ANNEXES

Comptes rendus des auditions du groupe de travail

M. Francis BECK, Président de l'INA

• M. Jean-Marie CAVADA , Président directeur général de Radio France

• Mme Véronique CAYLA, Membre du Conseil supérieur de l'Audiovisuel

M. Bruno CHETAILLE , Président directeur général de Télédiffusion de France

• M. Roger CHINAUD , membre de l'autorité de régulation des télécommunications (compte-rendu en attente de validation)

• M. Jean-Paul CLUZEL , Président directeur général de Radio France Internationale

M. Jean-Pierre COTTET , chargé de mission à France Télévision

• M. Jean DRUCKER , Président directeur général de M6

M. Jacques ESPINASSE, Directeur général de Télévision par satellite, M. Gilles MAUGARS , directeur technique et informatique et M. Bernard PRADES , délégué général de Suez-Lyonnaise

M. Bertrand LARRERA DE MOREL, Président de l'IFCIC et de Mme Elisabeth Flury-Herard, Directeur général

M. Maurice LEVY , président du directoire de Publicis SA

• M. Etienne MOUGEOTTE , Vice-président et Directeur général de TF1

M. Jean-Claude MOYRET , Directeur de l'audiovisuel extérieur et des techniques de communication du ministère des affaires étrangères

M. Fabrice NORA , Directeur général adjoint du groupe Amaury

• M. Jérôme SEYDOUX, Président de Pathé

• M. Frank SOLOVEICIK , Président directeur général de M5

• M. Bernard SPITZ , Maître des requêtes au Conseil d'Etat

• M. Marc TESSIER, Président directeur général de France télévision

Audition de M. Francis Beck

Président de l'Institut National de l'Audiovisuel (INA)

Mercredi 15 septembre 1999

M. Francis Beck a tout d'abord rappelé le contexte particulier dans lequel se déroulait son audition. En effet, elle se situait à la veille d'importantes décisions, pour l'avenir de l'INA, que devait prendre son Conseil d'administration et qui s'inscrivaient dans le processus législatif en cours.

Il a évoqué en premier lieu l'accord cadre avec France Télévision, le principal partenaire de l'Institut, qui constituera une mutation importante dans son mode de financement. Il a ainsi précisé que les modalités de facturation des prestations d'archivage, ainsi que le système de dévolution des droits de propriété intellectuelle sur les archives trois ans après diffusion, seraient revus.

Il a précisé en second lieu que le projet de plan stratégique pour la période 1999-2003 devait également être soumis à l'approbation du Conseil d'administration. Pour permettre à l'entreprise une visibilité à moyen terme, un contrat d'objectif et de moyens avec le gouvernement sur quatre années devra être signé. En effet, selon lui, les incertitudes pesant sur l'avenir de l'Institut avaient suscité une réelle inquiétude dans son personnel, au point de provoquer le déclenchement d'une procédure de droit d'alerte en mars dernier. Le Conseil d'administration allait également être amené à y répondre le lendemain.

M. Francis Beck a ajouté qu'en contrepartie, l'INA s'engagerait dans une stabilisation de ses charges, notamment celles de la masse salariale qui représente 60 % de son coût de fonctionnement. Il a indiqué que l'objectif de stabilisation de la masse salariale entraînerait une réduction de l'ordre de 2 % par an déjà mise en oeuvre dès 1999. Cette anticipation du contrat pluriannuel prévu dans le projet de loi, se fera sans plan social et sans licenciement. Il a précisé que d'autres économies seraient effectuées sur les frais généraux et grâce à une meilleure gestion des achats.

Répondant à M. Claude Belot et à Mme Marie-Claude Beaudeau , il a ensuite abordé les projets en matière de sauvegarde et de numérisation du fonds patrimonial de l'INA. Le site Internet de l'INA permettra de disposer de la commande électronique par messagerie et à terme, lorsque les réseaux seront suffisamment développés, la mise en service du télévisionnage en ligne avec télépaiement. Il a également déclaré que l'INA grâce à son expérience et à ses investissements en matériels performants représentait la compétence la plus poussée pour la gestion d'extraits d'émissions mais que face à un stock de plus d'un million d'heures d'archives, il ne pouvait, en l'état actuel de ses moyens, toujours répondre complètement à la demande. Il a regretté que sur 450.000 heures de programmes, qui représentaient 80 kilomètres de rayonnage et s'accroissaient au rythme de 35.000 heures par an, la moitié était menacée de disparition.

Enchaînant sur le problème de la sauvegarde, M. Francis Beck a constaté que si " conserver et mettre en valeur le patrimoine " figurait parmi les missions réaffirmées à l'Institut dans le projet de loi, son métier était également de trier ce qui méritait d'être conservé. Il a indiqué que si seulement 5.000 heures avaient été transférées sur support numérique en 1998, pour 1999 on en était d'ores et déjà à 18.000 heures, avec un objectif total de 88.500 heures fin 2003 dans le cadre du plan de sauvegarde et de numérisation. Il a également précisé qu'il était affecté à ce plan pluriannuel de sauvegarde et de numérisation, 23 millions de francs en 1999 et qu'il en était prévu 30  pour 2000. Il a surtout estimé que le coût total de cette opération s'élèverait à 500 millions de francs (300 pour 200.000 heures télévision et 200 pour 300.000 heures radio).

Confirmant à M. Claude Belot que la commercialisation de ses archives constituait un objectif majeur de l'INA, il a souligné que la réponse " à la demande " serait progressivement associée à une offre plus thématique. Il a rappelé qu'en ce qui concernait le dépôt légal, cette mission de l'Institut était réaffirmée dans le projet de loi pour toutes les émissions des chaînes hertziennes nationales. Pour ce qui concerne les sociétés nationales de programme, l'exploitation des programmes en dehors des oeuvres de fiction revenait de droit à l'INA, passé un délai de trois ans après la diffusion. Cette dévolution ne concernerait plus à l'avenir que la gestion des extraits, mais dans un délai d'une année.

Après avoir précisé que le budget annuel de l'INA, hors amortissements de programmes, s'élevait à 650 millions de francs, M. Francis Beck a conclu en rappelant que le projet de loi réaffirmait très fortement la priorité donnée à la mission patrimoniale tout en réaffirmant la nécessaire convergence des autres activités de production, de recherche et de formation.

Audition de M. Jean-Marie Cavada

Président directeur général de Radio France

Mardi 14 septembre 1999

Dans un propos introductif, M. Jean-Marie Cavada a souligné que Radio France, première radio sur le marché national avec 28,5 % d'audience, a conforté sa position, au cours des derniers mois, avec une progression de 525.000 auditeurs, dont plus de 200.000 pour la seule station France Musique.

Après avoir souligné les bons résultats de Radio France, en saluant au passage la culture d'entreprise des personnels, M. Jean-Marie Cavada a évoqué les réformes en cours, notamment l'affirmation de l'identité de chaque station sous le signe d'une marque administrée par une direction monocéphale. Ainsi, Radio France procède à une contraction des services généraux après avoir réformé les antennes.

M. Jean-Marie Cavada s'est montré inquiet pour l'avenir, estimant que le budget actuel ne permet pas de faire face aux priorités qu'il a définies : numérisation des outils de production et de diffusion, politique sociale favorisant les départs volontaires et l'embauche de jeunes, meilleure agressivité sur le marché. Il a indiqué qu'avec le budget actuel, la numérisation ne pouvait être mise en oeuvre, et qu'il lui paraissait fondamental d'achever la numérisation en trois ans. Il a exprimé le souhait de réaliser l'entrée de Radio France sur de nouveaux supports.

Répondant à M. Claude Belot, M. Jean-Marie Cavada a rappelé que le transfert des oeuvres vers l'INA interdisait toute exploitation ultérieure de ce fonds, pourtant indexé et stocké par Radio France. Il a émis le voeu que les négociations à intervenir dans le cadre de l'OMC règlent la question des droits d'exploitation de ce fonds.

A une question de M. André Vallet, M. Claude Norek , directeur général délégué à la gestion et à la production a fait valoir que les fonds disponibles, celui de France Culture notamment, ne pouvaient être utilisés par les Universités que pour autant qu'on puisse les transférer sur bases de données, ce qui supposait de les numériser au préalable.

S'agissant de la présence sur Internet, M. Jean-Marie Cavada a souligné le très faible volume des crédits mis à la disposition de son entreprise, comparativement aux montants alloués à la télévision ou aux fonds dont disposent des radios étrangères telles la BBC.

M. Paul L'Ollivier , directeur des finances et du contrôle de gestion, a précisé que Radio France produisait ses programmes, la gestion de l'outil de production intégré supposant des coûts qui ne laissent de place ni à la souplesse, ni au développement technologique.

Abordant la question des radios locales, M. Jean-Marie Cavada a insisté sur la place prise par cette activité. Il a évoqué la réussite spectaculaire de certaines d'entre elles, rappelant que les programmes purement locaux représentaient environ 12 heures d'émission quotidienne. Il a regretté le manque de moyens financiers conduisant Radio France à rétrocéder des fréquences disponibles, au détriment de la couverture du territoire national, 38 fréquences locales desservant 43 départements. En réponse à M. Vallet, il a confirmé que France Info ne couvrait que 60 % de la population répartie sur 40 % du territoire.

M. Sylvain Anichini , directeur général adjoint chargé des technologies nouvelles, a souhaité que le développement du numérique hertzien résolve une partie des problèmes des radios locales, en rapprochant l'information des utilisateurs pour éviter l'encombrement du réseau national.

Répondant à M. Belot, M. Jean-Marie Cavada a évalué à 188 millions de francs par an, pendant deux à trois ans, le coût des investissements jugés indispensables.

M. Jean-Marie Cavada a conclu en invitant le législateur à définir une véritable politique de la radio publique, une importante réflexion s'avérant nécessaire. Il a émis le souhait que le pays se donne les moyens de soutenir la radio, industrie véritable qui devra encore faire face aux défis sociaux que constituent la révision des accords collectifs et l'application de la législation sur les 35 heures de travail hebdomadaire.

Audition de Mme Véronique Cayla

Membre du Conseil supérieur de l'Audiovisuel

Mardi 22 juin 1999

Mme Véronique Cayla a tout d'abord affirmé que la révolution numérique lui paraissait un phénomène inéluctable, tout en notant qu'il était compréhensible que, compte tenu de l'avance de la France dans le satellite et des investissements déjà réalisés en ce domaine, les opérateurs actuels ne soient guère enclin à accélérer le passage au numérique terrestre.

Elle a souligné que si le montant de l'investissement n'est pas encore connu, le coût de la diffusion numérique hertzienne sera nettement moins élevé que celui de la diffusion analogique : à terme -sans doute dix ans- la diffusion analogique doit disparaître, ce qui libérera des fréquences. Par ailleurs, cette perspective aboutit à poser en termes différents la question des télévisions locales, à un moment où les esprits évoluent comme le montre le revirement de la Presse quotidienne régionale.

Elle a évoqué le problème d'accès aux événements sportifs majeurs en attirant l'attention sur le problème de la définition de ces événements.

Au sujet de la publicité sur les télévisions de service public, Mme Véronique Cayla a indiqué qu'en Allemagne où il n'y avait pas de publicité à l'heure du  " prime time " et en Angleterre où la publicité est interdite par la charte, les règles du jeu étaient claires mais coûteuses, tandis qu'en France, il faut gérer un système mixte. La redevance rapporte 30 milliards de francs en Allemagne, 20 milliards de francs en Angleterre contre 13 milliards de francs dans notre pays. A cet égard, elle a fait savoir qu'il fallait se méfier des réglementations par trop tatillonnes, naturellement difficiles à appliquer.

D'une façon générale, Mme Véronique Cayla a mis l'accent sur la nécessité en matière audiovisuelle, de faire plus de place aux contrôles a posteriori qu'aux contrôles a priori : on a trop tendance à faire appel au décret et à susciter les interventions de la tutelle, pour des organismes publics dont le mode de gestion doit se rapprocher de celui des entreprises.

En ce qui concerne la production audiovisuelle, elle a d'abord noté que, compte tenu de la nature d'une activité caractérisée par des marges faibles, -les émissions de flux se révélant d'ailleurs plus rentables que les émissions de stocks- , le système des SOFICA fonctionnait moins bien que dans le cinéma. Plus généralement, elle a rappelé qu'il n'y a pas encore de réel marché européen de la production audiovisuelle en dépit des systèmes d'encouragements mis en place au niveau de l'Union Européenne et que les programmes américains constituaient, de fait, le vrai dénominateur commun culturel du paysage audiovisuel en Europe.

Evoquant enfin les enjeux culturels, Mme Véronique Cayla a fait remarquer que les évolutions en cours à TV 5 allaient dans le sens d'une présence audiovisuelle accrue.

Audition de M. Bruno Chetaille

Président directeur général de Télédiffusion de France (TDF)

Mercredi 15 septembre 1999

Dans un propos introductif, M. Bruno Chetaille a brièvement présenté l'entreprise qu'il dirige. TDF est, depuis 1990, une société anonyme, filiale à 100 % de France Télécom. Son chiffre d'affaires, pour 1998, s'est élevé à 4,2 milliards de francs. A cela s'ajoutent 500 millions de francs en provenance de ses filiales françaises. TDF est également présente à l'étranger, notamment au Royaume Uni où elle détient 20 % de CCICUK qui assure la diffusion des programmes de la BBC et de On Digital (Chiffre d'affaires d'1 milliard).

Il a expliqué, qu'en France, TDF exerce trois activités :

la diffusion des chaînes de télévision hertziennes. Cette activité représente 50 % du chiffre d'affaires (environ 2,4 milliards de francs) et régresse de 2 % environ en raison de la baisse des prix pratiqués par l'entreprise ;

la diffusion des radios. Cette activité représente 20 % du chiffre d'affaires (environ 1 milliard de francs). Les prix pratiqués décroissent mais le volume augmente, les recettes sur ce poste restent donc stables ;

l'activité de radiocommunications, notamment avec les opérateurs Itinéris, SFR et Bouygues Telecom. Ce secteur qui représente 20 % du chiffre d'affaires est le moteur de croissance de l'activité de TDF sur le marché français.

Il a expliqué que TDF pratiquait une égalité de traitement entre ses clients. Lorsqu'une offre est faite à une chaîne , elle est immédiatement répercutée aux autres. Il a indiqué que TDF avait un contrat de 7 ans avec TF1, de 6 ans avec M6, de 5 ans avec F2 et F3 et 4 ans avec Canal +. Les prix pratiqués ont baissé de 2,5 % au cours de 5 dernières années.

Abordant la question de la diffusion en numérique sur le réseau hertzien, M. Bruno Chetaille a souligné que TDF ne demandait pas un monopole sur ce nouveau marché. Il a expliqué que la plupart des pays européens s'étaient engagés ou s'apprêtaient à s'engager dans cette mutation technologique. Il a notamment indiqué que la Grande-Bretagne et la Suède avaient déjà démarré et que l'Espagne s'apprêtait à le faire en 2000. Il a rappelé que TDF avait placé son action dans un cadre européen : au niveau des études et recherche dans le cadre des programmes Eureka, au niveau de la normalisation au travers des groupes DVB - une norme européenne a été définie en 1996 - et maintenant au niveau opérationnel avec sa présence au Royaume Uni et en Espagne.

Il a souligné que la diffusion numérique hertzienne permettait de diffuser 6 réseaux nationaux avec pour chacun de l'ordre de 6 chaînes, l'offre audiovisuelle pouvant être complétée par des services (ex : Internet diffusé). A ces réseaux nationaux peuvent également s'ajouter des multiplex locaux ou régionaux. Il a indiqué que ce type de diffusion était moins performant en matière d'interactivité que le câble mais présentait l'avantage de s'adresser rapidement à l'ensemble du territoire et de garantir l'entrée de tous les foyers français dans la société de l'information.

Il a rappelé que la diffusion numérique hertzienne pourrait fonctionner en complémentarité avec la diffusion par satellite (couverture géographique).

En réponse à M. Claude Belot , qui l'interrogeait au sujet du délai de mise en place de ce type de diffusion, M. Bruno Chetaille a indiqué que 18 mois seraient nécessaires à compter de la décision. En France, il a estimé que le système serait opérationnel - fin 2001.

Audition de M. Roger Chinaud

Membre de l'autorité de régulation des télécommunications (ART)


Mardi 21 septembre 1999

M. Roger Chinaud a observé que la France n'avait mesuré ni l'ampleur de la révolution numérique en cours, ni les nouvelles facultés de transport que l'on pouvait en espérer.

Il a expliqué que le gouvernement avait lancé une consultation au cours de l'été au sujet de la télévision numérique hertzienne, à la suite du rapport de Messieurs Cottet et Emery et a relevé quatre éléments, à ses yeux primordiaux :

- la qualité de service qu'autorisera le numérique

- la baisse du coût de la diffusion

- la multiplication du nombre des chaînes

- la naissance de bouquets mis à la disposition des grandes chaînes de télévision .

Il a indiqué que cette révolution impliquait un renouvellement du parc des téléviseurs et une meilleure gestion du spectre hertzien. A ce sujet il a précisé que la France se trouvait actuellement en situation de pénurie de fréquence, et a estimé que cette situation disparaîtrait avec l'avènement de la diffusion numérique terrestre.

M. Roger Chinaud a ensuite fait remarqué que le mot " Internet " ne figurait pas dans la loi, qui en 1996 a créée l'ART, illustrant ainsi la rapidité des évolutions des techniques. Il a retracé la très importante progression l'usage du téléphone portable en Europe, soulignant que la prochaine génération de téléphones portables (UMTS) comporterait des dispositifs permettant d'utiliser Internet.

Il a indiqué que la principale préoccupation des opérateurs de téléphonie mobile était de fidéliser leur clientèle ; pour ce faire le développement des services interactifs est indispensable. Les recettes sont à venir, pour l'instant chaque nouvel abonné coûte entre 2.000 et 2.300 francs à l'opérateur.

Il a estimé que dans les trois années à venir, les opérateurs feraient cadeau du transport de la voix, celui des données étant le véritable enjeu de la prochaine décennie.

Abordant, à la demande de M. Claude Belot , l'avenir du réseau câblé français, M. Roger Chinaud a estimé qu'il se développerait en réseaux de fibre optique, destinés notamment à l'exploitation des liaisons satellitaires.

Il a cité l'exemple de plusieurs communes qui développent des réseaux fermés. Bien souvent le retour sur investissement est effectué en 18 mois seulement. Tout en préconisant la prudence, il s'est dit favorable à ce genre d'initiative.

En réponse à M. Claude Belot , qui l'interrogeait sur le sort réservé aux fréquences du spectre hertzien qui seraient libérées par l'avènement du numérique, M. Roger Chinaud a indiqué qu'une partie pourrait servir à la troisième génération de téléphone mobile. Par ailleurs il a fait remarquer qu'un certain nombre d'entre elles étaient aujourd'hui attribuées à l'armée -qui ne les utilise pas toujours- et a souhaité en rationaliser l'affectation.

Audition de M. Jean-Paul Cluzel

Président directeur général de Radio France Internationale

Mardi 14 septembre 1999

M. Jean-Paul Cluzel a tout d'abord rappelé que RFI avait une triple caractéristique : un statut de droit commun ; un double financement public (ses recettes proviennent pour 60 % du ministère des affaires étrangères et pour 40 % du ministère de la culture); des émissions en FM et ondes courtes presque exclusivement destinées à l'étranger, à l'exception de l'émetteur situé en région parisienne.

RFI possède des relais FM dans 80 villes du monde et est repris dans 180 autres villes par des radios étrangères. Sa présence sur le dispositif de diffusion satellitaire directe est assurée en Europe, par le biais d'Astra, ainsi qu'en Amérique du Nord et en Amérique latine ; elle dispose également d'un réseau satellitaire professionnel lui permettant d'être repris, au niveau mondial, par tout particulier ou radio possédant la parabole nécessaire. Elle est également présente sur Internet. Dans ce cadre international, elle dispose de 30 millions d'auditeurs dans le monde, pour moitié de langue française, l'autre moitié se répartissant entre 19 langues étrangères. M. Jean-Paul Cluzel a signalé en outre l'importance de RMC Moyen-Orient, filiale de RFI, qui reprenait 1 h 30 d'émissions françaises, et qui compte par ailleurs 15 millions d'auditeurs arabophones. Il a tenu à préciser que ces chiffres ne reflétaient pas un auditoire potentiel mais un auditoire effectif et souligné l'importance de RFI dans le paysage audiovisuel extérieur de la France puisqu'il est le seul organe 100 % français dont dispose la nation pour faire entendre sa voix sur le plan international et qu'en outre ses émissions reflétaient la diversité d'opinion des médias français.

Face à cet enjeu et au nombre de ses auditeurs, les recettes de RFI apparaissent bien faibles : son budget en 1999 s'élevait à 725 millions de francs, soit 3,9 % du total du budget de l'audiovisuel public et 5,6 % des ressources publiques affectées à ce secteur. Depuis plusieurs années RFI connaît un traitement budgétaire défavorable. Pour des raisons structurelles, d'abord car la subvention du ministère des affaires étrangères dont le budget est chaque année reconduit ou en régression, ne lui permet pas de faire face au dynamisme de ses frais de personnel qui représentent 44 % de son budget ; pour des raisons conjoncturelles ensuite, car RFI a dû faire face à des mesures de régulation budgétaire : 60 millions de francs en 1996 et 14 millions de francs en 1997 ; en 1999, l'apport du ministère des affaires étrangères a été diminué de 20 millions de francs et celui de la culture de 10 millions de francs. Au total les concours publics octroyés à RFI en loi de finances initiale ont diminué de 1,7 % entre 1997 et 1999 contre une augmentation de 6,3 % pour l'ensemble du secteur audiovisuel public. Si RFI avait bénéficié d'une évolution de ses ressources comparable, elle aurait perçu environ 60 millions de francs de plus au cours des deux derniers exercices.

Cette politique budgétaire a conduit RFI à faire des ajustements importants, portant essentiellement sur les ondes courtes, et à réaliser des économies notamment grâce à la numérisation. La gestion rigoureuse mise en place a permis de renouer avec l'équilibre budgétaire en 1999. M. Jean-Paul Cluzel a énuméré les priorités de son budget : la modernisation des équipements afin de les adapter à la numérisation ; l'adaptation des moyens de diffusion aux attentes et à la diversité des auditeurs, grâce au maillage du réseau de FM et à l'enrichissement des sites Internet ; la situation au Kosovo exigeant le renforcement du dispositif de diffusion en FM ainsi que l'extension des émissions en serbe et en croate et la mise en place d'émissions en albanais et en macédonien.

M. Jean-Paul Cluzel a souhaité qu'on donne à RFI les moyens de poursuivre le développement du réseau de FM, de mener une politique de communication adaptée à sa présence internationale, de renforcer le contenu des émissions, notamment en les régionalisant, en enrichissant les magazines, en développant les programmes en langue étrangère. Il a conclu en soulignant combien ces coûts étaient négligeables face à l'impact décisif qu'ils entraîneraient pour l'image de la France à l'étranger.

En réponse à M. Claude Belot qui évoquait la puissance de la BBC, M. Jean-Paul Cluzel a reconnu que le système anglais était certainement plus efficace mais qu'il était difficilement transposable en France. Il souhaitait une mise en commun des ressources de l'audiovisuel public sur la base des avantages relatifs à chacun, notamment pour réformer le réseau des correspondants à l'étranger. M. Claude Belot s'est étonné de ce que le budget de la BBC, qui ne comprend pas de recettes publicitaires, et celui de l'ensemble de l'audiovisuel français soient du même ordre.

Les radios francophones, a déclaré M. Jean-Paul Cluzel , se portaient plutôt bien, ainsi qu'en faisait état un rapport récent de Médiamétrie qui dégageait deux catégories principales d'auditeurs : les décideurs et les jeunes. Le succès rencontré par la radio dans le monde francophone et non francophone s'expliquait par le fait qu'il s'agissait là d'un média particulièrement économique et accessible.

M. Jean-Paul Cluzel s'est attaché à préciser qu'il tenait à ce que RFI garde sa spécificité dans le monde et ne vienne pas en concurrence avec les autres radios du monde francophone mais apporte un complément en mettant l'accent sur l'information et la culture. C'est volontairement que RFI n'avait pas développé une politique de radios de proximité afin de laisser place aux radios locales. En trois ans, RFI avait réussi à reconstituer son audience et à l'augmenter dans de nombreux pays en se repositionnant sur le créneau de l'information.

M. Claude Belot a reconnu que le budget de communication de RFI, s'élevant à 3 millions de francs, était insuffisant et a suggéré que RFI pourrait se faire l'écho des régions françaises à l'étranger et dégager ainsi des recettes supplémentaires. M. Jean-Paul Cluzel s'est déclaré très intéressé par cette perspective.

Audition de Monsieur Jean-Pierre Cottet

Chargé de mission à France Télévision

Mardi 21 septembre 1999

M. Jean-Pierre Cottet a expliqué que M. Gérard Emery et lui même étaient convaincus de l'avènement du numérique dans toute la chaîne de la production audiovisuelle, tant dans la production d'images que dans le stockage, le montage et la diffusion.

Il a indiqué que la généralisation de la diffusion numérique terrestre permettrait d'engager une meilleure gestion du spectre hertzien français. 150 émetteurs actuellement en service couvrent 85% de la population. Ils seraient susceptibles de permettre le développement de la télévision locale, si la loi autorisait la syndication - condition essentielle à l'équilibre financier de tels projets-. La technique de l'Adsl et la transmission par satellite permettraient aux 15% de population restante, l'accès aux programmes Il a rappelé qu'aucune mesure n'obligeait les diffuseurs, même publics, à couvrir l'intégralité du territoire, et qu'une réflexion mériterait d'être menée à ce sujet.

En réponse à M. Claude Belot , M. Jean-Pierre Cottet a souligné que le gouvernement avait besoin de geler un certain nombre de fréquences analogiques afin de préserver les espaces nécessaires au transport des six futurs multiplexes - destinés aux six grandes chaînes actuelles - et un réseau interville. Il est souhaitable de réserver quelques canaux à de nouveaux acteurs.

Il a rappelé que la presse quotidienne régionale souhaitait investir rapidement les fréquences actuellement libres et diffuser des programmes analogiques, qui, même s'ils ne sont pas rentables, les placeront dans une position de marché confortable le jour où le mode numérique se généralisera. Il a insisté à nouveau sur l'impérieuse nécessité de réformer la loi sur la syndication faute de quoi les télévisons locales se développeraient dans un esprit de " patronage ".

M. Jean-Pierre Cottet a cité l'exemple d'une télévision locale parisienne. Il a expliqué que l'investissement de départ s'élevait environ à 200 millions de francs, et que l'espoir de rentabilité n'intervenait pas avant au moins six ans. Il a souligné que les chaînes locales n'échappaient pas aux grands combats d'audience que représentent les créneaux horaires 18-20 heures et 21-22 heures. Pour des raisons de rentabilité, les télévisions locales ne peuvent se limiter à une audience de journée dont les programmes sont dédiés aux inactifs.

En réponse à M. Alain Joyandet qui s'interrogeait sur la nécessité d'appliquer les standards nationaux aux télévisions locales, M. Jean-Pierre Cottet a expliqué que la paysage audiovisuel français permettait la création d'une télévision différente mais aucune chaîne ne peut se passer de ressources publicitaires.

Abordant -à la demande de M. Alain Joyandet- la question de l'entrée de nouveaux acteurs dans la télévision numérique, M. Jean-Pierre Cottet a indiqué qu'ils s'installeraient vraisemblablement dans le secteur de la télévision locale par le biais du réseau interville. Ces nouveaux projets auront besoin de mesures d'accompagnement législatives et réglementaires, ainsi que de partenaires locaux. Au cours de la nécessaire transition technique, ces nouvelles chaînes ne bénéficieront pas de leur diffusion simultanément en numérique et en analogique contrairement aux chaînes historiques. Il a toutefois souhaité que la transition ne soit pas trop longue.

En réponse à M. Claude Belot, M. Jean-Pierre Cottet a abordé la question de l'interactivité de la télévision et a défendu la technique du numérique terrestre. Il a expliqué que la diffusion par satellite ne permettait pas une grande interactivité car le retour des informations n'est guère possible.

Il a plaidé en faveur de la substitution de l'analogique par le numérique hertzien pour des raisons politiques d'une part. En effet, l'Etat conserve la possibilité de maîtriser l'émission du signal, ce qui n'est pas le cas avec le satellite. Les diffuseurs ont le choix d'émettre à partir d'un pays étranger. D'autre part, la diffusion hertzien permet de rendre les postes de télévision " portables ", car l'antenne disparaît. Cette possibilité rendrait possible la diffusion dans les moyens de transport et engendrerait une modification des modes de consommation.

Commentant l'exemple donné par M. Claude Belot, qui faisait allusion à une expérience québécoise de diffusion en boucle d'un programme local quotidien numérique, M. Jean-Pierre Cottet a émit des voeux d'une plus grande richesse des programmes des futures télévisions locales françaises.

Audition de M. Jean Drucker

Président directeur général de M6

Mardi 22 juin 1999

M. Jean Drucker a tout d'abord retracé l'histoire du service public de l'audiovisuel au cours des dernières années. Il a remarqué que, lors de la privatisation de TF1, les chaînes publiques n'avaient pas été dotées d'un exécutif stable et qu'elles n'avaient pas reçu d'objectifs clairs. Les chaînes privées ont bénéficié d'une grande stabilité de leurs équipes dirigeantes ; cette pérennité -que les politiques revendiquent pour conduire leur action- est également nécessaire aux entreprises publiques.

Il s'est montré inquiet sur l'avenir de France 2 estimant que la prochaine loi sur l'audiovisuel constituerait pour la chaîne sa dernière chance tant la concurrence est rude (chez les moins de 50 ans l'audience du journal de M6 est supérieure à celle de France 2 ).

Il a critiqué le lancement concomitant du plan câble et d'une chaîne de télévision à péage sur le réseau hertzien, le succès de cette dernière expliquant l'échec du premier.

Il a souligné que la création d'Arte avait engendré une fuite des programmes culturels ou intellectuels vers cette chaîne aux dépens de France 2. Dans l'hypothèse d'une privatisation, France 2 lui a semblé mieux placée que France 3. Il a redouté cette perspective, en raison notamment des répercussions très néfastes sur le marché publicitaire.

A l'invitation de M. Claude Belot , M. Jean Drucker s'est ensuite livré à une analyse des évolutions technologiques récentes et à leur impact sur le paysage audiovisuel français. En premier lieu il a évoqué le succès dans notre pays des bouquets diffusés par satellite. Il a observé que les chaînes thématiques, à vocation culturelle, coûtent chères à produire, alors qu'elles ne connaissent pas de véritable succès d'audience ; cependant, elles représentent un investissement pour l'avenir et pourront constituer, des programmes destinés à des chaînes diffusées en numérique hertzien.

Il s'est ensuite interrogé sur les intentions du gouvernement dans ce secteur, qui, de façon contradictoire, semble favorable au développement du numérique hertzien tout en laissant distribuer des fréquences analogiques en province, voire à Paris. M6 réalise avec succès des décrochages régionaux au cours de ses journaux d'information. La chaîne collabore avec des grands quotidiens régionaux tels que Sud Ouest pour la région de Bordeaux. Il a regretté que ces mêmes quotidiens aient des velléités de création de chaînes télévisées de plein exercice.

En réponse à M. Claude Belot qui l'interrogeait sur les nouvelles technologies de diffusion et sur l'avenir du câble en France, M. Jean Drucker a expliqué que l'environnement français semblait favorable au développement du numérique hertzien, encouragé par la société Télédiffusion de France (TDF) et l'industrie électronique qui voit là l'occasion d'un renouvellement des postes de télévision.

Il a répété qu'à son sens le câble était un échec en France et que le réseau actuel servirait sans doute demain à autre chose qu'à la diffusion de chaînes de télévision.

Il a remarqué que la communication est une industrie de l'offre. Les téléspectateurs n'ont pas besoin fondamentalement de nouveaux programmes, mais ils en ont simplement envie. Dans ces circonstances, le prix devient une donnée subjective, non discriminante, sauf lorsque la concurrence voit le jour. C'est la raison pour laquelle les Français assistent aujourd'hui à une bataille serrée, au niveau des prix, entre TPS et Canal satellite.

M. Jean Drucker s'est ensuite exprimé au sujet de l'amendement " Mathus " adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, au cours de la discussion de la loi relative à la liberté de communication. Cette disposition tend à rendre nulle l'exclusivité que possède TPS, de diffuser sur son bouquet les chaînes France 2 et France 3. Il a plaidé pour le maintien de l'actuelle exclusivité, au moins pour un temps. TPS ne dispose actuellement que de la moitié des abonnés de Canal satellite, et a besoin -afin de conforter son lancement commercial- de cet atout. Il a indiqué qu'en cas d'adoption de cet amendement dans le texte définitif de la loi, TPS continuerait à diffuser ces chaînes sur son bouquet.

En réponse à M. Yann Gaillard qui évoquait les travaux de M. René Trégouët, selon lesquels l'avenir de la télévision passerait par le choix donné aux téléspectateurs de sélectionner leurs propres programmes et le développement de l'interactivité, M. Jean Drucker , sans exclure ce nouveau marché, s'est montré optimiste sur l'avenir des chaînes généralistes et la coexistence des deux systèmes.

Pour conclure il a plaidé pour une concentration des entreprises de communication françaises, estimant que leur taille, était à l'heure actuelle, trop petite comparée aux groupes anglo-saxons. A titre d'exemple, il a indiqué que la capitalisation boursière de Canal Plus était inférieure aux bénéfices d'Intel.

Audition de Messieurs Jacques Espinasse , Directeur général et Gilles Maugars, directeur technique et informatique de Télévision par satellite (TPS) ainsi que de Monsieur Bernard Prades, délégué général de Suez-Lyonnaise

Mercredi 15 septembre 1999

M. Bernard Prades a tout d'abord retracé brièvement l'historique du développement du câble en France. Il a rappelé que le lancement du câble en tout fibre optique en France avait été un échec. On a d'abord rencontré des difficultés techniques. Ensuite le démarrage de la commercialisation de TV Câble en décembre 1986 s'est déroulé dans de mauvaises conditions, tant du fait du lancement simultané de Canal + et de deux chaînes hertziennes gratuites que des relations délicates avec France Télécom. Par ailleurs, France Télécom, n'a pas favorisé le développement technique de l'accès à Internet par le câble. L'entreprise publique ne souhaite se voir concurrencée sur la boucle locale dont elle détient le monopole. Il a par ailleurs regretté que l'autorité de régulation des télécommunications peine à obtenir la levée de ce monopole. Il a conclu en se déclarant convaincu que le câble constitue la vraie " autoroute de l'information " de demain.

M. Claude Belot a fait remarquer qu'une large partie du territoire national serait exclu de cette autoroute. M. Bernard Prades a expliqué que seules les entreprises - environ 20% de clients potentiels - auraient l'utilité de l'énorme débit qu'offre le câble, les particuliers n'auront l'usage que du débit, déjà important, de l'ADSL. Il a précisé qu'il était toujours possible d'installer un câble pour une entreprise qui serait située dans une zone géographique isolée.

M. Jacques Espinasse , a ensuite précisé que les malheurs du réseau câblés français n'étaient pas à l'origine du succès de la télévision par satellite. Il l'a attribué à la géographie de notre pays et la faible densité de population constatée dans certaines régions qui ne permet pas une généralisation des branchements dans des conditions économiques raisonnables. Il a indiqué, qu'en terme de coût, la diffusion par satellite était en France, la meilleure marché. Il a également rappelé que l'attribution à Canal Plus d'un réseau crypté analogique, la création de la Cinq et M6, de façon concomitante au lancement du plan câble, n'avaient pas favorisé sa réussite.

M. Jacques Espinasse a ensuite retracé l'histoire de TPS, rappelant que sa création avait eu lieu en 1996 et que sa diffusion était assurée par le satellite Eutelsat. Il a indiqué que les pertes cumulées s'élèveraient au 31 décembre 1998 à 1,9 milliard de francs. Le chiffre d'affaires pour 1999 est estimé à la même somme, et les pertes pour cette même année à 900 millions de francs. Le seuil de rentabilité sera atteint lorsque TPS comptera 1,3 million d'abonnés. Elle en comptait - en septembre 1999- 800 0000.

Abordant la composition du bouquet M. Jacques Espinasse a rappelé que l'exclusivité faite à TPS, pendant 10 ans, de diffuser les chaînes publiques avait été remise en cause par un amendement du député Didier Mathus. Il a souhaité conserver cet avantage -tout en reconnaissant que la durée initiale pourrait être réduite- ce qui lui paraît d'autant plus nécessaire que les chaînes thématiques du service public font elles aussi partie du bouquet.

Audition de Monsieur Bertrand Larrera de Morel
Président de l'Institut de Financement du Cinéma et des Industries culturelles (IFCIC)

et de MadameElisabeth Flüry-Hérard
directeur général

Mercredi 15 septembre 1999

M. Bertrand Larrera de Morel a expliqué que le rôle de l'IFCIC consistait à alléger les risques pris par les banques lorsqu'elles financent des productions audiovisuelles, ou des projets culturels. Le plus souvent ce sont des productions cinématographiques ou des programmes destinés à la télévision.

Il a indiqué qu'à une époque, le financement de ce type de production par le capital risque, avait été tenté mais sans succès. C'est la raison pour laquelle le système de garantie qu'apporte l'IFCIC, reste aujourd'hui l'un des moyens les plus efficaces pour permettre le montage financier des opérations.

M. Bertrand Larrera de Morel a ensuite expliqué, que le plus souvent, le financement d'un film était assuré à 60 % par les chaînes de télévision dont Canal Plus, et le reste partagé entre le Centre national du cinéma -20 % environ-, les fonds propres du producteur, les distributeurs.

Le risque majeur de ce type d'industrie réside dans l'éventualité que le produit ne soit pas livré, ceci est très rare. En effet la raison la plus courante pour laquelle une livraison ne serait pas effectuée est liée au manque d'argent en cours de tournage ; dans ce cas les banques n'hésitent pas à consentir un prêt complémentaire, évitant ainsi de perdre l'ensemble des fonds engagés précédemment. L'IFCIC garantit le nouveau prêt.

M. Bertrand Larrera de Morel a expliqué que ce dispositif permettait de pré-financer la production.

Abordant la question du financement de ce secteur, Mme Elisabeth Flüry-Hérard a indiqué que les SOFICA représentaient 180 millions de francs et que le reste, -environ 2,2 milliards de francs- provenaient des acteurs du secteur. Elle a précisé que l'IFCIC garantissait le capital à l'exclusion des frais d'agios. Ce sont les banques, et non les producteurs qui bénéficient de cette garantie. A titre indicatif, elle a estimé à 638 millions de francs le montant des garanties consenties en1998.

Sur cette enveloppe, 4 à 10 millions présentent des risques sérieux.

M. Bertrand Larrera de Morel a ensuite indiqué que le taux de sinistre s'élevait à 1 ou 2 % des crédits accordés. Il a expliqué que des assureurs britanniques avaient tenté de fournir le même service que l'IFCIC sur notre territoire. Ce fut sans succès. Il a émis l'idée de relancer le capital risque sur ce secteur, ce qui supposerait une forte sélection. Il a expliqué que huit films sur dix n'étaient pas rentables, et que sans les fonds versés par les chaînes de télévision, la production française n'existerait plus.

Madame Elisabeth Flüry-Hérard a signalé notamment la faiblesse des exportations des productions françaises. Cette faiblesse est due à plusieurs causes :

- domination de masse du film anglo-saxon, et surtout concurrencé sur les marchés exports par les productions locales. Entre les deux, le film français ou européen trouve de moins en moins sa place, à quelques exceptions près comme " le 5 ème élément " ou " Astérix et Obélix " ;

- en ce qui concerne l'audiovisuel, les problèmes viennent des formats pratiqués en France -les films de 90 minutes ne correspondent pas aux standards internationaux- et de l'effet volume : pour vendre à l'étranger, il faut pouvoir proposer des séries très longues, que la faiblesse quantitative de notre production -handicapée par des diffuseurs moins riches que ceux de nos voisins- nous interdit de proposer à la vente ;

- en ce qui concerne les films, la solution est sans doute à chercher du côté d'une adaptation en amont aux standards du marché international d'une partie de la production française : pour vendre, il faut d'abord concevoir pour le marché international. Cette ambition n'est pas incompatible avec le développement d'un secteur de films d'art et d'essai vivant, secteur qui constitue aujourd'hui une réussite, du point de vue artistique, de la production française. Il faut cependant comprendre que ces deux secteurs n'ont pas le même public, ni la même économie, ni la même commercialisation.

D'une façon générale, elle a souligné que l'essor du secteur de la production ne pourrait provenir que du renforcement de la capacité financière des producteurs indépendants, aujourd'hui trop faibles pour pouvoir se développer dans le moyen terme. En effet, l'insuffisance chronique de fonds propres les met en situation de vulnérabilité lorsqu'ils négocient avec les diffuseurs. Ils gardent, du coup, très peu de droits sur des oeuvres qu'ils produisent, et ne peuvent dégager, au surplus, qu'une marge minimale sur la production. Ainsi se perpétue une situation de précarité financière qui leur interdit toute perspective d'entrée en Bourse, moyen normal de lever des capitaux pour une entreprise en croissance.

C'est pourquoi l'urgence paraît être de leur garantir une part de négatif -et donc de droits sur les recettes futures- plus importantes sur les oeuvres qu'ils produisent, seul moyen, pour eux, de se développer sur une base ambitieuse, et de se dégager de la dictature à court terme des besoins et des méthodes éditoriales des chaînes françaises.

Audition de Monsieur Maurice Lévy

Président du directoire de Publicis SA

Mardi 29 juin 1999


M. Maurice Lévy a débuté son propos en faisant observer que la publicité était le programme préféré des Français, tandis que M. Claude Belot évoquait l'idée de " coupure-souillure " qui sous-tend le nouveau projet de loi sur la liberté de communication.

M. Maurice Lévy s'est montré dubitatif sur les errements de la politique gouvernementale depuis de nombreuses années, et ce quelle que soit l'appartenance politique, en matière de définition de service public de l'audiovisuel. La mise en concurrence de France télévision avec TF1 a entraîné un renchérissement du coût des programmes et donc un accroissement du financement par la publicité. Le gouvernement n'a jamais clairement privilégié la qualité ou l'éducation et a toujours hésité entre rentabilité et Audimat, au détriment de la notion de service public.

Evoquant la décision du gouvernement de diminuer l'espace réservé à la publicité sur les chaînes publiques, il a jugé cette proposition absurde et surtout regretté que le vrai problème ne soit pas abordé et qu'aucune décision concernant les lignes éditoriales n'aient été prises. Les dirigeants de l'Audiovisuel Public ne se voient pas confier une mission de projet industriel ou un cahier des charges précis. Il a également déploré l'absence de recherche dans le secteur du numérique. Il a remarqué que cette nouvelle loi faisait rejaillir dans l'inconscient collectif le fantasme de l'ancienne ORTF (sans la radio toutefois).

M. Maurice Lévy a ensuite analysé les conséquences de cette nouvelle donne pour le marché de la publicité. Inéluctablement, la limitation des écrans publicitaires sur les chaînes publiques va entraîner un renchérissement du prix de l'espace publicitaire à la Télévision. Les chaînes privées n'accroîtront probablement pas le temps réservé à la publicité mais simplement leurs prix. L'espace, sur les chaînes publiques, sera vraisemblablement redistribué tout au long de la journée au bénéfice des heures de nuit et des heures de moindre écoute dans la journée : les recettes baisseront donc mais dans une proportion probablement moindre que la baisse du temps.

Plusieurs solutions s'offrent aux annonceurs : le report partiel des investissements publicitaires sur les chaînes thématiques diffusées par le câble et le satellite et, dans une proportion beaucoup plus faible, vers la presse quotidienne et régionale. Quoiqu'il en soit, il est probable que les dépenses publicitaires consacrées à la Télévision Publique régresseront de 5 à 8% et que ces sommes là ne seront pas redistribuées.

M. Maurice Lévy a rappelé la philosophie qui avait conduit dès les années 60, les pouvoirs publics à ouvrir la télévision au marché publicitaire : favoriser l'égal accès de toutes les entreprises à ce support. Certes, depuis la disparition de la Régie française de publicité, cet état d'esprit ne règne plus réellement. Mais cette nouvelle loi -entraînant un renchérissement des coûts- privera totalement les entreprises de taille moyenne de la possibilité de promouvoir leurs produits à l'écran.

M. Claude Belot a ensuite invité M. Maurice Lévy a s'exprimer sur la dispersion de l'audience que provoque la multiplication des offres de chaînes. Celui-ci a livré les résultats d'une enquête menée par son groupe sur les souhaits d'abonnements des Français pour l'année à venir : la télévision arrive en tête. Il a expliqué que dans les pays où les chaînes thématiques étaient très implantées, les chaînes classiques conservaient 50 à 60% de l'audience. Les chaînes thématiques constituent donc un marché potentiel intéressant ; il a précisé -à titre d'exemple- que la Cinquième coûterait 120 millions de francs et Arte 150 millions de francs, si la publicité y avait sa place.

A la demande de M. Claude Belot , il a décrit l'abonné type des chaînes payantes : ce n'est pas le cadre supérieur qui le plus souvent consacre ses soirées et son temps libre à des activités culturelles et sociales, mais le cadre moyen ou l'employé qui rentre tôt de son travail, habite des zones suburbaines où les loisirs sont moins nombreux qu'en centre ville et dont les déplacements de fin de semaine sont plus rares. Il a estimé que les programmes interactifs et le développement de l'Internet (diffusion prochaine de films, commerce électronique affranchi de toute règle nationale et internationale) bénéficieront, en premier lieu, à ces mêmes catégories de consommateurs. Il a parié sur un taux de réception des chaînes câblées et diffusées par satellite d'environ 70% des ménages français à l'horizon 2005-2010.

En réponse à M. Claude Belot qui s'interrogeait sur l'avenir des grandes chaînes généralistes, M. Maurice Lévy a expliqué que TF1 se devait de conserver sa position dominante dans le but de pérenniser "la prime au leader" dont elle bénéficie à l'heure actuelle dans le domaine de la publicité. Cette volonté explique la part active jouée par la chaîne dans TPS. L'intérêt des annonceurs est d'offrir à leurs clients des audiences de plus en plus ciblées, c'est pourquoi la publicité tiendra une place non négligeable sur les chaînes payantes, même si l'audience y est plus faible. Le processus actuel ne condamne pas les chaînes de télévision généralistes mais conduit seulement à une fragmentation de l'audience. Il a rappelé que l'homme est un animal d'habitude, fidèle aux programmes et aux présentateurs qu'il connaît.

En réponse à M. Yann Gaillard, M. Maurice Lévy a indiqué qu'Internet représentait à l'heure actuelle 0,11 % des recettes publicitaires du marché français et 2 % du marché nord américain.

A l'invitation de M. Claude Belot, M. Maurice Lévy a donné son opinion sur l'avenir des chaînes de service public. Il a approuvé la nomination de M. Marc Tessier à la tête de France Télévision. Il y a vu une possibilité pour les chaînes, de clarifier leurs lignes éditoriales, de procéder à une modernisation de leurs structures, et d'avancer dans le numérique, l'Internet et l'interactivité. Il a déploré le malaise observé entre les pouvoirs publics et leurs chaînes depuis 1968. La tentation d'intervention demeure importante et s'exprime à travers les journaux d'information. Pris de mauvaise conscience, les pouvoirs publics renoncent alors à donner des orientations sur les programmes, ce qui s'avérerait pourtant nécessaire.

Abordant les projets locaux de la Télévision Presse Régionale et sa syndication publicitaire, il s'est montré sévère quant à la réduction des coûts pour les annonceurs et le retard technique qu'engendrera le développement de la télévision locale en analogique dans la course au numérique qui est aujourd'hui engagée au niveau mondial.

Audition de M. Etienne Mougeotte

Vice-Président et directeur général de TF1

Mercredi 22 septembre 1999

M. Etienne Mougeotte a indiqué qu'il aborderait trois points, à ses yeux essentiels en matière de service public de l'audiovisuel. Il a remarqué que la question du financement ne concernait pas uniquement la France mais plus largement l'Union Européenne, qu'une confusion existait au sujet des sources et des structures de financement et enfin que des solutions équitables étaient possibles.

S'agissant du financement des télévisions publiques -qui est assuré par la publicité et la redevance- M. Etienne Mougeotte a rappelé qu'une plainte avait été déposée par TF1, auprès de la Commission européenne le 10 mars 1993. A la suite de l'arrêt rendu en première instance, le 3 juin 1999, la commission a ouvert une procédure pré-contentieuse envers la France, engageant notre pays à s'expliquer. Le gouvernement a formulé, en août 1999, un pourvoi contre cet arrêt. Les chaînes privées portugaises ont elles aussi entrepris les mêmes démarches, auprès de la Commission européenne et ont obtenu des explications de la part de leur gouvernement .

Il a souligné que l'objectif de TF1 dans cette procédure n'était pas de remettre en cause le double financement des télévisions publiques dans notre pays, mais de déterminer précisément l'affectation de la redevance et celle des recettes publicitaires. M. Etienne Mougeotte a indiqué qu'il lui semblait indispensable de consacrer les fonds provenant de la redevance à des missions de service public, et ceux provenant des recettes commerciales à des actions commerciales.

Il a ensuite abordé le problème de la confusion française -et non l'exception française- en matière de financement et de structure.

Il a regretté la concurrence, à ses yeux peu loyale, que les chaînes de service public exercent sur le marché de l'achat des programmes. Il a émis un doute quant à la possibilité qu'auraient ces chaînes, si elles achetaient avec leurs seules recettes publicitaires, de faire monter les prix comme elles le font actuellement sur certains secteurs tels que les retransmissions sportives. Il a conclu sur ce thème en démontrant que le produit de la redevance n'était guère affecté à l'achat ou la production d'émission de service public mais plutôt faire de la surenchère sur le marché des programmes.

Évoquant l'éventuelle création d'une holding -tel que le prévoit le projet de loi sur la liberté de communication- il l'a dénoncée, estimant que le bénéfice d'une telle structure constituerait pour les chaînes publiques un privilège exorbitant par rapport à leurs concurrentes privées. En effet elles seraient en possession d'un outil qui leur permettrait de mieux coordonner leurs programmes. Elles le font déjà, en diffusant par exemple le dimanche soir en première partie de soirée, un programme destiné aux téléspectateurs de moins de 50 ans sur France 2 (série " Urgences "), et un programme destiné aux téléspectateurs de plus de 50 ans sur France 3 (la série " Derrick "). Il en est de même pour les diffusions sportives à l'exemple des basculements d'une chaîne à l'autre lors de la diffusion du Tour de France ou du tournoi de tennis de Roland-Garros. M. Etienne Mougeotte s'est ému de cette situation qu'il a jugée inégalitaire au vu des mesures de nature anti-concentrationnelles imposées aux chaînes privées.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau qui s'interrogeait sur l'avenir, M . Etienne Mougeotte a ensuite exposé ses préconisations.

Il a recommandé de préciser les missions du service public de l'audiovisuel. Pour illustrer son propos il s'est interrogé sur l'opportunité pour France 2 d'avoir programmé une édition spéciale du jeu " les z'amours " au moment ou TF1 diffusait le premier épisode du téléfilm " Balzac ".

Il a revendiqué un mieux disant déontologique. A ce titre il a rappelé que le service public avait consacré une émission à une jeune infirmière ayant reconnu avoir pratiqué l'euthanasie, alors qu'elle faisait l'objet d'une procédure judiciaire. Il a insisté également sur le lourd dispositif interdisant la concentration qui pèse sur les télévisions privées. Il a souhaité une évolution dans ce domaine afin de permettre aux chaînes privées de prendre des participations significatives dans des entreprises de communication.

Il a plaidé pour un allégement des contraintes qui séparent le producteur du diffuseur, pour un assouplissement des modalités d'application des quotas de diffusion et pour une réadaptation des obligations de production. S'agissant d'oeuvres co-produites par les chaînes de télévision, M. Etienne Mougeotte a rappelé que seules trois diffusions en quatre ans étaient autorisées. Ensuite les droits reviennent au producteur. Il s'est montré inquiet quant aux dispositions contenues dans le projet de loi sur la liberté de communication à ce sujet. Il a rappelé qu'il n'existait plus en France de producteurs indépendants et qu'ils était tous adossés à des chaînes de télévision.

Il a souhaité qu'une différence de statut juridique soit instaurée entre des séries classiques et des productions plus importantes du type " Monte-Cristo " pour lesquelles l'investissement de la chaîne est considérable.

M. Etienne Mougeotte a ensuite abordé les évolutions liées au mode de diffusion numérique. Il a exprimé le désir de TF1 d'être présente sur Internet. Il a indiqué que 100 millions de francs y seraient consacrés en 2000. Le développement de l'interactivité fait également l'objet d'études. Les recettes escomptées pour 1999 pour la seule activité Internet, pourraient atteindre 6 millions de francs. Il a indiqué que la politique menée par TF1, dans le but de conserver sa place de leader dans le paysage audiovisuel français, était de produire le plus grand nombre de magazines, de documentaires et de programmes en général, afin d'être prêt à créer des chaînes à haute valeur ajoutée.

En réponse à M. Claude Belot qui l'interrogeait sur la percée du numérique M. Etienne Mougeotte a indiqué que la chaîne de production de TF1 serait entièrement numérisée à la fin de l'année 2000 ; pour l'information les cassettes devraient totalement disparaître entre 2001 et 2002. Il a précisé que les locaux de LCI seraient transférés vers ceux de TF1, afin de rationaliser la gestion. Les résultats financiers de LCI seront équilibrés, en 1999, comme prévu dans son business plan. M. Etienne Mougeotte a expliqué que TF1 possédait une participation d'un tiers dans le capital d'Eurosport. En outre, trois chaînes sont prêtes à être lancées : l'une mini-généraliste (TF2), l'autre destinée à la jeunesse et enfin une dernière consacrée aux séries télévisées. Le lancement des chaînes se fera sur le câble et le satellite dans un délai qui reste à définir.

Il a indiqué à M. Claude Belot que la télévision locale n'était pas la vocation de TF1. Il a précisé que le cahier des charges ne le permettait pas et a estimé que la presse quotidienne régionale lui semblait la plus à même de réaliser ce type de projet.

Audition de M. Jean-Claude Moyret

Directeur de l'audiovisuel extérieur et des techniques de communication
du Ministère des Affaires étrangères

Mercredi 23 juin 1999

M. Jean-Claude Moyret a tout d'abord présenté les objectifs de son ministère dans le domaine de l'audiovisuel. Ceux-ci s'articulent autour de quatre thèmes, hors Internet.

Le premier concerne la partie juridico-multilatérale et recouvre les questions européennes et les questions internationales liées à l'organisation mondiale du commerce (OMC). En effet, les textes européens comme ceux de l'OMC ont une forte incidence sur le secteur audiovisuel.

S'agissant des premiers, une directive européenne a fixé un corpus minimum à respecter mais celui-ci ne se traduit pas par un système juridique égalitaire. En fait, le système est plus favorable à Londres qu'à Paris car la directive y est bien appliquée. S'agissant de la télévision, la liberté de réception est la règle mais l'Etat d'émission doit faire respecter la directive. Ce mécanisme européen est difficile à mettre en oeuvre et difficile à faire respecter, plus particulièrement, avec le satellite. Cette directive de 1989 fera l'objet d'une nouvelle négociation en 2002 sur les quotas de diffusion. L'autre dossier concerne la négociation sur les services dans le cadre de l'OMC. A partir de 2000, les négociations vont reprendre avec les américains. Ils vont tenter de revenir sur l'exception culturelle qui concerne l'audiovisuel, en s'appuyant sur la diffusion par Internet et la convergence technologique.

M. Claude Belot a alors souhaité savoir comment réguler la diffusion sur Internet.

M. Jean-Claude Moyret a répondu que cette régulation serait possible dans le cadre de la lutte contre le piratage. En effet, lorsque Internet diffusera de l'image et des films, les grandes firmes de production devront protéger leurs intérêts financiers. Les américains vont trouver un système de cryptage qui permettra d'identifier l'acte de consommation et d'empêcher la duplication illicite du produit chargé.

M. Jean-Claude Moyret a ensuite abordé le deuxième axe d'intervention du ministère qui concerne la vente de programmes. A cet égard, il a rappelé que France télévision pouvait vendre pendant 3 ans ses productions et qu'au-delà de ce terme, elle devait remettre ces programmes à l'INA. Cependant, cette règle ne s'applique pas lorsqu'il s'agit d'une coproduction avec un opérateur privé, ce qui est très souvent le cas pour les oeuvres de fiction. Il a rappelé qu'en matière de diffusion internationale, le système français des droits d'auteur constituait un handicap par rapport au système américain de copyright. Il a cependant indiqué que la France vendait bien ces programmes, soit 1,4 milliard de francs par an. Les ventes de documentaires et les dessins animés progressent de plus de 10 % et sont les produits les plus porteurs, suivis par les oeuvres de fiction. Un rapport de M. Soloveicik a récemment fait un bilan sur les exportations des contenus audiovisuels et multimédia.

S'agissant de l'exportation de cinéma français, il existe une réelle volonté de soutenir son mode financement spécifique. Malheureusement, les ventes stagnent à 400 millions de francs par an depuis plusieurs années.

Le système de répartition des aides est subtil et très difficile à réformer d'autant plus que les intérêts divergent entre ceux qui sont plutôt liés aux Américains et ceux qui veulent un financement unique et public. L'ensemble de ces questions est traité par M. René Bonnel dans son rapport d'audit sur l'avenir d'Unifrance.

Le troisième axe de réflexion concerne les opérateurs publics, RFI et ses filiales, et plus particulièrement leur mode de diffusion. L'évolution technologique a, en effet, conduit les auditeurs à déserter l'onde courte au profit de la bande FM. L'onde courte a donc été arrêtée sur l'ensemble de l'Europe, l'Amérique latine et l'Amérique du Nord. Il a également indiqué que les moyennes ondes allaient bientôt disparaître. Dans certaines zones géographiques, la diffusion par Internet devrait prendre sous peu, le relais. Il a expliqué qu'à terme, ce mode de diffusion serait également utilisé par la télévision.

Interrogé par M. Claude Belot sur la diffusion en Espagne des chaînes publiques françaises, M. Jean-Claude Moyret a indiqué que La cinquième, Arte et TV5 sont diffusées sur Eutelsat, Astra diffuse pour sa part TV5 en mode numérique.

Il a rappelé que d'autres chaînes sont diffusées, avec plus ou moins de succès, à l'étranger. Si TF1 n'a pas réussi son implantation en Afrique du Sud ou en Hongrie, tel n'est pas le cas de Canal Plus (en Espagne et en Europe de l'Est).

Evoquant son quatrième axe, les incitations envers les opérateurs privés à lancer des chaînes sur les bouquets numériques, M. Jean-Claude Moyret a regretté le peu d'attrait des opérateurs français pour le secteur international.

En réponse à M. Claude Belot qui l'interrogerait sur la diffusion des programmes en numérique hertzien, M. Jean-Claude Moyret n'a pas jugé indispensable l'adoption de cette technologie pas les grandes chaînes françaises, au regard du coût d'une telle opération, sauf si elles y sont obligées par la concurrence.

Pour conclure, il a indiqué que quelques postes d'attachés audiovisuels seraient créés -en Pologne, en Afrique de l'Ouest et au Portugal entre autres- afin de promouvoir le secteur audiovisuel français à l'étranger. Il faudra ainsi faire face à la suppression des postes occupés par les volontaires du service national à l'étranger.

Audition de M. Fabrice Nora

Directeur général adjoint du groupe Amaury

Mardi 22 juin 1999

M. Fabrice Nora a indiqué qu'en sa qualité de membre du directoire du groupement d'intérêt économique (GIE) de " Télévision Presse Régions " (TPR), il était un représentant des intérêts des 17 quotidiens régionaux, à l'exception de ceux de la région de Tours (NRCO) et de Rennes (Ouest France). Il a indiqué l'intérêt de la presse quotidienne régionale pour la télévision locale, et son désir -exprimé depuis 1998- de développer ce type de média. Cette volonté s'est déjà concrétisée par une collaboration avec M6 pour l'élaboration de cinq des dix décrochages locaux effectués par la chaîne dans ses journaux télévisés et par une déclaration commune d'être opérateur de télévision locale dès le lancement d'appel à candidature.

M. Jean-Charles Bourdier , directeur du développement du Républicain Lorrain, en tant que membre du directoire du GIE " TPR " a précisé que, depuis un récent arrêt du Conseil d'Etat, le Conseil supérieur de l'audiovisuel était tenu d'effectuer un appel d'offres sur les fréquences hertziennes terrestres libres dès lors qu'un intervenant en faisait la demande. Cette situation n'est pas sans rappeler la naissance des radios libres dans les années 80. La presse quotidienne régionale a, suite à ce changement, effectué des études de marché dont il ressort que les télévisions locales pourraient représenter jusqu'à 800 millions de francs de recettes publicitaires.

M. Jean-Charles Bourdier a fait valoir que, pour être économiquement viables, les chaînes de télévision locales se trouvaient dans l'obligation de faire appel au marché publicitaire national. C'est la raison pour laquelle une nouvelle syndication publicitaire serait mise en place, à l'exemple de ce que pratique la presse quotidienne régionale, avec sa formule 66-3. Ce système permettrait aux annonceurs de diffuser leurs spots sur l'ensemble des stations locales, tout en n'ayant qu'un seul interlocuteur commercial et technique. Pour illustrer son propos, il a cité l'exemple les chaînes TLT (à Toulouse) et TLM (à Lyon), qui, ne bénéficiant pas de cette syndication publicitaire, perdent chacune plus de 10 millions de francs par an. En d'autres termes, il ne saurait y avoir d'avenir pour des télévisions d'expression locale qui tireraient leurs ressources du seul marché publicitaire local.

Il a informé le groupe de travail que TPR avait fait parvenir une lettre ouverte à Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture, lui demandant de ne pas geler l'attribution par le Conseil supérieur de l'audiovisuel des fréquences hertziennes terrestres. En effet, le ministère aurait l'intention de favoriser le développement de la diffusion en numérique des programmes.

M. Claude Belot , président du groupe de travail a fait remarquer que le passage à la diffusion numérique de programmes analogiques lui semblait une évolution technologique inéluctable en raison de la qualité des retransmissions, de la multiplicité des programmes proposés et de l'interactivité que permet cette technique.

M. Jean-Charles Bourdier a rappelé que les quotidiens régionaux regroupés dans " TPR " étaient défavorables au développement du numérique hertzien. Leur demande d'obtenir des fréquences analogiques avait pour objet, d'ores et déjà d'être présents sur le marché de l'image et donc d'être partie prenante au moment de la mise en place, dans les 3 à 5 ans à venir, des réseaux numériques sur l'ensemble des grandes agglomérations françaises.

M. Gilles Crémillieux, directeur de la diversification, a ensuite apporté son témoignage sur la démarche du groupe La Montagne Centre-France. Un dossier, en vue d'obtenir une fréquence hertzienne sur l'agglomération de Clermont-Ferrand, est en effet à l'étude. Ce choix a été justifié par le constat du recul de la pénétration de l'écrit, sous toutes ses formes, notamment dans les agglomérations, au sein des catégories sociales les plus défavorisées et chez les plus jeunes. A ses yeux, la télévision locale représente le moyen supplémentaire pour pénétrer dans tous les foyers afin de rétablir cette relation citoyenne et de favoriser l'intégration de tous en encourageant particulièrement la vie associative.

Le projet comporte en multidiffusion un programme d'informations (remis à jour régulièrement), des magazines traitant de la vie des quartiers, de l'actualité sportive, de la vie culturelle et des aspects économiques et sociaux. Le budget prévisionnel s'élève à 12 millions de francs par an, trente emplois seraient créés, dont onze de journalistes. Les rédactions du quotidien et de la chaîne de télévision seront distinctes afin de garantir le pluralisme. Enfin, les charges seraient couvertes par la publicité -à hauteur d'un tiers par la publicité locale, les deux autres tiers ne pouvant être apportés qu'à travers une commercialisation nationale commune d'une quinzaine de télévisions locales de même format-.

M. Fabrice Nora a regretté le manque de lisibilité de la volonté gouvernementale. Si elle allait dans le sens d'un gel de la distribution des fréquences hertziennes, les petits projets seraient handicapés : le coût des programmes numériques s'avérant être élevé, seules les grandes chaînes nationales, -dont les recettes publicitaires sont aujourd'hui saturées-, pourraient conquérir ce nouveau marché. Il a insisté sur la nécessaire libéralisation du secteur afin de laisser se développer l'esprit d'entreprise.

M. Jean-Charles Bourdier a, pour conclure, remarqué que les opérateurs américains s'intéressaient de très près au réseau câblé français. Il a déploré que la problématique autour du câble, en tant qu'infrastructure de base dans le cadre du développement des nouvelles technologies, n'ait pas encore vraiment été abordée en France.

Audition de M. Jérôme Seydoux

Président du Groupe Pathé

Mercredi 22 septembre 1999

M. Claude Belot a tout d'abord interrogé M. Jérôme Seydoux sur la situation du secteur audiovisuel public français et l'évolution du groupe Pathé.

M. Jérôme Seydoux, après avoir indiqué qu'il n'avait pas qualité pour se prononcer sur la situation du secteur public, a déclaré que la télévision était un axe majeur du développement de Pathé.

Pathé possède deux chaînes de télévision : Voyage et Pathé Sport 12( * ) . M. Jérôme Seydoux a rappelé que son groupe travaillait à développer d'autres chaînes sur le câble et le satellite et souligné qu'il saisirait les opportunités qui apparaissent aujourd'hui pour les opérateurs indépendants de renforcer leur présence, qu'il s'agisse du lancement du numérique terrestre ou du renouveau des télévisions locales.

En ce qui concerne la production audiovisuelle, M. Jérôme Seydoux a indiqué que Pathé Télévision, au sein du groupe, produit des fictions et des documentaires pour le service public aussi bien que pour les chaînes privées. Il a indiqué que ce métier est, en France, difficile et peu rémunéré.

Interrogé sur la chaîne Pathé Sport, M. Jérôme Seydoux a indiqué que Pathé avait racheté l'année dernière AB Sport au groupe AB. Un effort important a été consenti depuis lors pour cette chaîne, désormais dénommée Pathé Sport. Elle dispose d'un budget d'une centaine de millions de francs. Sa programmation est aujourd'hui fortement renforcée par les droits dont elle dispose dans des disciplines telles que le basket, le handball, le volley-ball qui ont un grand attrait pour le public, notamment les jeunes.

M. Claude Belot a interrogé M. Jérôme Seydoux sur les évolutions du secteur audiovisuel.

M. Jérôme Seydoux a estimé que l'enjeu déterminant aujourd'hui est le passage au numérique de la diffusion hertzienne, qui va permettre de multiplier par 5 ou 6 le nombre des chaînes que pourront recevoir tous les foyers avec leurs postes et leurs antennes actuels, moyennant seulement l'ajout d'un décodeur de faible coût. Le rythme de sa mise en place n'est pas connu, mais ce changement majeur est de toute façon inéluctable.

M. Jérôme Seydoux a indiqué que le numérique constituait un défi pour les chaînes hertziennes existantes, notamment du service public, qui devront réussir le passage de l'analogique au numérique.

Il a estimé qu'il ne s'agissait pas d'une menace pour la câble et le satellite, qui compte déjà de nombreuses chaînes : le numérique terrestre disposera de moins de chaînes que le satellite ou le câble, une trentaine contre deux cents environ. C'est un avantage important des systèmes actuels de diffusion (câble et satellite) sur une offre concurrente éventuelle de chaînes payantes diffusées en numérique terrestre.

M. Jérôme Seydoux a souligné enfin que le numérique terrestre ouvrait l'opportunité de faire créer des chaînes supplémentaires par de nouveaux entrants et de donner ainsi plus de choix au public et plus de débouchés à la création. La saturation actuelle des espaces et la croissance du marché publicitaire montrent que ces chaînes nouvelles, dont le nombre restera limité, seront en mesure de trouver leur financement.

M. Claude Belot a souhaité savoir si les règles sur les quotas de production française pourraient être maintenues avec ces nouvelles chaînes.

M. Jérôme Seydoux a précisé que le législateur aurait la maîtrise de la réglementation des chaînes du numérique terrestre, qu'il n'y avait pas de raison de remettre en cause, à l'occasion d'une évolution des modes de diffusion, un dispositif mis en place en faveur de la création française et européenne, qu'il pourrait cependant être nécessaire d'aménager ces règles au départ, pour les chaînes nouvelles, de façon à leur permettre de trouver leur économie.

M. Claude Belot a enfin interrogé M. Jérôme Seydoux sur les liens entre la télévision et le cinéma.

Le Président de Pathé, producteur notamment d' Astérix et Obélix contre César en 1999, a rappelé que, dans notre pays, les liens entre le cinéma et la télévision avaient été organisés d'une façon intelligente qui permet aujourd'hui à la France d'avoir la première industrie cinématographique d'Europe. Il a, plus généralement, rappelé les relations de complémentarité, et non de concurrence, qui existent entre le cinéma et la télévision : le cinéma fournit à la télévision un de ses principaux moteurs d'audience ; la télévision apporte une part déterminante au financement des films, y compris comme co-producteur.

Audition de M. Frank Soloveicik

Président directeur général de M5 S.A., auteur d'un rapport remis à M. Jacques Dondoux, ministre du commerce extérieur, sur l'exportation des contenus audiovisuels et multimédia

Jeudi 24 juin 1999

En introduction, M. Frank Soloveicik a rappelé qu'il était l'auteur de deux rapports consacrés à l'audiovisuel, le premier avait été écrit pour le ministère d'Alain Carignon en 1992, le second à la demande de Jacques Dondoux, actuel ministre du commerce extérieur. Il a remarqué que la question de l'exportation des programmes audiovisuels relevait de compétences transversales au sein du gouvernement.

M. Claude Belot a rappelé son attachement à la présence française à l'étranger, et a remarqué l'incapacité de notre pays à pallier la faiblesse de ce secteur. A titre d'exemple, il a cité la société Expand- productrice du célèbre jeu Fort Boyard- qui réalise 640 millions de francs de chiffre d'affaires à l'exportation, et qui est quasiment la seule en France à le faire.

M. Frank Soloveicik a expliqué que les professionnels français ont longtemps opposé à la noblesse de l'art la vilenie du marché. Ils se posent la question de savoir si le film est une oeuvre ou un simple produit commercial. M. Frank Soloveicik a expliqué, qu'à son avis, le film possède ces deux caractéristiques.

Il a mis en exergue la qualité des moyens mis en oeuvre par les pouvoirs publics afin d'aider le secteur en ce qui concerne le contenu des productions. Il s'est toutefois montré admiratif vis-à-vis de la politique audiovisuelle publique canadienne, qui a permis à sa composante québécoise de préserver son exception culturelle et sa langue. Les Canadiens ont su inventer une vraie industrie audiovisuelle dont la capitalisation boursière est très importante. M. Frank Soloveicik a évoqué le fort développement du multimédia au Canada et le nouveau programme d'aide à l'exportation des programmes mis en oeuvre pour un montant de 200 millions de francs.

M. Frank Soloveicik a ensuite plaidé pour un accroissement des incitations fiscales en France et une politique d'aide aux "start-up", afin de relancer le secteur de la production. Évoquant le compte de soutien, il a indiqué que de telles incitations seraient susceptibles d'entraîner un effet d'aubaine : doté de 40 millions de francs à l'heure actuelle, son montant pourrait s'en trouver multiplié par cinq.

En réponse à M. Claude Belot qui s'interrogeait sur les problèmes posés par les droits d'auteurs lorsqu'un film est vendu à l'étranger, M. Frank Soloveicik a répondu que la circulation des oeuvres pose le problème de la patrimonialité, de l'usufruit et des droits. Les producteurs français manquent d'argent et de ce fait ne peuvent s'approprier leurs droits. Aux Etats-Unis la question ne se pose pas : les producteurs sont automatiquement propriétaires des droits. Un effet pervers ressort de la conception française du droit d'auteur : à force de vouloir protéger les acteurs, les ventes de film à l'étranger s'affaiblissent, et finalement les acteurs ne touchent plus de droits.

M. Frank Soloveicik a également plaidé, dans le cadre de l'Organisation Mondiale du Commerce, pour une renégociation des droits des distributeurs au Québec. Dans ce pays le distributeur ne peut être étranger.

Puis à la demande de M. Claude Belot , il a évoqué les techniques de traductions et de doublage. Il a indiqué que le Centre national du Cinéma aidait les producteurs dans ces opérations coûteuses. Il a exposé l'intérêt du sous titrage, qui est peu coûteux et permet de conserver à l'oeuvre son authenticité. Quant au doublage, plus onéreux, il se fait partout sauf chez les anglo-saxons. Il a plaidé pour une certaine modestie face aux diffusions, estimant que le passage, à l'étranger, d'un film français sous titré en deuxième partie de soirée est toujours préférable à une absence de passage. Il a estimé que la langue n'était pas un obstacle à la diffusion.

Évoquant ensuite la commercialisation des productions françaises des télévisions publiques, M. Frank Soloveicik a expliqué qu'elles étaient la propriété de l'Institut National de l'Audiovisuel trois ans après leur sortie. Avant ce délai elles restent dans les chaînes, qui s'occupent elles mêmes de leur commercialisation. Il a expliqué que les productions et, que le plus souvent, les programmes faisaient l'objet de coproduction avec des acteurs privés.

Il a ensuite suggéré plusieurs initiatives afin de développer l'exportation de programmes français. Tout d'abord, la Coface pourrait s'investir dans ce domaine et octroyer des prêts ; le ministère des finances pourrait également mieux intégrer l'idée que la rentabilité des biens immatériels a de l'intérêt, et mener dans ce sens ces discussions au sein de l'OMC. L'IFCIC a également besoin d'une réforme afin de rendre plus efficace le fonds dont il est doté. Il a également plaidé en faveur d'un recours au "parterre", comme cela se pratique aux Etats-Unis. Il déploré le manque de formation professionnelle des jeunes dans le métier de la commercialisation des programmes. Afin d'y remédier, il a expliqué qu'un contrat de prospective était en cours de réalisation en partenariat avec les grandes écoles de commerce. Il a également envisagé, dans la perspective de la fin du service national -et donc de la fin du recrutement des Volontaires Service National à l'étranger (VSNE)- un nouveau système de stage pour les jeunes français dans les entreprises audiovisuelles étrangères. Il a enfin regretté le manque de rapports commerciaux entre les Européens, et plaidé pour que se tiennent des Etats généraux de la communication au cours de la prochaine présidence française de l'Union européenne.

Audition de M. Bernard Spitz

Maître des requêtes au Conseil d'Etat
auteur d'un rapport sur la révolution numérique pour la Fondation Saint-Simon

Mardi 21 septembre 1999

M. Bernard Spitz a débuté son exposé en soulignant que la révolution numérique avait eu pour effet de substituer sur le plan économique à la distinction traditionnelle service public-privé celle de services payants - services gratuits.

Face à la numérisation le service public doit choisir entre subir, accompagner ou anticiper. La multiplication des chaînes, rendue possible par la réduction des coûts de diffusion, rend urgente l'élaboration d'une stratégie, notamment pour déterminer si l'on maintient le rôle fédérateur de la télévision publique et si l'on décide de faire payer l'utilisateur ou non pour l'accès à des chaînes thématiques supplémentaires.

A la demande de M. Claude Belot, M. Bernard Spitz a défini la mission de la télévision publique : instrument d'information, de loisir et d'accès à la culture, elle joue le rôle d'éveilleur auprès du grand public. Cette spécificité jointe au fait qu'elle n'est pas assujettie au critère unique de l'audience, plaide en faveur du maintien du service public. M. Bernard Spitz s'est prononcé en faveur d'un schéma regroupant une multiplicité de chaînes dont la programmation serait étroitement coordonnée autour d'un petit noyau de chaînes généralistes, mais il s'est demandé si la France était prête à investir dans sa télévision publique car elle y consacrait moins de moyens que ses voisins.

M. Claude Belot ayant fait état du budget de la BBC équivalent à celui de la télévision française, M. Bernard Spitz a expliqué que la BBC, dont les ressources restaient supérieures, tirait en particulier 25 % de celles-ci de ses propres recettes commerciales, le reste étant composé de recettes publiques, et qu'elle n'avait pas de recettes publicitaires. En réponse à M. Yann Gaillard , M. Bernard Spitz a reconnu que le fait de ne pas du tout dépendre des recettes publicitaires avait une incidence sur la gestion du service public bien qu'il soit ne soit pas réaliste ni légitime au regard de la bonne utilisation de l'argent public d'éliminer totalement le critère de l'audience.

La contradiction de l'audiovisuel en France tenant notamment à l'ambiguïté de son financement, la suppression de la publicité sur les chaînes publiques pourrait avoir des effets pervers sur la programmation et sur la concurrence. M. Bernard Spitz a ensuite énuméré les problèmes essentiels relatifs au fonctionnement du service public : rôle, identité, périmètre d'action (chaînes généralistes ou thématiques), nature et importance du financement, type de fonctionnement (choix des dirigeants, structuration, organisation, problèmes sociaux, etc.).

Abordant ensuite la question de la redevance dont le système de perception, par les coûts qu'il engendre et le niveau de fraude qu'il tolère, prive le budget de l'audiovisuel public d'environ 1 milliard de francs par an, M. Bernard Spitz a proposé de la collecter systématiquement en liaison avec une perception de recettes déjà existante et d'en exonérer les personnes fournissant une déclaration sur l'honneur. Cette méthode aurait l'avantage de dégager du personnel et des ressources et de réduire la fraude. M. Yann Gaillard a déclaré que la redevance représentait la borne entre le secteur public et privé et, tout comme M. Bernard Spitz , il s'est déclaré favorable à son maintien dans les circonstances actuelles.

M. Claude Belot ayant abordé la question de l'amélioration de la production audiovisuelle publique, M. Bernard Spitz a défendu les télévisions publiques qui sont certes perfectibles, mais qui assurent des programmes nationaux de qualité avec moins de moyens que leurs homologues anglais et allemand.

M. Claude Belot s'étant déclaré inquiet de la concurrence des grands groupes audiovisuels qui s'apprêtent notamment à mettre en oeuvre l'interactivité, M. Bernard Spitz a déclaré que le marché audiovisuel français comportait encore une marge d'accroissement mais que les chaînes généralistes publiques étaient condamnées à se montrer innovantes et attractives sous peine de voir leur part se réduire de plus en plus, alors que les coûts en matière de droits cinématographiques ou sportifs notamment, continuaient leur inflation.

En réponse à M. Claude Belot, M. Bernard Spitz a observé que la révolution numérique impliquait une révision générale de notre réglementation, en particulier s'agissant du système des quotas, dans la perspective de la convergence entre Internet et la diffusion de programmes.

M. Claude Belot s'étant ensuite interrogé sur l'éventualité d'une récession économique et les conséquences qu'elle aurait sur l'audiovisuel public, M. Bernard Spitz a répondu que donner la priorité à ce secteur était une question de volonté politique et que la représentation nationale avait à cet égard un rôle à jouer dans la mise en oeuvre d'une telle stratégie volontariste lors de la discussion du projet de loi de finances.

M. Claude Belot a déclaré qu'il lui semblait que les moyens étaient suffisants mais mal employés. M. Bernard Spitz a reconnu l'existence de dysfonctionnements tout en affirmant qu'ils ne devaient pas servir de prétexte à éluder les choix politiques et la mise en oeuvre d'une réforme en profondeur. La dotation de moyens supplémentaires devait être selon lui la contrepartie d'une modernisation manageriale et d'une adaptation du périmètre d'action de la télévision publique.

M. Claude Belot ayant enfin abordé la question du numérique hertzien et de ses conséquences sur les acteurs du marché de l'audiovisuel, M. Bernard Spitz a répondu qu'il aurait pour effet d'élargir la concurrence, d'où l'importance de la question des conditions d'accès à ce marché à de nouveaux opérateurs éventuels. Il a signalé comme piste de réflexion, ainsi que cela avait été étudié en Angleterre, l'instauration d'une nouvelle redevance basée sur l'utilisation d'un décodeur numérique.

Audition de M. Marc Tessier

Président directeur général de France Télévision

Mardi 14 septembre 1999

En guise de propos introductif, M. Marc Tessier a dressé un bilan satisfaisant de l'audience du service public au cours de l'été. Il a indiqué que la rentrée s'annonçait bien, France 2 ayant devancé TF1 a plusieurs reprises en prime-time.

A l'invitation de M. Claude Belot, M. Marc Tessier s'est exprimé sur l'avenir de la télévision publique. Il a jugé que les mécanismes actuels de financement conduisaient à la marginalisation du secteur public : les budgets étant votés chaque année à l'équilibre, aucun investissement significatif ne peut donc être envisagé.

Il a souligné que TF1 voit ses dépenses d'exploitation et d'investissement croître de 7 à 9 % par an, tandis que le budget de France Télévision, lui, ne progresse que de 3% environ. En effet son budget est calculé par rapport à la croissance de celui de l'Etat, alors que l'évolution du secteur audiovisuel est absolument sans rapport. Cette situation engendre de graves problèmes de gestion : la trésorerie de France 2 est négative de 400 millions.

M. Marc Tessier a expliqué que le renchérissement des droits de retransmission des programmes sportifs absorbait la totalité de l'augmentation allouée par l'Etat. Il a regretté que l'Etat ait refusé de participer à l'augmentation de capital de la société TPS ; France Télévision a dû, de ce fait, se résoudre à voir sa participation passer de 25 à 8%. Manquant de moyens, le service public ne représente que 5 % de l'offre sur le marché des chaînes thématiques, avec des chaînes consacrées à l'histoire, à la musique classique, à la fiction et aux régions.

Il a conclu en observant que la pénurie financière observée ces dernières années, a conduit la télévision publique à n'occuper qu'une position marginale sur le câble et sur le satellite.

Abordant le projet de loi portant réforme de l'audiovisuel public, M. Marc Tessier a indiqué que la société holding qui pourrait être créée, serait dotée d'un capital, aurait des objectifs de résultat, pourrait financer son développement et aurait la faculté de contracter des emprunts. Il s'est montré satisfait par ce projet.

En réponse à M. Claude Belot qui l'interrogeait sur la publicité, M. Marc Tessier a déclaré que les " tunnels publicitaires " étaient rendus nécessaires par l'interdiction faite au service public de couper les programmes par de la publicité, soulignant qu'on aurait pu faire le choix d'autoriser ces coupures tout en diminuant la durée de la publicité.

Abordant le problème de la diffusion numérique, M. Marc Tessier a développé l'idée d'une complémentarité des dessertes pour France Télévision : diffusion hertzienne sur la plus grande partie du territoire et diffusion satellitaire pour les zones marginales. Après avoir évoqué la question de la participation de France Télévision dans TPS, il a manifesté sa volonté de développer une offre de chaînes majoritairement gratuites sans écarter les offres spécifiques payantes en partenariat. Pour assurer une période de transition M. Marc Tessier a évoqué la possibilité d'un switch-off progressif par zone géographique. Il s'est dit convaincu par ailleurs, que pour la distribution de la télévision, une véritable révolution viendrait de la transmission, à terme, des images par lignes téléphoniques.

Il a indiqué que le développement de la télévision numérique terrestre permettrait au service public d'offrir des programmes locaux, une information et des services encore plus proches des téléspectateurs, et de développer des programmes interactifs.

En conclusion M. Marc Tessier a indiqué que le projet de loi portant réforme de l'audiovisuel public représentait, sans doute, pour le service public, la dernière chance.

En réponse à M. Yann Gaillard qui l'interrogeait sur les novations attendues en matière de programme, M. Marc Tessier a insisté sur l'importance de l'information dans la grille du service public. Il a indiqué que la régionalisation, au sens large de l'information constituerait la principale nouveauté. Il a ajouté que l'interactivité et la possibilité pour le téléspectateur de choisir l'horaire auquel il souhaite visionner une émission seraient mises en oeuvre. Il a rappelé que les chaînes thématiques de service public trouveraient sans doute leur place au sein de bouquets payants sur le câble ou le satellite.

A M. Claude Belot, il a réaffirmé son intention de promouvoir les chaînes locales en insistant sur le fait que de tels programmes existent déjà sur France 3, de ce fait le service public aura une longueur d'avance sur la concurrence.

I. PROGRAMMES DES DÉPLACEMENTS AU CANADA, À LONDRES ET À RENNES

A. DÉPLACEMENT AU CANADA DU 7 AU 11 JUIN 1999

Personnalités rencontrées

•  Alain MASSE, Attaché audiovisuel à l'Ambassade de France au Canada,

•  Mme Micheline VAILLANCOURT, Directrice générale de Radio Canada,

•  Mme Françoise BERTRAND, Présidente du Conseil de la Radiodiffusion et des Télécommunications Canadiennes, (CRTC),

•  M. Paul RACINE, Premier Vice-Président de BCE Média (première entreprise canadienne de communication par satellite),

•  M. Guy GOUGEON, Président de TV5 Québec-Canada,

•  M. Pierre GAGNON, Vice-Président de Vidéotron (deuxième cablo-opérateur canadien),

•  M. Hervé FISCHER, Président du Marché International du Multimédia (MIM),

•  M. Pierre-Luc DUMAS, Directeur général du la Cité du multimédia Montréal,

•  M. André PROVENCHER, Président de TVA International.

B. PROGRAMME DU DÉPLACEMENT À LONDRES LES 1er ET 2 SEPTEMBRE 1999



Mercredi 1 er septembre

. après-midi


. dîner

- ITC (Independant Television Council) : Mr Gary TONGE (Director of Engineering)

- ON DIGITAL : Mr John EGAN (Operations and Strategy Director), accompagné de Mr Marcus IZEKAEL

A la résidence de M. Daniel BERNARD, Ambassadeur de France, en présence de personnalités des médias.

Jeudi 2 septembre

. matin

- British Sky Broadcasting : Mr Ray GALLAGHER (Director of Public Affairs)

. déjeuner

avec M. John WARD (chief of Digital Television Project de la société Castel Tower International

. après-midi

- BBC : Mr Michael GLEAVE (Technical Policy Advisor in New Technologies) accompagné de Mr Wilf WHITE (Senior Policy Advisor)

C. PROGRAMME DU DÉPLACEMENT À RENNES LE 5 OCTOBRE 1999

I. - Centre de la Redevance de Rennes

- Matin

- Présentation du service de la Redevance par Michel GOBBO, Trésorier-Payeur Général, Chef du Service

- Visite du Centre

- Réunion avec les représentants syndicaux du centre

- Déjeuner au restaurant administratif du Centre

II. - Visite des installations de Télédiffusion de France SA


- Après-midi

- Arrivée à l'émetteur de Rennes St-Pern, de TDF

- Présentation de la TV numérique terrestre (les avantages, la chaîne de la valeur, le calendrier de déploiement en France) par M. Marc RENNARD, Directeur général adjoint de Télédiffusion de France SA

- Visite de l'émetteur de Rennes St-Pern

- Démonstrations des services interactifs


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