C. RENFORCER L'EFFICACITÉ PROPRE DES PORTS FRANÇAIS

1. Consolider la réforme de la manutention

La réforme de la manutention engagée en 1992 est globalement un progrès, mais elle doit encore être consolidée sur plusieurs points.

Premièrement, le retour au droit commun du travail doit s'effectuer de la manière la plus complète, ce qui suppose que soit levée l'ambiguïté sur la notion de docker occasionnel, qui ne doit pas devenir un moyen détourné de ressusciter en fait le système de l'intermittence.

Deuxièmement, la question des sureffectifs, qui se pose à nouveau en raison des progrès constants de la productivité, pourrait être réglée par des mesures d'âge.

Troisièmement, les gains de productivité résultant de la réforme de la manutention sont en partie limités par le maintien d'une organisation réservant la conduite de l'outillage à du personnel de l'administration portuaire. Les négociations engagées dans certains ports pour intégrer progressivement le personnel grutier dans les entreprises de manutention mériteraient d'être poursuivies et étendues.

En toute hypothèse, la mise en oeuvre de ces réformes ne peut se faire que de manière consensuelle. Une résurgence des mouvements de grève de 1992 serait une catastrophe pour les ports français. Votre rapporteur a pu constater lors de sa mission que le souvenir en est encore vif chez les armateurs et les chargeurs, et que les ports étrangers concurrents ne se font pas faute de l'entretenir.

2. Moderniser les professions réglementées

Les services portuaires très spécialisés du pilotage et du remorquage sont organisés en professions réglementées qui disposent d'un monopole de droit pour la première et de fait pour la seconde.

Le caractère réglementé et monopolistique de ces professions s'explique par des impératifs de sécurité vitaux pour le bon fonctionnement des ports. Mais il a eu pour conséquence de créer des rentes de situation qui sont de moins en moins défendables à mesure que la pression de la concurrence se renforce sur tous les autres acteurs de la filière portuaire.

Toutefois, la solution radicale de l'abandon du monopole n'est pas la seule. Votre rapporteur estime qu'une amélioration de la productivité de ces professions pourrait être obtenue de façon pragmatique, dans le cadre réglementaire actuel, par la modernisation de leurs modes de fonctionnement.

Il s'agit notamment de la révision des modes de fixation des tarifs dans le sens de la transparence, impliquant la négociation directe avec le client et la disparition des prestations fictives.

Au-delà de la question des professions réglementées, se pose celle de la fragmentation des professions portuaires en France. L'une des forces des ports du Benelux est de proposer à leurs utilisateurs les services de sociétés de logistiques très intégrées, capables d'offrir une prestation complète d'un bout à l'autre de la chaîne du transport. Il n'en va pas de même dans notre pays, où la multiplication des intermédiaires est un facteur de complications et de coûts supplémentaires. Mais, l'amélioration de cette situation ne peut évidemment pas résulter d'une initiative législative ou réglementaire des pouvoirs publics.

3. Réduire les distorsions douanières et fiscales

Les ports français sont victimes de certaines distorsions de concurrence d'origine douanière et fiscale par rapport à leurs voisins.

En ce qui concerne les contrôles vétérinaires et phytosanitaires, l'harmonisation communautaire est encore insuffisante et la réglementation, lorsqu'elle existe, n'est pas toujours respectée par les ports nord-européens.

Les délais de régularisation des restitutions versées dans le cadre de la politique agricole commune restent encore plus longs que ceux des ports du Benelux, en dépit des progrès récents.

Mais, plus grave que ces différences de réglementations, sont les différences des pratiques douanières. Les douanes des pays du Benelux sont notoirement plus accommodantes que les douanes françaises, et leurs sanctions plus légères. Aux Pays-Bas, il n'y a pas d'amendes proprement dites. En cas d'infraction, l'entreprise fautive est simplement tenue d'acquitter les droits dus. La seule voie d'amélioration réside dans les travaux en cours de la Commission européenne pour harmoniser au niveau communautaire les contrôles et les sanctions douanières.

Une autre distorsion de concurrence résulte du régime de la taxe professionnelle sur les transports. L'acheminement terrestre de marchandises passant par le port d'un Etat étranger est considéré comme un transport international ouvrant droit à une réduction de taxe professionnelle pour les transporteurs qui les réalisent. En revanche, cette réduction n'est pas possible lorsque la marchandise passe par un port français.

Enfin, certaines marchandises importées de pays tiers à l'Union européenne sont frappées par des taxes parafiscales à leur arrivée en France. Or, les mêmes marchandises échappent à ces taxes si elles sont importées dans un autre Etat membre puis mises en libre pratique pour être expédiées en France. Ce mécanisme entraîne, pour les produits concernés, des détournements de trafics au profit des ports européens concurrents.

Taxes parafiscales sur les produits importés en France de pays tiers

Intitulé

Taux

Champ d'application

Pêches maritimes et cultures marines

0,30 % ou 0,20 %

Abattements possibles de 25 % ou 50 %

Poissons, crustacés, mollusques, algues, échinodermes de mer, saumons et truites de mer

Secteur du cuir

0,18 %

Cuir, chaussures, maroquinerie

Textile et maille

0,08 % textiles

0,08 % maille

0,03 % filature

Produits textiles et en maille

Habillement

0,11 %

Articles d'habillement

Ameublement

0,15 % ou 0,20 %

Articles d'ameublement

Horlogerie

0,20 %

Articles d'horlogerie et de bijouterie

Tomates (actuellement suspendue)

0,030 à 0,6 F/kg net
selon le produit

Tomates, jus de tomates, conserves, concentrés

Pruneaux

4 %

Pruneaux



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