II. LE POINT DE VUE DES CONSOMMATEURS
AUDITION DE MME MARIE-JOSÉ NICOLI,
PRÉSIDENTE DE
L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS (UFC)
Mme Marie-José NICOLI - Je vous remercie de me recevoir et je
vais aller directement au coeur du sujet. A l'heure actuelle, si nous faisons
un bilan de ces dernières années sur la sécurité
sanitaire en France, et en particulier du point de vue alimentaire, je
donnerais trois éléments importants.
Le premier est le choc émotionnel ressenti par l'ensemble des
consommateurs en France ou en Europe avec toutes les affaires qui se sont
déroulées depuis 1996, avec la confirmation du passage de l'ESB
à l'homme qui donne la maladie dite de Creutzfeldt-Jakob, et avec les
affaires qui se sont ajoutées ensuite. Je ne les citerai pas, vous les
connaissez autant que moi.
Je ne dirais pas que nous commençons à nous habituer à ces
" affaires " sanitaires dans l'alimentation, mais le consommateur a
acquis un certain fatalisme. Je rappelle que le besoin de se nourrir est un
acte banal et quotidien qu'il faut accomplir tous les jours ; face à des
affaires comme celles de la dioxine ou l'ESB, on est tout de même
obligé de manger. C'est la réalité des faits sur le
terrain.
Les consommateurs ont transformé ce choc émotionnel en
détermination. En tant qu'association de consommateurs, nous sommes
amenés à répondre aux demandes des consommateurs,
c'est-à-dire à jouer un rôle plus important, plus actif, en
partenariat avec tous les professionnels, en particulier dans le domaine
agro-alimentaire.
A l'heure actuelle, non seulement nous nous préoccupons de la
sécurité sanitaire, mais nous nous préoccupons aussi de la
qualité des produits et même des modes de production, ce qui
était impensable il y a 20 ans, les associations de consommateurs ne
s'occupant pas des modes de production.
Le deuxième élément important est le fait que
l'alimentation et le monde agricole ont fait leur révolution
industrielle. On peut dire qu'aujourd'hui, le monde agricole et
l'agro-alimentaire utilisent les procédés industriels, et le
consommateur a enfin compris que les aliments n'étaient plus des
aliments naturels qui arrivaient de la ferme mais des produits
assemblés, sophistiqués, " trafiqués ", avec
énormément de composants.
C'est un point extrêmement important du point de vue alimentaire parce
que cela détermine beaucoup de nos habitudes et de nos comportements. De
plus, il devient très compliqué de donner satisfaction aux
consommateurs sur l'information, par exemple, le libre choix,
l'étiquetage etc.
Le troisième élément concerne les nouvelles exigences des
consommateurs, on en parle de plus en plus, et nous espérons que les
instances de décision au niveau professionnel ou des pouvoirs publics
passent aux actes, ne se contentent pas de toujours parler du consommateur,
mais l'aident dans sa démarche de sécurité et de
qualité.
Je rappelle que, parmi les exigences, la sécurité sanitaire des
aliments est un dû pour tous, c'est une obligation pour les
professionnels qui doivent l'assurer : cela concerne tous les produits,
qu'ils soient standards ou labellisés.
Notre expérience vient de la demande des consommateurs qui remonte par
le courrier des lecteurs de notre journal ou par nos associations, au nombre de
200 en France. De plus, les autres organisations de consommateurs ont aussi des
réseaux d'information.
Nous sommes caractérisés par le fait que nous faisons de plus en
plus d'analyses et de tests sur les produits, aussi bien les produits
alimentaires que les éléments comme l'eau, l'air et le sol. Ces
analyses augmentent nos inquiétudes, notamment concernant les
résidus de pesticides car, quelles que soient les analyses, nous en
retrouvons partout. Nous en retrouvons des traces dans notre alimentation et il
est vrai que l'utilisation des produits phytosanitaires dans le monde agricole
doit être modifiée petit à petit afin d'avoir une meilleure
maîtrise de ces produits.
Nous trouvons des traces de polluants environnementaux dans les produits
alimentaires, je citerai le plomb, le mercure et les dioxines. Il faut savoir
que les usines d'incinération et la politique d'épandage des
boues des stations d'épuration touchent de près notre
alimentation et je crois qu'actuellement, la politique en matière de
déchets n'est pas définie et n'est pas responsable. Dès
qu'il est question d'établir une zone de déchets
nucléaires, ou une usine d'incinération, ou des élevages
de porcs, les consommateurs n'en veulent pas.
Certaines organisations attisent ces inquiétudes et font qu'aujourd'hui
nous sommes une société de consommation qui engendre des
déchets ; aujourd'hui, nous n'arrivons pas à faire accepter
à la population que ces déchets doivent être mis quelque
part. Toutes les populations les refusent et évidemment, au milieu, les
maires et les politiques ne sont pas en position très confortable.
Je parlerai aussi des activeurs de croissance, les hormones et les
antibiotiques en particulier. Les hormones sont interdites en Europe, mais
d'autres Etats dans le monde les utilisent ; je vous rappelle l'affaire du
boeuf aux hormones américain qui est toujours à nos portes et
qui, pour l'instant, ne rentre pas en Europe, mais n'en est pas loin. Les
antibiotiques sont souvent utilisés dans l'alimentation des animaux
comme activeur de croissance, voire à titre préventif au moment
des sevrages.
De plus en plus d'Etats membres refusent ces pratiques dans l'élevage,
des pays comme la Suède l'ont supprimé ; en Europe, nous en
avons supprimé quatre il y a environ un an, il en reste encore quatre ou
cinq et nous voudrions que le contrôle vétérinaire soit
plus large.
Je passe aux farines animales. Notre association n'est pas opposée
à l'utilisation des farines animales dans l'alimentation des porcs, de
la volaille et des saumons, à condition que la réglementation
française s'adapte et soit imposée au reste de l'Europe, ce qui
n'est pas le cas aujourd'hui.
M. Claude HURIET - Puis-je vous demander, en tant que
rapporteur, de nous faire connaître l'appréciation que vous portez
en qualité de Présidente de l'Union Fédérale des
Consommateurs sur l'organisation du contrôle de la sécurité
sanitaire qui s'est mise en place ?
C'est l'objet de notre journée d'audition, il s'agit de porter une
appréciation positive ou négative, d'exprimer des regrets quant
aux insuffisances du dispositif.
Comment est perçue la nouvelle organisation, particulièrement
concernant les attributions de l'AFSSA, par rapport à ce qui existait ou
ce qui n'existait pas auparavant ?
Mme Marie-José NICOLI - L'AFSSA a été
créée il y a un an et demi environ et depuis, elle a eu
énormément de travail. Nous avons été
agréablement surpris par sa réactivité, mais aujourd'hui
un problème se pose quand même pour nous, associations de
consommateurs.
En effet, la loi permet aux associations de saisir l'AFSSA mais les
décrets d'application ne sont toujours pas sortis et ne sont pas en
projet. Pour l'instant, il nous arrive d'écrire à l'AFSSA pour
soumettre des problèmes, poser des questions ou dire que nous voudrions
certains dossiers plus détaillés que ceux parus dans la presse,
mais c'est laissé à l'appréciation et à la
courtoisie du Directeur parce que, pour l'instant, il n'y a aucune obligation
de répondre à nos demandes.
Je pense que vous êtes directement concernés et que vous feriez
bien de vous en préoccuper parce que nous avons beaucoup de
matière à fournir à l'AFSSA. Je sais qu'ils ont
déjà beaucoup de travail mais il serait normal que cette loi
s'applique dans son entier et que les consommateurs et les associations
puissent en profiter.
M. Claude HURIET - D'après l'article L. 794-3 de la
loi, je cite :
" L'Agence est administrée par un Conseil
d'Administration composé pour moitié de représentants de
l'Etat et pour moitié de représentants des organisations
professionnelles concernées, de représentants des consommateurs,
de personnalités qualifiées. "
.
Mise à part la réflexion que vous faites qui entre dans le champ
de nos préoccupations, c'est-à-dire le retard de la publication
de certains décrets d'application, les consommateurs font-ils partie du
Conseil d'Administration ? Ont-ils leur mot à dire ? Avez-vous
le sentiment que cette participation pourrait être quelque chose de
positif ?
Mme Marie-José NICOLI - Je ne siège pas à
l'AFSSA, mon organisation non plus, et c'était un choix de ne pas
présenter de candidat...
M. Charles DESCOURS - ... C'est vous qui n'avez pas voulu ?
Mme Marie-José NICOLI - Absolument, notre association a
une politique vis-à-vis des institutions qui est d'être dans
certaines, mais pas dans toutes, il y en a trop. Nous sommes beaucoup
sollicités, nous avons une particularité qui est celle de pouvoir
tester le marché très en aval, c'est-à-dire lorsque nous
avons les moyens financiers de tester les produits sur le marché.
Parfois, il peut être très embarrassant pour nous d'avoir à
donner des avis ou à nous exprimer dans notre revue
Que Choisir
alors que nous siégeons dans certaines instances.
Il faut savoir que nous sommes sûrement l'organisation qui saisit le plus
souvent toutes les instances, à cause des essais comparatifs et des
analyses de produits ; cela nous permet de les solliciter en toute
indépendance et de dire ce que nous en pensons sans avoir un pied
à l'intérieur.
M. Claude HURIET - C'est un choix ?
Mme Marie-José NICOLI - Tout à fait, c'est un choix.
M. Charles DESCOURS - Globalement, les experts nous disent que
l'alimentation est de plus en plus sûre. Quel regard portez-vous sur
l'état de l'opinion ?
Pensez-vous qu'elle est susceptible de comprendre les messages d'alerte que
peuvent donner les agences, qu'elle ne pense pas que ces messages traduisent
une dégradation de la sécurité sanitaire des
aliments ?
Nous avons le sentiment que l'alimentation est de plus en plus sûre et
que l'opinion pense qu'elle l'est de moins en moins.
Mme Marie-José NICOLI - Je pense que ceci est dû
à un décalage d'information. Du point de vue alimentaire,
d'énormes progrès ont été faits. Prenons les
statistiques en listeria, par exemple, en salmonellose etc., c'est
évident. Seulement, il y a 15 ou 20 ans le consommateur vivait heureux,
il ne savait pas qu'il mourait de la listériose ou qu'il était
atteint de salmonellose, il ne savait rien.
Voilà quelques années qu'on l'informe, laissez-lui le
temps ! Qui plus est, je trouve que, par rapport aux professionnels, par
rapport aux pouvoirs publics et à vous-même, les consommateurs
font moins de psychose que vous tous. Sur le moment, lorsqu'il y a une alerte,
il est normal de se priver du produit ou de refuser de l'acheter mais,
après, les habitudes reviennent tout doucement.
Je trouve que, depuis qu'ils sont informés, on ne leur a pas
laissé de répit, ni même à vous pour les
décisions à prendre. Il n'empêche que les individus
comprennent petit à petit qu'il faut faire attention, qu'il y a des
risques dans le domaine alimentaire comme dans d'autres secteurs. Dans
l'ensemble, je trouve que les consommateurs réagissent très
sainement contrairement aux personnes concernées directement,
financièrement ou politiquement, qui sont parfois prises dans des
paniques extrêmes parce que les enjeux sont financiers ou politiques.
Pour le consommateur, l'enjeu c'est la santé publique ; il a de
plus en plus d'exigences, et il demande des contrôles, nous demandons la
mise en place d'une agence communautaire : toutes ces demandes existent
parce que nous voulons être rassurés.
D'autre part, nous voulons aussi avoir une information loyale et je pense que
c'est relativement difficile. En matière de sécurité
sanitaire, l'expertise est peut-être difficile à faire, mais
après les avis scientifiques, il y a la gestion. Elle doit prendre en
compte non seulement l'avis de l'AFSSA, pour la France, mais aussi l'avis des
consommateurs, l'avis des associations écologiques si elles sont
concernées, etc.
La décision prise finalement doit comporter des éléments
différents et pas uniquement l'avis scientifique, parce que
l'alimentation n'est pas seulement une affaire de scientifiques. Lorsque vous
faites des congrès internationaux sur l'alimentation, vous vous rendez
compte que s'y mêlent fortement les cultures, les usages, des
quantités d'autres facteurs qui sont aussi importants à un moment
donné que l'avis ou la vision scientifique. Evidemment, dans les
périodes de crise la vision scientifique est à prendre en premier
lieu et -espérons-le- concernant l'alimentation nous ne serons pas
toujours en période de crise. Des avis peuvent être donnés
par l'AFSSA sans avoir de relation avec une crise ou une mise en danger de la
vie des animaux ou des êtres humains.
M. Alain VASSELLE - J'ai une remarque à faire et trois
questions très brèves à vous poser. Tout d'abord, j'ai
été surpris de l'utilisation dans votre bouche d'un terme
à l'encontre de la profession agricole. Vous avez parlé de
produits " trafiqués " dans la profession agricole, je suppose
que cela vous a échappé ou que vous lui donnez un autre sens que
celui qui est habituellement utilisé. Cela a un caractère
péjoratif, cela m'a surpris.
En ce qui concerne les normes, vous avez parlé de la dioxine et du fait
qu'une forme de psychose était née au sein de la population
française. Contestez-vous les normes françaises ?
Considérez-vous qu'elles ne sont pas suffisantes ?
A partir du moment où vous ne les contestez pas, les consommateurs que
vous représentez sont-ils prêts à se rallier à ces
normes ? Auquel cas, à chaque fois que l'on propose la construction
d'une unité d'incinération que l'on suspecte de rejeter de la
dioxine ou lorsque l'on va enfouir nos déchets ménagers dans un
centre d'enfouissement technique, les normes françaises étant ce
qu'elles sont, voire les normes européennes, la garantie
recherchée par le consommateur est assurée, sauf un risque -le
risque est toujours possible- lié à un accident ou un incident,
mais personne, ni les consommateurs, ni les professionnels ne peuvent
maîtriser les accidents dans la mesure où les normes sont
respectées.
Jusqu'où souhaitez-vous que nous mettions en oeuvre la
traçabilité en France, notamment dans les grandes surfaces de
distribution ?
Je pense à l'ESB, faut-il se contenter de mettre " viande
anglaise ", " viande irlandaise " ou " viande
française " ou faut-il aller jusqu'à donner les
références de l'éleveur et des produits alimentaires
donnés aux animaux ?
A propos de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des
Aliments, nous avions vu dans l'épisode de l'ESB qu'il y avait un
différend entre la position européenne et la position
française. La position française l'a emporté, encore que
nous avons constaté que l'Allemagne, qui avait la même position
que nous, a cédé avant nous. Pour le moment nous n'acceptons pas
l'importation de viande anglaise en France grâce à la position de
l'Agence Française. Considérez-vous que ce soit une bonne
référence ?
S'il doit y avoir un jour une agence européenne, comment celle-ci
devra-t-elle fonctionner ? J'ai le sentiment que, pour le moment, il y
aurait plus de souplesse au plan européen qu'en France. Quelle
harmonisation pouvons-nous espérer ?
M. Jacques MACHET - Je voudrais savoir quelle est votre position
sur ce qui a été mis en place, sur les agences ? Les choses
s'améliorent-elles ou se détériorent-elles ?
J'aimerais que vous me donniez la position de votre organisation.
Mme Marie-José NICOLI - Oui, je pense qu'il y a parfois
des trafics, ils sont dénoncés, et nous sommes partie civile dans
15 procédures de trafic d'hormones en France. Si ce n'est pas du trafic,
je ne sais pas comment vous l'appelez !
Par ailleurs, il peut y avoir des produits trafiqués, en
agro-alimentaire, qui ne correspondent pas aux normes ou qui n'ont pas des
étiquetages précis, nous en faisons l'expérience chaque
fois que nous faisons des analyses. Ce n'est pas péjoratif ; dans
l'ensemble, le monde agricole travaille correctement, si cela peut vous
rassurer, mais cela n'empêche que nous avons aussi un certain nombre de
fraudeurs.
Les normes ne sont pas immuables, elles sont faites pour évoluer et
être changées. Lorsque nous faisons des tests, que ce soit en
alimentaire ou dans d'autres secteurs, nous prenons les normes qui sont les
plus favorables aux consommateurs, parfois ce sont des normes
européennes, parfois des normes françaises. C'est pour cela que
nous ne participons pas à l'AFNOR dans les différents
comités de normalisation, parce que nous voulons pouvoir les tester et
nous le faisons régulièrement.
Par contre, nous avons régulièrement des contacts avec l'AFNOR et
tous les ans ou tous les ans et demi nous leur disons :
" nous avons
testé telle et telle norme, voilà les problèmes que nous
avons rencontrés dans les produits testés, voilà les
résultats "
; ils apprécient que nous fassions ce
genre de démarche, parce que nous sommes les seuls à pouvoir les
faire en tant qu'association de consommateurs.
Pour ce qui est de la traçabilité, il ne faut pas confondre la
traçabilité avec l'étiquetage ; d'ailleurs en ce
moment nous avons un exemple flagrant au plan communautaire, une erreur vient
d'être commise par le Parlement Européen où l'on a
mélangé la traçabilité avec la demande
d'étiquetage et d'information des consommateurs.
En effet, à l'heure actuelle, on veut mettre sur les étiquettes
des viandes des codes illisibles pour le consommateur, mais très
précieux pour les Pouvoirs Publics ou pour les professionnels. Ce n'est
pas ce que nous demandons, nous demandons d'avoir l'origine de la viande, la
catégorie et, en France en particulier, nous voulons le type racial.
J'étais en Angleterre, il y a 15 jours, en prévision d'une
levée de l'embargo. Mon organisation est en train de se faire sur le
terrain un certain nombre d'idées à ce sujet, et j'ai
été très étonnée de voir que les Anglais
mélangent les races. En effet, pour eux la race n'est pas un
critère de qualité, ils mélangent les laitières
avec les races charolaises etc. Ils font un mélange surprenant et les
consommateurs anglais n'ont pas l'air de s'en préoccuper. La partie type
racial n'est peut-être pas à mettre au plan communautaire mais
nous voulons l'origine et la catégorie.
Je termine avec l'AFSSA et le Comité Scientifique Directeur où il
y a eu une divergence. Je pense qu'elle a été perçue ainsi
par le public, mais les questions posées au Comité Scientifique
Directeur et la question posée à l'AFSSA n'étaient pas les
mêmes, les réponses ont donc été différentes.
En qualité de présidente de mon organisation, je dirais que le
Comité Scientifique Directeur au plan communautaire est composé
d'éminents scientifiques, mais pas obligatoirement de
spécialistes du Prion alors qu'à l'AFSSA, le Comité en
question était composé de spécialistes de ces questions.
A " Que Choisir ", nous avons fait plus confiance à l'AFSSA
qu'au Comité Scientifique Directeur bien que nous ne remettions pas en
cause leurs compétences, ce qui veut dire que lorsqu'il a
été question de lever l'embargo sur la viande bovine anglaise,
nous nous sommes largement exprimés pour dire que nous voulions son
maintien.
Après mon voyage en Ecosse, je dis que nous avons rendu service aux
Anglais parce qu'en maintenant l'embargo français nous leur permettons
de prendre le temps de tracer et d'identifier leur cheptel, ce qui n'est pas
encore complètement fait en Angleterre. Cela évite les fraudes
et, en fin de compte, je pense que le circuit d'exportation de la viande bovine
anglaise est très bien contrôlé, j'ai pu le
vérifier, en allant partout où il fallait aller. En revanche,
lever l'embargo maintenant ne me semble pas possible, peut-être
pourrons-nous le lever à la fin de l'année ou au début
2001, mais pas avant parce que nous n'avons pas d'étiquetage
européen et le consommateur n'a pas le choix.
De plus, je fais le pari que, dès l'instant où la France aura
levé l'embargo sur la viande bovine anglaise désossée, les
Anglais nous demanderont d'exporter des carcasses et des bêtes sur pied
à peine trois mois après. Et là nous aurons
d'énormes problèmes parce que pour l'instant, en Angleterre, les
bêtes ne sont pas toutes identifiées.
Le dernier point concerne l'avis sur les agences mises en place. Effectivement,
c'est une bonne chose parce qu'au plan communautaire on prend exemple sur ce
que la France a fait. Deux problèmes importants vont cependant se poser.
Tout d'abord, comment s'articulera l'Agence européenne avec les
différentes agences ?
Un autre point qui concerne aussi bien les agences nationales
qu'européennes, est l'indépendance des scientifiques. Là,
ce sera un énorme problème et il faudra beaucoup de vigilance sur
les dossiers qui arriveront dans les différentes agences.
M. LE PRÉSIDENT - Soyez assurée de la vigilance de la
commission des Affaires sociales.
Mme Marie-José NICOLI - De la nôtre aussi !