IX. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

A. UN SUJET MAJEUR

Le présent rapport a pour objectif d'éclairer le débat nécessaire sur le futur de l'eau en France à l'horizon d'une génération (2050) , débat en partie ouvert par les Assises de l'eau et le Varenne agricole de l'eau. Nos concitoyens devront se saisir de ce sujet majeur en évitant les polémiques et en conservant un regard lucide et éclairé sur les effets du changement climatique sur le cycle de l'eau.

Plusieurs interrogations, certitudes, conclusions peuvent d'ores et déjà être mis en exergue dans ce débat.

1. Deux interrogations permanentes

L'avenir de l'eau en France suscite deux sortes d'inquiétudes :

- sur la qualité de l'eau

Ces inquiétudes ne sont pas celles qui sont le plus mises en avant aujourd'hui, même si l'on peut légitimement être préoccupé par la persistance de certains polluants, en particulier ceux issus des pesticides utilisés en agriculture, des résidus de médicaments charriés par les eaux usées, ou encore la pollution plastique, et plus largement par le fait que la France n'atteindra probablement pas en 2027 les objectifs fixés par la directive cadre sur l'eau relatifs au bon état de l'ensemble des masses d'eau du pays.

- sur la quantité de la ressource en eau

Des interrogations de plus en plus fortes se font entendre sur l'aspect quantitatif de la ressource en eau . Alors que la France était perçue comme un pays bien pourvu en eau, et l'est encore largement, l'inquiétude de nos concitoyens concerne la disponibilité d'une quantité suffisante d'eau pour faire face à l'ensemble de nos besoins. De ce point de vue, notre jugement sur les perspectives à long terme est souvent influencé par l'observation directe des phénomènes météorologiques du quotidien : multiplication des vagues de chaleur, sécheresses estivales récurrentes, mais aussi pluies diluviennes et épisodes cévenols. Nous oublions aussi parfois que le cycle de l'eau est saisonnier et qu'un été sec ne conduit pas mécaniquement à un pays structurellement sec si la recharge des nappes se fait correctement l'hiver. Les réalités régionales sont également très disparates.

2. Une certitude

S i le changement climatique va immanquablement modifier le cycle de l'eau en France , en diminuant les débits des cours d'eau et en suscitant un stress hydrique accru dans des territoires plus septentrionaux que ceux des rives de la Méditerranée, habitués aux sécheresses, notre pays ne va pas se transformer en quelques années en désert . L'eau va continuer à couler, mais de manière plus discontinue et irrégulière.

Cette transformation pose un défi à l'ensemble des acteurs de la politique de l'eau et appelle une mobilisation de tous afin de franchir une nouvelle étape dans l'adaptation au changement climatique.

3. Deux impératifs

Pour faire face à ce défi et avancer dans la voie d'une gestion renouvelée de l'eau dans notre pays, deux préalables apparaissent incontournables :

- disposer, d'une part, des bons outils de mesure et de suivi de la ressource et de ses utilisations, d'autre part, de prévisions affinant les modèles prédictifs , ce qui est particulièrement difficile compte tenu de la grande diversité des situations locales liées à la pluviométrie, aux sols et sous-sols. À cet égard, il est impossible d'adopter une approche globale de la gestion de l'eau faisant fi de la grande diversité de nos territoires, de même qu'il est impossible de transposer les analyses prospectives d'une vallée à l'autre ;

- prévenir les conflits d'usage insolubles et les guerres de l'eau qui pourraient se multiplier et ne faire que des perdants . Le premier niveau des conflits d'usage est entre les utilisateurs de l'eau, en premier lieu les agriculteurs, qui veulent continuer à bénéficier des mêmes quantités voire de quantités accrues pour faire face aux évènements climatiques plus prononcés, et ceux qui considèrent que l'eau pompée dans les rivières ou les nappes, voire seulement recueillie dans des retenues collinaires, aggrave les sécheresses et contribue à dégrader l'environnement et les milieux aquatiques. Le second niveau des conflits d'usage pourrait être entre utilisateurs concurrents : touristes contre agriculteurs, voire agriculteurs entre eux.

4. Un avenir difficile à scénariser

L'avenir n'est pas tout tracé. Plusieurs scénarios peuvent néanmoins être esquissés :

- un scénario catastrophe : celui d'une baisse significative de la disponibilité en eau dans de nombreuses régions, avec une baisse généralisée du niveau des nappes et une réduction des possibilités d'irrigation ou même d'approvisionnement en eau potable, qui se traduirait par l'abandon d'exploitations agricoles, des ruptures ponctuelles d'approvisionnement en eau potable et une dégradation des écosystèmes dépendants de l'eau ;

- un scénario vertueux : celui d'une gestion de l'eau apaisée, capable de faire face à une moindre disponibilité estivale un peu partout, à travers l'anticipation des difficultés et la mise en place d'un partage de la ressource entre tous les secteurs qui en dépendent ;

- un scénario intermédiaire : celui d'une certaine sobriété dans la consommation d'eau, d'une gestion améliorée de la ressource, d'un travail approfondi sur les conflits d'usages, d'une meilleure anticipation des difficultés.

Dans les trois scénarios, quatre variables principales sont prises en compte : la quantité d'eau disponible, l'investissement effectué dans la gestion de la ressource, le traitement des conflits d'usage et l'anticipation des évolutions.

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