C. DES PISTES DE RENFORCEMENT DES MOYENS AÉRIENS DE LUTTE CONTRE LES FEUX À COURT-TERME, ENTRE LOCATION D'APPAREILS, DIVERSIFICATION DE LA FLOTTE ET APPROFONDISSEMENT DE LA COOPÉRATION EUROPÉENNE

1. Si la location d'aéronefs permet de renforcer la flotte à court-terme, cette pratique apparait coûteuse et crée des difficultés opérationnelles

Compte tenu du délai de production des Canadair, la DGSCGC est contrainte de trouver des solutions de renforcement de la flotte à court-terme pour répondre à l'augmentation du risque de départ de feux. Dans le cadre d'une visite sur la base aérienne de Cazaux, à la Teste-de-Buch, le ministre de l'intérieur a ainsi annoncé, le 11 avril 2023, un nouveau dispositif de lutte contre les feux pour l'année 2023, qui impliquera notamment un renforcement de la flotte existante par la location de plusieurs appareils.

La flotte sera ainsi renforcée par quatre avions Air Tractor, loués auprès de la société espagnole Titan Aerial Firefighting. Ces petits avions bombardiers d'eau disposent d'une capacité d'emport (3 000 litres) deux fois moins importante que celle des Canadair, mais peuvent réaliser du largage de retardant. Le coût de cette location pour une période s'étalant du 15 juin au 15 septembre est estimé à 6,2 millions.

En outre, trois hélicoptères bombardiers lourds « Super Puma » produits et loués par Airbus s'ajouteront aux sept hélicoptères déjà loués l'an dernier. Ces hélicoptères constituent un complément intéressant des Canadair et des Dash (voir infra) et la DGSCGC y a déjà recours depuis 2020 dans le cadre de contrats de location. Si le montant du contrat passé pour la location de ces appareils au titre de l'année 2023 n'est pas connu avec précision, la loi de finances pour 2023 a prévu 10 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) pour la location de ces hélicoptères.

Enfin, la flotte devrait être renforcée par la location d'un Dash supplémentaire auprès de la société canadienne Conair, portant ainsi la flotte pour l'été 2023 à 9 appareils. Le coût de location de ces appareils est estimé à 44 365 euros par jour de mise à disposition, et 12 681 euros par heure de vol.

Si le rapporteur spécial se félicite des moyens supplémentaires engagés par le ministère de l'intérieur pour renforcer la flotte à court-terme, le recours à la location d'appareils peut néanmoins susciter plusieurs réserves.

Tout d'abord au regard de l'importance des montants en jeu, le recours à la location ne peut constituer une solution satisfaisante à long-terme. Ensuite, la mise à disposition par un prestataire extérieur d'appareils habituellement non intégrés à la flotte de la DGSCGC peut susciter des difficultés opérationnelles. Ces marchés de location incluent la mobilisation et la maintenance des appareils, mais aussi la mise à disposition de pilotes qui, le plus souvent, ne sont pas francophones. Il peut en résulter des difficultés de communication avec les pilotes de la DGSCGC et, par conséquent, des difficultés d'intégration de ces appareils dans le dispositif opérationnel. Dans le cadre des auditions du rapporteur spécial, les pilotes de la sécurité civile ont en effet souligné que ces difficultés de communication ont donné lieu, au cours de la saison « feux de forêt » de 2022, à plusieurs largages non autorisés par des pilotes de ces sociétés.

Pour limiter les difficultés d'intégration de ces appareils, la DGSCGC a fait le choix de ne pas les intégrer à la base aérienne de Nîmes, mais de les prépositionner dans le Sud-Ouest. Ces appareils n'auront donc pas vocation à intervenir sur les mêmes zones que la flotte permanente. Par ailleurs, les équipages non francophones ont l'obligation d'être accompagnés par un interprète, afin de favoriser la coordination avec les autres avions.

En tout état de cause, les souplesses permises par ces contrats de location ne sauraient dispenser le ministère de l'intérieur de mener une réflexion sur une stratégie l'investissement de long terme dans de nouveaux moyens pour renforcer sa flotte.

2. Les hélicoptères bombardiers d'eau : un complément utile des Canadair, qui ont fait leurs preuves depuis plusieurs années
a) L'acquisition d'hélicoptères lourds bombardiers d'eau constitue une piste crédible de diversification et de renforcement de la flotte

Dans le cadre de son audition par le rapporteur spécial, le vice-président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, Éric Flores (FNSPF), soulignait l'importance « d'augmenter la flotte, mais aussi de la diversifier ».

Le recours à des hélicoptères lourds bombardiers d'eau constitue à cet égard une perspective particulièrement intéressante pour la DGSCGC. Ces hélicoptères disposent généralement d'une capacité d'emport de 4 000 litres, contre seulement 800 à 1 000 litres pour les hélicoptères dits légers. Si ces hélicoptères n'ont pas vocation à participer aux missions de guet aérien armé (GAAr), leurs interventions très ciblées et localisées, susceptibles de contrer les phénomènes de « sautes de flammes », constitue un complément utile de l'action des Canadair et des Dash.

Ils présentent également l'intérêt de pouvoir accéder, contrairement aux autres avions bombardiers d'eau, à des zones difficiles d'accès, tels que les espaces montagneux ou périurbains, ce qui constitue une perspective particulièrement intéressante dans un contexte d'extension géographique du risque « feux de forêt ».

Leurs missions ne se limitent pas à la lutte contre les feux, puisque ces aéronefs peuvent également réaliser des opérations de secours lors des évènements météorologiques exceptionnels ou maritimes, de transport de blessés ou de patients lors d'une crise majeure ou encore de transport des formations militaires de la sécurité civile.

Les hélicoptères lourds bombardiers d'eau disposent par ailleurs d'une certaine souplesse en ce qui concerne son ravitaillement en eau, alors que le ravitaillement des Canadair, plus contraignant, est conditionné à la présence d'un plan d'eau de minimum 250 mètres de longueur. D'après François Pradon, chef de l'État-major de la sécurité civile (EMSC), cette flexibilité dans le ravitaillement des hélicoptères lourds bombardiers d'eau leur permettra de réaliser davantage de rotations que le Canadair. Les représentants d'Airbus estiment que leur hélicoptère « Super Puma » est en effet en mesure de réaliser 10 à 14 largages par heure.

Enfin, l'acquisition de ces hélicoptères permettrait également de développer une capacité de vol et de largage de nuit, afin d'assurer la permanence du soutien aérien pour les sapeurs-pompiers au sol.

Le recours à la location de ce type d'appareils depuis 2020 a permis à la DGSCGC de confirmer l'intérêt opérationnel de ces hélicoptères, dont l'efficacité a été soulignée par l'ensemble des acteurs auditionnés par le rapporteur spécial. Le président de la République a ainsi annoncé, le 28 octobre 2022, l'achat de deux hélicoptères lourds bombardiers d'eau. Ces acquisitions devraient être réalisées dans le cadre de financements européens, et plus particulièrement par l'intermédiaire du dispositif RescEU.

D'après les représentants d'Airbus, le coût d'un hélicoptères bombardiers d'eau « Super Puma » s'élèverait à 25 millions d'euros environ. Toutefois, la Commission européenne, interrogée sur le sujet, a indiqué ne pas vouloir imposer un modèle particulier.

Le programme RescEU devrait permettre de financer trois hélicoptères lourds bombardiers d'eau, qui devraient bénéficier à la France, la Pologne et la Roumanie. La commande de ces appareils était initialement programmée en 2025 dans le cadre financier pluriannuel de l'Union européenne, mais la direction générale de la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes (DG ECHO) de la Commission européenne a accéléré ce calendrier, prenant acte des sollicitations de plusieurs États membres en ce sens.

D'après les informations transmises par la DG ECHO au rapporteur spécial, la commande de ces trois appareils devraient se concrétiser dès l'année 2023. Six autres appareils additionnels seraient financés par ce même mécanisme dans les années à venir. Les délais de livraison de ces appareils apparaissent par ailleurs relativement rapides en comparaison avec les Canadair, dont la date de livraison demeure incertaine (voir infra).

Il apparait donc essentiel que la France plaide au niveau de l'Union européenne pour une accélération du calendrier de commande de ces appareils dont l'intérêt sur le plan opérationnel fait aujourd'hui l'unanimité. Par ailleurs, l'intérêt de l'acquisition en propre de ces appareils par rapport à la location est que ces hélicoptères seront directement exploités par des pilotes du groupement d'avions de la sécurité civile (GASC), ce qui facilitera leur intégration dans le dispositif de lutte contre les feux.

Les représentants d'Airbus ont par ailleurs indiqué au rapporteur spécial que la concrétisation de ces commandes présente également un enjeu économique, dans la mesure où près de 1 500 emplois seraient actuellement menacées à Marignane, lieu d'implantation de la chaîne d'assemblage des Super Puma, faute d'activité suffisante.

Le rapporteur spécial se félicite de la concrétisation probable de la première commande d'hélicoptères lourds bombardiers d'eau dans le cadre de RescEU. Il conviendra ensuite d'accélérer la concrétisation de la deuxième vague de commande, qui devrait également bénéficier la France. Ces hélicoptères ne doivent toutefois être envisagés que comme un complément utile à la flotte actuelle, et non comme une solution de substitution aux Canadair, malgré le délai de livraison incertain de ces avions.

Recommandation n° 4 : afin de diversifier la flotte aérienne de lutte contre les feux, accélérer l'acquisition d'hélicoptères lourds bombardiers d'eau (DGSCGC et Commission européenne).

b) Si les nouveaux modèles d'hélicoptères « Dragon » disposeront d'une capacité de largage d'eau, leur participation à la lutte contre les feux demeurera toutefois limitée

La loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) du 24 janvier 202312(*) a par ailleurs été l'occasion d'acter le renouvellement de la flotte d'hélicoptères « Dragons » EC-145, en validant la commande de 36 hélicoptères neufs, pour un montant total de 471,6 millions d'euros en AE ouverts en loi de finances initiale pour 2023. La flotte d'hélicoptères de la sécurité civile sera ainsi portée à 40 appareils. Selon le ministère de l'intérieur, la livraison de l'ensemble des appareils doit être réalisée sur une période de 5 ans.

Ces appareils auront la particularité de disposer d'une capacité d'emport d'environ 1 000 litres d'eau, ce qui les distingue des « Dragons » actuels, aujourd'hui quasi-exclusivement utilisés pour la réalisation d'opérations de secours, et dont la configuration opérationnelle ne permet pas d'emporter une masse d'eau significative pour lutter contre les feux de forêt. Ces hélicoptères seront en effet équipés de crochets à élingue, ou « bambi bucket », permettant de les armer de capacités de largage d'eau. D'après les représentants d'Airbus, ces hélicoptères pourraient utilement être mobilisés pour l'attaque des feux naissants, et pourraient plus particulièrement s'avérer utiles dans des territoires qui ne disposent pas des moyens aériens bombardiers d'eau de proximité.

Toutefois, ces hélicoptères n'auront pas vocation à être exclusivement dédiés à la lutte contre les feux, et leur action sera limitée à l'attaque des feux de faible et moyenne envergure. La DGSCGC précise que l'engagement d'un hélicoptère EC-145 sur ce type de mission fera systématiquement l'objet d'arbitrage par les donneurs d'ordre opérationnel sur la priorisation des missions « feux de forêt » et des missions de secours à la personne.

3. La coopération européenne constitue une piste intéressante de renforcement des moyens aériens en cas de crise
a) Le mécanisme de protection civile de l'Union européenne a récemment été complété par un programme de financement de moyens capacitaires mutualisés entre les États membres

Le mécanisme de protection civile de l'Union européenne (MPCU), créé en 2001, permet de mobiliser, en cas de catastrophe de grande ampleur, l'aide des pays européens participant à ce dispositif coordonné par la Commission européenne. Ce mécanisme de coopération, qui s'est renforcé au fil des années, rassemble aujourd'hui 35 États participants13(*). Le Centre européen de réaction d'urgence (Emergency response coordination centre, ERCC), situé à Bruxelles, coordonne la mise en commun des ressources proposées par les États membres, dans le cadre de ce dispositif.

Le programme RescEU, créé en 2019, et actuellement financé à hauteur de 1,9 milliard d'euros par l'intermédiaire du plan de relance européen Next Generation UE, est venu compléter le MPCU. Il a notamment acté la création d'une réserve de moyens aériens surnuméraires, mobilisée en dernier ressort après épuisement des capacités de réponses nationales et des offres spontanées des États participant au MPCU. Cette réserve européenne, actuellement composée de 13 appareils, devraient être portée en 2023 à 28 appareils, conformément aux annonces du commissaire européen à la gestion des crises, Janez Lenarèiè, le 30 mai 2023.

Le dispositif RescEU comporte un volet consacré à l'acquisition d'une flotte d'avions bombardiers d'eau « amphibies » au niveau européen. Ces avions seront librement mobilisés par les États bénéficiaires de ces commandes pour leurs besoins nationaux, mais ils seront également susceptibles d'être mis à disposition de l'Union européenne en cas de catastrophe importante sur le territoire d'un autre État membre. Cette flotte, qui a vocation à être composée de 12 Canadair, ne pourra toutefois pas être effective avant 2027 compte tenu des délais de production et de livraison des appareils.

Dans l'attente de la concrétisation de cette commande, un mécanisme « RescEU transitoire», mis en oeuvre jusqu'en 2024, permet par exemple à l'Union européenne de financer la location d'appareils ou les dépenses engagées par les États membres dans le cadre de la mise à disposition de leurs aéronefs. La France a notamment mis à disposition de l'Union européenne un Dash entre 2019 et 2021, puis deux Canadair en 2022 au titre du RescEU transitoire. Dans la mesure où la commande de Canadair ne pourra être achevée à courtterme, le programme RescEU transitoire a vocation à être prolongé jusque 2027, et fait en ce sens l'objet d'un projet d'acte législatif actuellement en discussion au sein des instances de l'Union européenne.

b) Une saison « feux de forêt » 2022 qui a confirmé l'intérêt de la solidarité européenne

La France a bénéficié en 2022 pour la première fois du soutien de partenaires européens dans le cadre du programme RescEU. Elle a en effet bénéficié du renfort de deux Canadair italiens, deux Canadair grecs, deux Air Tractor Fire-boss suédois.

Les personnels navigants de la sécurité civile ont souligné, lors du déplacement du rapporteur spécial à la base aérienne de la sécurité civile (BASC) de Nîmes le 13 octobre 2022, la qualité de la coopération avec leurs homologues, qui se seraient bien intégrés dans le dispositif opérationnel. Cette intégration à toutefois nécessité quelques ajustements opérationnels, afin de surmonter la barrière de la langue et les divergences de formation et de culture en matière d'appréhension opérationnelle de la lutte contre les feux.

C'est pourquoi les deux Air Tractor Fire-boss suédois ont été cantonnés à des opérations en Bretagne, où la flotte nationale est peu intervenue. La DGSCGC a en effet fait état d'une absence d'interopérabilité entre ces moyens et les moyens nationaux.

En revanche, les Canadair grecs et italiens ont pu être directement intégrés aux norias de Canadair de la sécurité civile, en tant qu'avions « suiveurs » - c'est-à-dire obligatoirement au sein d'une noria dirigée par un avion français.

Le rapporteur spécial se félicite par ailleurs de la mise en oeuvre, à l'initiative de la Commission européenne, de modules de formation à destination des pilotes de tous les pays participants au MPCU, visant à renforcer l'interopérabilité des différentes flottes, et à développer une véritable culture commune de lutte contre les feux. Ces modules de formation, réalisés à la base aérienne de Nîmes, permettent des échanges de bonnes pratiques entre États membres participants. Ils ressemblent des pays historiquement exposés au risque de feux de forêt et souhaitant renforcer leur interopérabilité avec les flottes des autres États membres, mais aussi des pays dont l'exposition à ces incendies, historiquement minime, tend à augmenter (par exemple, l'Allemagne). La Commission européenne met également en place des dispositifs d'échange de pilotes entre États membres, sous la forme de stages de trois mois pilotés et financés par l'Union européenne.

Le rapporteur spécial partage le constat de la DGSCGC et de la Commission européenne, qui estiment que l'approfondissement de ce mécanisme sera essentiel à l'avenir pour faire face à l'intensification des crises, leur multiplication et leur caractère transfrontalier. Comme l'affirmait la colonelle de sapeurs-pompiers et experte nationale détachée auprès de la DG ECHO de la Commission européenne, Claire Kowalewski, « quand l'exceptionnel se produit, il est normal que la solidarité prenne le relais14(*) ».

4. Les technologies innovantes de reconnaissance des départs de feux peuvent être mobilisées en complément de l'action des bombardiers d'eau

D'autres matériels complémentaires des avions bombardiers d'eau peuvent également constituer des pistes de renforcement de la flotte à court terme. Le président de la République a annoncé, dans le cadre de son intervention du 28 octobre 2022, vouloir progresser sur l'expérimentation de matériels innovants, et notamment sur les « drones autonomes et systèmes de détection par imagerie satellite, signalement de départ en temps réel avec des dispositifs d'intelligence artificielle. »

Le recours aux drones présente en effet un intérêt indéniable en cas de départ de feux en permettant :

- de donner à la chaîne de commandement une vision globale de la situation et d'identifier les zones à protéger ou à évacuer;

- de localiser des victimes en situation de péril imminent par l'utilisation de l'imagerie thermique ;

- de coordonner en direct des moyens engagés, en cas d'opération complexe et de grande ampleur.

D'après la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), les évolutions technologiques relatives aux drones peuvent permettre d'envisager, à plus long terme, d'équiper ces appareils d'une capacité de largage d'eau.

Pour autant, ce type de technologique n'est à ce stade pas utilisé par le groupement des moyens aériens (GMA) de la DGSCGC, qui ne dispose à ce jour d'aucun appareil de ce type. Des études seraient toutefois en cours en vue de l'acquisition de tels engins.

Certains SDIS sont en revanche déjà dotés de tels appareils, dans le cadre de contrats de location. C'est notamment le cas du SDIS de la Sarthe, dont les sapeurs-pompiers ont insisté sur le faible coût de fonctionnement de ces drones par rapport aux gains potentiels engendrés par la détection précoce des départs de feux. Ce coût annuel de location d'un drone pour le SDIS de la Sarthe serait en effet de l'ordre de 100 000 euros par an, soit de seulement 100 euros de l'heure, contre 3 000 euros de l'heure pour la location d'un hélicoptère bombardier d'eau.

Toutefois, la cohabitation dans les airs entre les drones et les aéronefs bombardiers d'eau pourrait susciter des difficultés en termes de sécurité, et constitue, selon la DGSCGC, le principal obstacle au développement de cette technologie pour la lutte contre les feux. Un autre obstacle à la pleine appropriation de ces appareils réside également, selon les sapeurs-pompiers du SDIS de la Sarthe, dans le caractère mouvant et complexe de la réglementation européenne sur ce type de technologie.

Le rapporteur spécial a également pu constater lors de son déplacement du 18 avril 2023 au SDIS de la Sarthe, l'intérêt que représente le recours à des caméras de détection de départ de feux.

Le SDIS a en effet fait l'acquisition en 2019 d'un système de vidéo détection et de localisation des feux d'espaces naturels. Ces caméras ont nécessité un investissement initial de 1,24 million d'euros, et représentent un budget annuel de fonctionnement de 111 700 euros.

Ce système repose sur l'utilisation conjointe de deux types de caméras complémentaires :

- une caméra de détection, au sein de laquelle est enregistrée une image de référence. La caméra est ensuite en mesure de détecter les mouvements par rapport à cette image fixe (par exemple, de la fumée provoquée par un départ d'incendie) ;

- une caméra de « levée de doute », plus précise, qui permet aux sapeurs-pompiers de vérifier si le signal de la caméra de détection a effectivement permis de repérer un départ de feu.

Le système de vidéo détection et de localisation des feux d'espaces naturels est installé sur 16 points hauts (7 châteaux d'eau et 9 pylônes), après autorisation des propriétaires et exploitants.

Le rapporteur spécial suivra avec intérêt le développement de ces nouvelles technologies, dont les apports sont complémentaires de l'action de la flotte de bombardiers d'eau. La réactivité de cette dernière pourra en effet être grandement améliorée par la détection plus précoce des feux permise par ces technologies.


* 12 Loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur.

* 13Les 27 Etats membres de l'Union européenne, ainsi que l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, Islande, Norvège, Serbie, Macédoine du Nord, Monténégro et Turquie

* 14 Audition du rapporteur spécial du 19 avril 2023.