B. LA QUALITÉ DES INVESTISSEMENTS FINANCÉS PAR FRANCE RELANCE SUSCITE DES INTERROGATIONS

En contrepartie du décaissement rapide des crédits, l'exigence de qualité des investissements ne semble pas avoir été érigée en priorité de la gouvernance de France Relance , ce qui a pu nuire au potentiel de transformation du modèle économique de ce plan.

Bpifrance rappelle que pour les crédits qui la concernaient, la sélectivité des projets de France Relance était de l'ordre de 30 %, c'est-à-dire nettement inférieure à celle des Programmes d'investissement d'avenir (PIA) . Avec un nombre exceptionnel de dossiers traités en un temps réduit, les moyens humains et financiers des opérateurs de la relance ne permettaient pas de procéder à une instruction approfondie .

Alors que le Gouvernement affichait le double objectif d'une relance à court terme de l'économie, et de sa transformation à moyen terme, CCI France constate que le premier a largement pris le dessus.

De façon significative, parmi les deux objectifs présentés dans le projet annuel de performance, la contribution au « soutien et à la transformation de l'économie française » n'est pas précisée , alors que les cibles affichées sont ambitieuses, tant en créations d'emplois (200 000 en 2023) qu'en baisse des émissions de CO 2 (57 M de tonnes en 2023).

Alors que la transition écologique est la seule spécialisation relative affichée du plan de relance français (49 % des crédits de la facilité pour la résilience et la relance), les investissements figurant dans le programme 362 (écologie) ne semblent pas en mesure de permettre l'atteinte de ces objectifs. Leur impact écologique apparaît même très limité.

Ø Le rapport du comité d'évaluation du plan de relance souligne ainsi que les aides à la rénovation thermique des bâtiments publics et privés ont financé pour la grande majorité des rénovations « monogestes » , alors que les experts s'accordent sur les synergies des rénovations globales, plus performante en gains énergétiques.

Ø Alors que 60 % des fonds pour l'aéronautique et l'automobile ont été décaissés, il ressort des grilles d'évaluation utilisées lors des appels à projets et d'entretiens avec les services instructeurs des aides, que seulement 3 % des 367 projets aéronautiques (269 M€) et 30 % des 370 projets automobiles (311 M€) retenus, contribuaient explicitement à la transition vers la mobilité verte (véhicules électriques ou à l'hydrogène).

Si cette logique de relance à court terme peut être un choix du Gouvernement, elle semble contradictoire avec le slogan du plan France Relance, « construire la France de demain ». Cette approche comporte en effet plusieurs limites voire des effets contreproductifs :

- elle empêche la constitution de filières performantes, via la montée en gamme et l'émergence de savoir-faire ;

- elle peut freiner les investissements à venir pour des raisons financières, car les investissements mettront du temps avant d'être amortis ;

- elle peut enfermer dans des choix technologiques non efficients ( lock-in ).

L'institut Bruegel rappelle que l'ampleur des plans de relance français et allemand, de l'ordre de 3 à 4 % du PIB, était de toute façon insuffisante pour espérer initier une réelle transformation du modèle économique . Certains plans, comme ceux de l'Italie et de la Bulgarie, de 15 % du PIB et étendus sur plusieurs années, constituent en revanche une opportunité pour progresser dans la transition écologique et la transformation numérique. A contrario , les 25 % du PIB du plan de relance américain, s'ils venaient effectivement à être injectés dans l'économie, accroîtraient la forte poussée inflationniste qui se dessine actuellement aux États-Unis.

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