B. UNE GRADATION DES RECOURS À RÉAFFIRMER APPUYÉE SUR LES HÔPITAUX DE PROXIMITÉ

• La commission estime nécessaire de rendre plus lisible la répartition des missions de chaque type d'établissements.

L'activité hospitalière est souvent présentée de manière simplifiée comme graduée sur trois niveaux : classique, expertise, recours.

Ces trois types d'activités, très inégaux en termes de volume, sont ainsi plus ou moins fléchés sur les différentes catégories d'établissements , sans donner une répartition en silos hermétiques.

Source : Rapport d'information n° 195 (2018-2019) de M. Alain MILON, fait au nom de la commission des affaires sociales, sur l'enquête de la Cour des comptes sur le rôle des centres hospitaliers universitaires dans la politique de soins

Aussi, si les CHU captent l'essentiel de l'activité de recours , de grandes disparités sont constatées 273 ( * ) sur le territoire entre les CHU, certains relevant parfois davantage d'un centre d'expertise essentiellement, avec une capacité plus marginale à assumer une activité de recours.

Sur ce constat de niveaux hétérogènes parmi les CHU, la Cour des comptes avait en 2018 recommandé de constituer des réseaux de CHU, avec certains chargés d'assurer un rôle moteur pour la structuration de la recherche notamment.

Devant la commission d'enquête, Jean-Yves Grall 274 ( * ) estimait qu' « in fine , il n'y a pas d'établissement qui ne joue pas un rôle, mais certains ont un positionnement encore non approprié, essayant de maintenir coûte que coûte des activités dans des conditions qui ne garantissent justement pas les objectifs de qualité et de sécurité des soins . Dans ce contexte, les hôpitaux de proximité sont vraiment un pont intéressant entre le secteur ambulatoire et la médecine de ville . Cette nouvelle organisation constitue un atout certain d'attractivité sur ces territoires pour les jeunes professionnels de santé. »

Aussi, force est de constater que dans un paysage hospitalier divers, le patient peine parfois à identifier quelles missions sont assumées par quel centre et, surtout, quel est le juste lieu de recours. La rapporteure estime ainsi qu'il est important que la gradation des soins ne soit pas un sujet technique d'organisation entre établissements mais soit également un enjeu pratique connu du patient dans son recours aux soins hospitaliers.

Il convient à ce titre de mieux communiquer sur les missions de chaque établissement, mais aussi de davantage identifier les catégories d'établissements , de v aloriser le CHU comme établissement de référence et de faire connaître le maillage hospitalier de recours général et de recours local avec les centres hospitaliers et hôpitaux de proximité.

Chantier prioritaire du Ségur de la santé , l'organisation des soins au niveau local doit s'appuyer sur les hôpitaux de proximité qui ont vocation comme le souligne le Gouvernement à constituer un réel trait d'union entre l'ensemble des acteurs libéraux, hospitaliers et médico-sociaux pour proposer une offre de soins davantage structurée et des parcours de soins plus fluides pour les usagers. Ce schéma d'accès aux soins hospitaliers trouve l'assentiment de la Cour des comptes, Denis Morin 275 ( * ) saluant devant la commission « l'idée, annoncée au moment de Ma santé 2022, de considérer que certains hôpitaux de proximité pouvaient être des portes d'entrée pour assurer la prise en charge des soins de premier recours ».

La loi d'organisation et de transformation du système de santé a précisé les missions des hôpitaux de proximité, publics comme privés, qui assurent premier niveau de la gradation des soins hospitaliers 276 ( * ) .

Si les hôpitaux de proximité proposent des activités obligatoires : médecine , consultations de spécialités complémentaires à l'offre libérale disponible, accès à des plateaux techniques, ils offrent également des activités optionnelles : médecine d'urgence, centres périnataux de proximité, soins de suite et de réadaptation , soins palliatifs.

Pour se voir reconnaître hôpitaux de proximité, la labellisation par l'ARS relève d'une démarche volontaire des établissements de santé et d'un engagement à assurer ces missions.

Les hôpitaux de proximité doivent bénéficier d'un financement sécurisé :

- d'une part, leur activité de médecine bénéficie d'une garantie pluriannuelle de financement pour détendre la contrainte de la seule tarification à l'activité ;

- d'autre part, leurs projets renforçant l'accès aux soins seront accompagnés par la création d'une dotation de responsabilité territoriale.

Présentant le profil de ces établissements, Sophie Guinoiseau, présidente de la Fédération nationale des établissements de santé de proximité 277 ( * ) , expliquait que « dans une région, hors Île-de-France, ces établissements portent en moyenne 7 % à 12 % de l'offre publique de lits de médecine , et jusqu'à plus de 45 % de l'offre publique de lits de soins de suite et réadaptation (SSR) ».

Aussi, « pour dresser un portrait type d'un hôpital de proximité sur la base d'une moyenne, c'est un établissement en zone périurbaine ou rurale de 250 lits et places, sanitaire pour un tiers et médico-social pour deux tiers, souvent multisite avec des professionnels de santé salariés, mais également médicaux et paramédicaux en exercice mixte ».

Le Gouvernement revendique, avec le Ségur de la santé, une ambition de « fédérer les acteurs de santé des territoires autour de projets communs, décloisonnés au plus près des besoins de la population » et entend faire des hôpitaux de proximité des « laboratoires en matière de coopération territoriale ». À cette fin, les modes d'organisation des hôpitaux sont appelés à être « ouverts sur leurs territoires » et à privilégier l'articulation avec les projets de santé portés par les CPTS. Ainsi, selon Sophie Guinoiseau, l'hôpital de proximité « partage une responsabilité territoriale avec les professionnels de la médecine ambulatoire ».

La commission d'enquête estime important de valoriser les hôpitaux de proximité comme premier maillon de l'accès aux soins hospitaliers, d'accélérer la labellisation et la connaissance des missions de ces établissements auprès du public et, surtout, d'assurer une bonne répartition de ces établissements qui ont pleine vocation à être des plateaux techniques supports pour les hospitaliers comme pour les médecins de ville .

La commission a constaté ces différents enjeux lors d'un déplacement dans les Côtes d'Armor au centre hospitalier du Penthièvre et du Poudouvre, labellisé hôpital de proximité, exemple d'une articulation entre différents secteurs hospitaliers avec de la médecine et un service de SSR, mais aussi avec le médico-social avec des Ehpad membre s, et, surtout, une forte intégration à l'offre de soins de ville à travers notamment la maison médicale de garde abritée.

Cependant, là encore cependant, la situation de ces établissements est particulièrement contrastée. Selon le constat de la présidente de la fédération, la crise a été « une loupe grossissante mettant en exergue des difficultés préexistantes que vous connaissez : une offre déjà amputée - j'ai évoqué les lits de médecine, disparus dans nos structures - ; des ratios d'encadrement fragiles, voire clairement insuffisants sur le secteur médico-social ; des viviers de professionnels réduits , notamment pour les personnels médicaux ; des moyens de fonctionnement contraints, ne laissant plus de marge pour investir, qu'il s'agisse de moderniser le bâti ou de renouveler les équipements ; un manque d'attractivité en termes de rémunération ».

Recommandation : accélérer la labellisation des hôpitaux de proximité et assurer un maillage du territoire par de telles structures.

Recommandation : renforcer les plateaux techniques des hôpitaux de proximité et faire de ceux-ci le pivot de la stratégie de locale des GHT avec les médecins libéraux.


* 273 Voir à ce sujet le rapport d'information n° 195 (2018-2019) de M. Alain Milon, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 12 décembre 2018, sur l'enquête de la Cour des comptes sur le rôle des centres hospitaliers universitaires dans la politique de soins.

* 274 Audition du 3 février 2022.

* 275 Audition du 3 février 2022.

* 276 Article L. 6111-3-1 du code de la santé publique.

* 277 Audition du 27 janvier 2022.

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