agriculteurs sont de plus en plus longues.

La proportion des bacheliers chez les exploitants est passée de 11 % en 1988 à près de 53 % en 2015. En 2016, 25 % des exploitants ont un diplôme supérieur au baccalauréat 11 ( * ) .

Désormais, les installations en sortie d'études secondaires sont minoritaires. Les chiffres de la Mutualité sociale agricole (MSA) relatifs à l'installation en 2019 mettent en avant, selon les informations recueillies par la rapporteure, que seules 470 installations ont été réalisées par des personnes entre 18 et 20 ans et 2 172 par des personnes entre 21 et 25 ans, sur 13 406 installations au total. De même, seules 4 % des personnes s'étant présentées aux points « accueil installation » en 2017 étaient des étudiants.

La rapporteure a ainsi pu constater, lors d'un déplacement dans la Drôme, que nombre de jeunes en formation continue « maraîchage » ne souhaitaient pas directement s'installer au sortir de leur formation, mais appelaient unanimement à la poursuite de leur apprentissage théorique ou au travers d'un stage ou d'une expérience transitoire sur une exploitation déjà existante.

Dès lors, l'âge moyen des agricultrices et agriculteurs qui s'installent recule pour atteindre 32 ans pour les femmes et 29 ans pour les hommes 12 ( * ) .

Cet allongement de la formation s'inscrit dans une dynamique modifiant le métier d'exploitant agricole, qui induit une diversification du métier et requiert une nécessaire professionnalisation ainsi qu'une formation accrue des professionnels aux fins de mobiliser des savoirs très étendus dans tous les domaines (production, transformation, commercialisation, service environnementaux...).

L'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA), dans sa contribution écrite, constate d'ailleurs que la demande de formations plus longues s'inscrit y compris dans les parcours d'installation des jeunes agriculteurs, qui peuvent inclure des formations ou stages complémentaires définis lors de l'entretien avec le conseiller du centre d'élaboration du plan de professionnalisation personnalisé, agréé par la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), et requis pour obtenir le droit de s'installer. Ainsi, si « la rénovation de la voie professionnelle (RVP) s'est fixée comme objectif prioritaire l'élévation des niveaux de qualification et la poursuite d'études au détriment de l'insertion professionnelle, aujourd'hui, le [brevet d'études professionnelles agricoles (BEPA)] n'est plus reconnu comme ayant une valeur d'insertion professionnelle et le Bac pro ne suffit pas pour prétendre à l'installation par manque, chez les jeunes, de savoir-faire pratique, leur jeune âge et le manque de maturité. Des formations complémentaires sont nécessaires et elles peuvent se dérouler pendant le parcours à l'installation. Sauf que, les formations préconisées pendant le parcours d'installation s'inscrivent dans le dispositif de la formation continue et ne peuvent être financées que pour les jeunes ayant déjà acquis des droits à la formation . »

Un phénomène structurant vient, en parallèle, remettre en question cette vocation historique de l'enseignement agricole à former tous les jeunes agriculteurs : l'arrivée de nombreuses personnes non issues du milieu agricole (NIMA) dans les dossiers d'installation , un constat qui se vérifie de manière encore plus importante après la période de confinement liée à la covid-19.

La place de plus en plus importante des NIMA parmi les personnes à installer pose un défi majeur en matière de transmission des entreprises et des savoirs, auquel l'enseignement agricole doit s'adapter.

Si pour certaines personnes auditionnées, comme Stéphane Cornec, membre du conseil d'administration des Jeunes agriculteurs, « le modèle de transmission familial est aujourd'hui devenu minoritaire », les dernières données disponibles prouvent que le renouvellement des générations se fait prioritairement au sein du milieu agricole (plus de 80 % des hommes et 50 % des femmes exploitants sont des fils ou filles d'agriculteurs) mais que les installations hors cadre familial progressent de façon continue ces dernières années, pour représenter désormais 31 % des installations.

C'est à ce stade que la formation continue joue un rôle essentiel dans la transmission des savoirs. Les données recueillies par les chambres d'agriculture témoignent par exemple qu'en 2016, 27 % des stagiaires VIVEA sortaient d'écoles d'ingénieurs, contre 18 % en 2013, ce pourcentage ayant encore augmenté depuis.

Bien entendu, ces changements de profils entraînent l'installation de personnes arrivant d'autres univers professionnels, s'installant souvent à un âge plus avancé : les plus de 40 ans représentent, en 2018, 25 % des installations, ce taux ayant tendance à augmenter.

La baisse continue depuis les années 1960 du nombre d'agriculteurs a considérablement modifié l'équilibre de formation des établissements d'enseignement agricole.

Selon les derniers chiffres de l'INSEE, la France ne compte plus, en 2019, qu'environ 400 000 chefs d'exploitation agricole, ce qui représente 1,5 % de l'emploi total, alors que ce taux était de 7,1 % en 1982. En 40 ans, le nombre d'exploitants agricoles a été divisé par quatre 13 ( * ) .

Comme l'a relevé auprès de la rapporteure le sénateur Laurent Duplomb, président du groupe d'études sur l'agriculture et l'alimentation, la trajectoire d'évolution des effectifs d'agriculteurs entraînait deux possibilités quant au devenir des établissements de formation : soit maintenir une orientation de formation spécifiquement dédiée à l'agriculture et réduire en conséquence le nombre d'établissements ; soit préserver le maillage et ouvrir les enseignements pour former des jeunes à d'autres métiers que ceux relevant strictement du champ agricole, au risque d'en diluer la spécificité. De fait, c'est cette deuxième voie qui a été choisie par les professionnels.

La raréfaction potentielle des élèves de l'enseignement agricole a en effet abouti à une diversification des enseignements pour que les établissements subsistent, en ouvrant l'enseignement agricole à des profils voulant évoluer en milieu rural et non dans le seul monde agricole .

L'enseignement agricole comprend parfois des filières générales et prépare à quelque 163 diplômes relevant des secteurs agricoles, mais aussi de l'agroéquipement, de l'aménagement paysager, de la forêt, de la gestion de la nature, des services aux personnes et aux territoires et de la transformation alimentaire.

Si de nombreuses antennes ont fermé leurs portes ces dernières années, la diversification des profils des élèves par l'augmentation du nombre de formations proposées, vue comme une nécessité pour pérenniser l'enseignement agricole, a abouti à une modification sociologique profonde de l'enseignement agricole et à un changement majeur dans sa vocation historique de former les agriculteurs de demain.

C'est ce qui explique que depuis 1975, en dépit de la chute du nombre d'exploitants, l'enseignement agricole a vu ses effectifs progresser de plus de 65 %.

La palette de formations est aujourd'hui très variée et non limitée aux secteurs agricoles : services en milieu rural, aménagement de l'espace et protection de l'environnement, production agricole, transformation alimentaire, ventes, formation généraliste, préparation à la santé et au bien-être des animaux...

Cette palette est également sujette à certaines adaptations. Ainsi, parmi les effectifs de la voie professionnelle (intégrant les élèves des CAP, du bac pro et du BTS), le nombre d'élèves a été réduit de 27 % dans les spécialités « services à la personne » entre 2007 et 2019 alors qu'il a augmenté de 136 % pour les spécialités « ventes », les spécialités productives liées au monde agricole ayant connu un léger déclin (- 2,5 %) 14 ( * ) .

Finalement, comme le précise la directrice générale de l'enseignement et de la recherche (DGER), « si le nombre de jeunes issus du monde agricole décroît chaque année au sein des filières de formation de l'enseignement agricole [...], des jeunes issus des zones urbaines ou péri urbaines s'intéressent de plus en plus à ces filières de formation tournées vers l'avenir, vers la nature et l'environnement . »

Aujourd'hui, les élèves de la formation par voie initiale scolaire sont inscrits à 35 % dans des filières de formation destinées à la production agricole. La majorité des formations de l'enseignement technique agricole est aujourd'hui liée aux services (42 % des élèves) et à l'aménagement de l'espace et la protection de l'environnement (19 % des élèves).

Si cette diversification est aujourd'hui indispensable et source d'enrichissements pour l'ensemble des apprenants, il importe de ne pas perdre de vue la vocation historique de l'enseignement agricole, à savoir la formation des exploitants et salariés des fermes de demain. Cet équilibre est indispensable à l'attractivité comme à la survie de l'enseignement agricole.

3. Un enseignement à taille humaine, ancré dans les territoires ruraux, en métropole comme dans les outre-mer

En 2019, l'enseignement agricole accueille et forme plus de 190 000 élèves et apprentis (au nombre de 37 425), auxquels s'ajoutent plus de 16 000 étudiants dans l'enseignement supérieur long au sein de 806 établissements scolaires dont 217 lycées agricoles publics, 368 maisons familiales rurales, 210 lycées agricoles privés, 11 centres médico-éducatifs.

Il comprend, pour le cycle supérieur, 17 établissements d'enseignement supérieur agronomique, vétérinaire et de paysage (11 établissements publics et 6 établissements privés) ainsi que 2 établissements d'enseignement à distance 15 ( * ) .

Au sein de l'enseignement agricole secondaire et supérieur court, les établissements privés sous contrat avec l'État représentent près des trois quarts des établissements scolaires, ayant la responsabilité de près de 60 % des élèves et étudiants. Les établissements publics accueillent la majorité des apprentis (70 %) et des étudiants (60 %).

Au sein de l'enseignement public, 174 établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles (EPLEFPA) regroupent diverses entités, comme les lycées, les centres de formation des apprentis (CFA) et les centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) ainsi que des exploitations agricoles ou des ateliers technologiques à vocation pédagogique et des centres équestres.

Certains EPLEFPA atteignent ainsi des tailles importantes. L'EPLEFPA de Bordeaux-Gironde, dans lequel la mission s'est rendue, considéré comme le plus grand de France, rassemble ainsi quatre lycées (1 000 élèves), un CFA (750 apprentis), un CFPPA (200 000 heures/stagiaires), trois exploitations viticoles et s'appuie pour cela sur 400 personnels et 20 millions d'euros de budget. La plupart des EPLEFPA sont toutefois de taille bien plus modeste, comme le lycée agricole de Rochefort-Montagne, dans lequel la mission s'est également rendue, et qui accueille quelque 180 apprenants, de la seconde au BTSA. La mission a aussi pu constater cette grande diversité au sein du réseau CNEAP, par exemple en se rendant au lycée Charles Brasseur de Bourbourg, orienté sur les services à la personne, l'agroéquipement et la mécanique agricole, puis à l'institut de Genech, qui regroupe un collège, un lycée professionnel, un lycée technologique, un lycée d'enseignement général, un pôle d'enseignement supérieur, une exploitation, un CFA régional, un centre de formation en alternance et un centre de formation intra et inter-entreprises.

Pour encadrer ces apprenants, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation emploie plus de 18 800 agents dans le secteur de l'enseignement agricole et 500 personnes exerçant des activités dans la gestion de l'enseignement agricole.

Enseignement technique agricole : quatre familles, deux rythmes et des modalités de financement qui diffèrent

Fruit de l'histoire, l'enseignement secondaire et supérieur court agricole est structuré en quatre « familles » :

- les établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles (EPLEFPA) ;

- les établissements privés relevant du Conseil national de l'enseignement agricole privé (CNEAP) ;

- les maisons familiales rurales (MFR), chacune étant une association placée sous l'égide de l'Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation (UNMFREO) ;

- les établissements privés relevant de l'Union nationale rurale d'éducation et de promotion (UNREP).

Les EPLEFPA, les établissements relevant du CNEAP et de l'UNREP accueillent des élèves en formation temps plein. Les MFR accueillent des élèves en rythme dit « approprié » (alternance), tout comme les établissements relevant de l'UNREP pour une partie de leurs élèves.

Cette différence de statut et de mode de fonctionnement emporte des conséquences sur le soutien qui leur est apporté par l'État.

Les dotations en faveur des établissements d'enseignement privé du temps plein et du rythme approprié sont régies par des protocoles. Ces derniers sont au nombre de trois et fixent des plafonds de dotations ou des dotations fixes pour une période comprise entre trois et quatre ans :

- Protocole du temps plein entre l'État, l'UNREP et le CNEAP : dotation plafonnée à 131,7 millions d'euros par an pour une période de quatre ans ;

- Protocole du rythme approprié entre l'État et l'UNREP : dotation plafonnée à 10,35 millions d'euros par an pour une durée de quatre ans ;

- Protocole du rythme approprié entre l'État et l'UNMFREO : dotation fixée à 208,5 millions d'euros par an pour une durée de trois ans.

En sus de ces dotations, les agents contractuels de droit public de l'enseignement agricole privé du temps plein sont financés par le ministère de l'agriculture et comptabilisés sous son plafond d'emplois. L'État met ainsi à disposition de ces établissements 4 799 ETPT, pour un coût d'environ 230 millions d'euros en 2021. Il accorde enfin des subventions aux fédérations du privé (0,6 million d'euros en loi de finances pour 2021) et aux organismes de formation (3,2 millions d'euros en loi de finances pour 2021).

Quant aux établissements publics, ils bénéficient de subventions au titre de leurs frais de fonctionnement (56 millions d'euros) et des emplois qui leur sont mis à disposition (10 467 ETPT, soit environ 510 millions d'euros). Ils emploient des personnels rémunérés sur leur budget propre : à la fois des agents de droit public qui exercent dans les centres de formation d'apprentis (CFA) et centres de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) et des agents de droit privé qui travaillent dans les exploitations et les ateliers et centres équestres.

L'accueil des apprentis et des personnes en formation professionnelle, au sein des CFA et des CFPPA, répond à des modes de financement différents ( cf . infra).

Source : à partir des éléments transmis par la direction du budget
et l'association des directeurs d'EPLEFPA

La mission d'information souhaite souligner le rôle essentiel que joue l'enseignement privé dans l'enseignement agricole, du fait de son histoire.

Les maisons familiales rurales, inspirées par les idées du Sillon de Marc Sangnier comme par celles du Secrétariat central d'initiative rurale (SCIR), se sont développées à partir de la fin des années 1930 sous forme d'associations portées par des familles d'agriculteurs afin d'offrir une formation et des perspectives d'émancipation aux jeunes ruraux. Il en résulte une vitalité associative particulière et l'on compte désormais 430 MFR en métropole et dans les outre-mer, dont 356 ayant un contrat avec le ministère de l'agriculture et de l'alimentation. L'Union nationale rurale d'éducation et de promotion trouve pour sa part son origine dans l'association pour le développement de l'apprentissage agricole et horticole des petits métiers ruraux, créée en 1925 par Louis Ferdinand Dreyfus. D'autres établissements ont des racines encore plus anciennes, comme l'Institut de Genech, relevant du CNEAP, qui découle de l'École pratique libre d'agriculture fondée en 1894.

Cette part importante de l'enseignement privé, spécificité de l'enseignement agricole, contribue à l'attractivité de l'enseignement agricole par son maillage, ses établissements à taille humaine et l'animation des territoires ruraux. Or, plusieurs responsables de l'enseignement privé agricole ont indiqué à la mission ressentir un traitement inégal en défaveur des établissements privés, notamment dans les aides financières attribuées à l'occasion de la crise de la covid-19 du fait d'une méthodologie jugée peu claire 16 ( * ) , ainsi que dans les attributions de subventions à l'échelle locale.

La rapporteure a d'ailleurs relayé ces inquiétudes auprès du ministre de l'agriculture et de l'alimentation lors de son audition du 30 juin dernier : « fragilité [institutionnelle] encore quand, parallèlement, le président du Conseil national de l'enseignement agricole privé (CNEAP) regrette devant nous que vous ne l'ayez pas reçu, ce qui pourrait laisser penser que le ministère aurait un problème avec l'enseignement agricole privé » .

La mission d'information rappelle le rôle historique joué par l'enseignement agricole privé. Elle souligne son attachement au maintien d'un enseignement agricole privé dynamique, aux côtés d'un enseignement agricole public qu'elle souhaite également fort : c'est l'intérêt de l'enseignement agricole dans son ensemble.

L'enseignement agricole dans les outre-mer : un atout décisif pour répondre aux besoins spécifiques de ces territoires et parvenir à l'autonomie alimentaire

Plus de 65 établissements d'enseignement et de formation agricoles sont présents dans les territoires ultramarins. Tout comme leurs homologues situés en métropole, ils ont pour mission de former les futures générations qui interviendront dans tous les secteurs d'emploi en lien avec le vivant, de participer à l'animation et au développement des territoires, mais aussi de contribuer à l'objectif d'autonomie alimentaire des outre-mer à l'horizon 2030, fixé par le Président de la République.

L'enseignement agricole contribue également au développement de formations répondant de manière très spécifique aux besoins des outre-mer. Les établissements et centres de formation participent ainsi pleinement, en Martinique et en Guadeloupe, à la mobilisation contre la chlordécone et ses effets. Les établissements de l'enseignement technique agricole ont, à cet égard, pu bénéficier des compétences de l'enseignement supérieur agricole, grâce à un livret ressources élaboré par AgroSup Dijon qui s'adresse aux enseignants et formateurs, afin de leur apporter des repères et références de ressources pédagogiques pour leur permettre d'aborder le sujet de la chlordécone avec leurs élèves, étudiants, apprentis et stagiaires.

L'enseignement agricole dans les outre-mer est dynamique : à l'exception de Mayotte, tous les territoires ultramarins connaissent une augmentation de leurs effectifs. Celle-ci est d'ailleurs supérieure à 5 % en Guyane, Guadeloupe et Polynésie française. Un lycée agricole - John Doom - y a d'ailleurs été ouvert en août 2018, pour des formations de bac pro BIT-Bio-industries de transformation et d'Aquaculture. Il accueille en 2020-2021 91 élèves - juin 2021 a été pour ce lycée la première promotion de bacheliers. Au contraire, d'autres établissements sont anciens, à l'image de l'EPLEFPA de Saint-Joseph à la Réunion, dont l'origine remonte à 1955.

De très nombreux établissements d'enseignement agricole ultramarins, souvent dans le cadre européen, s'inscrivent dans des partenariats ou des réseaux avec les territoires voisins. Ainsi dans le cadre du programme Interreg, l'EPLEFPA Forma-Terra de Saint-Paul de la Réunion participe à une coopération réunissant plus de 80 établissements de formation agricole de 9 pays et îles de la zone Afrique Australe-Océan indien. La Guadeloupe, la Guyane et la Martinique ont pour leur part créé le consortium Erasmus + réseau des établissements d'enseignement supérieur et de la formation dans la Caraïbes (REEF Caraïbes supérieur), qui réunit de façon inédite 2 centres de recherches (CIRAD, INRAE), 2 universités (Antilles et Guyane) et 3 EPLEFPA (Guadeloupe, Guyane et Martinique).

Carte des établissements d'enseignement agricole (secondaire et supérieur court)

Source : Panorama de l'enseignement agricole 2021

Carte des établissements d'enseignement agricole supérieur long

Source : Panorama de l'enseignement agricole 2021


* 3 Projet de décret sur l'organisation de l'enseignement agricole précédé de l'exposé des motifs par le citoyen Tourret, ministre de l'agriculture et du commerce (examiné à l'Assemblée nationale lors de la séance du 17 juillet 1848).

* 4 François Purseigle, La mosaïque de l'enseignement agricole : recomposition, enjeux et métamorphose - Formation et emploi 2020/3 (n° 151).

* 5 Loi n° 60-791 du 2 août 1960 relative à l'enseignement et à la formation professionnelle agricoles.

* 6 Loi n° 84-579 du 9 juillet 1984 portant rénovation de l'enseignement agricole public et loi n° 84-1285 du 31 décembre 1984 portant réforme des relations entre l'État et les établissements d'enseignement agricole privés (modifiant la loi n° 84-579 du 9 juillet 1984 pré-citée).

* 7 Loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole.

* 8 Loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.

* 9 Communiqué de presse du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt du 11 janvier 2014.

* 10 « Observations définitives sur les coûts et la performance de l'enseignement technique agricole », Cour des comptes, 3 ème chambre, juin 2021.

* 11 https://impactons.debatpublic.fr/

* 12 Demain je serai paysan.

* 13 Insee Focus, n° 312, 23 octobre 2020 : Les agriculteurs : de moins en moins nombreux et de plus en plus d'hommes.

* 14 CGAAER, rapport n° 19069 de juin 2020, « L'orientation des élèves vers l'enseignement agricole et son attractivité ».

* 15 Panorama de l'enseignement agricole 2021.

* 16 Auditions de l'UNMFREO et du CNEAP du 17 mars 2021.

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