AVANT-PROPOS

À l'automne 2021, alors que le regain de l'épidémie de covid-19 entraîne la montée rapide d'une nouvelle vague d'hospitalisation pesant sur les hôpitaux, des chefs de service, des praticiens et soignants, des responsables hospitaliers alertent sur les tensions profondes dans de nombreux services et les réductions de capacités d'accueil par manque de personnel.

Celles-ci ne tiennent pas à des décisions administratives de diminution d'effectifs ou de fermeture de lits, mais à l'impossibilité de pourvoir des postes vacants en nombre croissant, en particulier d'infirmiers et de personnels paramédicaux. Les départs en cours de carrière s'accentuent, pour changer de mode d'exercice ou parfois même de métier, et les recrutements deviennent plus difficiles.

Il y a certainement là un effet de contrecoup et d'épuisement, alors que se prolonge depuis près de deux ans une crise sanitaire exceptionnelle au cours de laquelle les personnels hospitaliers ont énormément donné. Mais les facteurs du malaise et de la démotivation ressentis par beaucoup d'entre eux étaient bien antérieurs à cette crise. Ils s'étaient manifestés dès la fin de l'année 2019, justifiant l'élaboration d'un plan d'urgence pour l'hôpital.

Cette situation critique aux ressorts anciens a justifié la création par le Sénat, à l'initiative du groupe Les Républicains, d'une commission d'enquête sur la situation de l'hôpital et le système de santé.

Recours indispensable pour les soins les plus aigus ou les plus urgents, creuset de la formation et de la recherche médicales, l'hôpital constitue une richesse et un atout qu'il est nécessaire de préserver.

Il était donc essentiel, à travers cette commission d'enquête, de recueillir auprès de l'ensemble des acteurs concernés - responsables médicaux et administratifs d'établissements, médecins et soignants hospitaliers, professionnels des soins de ville, organismes publics et élus locaux - leurs constats et leurs propositions sur les difficultés actuelles du système hospitalier.

Celles-ci appellent des réponses fortes sur l'organisation et le fonctionnement des établissements de santé, mais également une réflexion plus globale sur la place de l'hôpital dans l'organisation du système de soins. Car si l'hôpital concentre un certain nombre de difficultés, c'est aussi en raison de défaillances ou de faiblesses plus générales dans l'accès aux soins et dans la coordination des moyens, hospitaliers ou non, pour assurer la bonne prise en charge des patients.

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La commission d'enquête s'est constituée le 2 décembre 2021. En trois mois, elle a entendu en réunion plénière près d'une cinquantaine de personnalités ou d'organisations. Une quarantaine de personnalités ou d'organisations ont également été entendues lors d'auditions organisées par la rapporteure. Enfin, une délégation de la commission d'enquête s'est rendue dans trois établissements de types différents.

Dans le temps qui lui était imparti, la commission d'enquête n'a pu aborder l'ensemble des questions, extrêmement vastes, influant de manière directe ou indirecte sur la situation de l'hôpital.

Ainsi, alors que la psychiatrie connaît actuellement de grandes difficultés, la commission d'enquête ne pouvait mener de manière approfondie l'analyse qu'appelle ce pan important de l'activité hospitalière. Elle s'est essentiellement concentrée sur l'hospitalisation « générale » - médecine, chirurgie, obstétrique - bien que le secteur hospitalier ne se réduise pas à ces activités. Son travail a porté en priorité sur l'hôpital public, qui représente la majorité de l'activité et des personnels et assure le maillage territorial le plus dense, même si elle a abordé des problèmes communs à tous les établissements.

La commission a entendu des acteurs des soins de ville, sous l'angle de leurs relations et de l'articulation de leur rôle avec l'hôpital, mais l'organisation des soins primaires, elle aussi en difficulté, qu'il s'agisse des médecins ou des personnels paramédicaux, dépassait le champ assigné à la commission d'enquête.

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Les travaux de la commission d'enquête lui ont tout d'abord permis, à travers le recueil d'un ensemble très riche de témoignages d'acteurs hospitaliers, de mesurer les tensions croissantes et l' usure qui fragilisent aujourd'hui les ressources humaines de l'hôpital , et cela même alors que notre pays lui consacre des moyens plutôt supérieurs à la moyenne européenne. Les modalités mises en oeuvre au cours de la décennie 2010 pour répartir entre les hôpitaux les ressources qui leur étaient assignées ont mis les établissements en difficulté et dégradé leurs capacités d'investissement , avec des conséquences sur la modernisation des équipements et de l'environnement de travail.

La commission d'enquête a jugé primordial, pour enrayer la spirale négative dans laquelle les établissements sont entraînés, de faire confiance et de redonner confiance aux acteurs hospitaliers : redonner de la liberté et de l' autonomie aux équipes soignantes et aux établissements ; redonner de l' attractivité et du sens aux métiers du soin ; assurer un financement durable et cohérent avec les besoins de santé .

Enfin, il est nécessaire de rééquilibrer notre système de santé en assurant le juste recours à l'hôpital dans une organisation des soins mieux coordonnée . Il s'agit d'améliorer le parcours du patient en décongestionnant l'hôpital et en le décloisonnant de la médecine de ville, d'assurer les prises en charge hospitalières au plus près des besoins des patients et de fédérer les acteurs locaux de santé pour mieux répondre aux besoins sur les territoires.

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