C. POUR UNE LARGE AUTONOMIE DE LA SNCF

Nous avons vu que l'Etat et les collectivités publiques ont des responsabilités à assurer dans le domaine du transport ferroviaire, qu'il s'agisse de la définition du service public, des infrastructures...

Pour le reste, il paraît souhaitable que la SNCF puisse jouir de l'autonomie nécessaire à une entreprise commerciale, qu'elle puisse se doter d'un projet, prendre les initiatives pour se réformer. Cette nécessité pour l'entreprise de prendre son destin en main est d'ailleurs ressentie aussi bien par la direction que par le personnel, même si cette volonté ne pourra réellement s'apprécier que lorsque les premières décisions visant à restaurer la compétitivité de la SNCF seront mises en oeuvre.

Au cours des entretiens préparatoires au présent rapport, de nombreuses pistes ont été évoquées pour l'amélioration du fonctionnement et de l'efficacité de l'entreprise.

Le président de la SNCF, constatant une disproportion importante entre le nombre de personnes travaillant au siège de l'entreprise et le nombre total de salariés de la SNCF, paraît décidé à alléger les effectifs du siège (10.500 personnes sur 180.000 au total) et à renforcer dans le même temps la présence dans les établissements régionaux. Cette évolution pourrait s'accompagner d'un nouveau système de contrôle de gestion, comme l'a récemment déclaré M. Le Floch-Prigent : « Ce qu'il nous faut, c'est un système de gestion beaucoup plus rustique et rapide que celui qui existe. Ce nouveau système nécessitera la présence sur place des gens dans les établissements régionaux, liés à un système central dégonflé. Les salariés du système central vont se retrouver en nombre plus faible et déconcentré dans les différentes régions. Dans une entreprise comme la SNCF aujourd'hui, la structure centrale, c'est ce qui coûte le plus cher. Il faut qu'elle soit pleinement utilisée ».

Naturellement, la mise en oeuvre de réformes de structure implique que la SNCF jouisse d'une autonomie suffisante, notamment en ce qui concerne la gestion des effectifs. Le 14 décembre 1995, le Gouvernement s'est engagé à ce qu'aucune modification n'intervienne, pendant la phase de préparation d'un nouveau contrat de plan, en ce qui concerne « les données de base qui caractérisent aujourd'hui les structures, les modes de fonctionnement et les effectifs de la SNCF ». Il est clair qu'un tel moratoire, décidé dans une situation de crise majeure, ne saurait constituer une politique pour l'avenir.

La situation des gares devrait également faire l'objet d'un examen approfondi. Ces espaces sont-ils suffisamment valorisés ? Les liens avec les autres modes de transport sont-ils assurés de manière optimale ? Certains ont évoqué la possibilité d'accueillir dans les gares de nouveaux services, qui pourraient dynamiser ces espaces. Cette hypothèse est intéressante et peut permettre une meilleure valorisation des gares, à condition toutefois que ces services soient plus faciles à trouver pour l'usager que les guichets à la gare Montparnasse !

Un autre problème est celui de la rentabilité du capital. La sous-utilisation du matériel n'est assurément pas un gage d'efficacité. Nous avons évoqué le fait que, dans certains cas, une relance et une dynamisation de l'offre pourraient conduire à une relance de la demande. Cette politique permettrait une utilisation plus intensive du capital. Certaines organisations professionnelles ont évoqué l'abandon des trains de nuit par la SNCF, en faisant valoir que cette solution présenterait pourtant des avantages sur certaines distances lorsqu'il est nécessaire d'atteindre une destination tôt le matin, à condition naturellement d'offrir une qualité de service suffisante.

En ce qui concerne le fret, il semble évident que la SNCF doit améliorer sa rapidité, sa souplesse, sa capacité de réaction face à des demandes de transport. Le fret est l'un des secteurs pour lesquels la dimension communautaire peut présenter de grands avantages pour le transport ferroviaire, qui n'a une réelle pertinence que sur des distances assez longues. Dans son rapport, M. Claude Martinand s'interrogeait sur la possibilité de mettre en place des infrastructures exclusivement consacrées au fret. Cette solution, largement développée aux Etats-Unis, pourrait permettre des économies importantes, l'entretien de telles infrastructures étant moins coûteux que l'entretien d'infrastructures sur lesquelles évoluent des trains de voyageurs.

Ce ne sont là que quelques pistes qui ont été évoquées au cours des entretiens conduits par votre rapporteur. Elles démontrent simplement qu'il existe de nombreux moyens pour la SNCF d'améliorer son fonctionnement et sa compétitivité. D'une manière générale, il semble que la SNCF doive concentrer désormais son attention sur la satisfaction de ses clients. Les usagers captifs d'autrefois sont aujourd'hui des clients qui ont souvent le choix entre plusieurs modes de transport. La SNCF doit s'adapter pleinement - elle a d'ailleurs commencé à le faire - à cette situation nouvelle. Cette tâche de restauration de son efficacité appartient à la seule SNCF, qui doit disposer de la marge de manoeuvre la plus étendue possible en ce domaine, mais qui est appelée à être jugée sur les résultats qu'elle obtiendra.

Les changements qui s'imposent dans l'organisation du transport ferroviaire en France sont donc considérables. Certains doivent être rapidement mis en oeuvre, d'autres nécessiteront plus de temps. A terme, on peut se demander si la loi d'orientation des transports intérieurs ne devrait pas faire l'objet d'une modification, afin de prendre acte des évolutions en cours, de définir de manière plus précise les relations entre l'Etat et la SNCF. En tout état de cause, il est souhaitable que le Parlement soit pleinement associé aux décisions qui seront prises, compte tenu du fait que l'avenir du transport ferroviaire concerne l'ensemble des citoyens, compte tenu également de l'ampleur des enjeux financiers. Une déclaration du gouvernement suivie d'un débat peut-elle suffire à assurer cette association du Parlement aux décisions sur l'avenir du transport ferroviaire ?

Votre rapporteur ne le pense pas, c'est pourquoi il a souhaité déposer une proposition de résolution qui pourrait permettre au Sénat de défendre quelques orientations fortes sur l'avenir du transport ferroviaire européen.

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