II. UNE ORGANISATION DE LA SÉCURITÉ PAR LES POUVOIRS PUBLICS QUI A NÉGLIGÉ LES SUPPORTERS

A. UNE PRISE EN COMPTE DES SUPPORTERS INSUFFISANTE

Les auditions des associations de supporters ont mis en avant une organisation de la sécurité du match fondée sur une vision datée des supporters britanniques, renvoyant aux hooligans des années 80 . Les responsables publics ont ainsi été presque exclusivement attachés à gérer sous l'angle du maintien de l'ordre les supporters anglais sans billet, qui ont une habitude connue de venir soutenir leur équipe pour profiter de l'ambiance du match à l'extérieur du stade.

Les organisateurs se sont ainsi privés des moyens sociaux qui permettent d'acheminer les flux de spectateurs au stade ou de les divertir aux alentours du stade ou à des endroits sécurisés en ville.

Ont ainsi manqué : un accueil par des agents en gare pour orienter les spectateurs dans leur langue, une signalétique adéquate, des annonces sonores ou sur les portables pour les informer en temps réel, dans leur langue, de ce qu'il se passait et notamment que le début du match avait été décalé d'une demi-heure, ce qui aurait évité les mouvements de foule pour accéder à l'enceinte...

De manière plus générale, l'accueil dans un cadre festif des supporters a été négligé : les fan zones ont été organisées tardivement et s'agissant des supporters de Liverpool, loin du stade ; l'interdiction de l'alcool à partir de 18 heures aux alentours du stade a contribué à leur arrivée tardive sur le site du Stade de France. Ainsi que l'a relevé le maire de Saint-Denis, Mathieu Hanotin, « l'organisation des fan zones , l'autorisation de consommer de l'alcool jusqu'au début du match, ainsi que les animations musicales et sportives autour du stade, sont des éléments de contrôle social permettant de ramener au plus tôt la population aux abords du stade, afin de fluidifier les parcours et de permettre à un maximum de personnes de rentrer progressivement dans l'enceinte . »

Enfin, les interlocuteurs immédiats des supporters, les stadiers, ont été incapables de leur expliquer ce qu'il se passait. Ils ont rapidement été débordés : placés dans la situation inhabituelle sinon inédite d'avoir à exercer un premier contrôle de validité des billets au niveau des points de filtrage, les stadiers ont d'abord douté de la qualité des stylos de vérification fournis avant, selon le préfet de police, de quitter leur poste face à la pression de la foule. Ainsi que l'a souligné la FFF lors de son audition, il est difficile de recruter des stadiers disposant des agréments nécessaires à l'exercice de la sécurité privée et formés adéquatement, notamment en langues étrangères, pour l'exercice de leur fonction sur des événements sportifs de grande ampleur. La formation des forces de sécurité aux relations avec une foule majoritairement étrangère doit également être interrogée.

Enfin, l'accueil des supporters nécessite également de veiller à ce que leurs conditions de retour après le match soient bonnes : les supporters espagnols ont déploré le passage sur une passerelle assez étroite franchissant le canal sans personne pour réguler le flux, et le manque d'éclairage public alors que le sol était jonché de bouteilles cassées...

Tout ceci laisse à penser que l'expérience spectateur n'a pas été prise en compte par les organisateurs de l'événement.

Le dialogue avec les supporters doit permettre de mieux partager les informations et de rendre plus efficaces les dispositifs mis en place .

Recommandation n° 13 : faire évoluer le regard des autorités publiques sur les supporters et créer les conditions d'un dialogue permanent afin de faire de leurs représentants des partenaires dans le cadre de la préparation et du déroulement des grands événements (État, FFF).

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