ANNEXE II -
PROGRAMME DE LA DÉLÉGATION

Vendredi 14 avril

23 h 15 : arrivée de la délégation à l'aéroport Mehrabad de Téhéran, par le vol Iran Air 732. Accueil par l'Ambassadeur, puis installation à l'hôtel Laleh.

Samedi 15 avril

11 h 00 : réunion de travail avec les chefs de servies de l'Ambassade, suivie d'un déjeuner restreint à la résidence. Dîner offert par le Premier conseiller.

Dimanche 16 avril

9 h 00 : entretien avec M. Rouhani, Vice-président du Madjlis et Président de la Commission des affaires étrangères du Parlement islamique, suivi d'une rencontre avec le groupe d'amitié Iran-France.

11 h 15 : entretien avec M. Chahidi, Vice-ministre de la culture et de l'orientation islamique, chargé de la presse.

16 h 00 : entretien avec M. Hosseini, Vice-ministre du pétrole, chargé des affaires internationales.

20 h 30 : dîner offert par le Président du Madjlis au " Mehman Sara-yé Naft " (Maison d'hôtes du ministère du pétrole).

Lundi 17 avril

9 h 00 : entretien avec M. Madjid Ansari, député et membre du Conseil central du parti des clercs combattants.

10 h 00 : entretien avec M. Mar'ashi, Secrétaire-adjoint du parti des constructeurs.

11 h 15 : entretien avec M. Kamal Kharrazi, Ministre des affaires étrangères.

Mardi 18 avril

9 h : entretien avec M. Mohammad-Reza Khatami, Secrétaire général du Front de la participation islamique.

11 h 00 : départ de l'aéroport Mehrabad de Téhéran pour Ispahan.

12 h 00 : arrivée à Ispahan et installation de la délégation à l'hôtel Abbassi.

Mercredi 19 avril

18 h 00 : départ en avion d'Ispahan pour Boushehr et installation à l'hôtel.

Jeudi 20 avril

Visite du site de Total à Assalouieh dans la journée.

23 h 55 : départ en avion de Boushehr pour Téhéran et installation à l'hôtel Laleh.

Vendredi 21 avril

8 h 00 : départ de Téhéran pour Paris par le vol Iran Air 733.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a entendu le compte rendu du présent rapport au cours de sa réunion du 17 mai 2000.

Un débat est ensuite intervenu entre les commissaires.

M. André Dulait a estimé que, sur le plan politique, on ne pouvait pas porter sur l'évolution iranienne une appréciation fondée sur des critères " occidentaux ". L'organisation institutionnelle très particulière de l'Iran ne laissait aux réformateurs que des possibilités d'action limitées face aux pouvoirs détenus par les conservateurs.

Sur le plan économique, M. André Dulait a relevé les occasions que l'Iran pouvait retirer de la hausse récente du prix du baril. Il a souligné l'intérêt du projet mis en oeuvre par Total dans ce pays et fait observer que la pénétration économique de nos entreprises en Iran, déjà difficile, pourrait être, un jour ou l'autre, confrontée à la concurrence des entreprises américaines, dès que les relations entre les Etats-Unis et l'Iran se seraient normalisées.

M. Claude Estier a fait observer que la relation entre conservateurs et réformateurs en Iran était beaucoup plus complexe et sans comparaison, par exemple, avec le lien droite/gauche en France. Le président Khatami était issu du même système religieux que bien des membres du camp conservateur et on constatait que les réformes promises par le Président de la République n'avaient gère reçu d'applications concrètes. Il a, par ailleurs, fait part de son étonnement à voir un Parlement, battu après le premier tour des élections législatives de février 2000, continuer cependant à légiférer pour, notamment, réduire les prérogatives de la nouvelle assemblée qui ne siégerait qu'à compter du 27 mai prochain. M. Claude Estier a cependant fait valoir que l'appui que ce nouveau parlement majoritairement réformateur pourrait apporter au Président Khatami pourrait ouvrir une phase nouvelle. Il a estimé, par ailleurs, que les évolutions des techniques de communication, notamment Internet, très présent à Téhéran, conduirait inévitablement la jeunesse iranienne, largement majoritaire dans le pays, à s'intéresser au monde extérieur. Le succès massif du salon du Livre, qui s'était récemment tenu à Téhéran, témoignait également de cette volonté des jeunes et des femmes de voir les choses évoluer.

M. Claude Estier a relevé que, sur le processus de paix au Proche-Orient, la position iranienne laissait apparaître une certaine contradiction entre, d'une part, un discours encore très dur à l'égard d'Israël et, d'autre part, comme M. Mohammad Reza Khatami l'avait formulé, une position plus pragmatique, laissant aux Palestiniens eux-mêmes le soin de décider de leur destin dans le cadre des négociations en cours.

M. Aymeri de Montesquiou , évoquant la richesse pétrolière de l'Iran, a estimé que deux raisons avaient justifié l'opposition de ce pays à la récente décision de l'OPEP d'accroître la production de pétrole : le risque de voir le cours du brut chuter, et l'incapacité de l'Iran à suivre une hausse de la production, compte tenu de l'obsolescence de ses structures dans ce secteur. Il a regretté que les investissements étrangers soient limités à des prises de participation minoritaires dans le capital d'entreprises iraniennes, bien que, d'après lui, les choses, en ce domaine, étaient en train d'évoluer favorablement. Il a redouté que le " bras de fer " opposant réformateurs et conservateurs ne traduise le souhait des plus radicaux de ces derniers de mener la " politique du pire " qui pourrait déboucher sur une explosion sociale. Le énième décompte des voix obtenues par les réformateurs à Téhéran lors du premier tour des élections témoignait de cette attitude négative. Fort des 70 % des suffrages qui s'étaient portés sur son compte, le Président Khatami cherchait l'apaisement en misant sur la durée.

M. Aymeri de Montesquiou a estimé par ailleurs que l'Asie centrale et son fort potentiel de richesses pétrolières constituaient un enjeu fondamental pour l'Iran.

Abordant le procès intenté contre les treize juifs iraniens, M. Aymeri de Montesquiou a considéré qu'il s'inscrivait dans une stratégie de durcissement des conservateurs, destinée à embarrasser le Président Khatami. Il n'était pas exclu, par ailleurs, a-t-il poursuivi, que ce procès soit également lié à des contentieux financiers anciens opposant l'Iran à Israël et aux Etats-Unis.

M. Aymeri de Montesquiou a enfin estimé que l'Iran était, dans la région, le seul Etat dont l'évolution politique se faisait par le recours aux urnes et a relevé, par ailleurs, qu'une rivalité historique avait longtemps opposé Perses et Arabes, expliquant, du temps du Shah, certaines actions de coopération avec Israël.

M. Xavier de Villepin, président, a alors relevé que l'Iran, qui produisait, avant 1979, 6 millions de barils par jour, n'en était plus qu'à 3,7 millions, et que seuls 2,5 millions étaient exportés, le reste étant voué à la consommation intérieure à des prix artificiellement bas.

Mme Danielle Bidard-Reydet a souligné l'importance de l'enjeu économique pour une jeunesse qualifiée, majoritaire dans la population et soucieuse de s'insérer dans le marché de l'emploi. La dépendance extrême à l'égard du pétrole était reconnue comme une faiblesse et les autorités iraniennes étaient soucieuses de valoriser le capital touristique du pays. Par ailleurs, elle s'est déclarée frappée par la volonté des autorités iraniennes de mettre en oeuvre un dispositif social destiné à limiter l'exclusion des plus faibles. Sur le plan politique , Mme Danielle Bidard-Reydet a observé que la liberté de la presse, jusqu'aux récentes interdictions, était une réalité bien ancrée, que la participation électorale importante témoignait de la confiance de l'électorat, et relevé que les résultats des élections dans les universités, favorables aux réformateurs, coïncidaient, paradoxalement, avec ceux qui étaient recensés dans certaines casernes de Pasdaran ou de Bassidjis. Elle s'est déclarée impressionnée par la situation particulière de la femme iranienne, liée, par-delà la contrainte vestimentaire, la plus visible, aux discriminations juridiques dont elle était l'objet. Enfin, pour Mme Danielle Bidard-Reydet , l'Iran apparaissait soucieux d'établir de meilleurs rapports avec son environnement régional et la communauté internationale. Son hostilité au processus de paix semblait porter davantage sur les modalités que sur le fond et l'Iran n'entendait pas être un facteur de blocage sur ce dossier. L'Iran occupait, a-t-elle conclu, une place géostratégique essentielle et la France semblait positivement perçue dans ce pays, l'attitude courageuse de Total par rapport à la législation américaine " d'Amato " y ayant sans doute contribué.

M. Robert Del Picchia a fait part de l'étonnement qu'il avait ressenti devant la faiblesse relative de la pratique religieuse en Iran, tout au moins quant à la fréquentation des mosquées. Il a relevé la contradiction entre une presse écrite, très vivante, et une télévision, dépendante du guide de la Révolution, peu attractive pour la jeunesse. Si Total avait marqué un point politique en investissant le premier en Iran après l'adoption de la législation américaine " d'Amato ", il restait, a estimé M. Robert Del Picchia , que l'Iran se voulait ouvert à bien d'autres investisseurs, y compris, à terme, aux Américains.

M. Robert Del Picchia a indiqué que la France, dans le cadre des entretiens de la délégation, s'était vu reprocher le soutien accordé à l'Irak pendant la guerre et l'accueil dont bénéficie, sur notre territoire, le mouvement des Moudjahidines du peuple.

Le sénateur a exprimé sa confiance en une évolution assez rapide de la situation en Iran, encouragée par le développement des techniques modernes de communication avec le monde extérieur.

M. Xavier de Villepin, président , a souligné les grandes différences qui séparaient le sunnisme du chiisme, notamment quant à la nature et à l'ampleur de la pratique religieuse.

M. Hubert Durand-Chastel s'est déclaré optimiste sur l'aboutissement des réformes, tout en s'interrogeant sur le moment où il interviendrait. Une certaine prudence semblait partagée par chacun des camps pour éviter tout risque d'affrontement. Le vrai problème de l'Iran était de nature économique, ce pays étant confronté à une démographie galopante peu compatible avec une croissance rapide ainsi qu'à un besoin crucial d'investissements étrangers.

M. Pierre Biarnès a considéré qu'il convenait d'insister sur les rapports de l'Iran avec la Chine et la Russie, qui expliquaient en grande partie la stratégie des Etats-Unis à l'égard de l'Iran. Il n'était ainsi un mystère pour personne que la Russie ou la Corée du Nord coopéraient avec l'Iran dans le domaine nucléaire. Un équilibre stratégique se dessinait dans la région où les puissances comme la Turquie, l'Inde ou le Pakistan tenaient une place essentielle et sur lequel la Chine, la Russie et les Etats-Unis entendaient exercer un rôle particulier.

M. Xavier de Villepin, président , a reconnu l'importance de la Russie dans l'histoire iranienne. Il a, par ailleurs, relevé que l'Iran figurait parmi les " menaces " identifiées par les Etats-Unis pour justifier la mise en place par ces derniers d'un système national de défense antimissiles. De fait, l'Iran disposait de capacités balistiques substantielles, élaborées grâce aux concours russe et chinois. Le projet américain de défense nationale antimissiles posait d'ailleurs des problèmes particulièrement préoccupants au regard de l'avenir du traité de 1972 sur les défenses antimissiles (ABM) et du désarmement nucléaire dans son ensemble.

M. Xavier de Villepin, président , s'est déclaré peu optimiste quant à l'issue de la rivalité entre conservateurs et réformateurs, qui avait d'ailleurs commencé dès l'accession de l'Ayatollah Khomeiny au pouvoir en 1979. L'évolution du pays demanderait beaucoup de temps, à supposer même que la volonté de réformes reste vivace et que les institutions cessent de se neutraliser mutuellement. En tout état de cause, la jeunesse iranienne jouerait dans la transition un rôle essentiel.

En réponse à M. Charles-Henri de Cossé-Brissac, M. Xavier de Villepin, président, a indiqué qu'il était difficile d'apporter une réponse précise aux interrogations que générait l'évolution actuelle de l'Iran.

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