Mme la présidente. En l’absence d’observations, je les considère comme adoptées.

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Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que deux candidatures, en remplacement de deux membres démissionnaires, pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique, ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Article 1er (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique
Article 1er

Gestion de la crise sanitaire

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique.

Nous poursuivons l’examen de l’article 1er.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 84

Article 1er (suite)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 44 rectifié quater, présenté par Mmes Noël, Thomas et Muller-Bronn, MM. D. Laurent, Duplomb et Meurant, Mme Pluchet et M. Houpert, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

.… – L’article 7 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les lieux d’exercice de la démocratie sont exclus des lieux dont l’accès peut être interdit. »

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Le hasard fait décidément bien les choses, puisque le ministre de l’intérieur a été reçu hier au Conseil constitutionnel pour évoquer l’organisation des futures échéances électorales.

Cet amendement a justement pour objet de ne pas permettre la mise en œuvre du passe sanitaire ou vaccinal à l’entrée des bureaux de vote. J’ai présenté à de nombreuses reprises des amendements à l’objet similaire lors de l’examen des précédents textes d’urgence sanitaire : chaque fois, ils ont reçu un avis défavorable et ont été refusés par le Gouvernement.

Il me semble toutefois qu’inscrire la nécessité absolue de préserver nos bureaux de vote de la mise en œuvre du passe vaccinal dans la loi rassurerait tout le monde.

M. le président. L’amendement n° 191 rectifié, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

…. – Les lieux d’exercice de la démocratie sont exclus des lieux dont l’accès peut être soumis à la présentation d’un passe sanitaire ou d’un passe vaccinal.

…. – Le code électoral est ainsi modifié :

1° L’article L. 52-18 est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. L. 52-18.- Le vote s’exerce en personne à l’urne ou par procuration. » ;

2° L’article L. 57-1 est abrogé ;

3° Le dernier alinéa des articles L. 58, L. 62, L. 63, L. 65, L. 313 et L. 314 est supprimé ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 64, les mots : « ou de faire fonctionner la machine à voter » sont supprimés ;

5° À l’article L. 69, les mots : « , ceux qu’entraîne l’aménagement spécial prévu à l’article L. 62, ainsi que les dépenses résultant de l’acquisition, de la location et de l’entretien des machines à voter » sont remplacés par les mots : « et ceux qu’entraîne l’aménagement spécial prévu à l’article L. 62 » ;

6° Le deuxième alinéa de l’article L. 116 est supprimé ;

7° À l’article L. 117-2, les mots : « au vote par machine à voter et » sont supprimés.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. En cette période de campagne électorale, l’inquiétude est grande pour nos compatriotes de voir le passe sanitaire devenir un passe vaccinal et, bientôt, un passe électoral.

Mardi 11 janvier, le Conseil constitutionnel a évoqué en ces termes « la possibilité que […] le Gouvernement élabore de nouvelles mesures d’organisation qui apparaîtraient rendues nécessaires par la crise sanitaire, afin de garantir le bon déroulement de l’élection présidentielle ».

Mes chers collègues, je ne vous cache pas que les engagements de M. le ministre de l’intérieur ne me satisfont pas : nous sommes habitués à ses revirements.

C’est la raison pour laquelle je vous demande d’inscrire dans ce texte trois dispositions : premièrement, l’interdiction de soumettre l’accès aux bureaux de vote à un quelconque passe, deuxièmement, l’interdiction du recours au vote électronique et par correspondance, troisièmement, le rappel du droit de chacun de voter à l’urne en personne ou de faire une procuration.

Pour rappel, le vote par correspondance est interdit en France depuis 1975, car il présente de trop nombreux risques de fraude. Le vote grâce à des machines électroniques est permis dans certaines communes depuis 1969, mais il n’a pas ramené les électeurs aux urnes, il a même suscité de la méfiance. La séquence politique majeure qui s’ouvre devant nous ne doit pas devenir un simulacre de démocratie.

Madame la ministre, ne faites pas monter la peur dans ce pays pour balancer par la fenêtre nos bulletins de vote. Il ne s’agirait pas de décourager les électeurs, qui sont de moins en moins nombreux à chaque élection, au point que certains se sont crus autorisés d’en fabriquer dans les Ehpad marseillais !

Le suffrage vaccinal deviendrait le nouveau suffrage censitaire de ce régime, non universel, restreint et contrôlé : trois adjectifs qui conviennent à merveille à la politique gouvernementale actuelle.

Pour balayer cet amendement, vous me rétorquerez qu’il est déjà satisfait par la Constitution ; je ne le crois pas. Pour rappel, le 5 août 2021, le Conseil constitutionnel a donné son accord pour l’instauration du passe sanitaire sous trois conditions : le passe sanitaire devait être limité dans le temps, il ne pouvait être restreint à la seule vaccination, il ne devait pas permettre le contrôle des citoyens par d’autres citoyens. Nous savons aujourd’hui ce que sont devenues ces trois conditions : classées, direction poubelle !

Mes chers collègues, je vous remercie donc de faire, par prudence, bon accueil à cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 12 rectifié bis, présenté par Mmes Muller-Bronn et Noël, MM. Panunzi et Reichardt, Mmes Bonfanti-Dossat, Belrhiti et Drexler, M. Paccaud, Mme Lopez, M. Meurant, Mme Puissat et M. Houpert, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. - Les lieux d’exercice de la démocratie et les bureaux de vote sont exclus formellement de la liste des lieux dans lesquels est exigé un passe sanitaire ou un passe vaccinal.

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Il est défendu, monsieur le président !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Mes chers collègues, si j’avais pensé qu’il y avait le moindre risque, j’aurais été le premier à proposer à la commission des lois un amendement de ce type.

M. Laurent Duplomb. Il n’est pas trop tard !

M. Philippe Bas, rapporteur. Pourquoi est-ce inutile ? Tout simplement parce que, de la même façon que pour le passe sanitaire, le passe vaccinal ne peut être exigé que dans des lieux limitativement énumérés par la loi elle-même. Mieux encore, quand il est exigé dans l’un des lieux qui n’est pas prévu par la loi, il y a des sanctions pénales.

M. Loïc Hervé. Il n’y en a aucune !

M. Philippe Bas, rapporteur. Bien sûr que si !

M. Loïc Hervé. En pratique, non !

M. Philippe Bas, rapporteur. Mon cher collègue, vous vous exprimerez tout à l’heure, si vous le souhaitez.

En ce qui me concerne, je vous confirme que des sanctions pénales sont prévues lorsque l’on demande le passe sanitaire dans des lieux où il ne peut pas être exigé. Voilà tout de même des protections naturellement extrêmement fortes ! (M. Laurent Duplomb manifeste son scepticisme.)

Les dénégations de Laurent Duplomb ne sont pas des arguments. La vérité, c’est celle que je vous dis – rien d’autre. (M. Laurent Duplomb sexclame.)

D’ailleurs, mes chers collègues, s’il nous venait l’idée saugrenue d’énoncer tous les lieux où le passe sanitaire ou le passe vaccinal ne peut être exigé, la liste serait très longue. En effet, il ne peut l’être nulle part, sauf dans les lieux qui sont prévus par la loi. Les bureaux de vote en sont absolument et radicalement exclus.

Vous pouvez le répéter dans le texte sur tous les tons, vous n’ajouterez rien à la loi : vous vous serez seulement fait plaisir. J’aimerais moi aussi vous faire plaisir, mais peut-être aurez-vous suffisamment de plaisir en sachant que votre intention est entièrement pourvue par le texte. Tout comme vous, je suis démocrate et je ne supporterais pas de telles restrictions.

Par ailleurs, mes chers collègues, vous semblez savoir ce qu’est un lieu d’exercice de la démocratie. Pour ma part, je l’ignore totalement ! La démocratie est à la fois partout et nulle part. On exerce la démocratie et la citoyenneté partout où l’on se trouve : au Parlement, dans les communes, dans les entreprises… C’est la vertu de la démocratie que son lieu d’exercice ne soit pas limité. Par conséquent, si vous inscrivez les dispositions prévues par ces amendements dans la loi et qu’un jour un juge a à statuer, il ne saura pas ce que vous avez voulu dire, parce que, quand vous dites cela, vous ne dites rien.

C’est la raison pour laquelle j’insiste – avec beaucoup de fougue, parce que, comme vous, je suis attaché à la démocratie – sur le fait que nous n’avons pas besoin de ces amendements, qu’ils sont même contre-productifs, car leur adoption impliquera d’énumérer tous les autres lieux où le passe vaccinal sera interdit. Si vous vous lancez dans cette gymnastique, vous n’avez pas fini !

La commission émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de lautonomie. Même avis, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Ma grand-mère disait : « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. » (Sourires.)

M. Philippe Bas, rapporteur. Nous avons eu la même grand-mère ! (Nouveaux sourires.)

M. Laurent Duplomb. Quand on inscrit une disposition dans la loi, on est sûr de ne pas avoir à y revenir.

Certes, on nous oppose que la Constitution et nos institutions nous rassurent, mais je rappelle que, sur le passe sanitaire, le Conseil d’État indiquait au mois de juillet dernier qu’il suffirait de présenter un test négatif pour aller au restaurant. Aujourd’hui, ce même Conseil d’État se renie et déclare exactement l’inverse : un test négatif ne suffira plus, il faudra un passe vaccinal.

Hier, comme par hasard, comme par enchantement, le ministre de l’intérieur, qui est chargé de l’organisation des élections, en particulier de l’élection présidentielle, a rencontré le président du Conseil constitutionnel pour évoquer les évolutions possibles sur la tenue de cette élection. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le communiqué du Conseil constitutionnel ! Je ne suis ni complotiste, ni pessimiste, ni anxieux, mais, face à un faisceau d’indices aussi important, le principal n’est-il pas de protéger l’élection présidentielle ?

Certes, j’entends l’argument de Philippe Bas sur la nécessité de nommer alors explicitement la totalité des sites concernés, mais, au regard de la démocratie, on se moque des autres sites ! Le seul site qui compte pour l’expression de la démocratie, c’est le bureau de vote !

M. le président. Il faut conclure !

M. Laurent Duplomb. Si, au Parlement, en particulier au Sénat, il faut préciser que le lieu le plus spécifique et le plus important de la démocratie, c’est le lieu de vote, votons cet amendement pour rassurer nos électeurs !

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.

M. Loïc Hervé. Je voterai l’amendement n° 44 rectifié quater et je dirai très précisément pourquoi, monsieur le rapporteur.

En matière de vie démocratique, on nous avait promis que jamais on ne demanderait le passe sanitaire pour accéder à des meetings politiques ou des réunions publiques organisées à l’occasion de la campagne présidentielle.

Madame la ministre, il se trouve que l’Assemblée nationale a ajouté la faculté pour les organisateurs de ces événements de demander la présentation d’un passe sanitaire ou d’un test négatif.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée. C’est leur droit ! On ne le leur impose pas !

M. Loïc Hervé. Mais, enfin, en France, l’arbitraire n’est pas entre les mains des organisateurs de meetings ! Tout citoyen, quel qu’il soit, a le droit d’assister à un meeting politique de l’élection présidentielle : ce n’est pas réservé aux militants !

Je pense donc sincèrement que cet amendement est nécessaire pour préserver et garantir le droit d’accès à ces lieux qui, comme l’a très clairement exposé Laurent Duplomb, sont ceux de l’exercice du vote. C’est pourquoi il faut selon moi adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. Ma grand-mère bourguignonne, qui n’est pas celle de Laurent Duplomb, disait la même chose… (Sourires.)

Je ne fais pas confiance à ce gouvernement et au Président de la République qui, il y a quelques jours, a piétiné l’article 5 de la Constitution en déclarant qu’il « emmerd[ait] les non-vaccinés ». Je ne suis pas constitutionnaliste, mais imaginons que la situation française se dégrade et qu’il applique l’article 16 de la Constitution : il aura tous les pouvoirs, notamment celui d’imposer le passe vaccinal dans les lieux de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. S’il n’y avait que cela !

M. le président. La parole est à Mme Sylviane Noël, pour explication de vote.

Mme Sylviane Noël. Monsieur le rapporteur, je m’étonne de l’avis que vous avez émis sur mon amendement, puisque, au mois de novembre dernier, vous vous en étiez remis à la sagesse de la Haute Assemblée, ce qui avait d’ailleurs permis au Sénat de l’adopter. (M. le rapporteur le conteste.)

Si ! Il n’est qu’à se référer aux comptes rendus des débats.

Par ailleurs, au vu des dernières déclarations, qu’est-ce qui nous garantit que l’on ne recourra pas au vote électronique ou que l’on n’imposera pas la présentation du passe vaccinal à l’entrée du bureau de vote pour nous prémunir du risque que les non-vaccinés pourraient faire courir aux vaccinés ? On peut s’attendre à tout.

Depuis un an, on va de reniement en reniement. Rappelez-vous les prémices du passe sanitaire, ce qu’il était et ce qu’il est aujourd’hui, neuf mois après.

Par conséquent, je préfère pour ma part inscrire cette disposition dans la loi.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 44 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 191 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 12 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l’article.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, sans surprise, même si nous sommes très favorables à la vaccination et bien que la commission des lois se soit évertuée à revoir les contours et les modalités du passe vaccinal, nous voterons contre l’article 1er. Le caractère temporaire et les critères d’occupation de nos hôpitaux et de couverture vaccinale à 80 % sont pour nous plus qu’hypothétiques.

En effet, à l’heure où la quatrième dose de vaccin est déjà évoquée, comment ne pas douter d’une stabilisation de la définition du schéma vaccinal complet, donc d’un recul incessant dans le temps du taux d’atteinte de couverture vaccinale à 80 % ?

En outre, retenir comme critère l’accueil de moins de 10 000 patients dans les hôpitaux revient à conforter le Gouvernement, qui légifère pour pallier les carences de nos hôpitaux publics dont il est lui-même en grande partie à l’origine. Aussi, tous ces efforts, qui sont à saluer, mais qui accompagnent pour ainsi dire les cheminements du Gouvernement, ne remettent absolument pas en cause la logique sécuritaire et autoritaire en cours, laquelle devrait selon nous être renversée au profit d’une logique de gestion purement sanitaire et sociale de la crise.

À l’issue de la discussion de cet article, nous nous félicitons tout de même de l’adoption de notre amendement visant à exonérer du passe vaccinal les déplacements de longue distance par transports publics interrégionaux en cas de motif impérieux, pour se rendre à la convocation d’une juridiction ou d’une autorité administrative ou chez un professionnel du droit.

Deux autres de nos amendements ont été adoptés : en en ce sens, nous saluons le revirement salutaire de la commission des lois et de son rapporteur sur l’importante question des contrôles d’identité, lesquels restent, heureusement, une prérogative des forces de l’ordre. Espérons, mes chers collègues, que cela passe la rampe de la commission mixte paritaire.

M. Jean-Pierre Sueur. C’est nécessaire !

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote sur l’article.

M. Guy Benarroche. Sans surprise, notre groupe ne votera pas l’article 1er de ce projet de loi.

Certes, nous nous félicitons des avancées qui ont été permises grâce au travail de la commission des lois et de son président, et des quelques votes positifs que nous avons obtenus, après plusieurs heures de discussions, sur certains points, comme le contrôle des papiers d’identité ou les exceptions pour les déplacements lointains. Néanmoins, oserais-je dire, nous avons une discussion décousue dans laquelle nous voyons de façon manifeste que la loi correspond non pas aux objectifs que le gouvernement annonce, mais bien plutôt à une politique qui n’est pas une politique de diminution de la propagation du virus, ni même une véritable politique sanitaire de lutte contre la pandémie.

Loin d’être un projet de loi d’urgence sanitaire, il s’agit au contraire d’un projet de loi d’urgence politique.

Comme je l’ai souligné au cours de la discussion générale, la droite républicaine roumègue, grommelle, maugrée, modifie à la marge le périmètre ou certains éléments de ce projet de loi, mais accompagne malgré tout une nouvelle fois le Gouvernement. Vraisemblablement, un certain nombre d’arbitrages seront discutés non plus par le Parlement dans toute sa diversité, mais par la commission mixte paritaire en fonction d’accords qui lieront la droite républicaine, majoritaire au Sénat, et La République En Marche, majoritaire à l’Assemblée nationale.

Sur un projet de loi aussi important pour nos concitoyens, nous ne pouvons pas accepter ce fonctionnement. Après la révolte et la résignation, c’est la lassitude qui pèsera sur la vie sociale de notre société pendant des mois et des années.

Pour toutes ces raisons, nous nous opposons à ce projet de loi et nous nous opposons à l’article 1er, malgré les modifications apportées par la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote sur l’article.

M. Alain Richard. Notre groupe a des réserves sur deux ou trois des adjonctions apportés par la majorité du Sénat, qui semblent affaiblir certains éléments d’efficacité du passe vaccinal. Toutefois, comme il entraîne la création et la mise en œuvre du passe vaccinal en préservant l’essentiel de ses effets positifs, tous ses membres, à l’exception d’une collègue, voteront l’article 1er.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote sur l’article.

M. André Reichardt. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour les raisons que j’ai déjà indiquées et malgré les efforts substantiels de M. le rapporteur et de Mme le rapporteur pour avis pour encadrer l’article 1er de ce projet de loi, je ne pourrai pas le voter. Je le regrette.

M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote sur l’article.

Mme Victoire Jasmin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je reste profondément guadeloupéenne et je représente ici les élus de la Guadeloupe et les Guadeloupéens.

Compte tenu de la situation particulière dans laquelle se trouve la population guadeloupéenne, compte tenu du taux de vaccination insuffisamment pris en compte par la population, même si l’on note une augmentation tant chez les personnels soignants que dans la population, je ne voterai pas cet article.

Je ne suis pas antivax, je ne l’ai jamais été : j’ai eu un premier schéma vaccinal complet, puis un deuxième, conformément aux dispositions qui ont été prises. D’ailleurs, pour éviter que l’on ne pense que j’ai un faux passe, je me suis fait vacciner au Sénat ! Les preuves sont donc ici même…

Je ne peux pas accepter que le travail des élus guadeloupéens, qui a été proposé et adopté à l’Assemblée nationale, soit récusé ici. Comment puis-je représenter une population qui est aujourd’hui en difficulté à cause d’une minorité ?

À titre personnel, je voterai contre cet article. J’ignore comment se positionneront les autres membres de mon groupe, mais j’entends qu’ils respectent mon choix.

Madame la ministre, je vous remercie d’avoir émis un avis favorable sur les deux amendements de mes collègues Dominique Théophile et Victorin Lurel. J’espère que vous ferez au mieux pour que la situation de la Guadeloupe s’améliore.

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote sur l’article.

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je reste sceptique devant la logique de ce texte, particulièrement de l’article 1er, et ce malgré les améliorations apportées par la commission, son rapporteur M. Bas et notre assemblée.

Selon le Gouvernement, obliger toute la population à se vacciner et enchaîner les doses de rappel sous la menace d’une restriction des libertés permettrait de stopper l’épidémie et de diminuer la pression sur le système hospitalier, déjà bien malade. Ce n’est pas l’avis de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui affirme que des programmes de rappel sans discernement ont toutes les chances de prolonger la pandémie plutôt que d’y mettre fin.

Une fois de plus, l’exécutif semble céder à la panique. Marginaliser toute une partie de la population par l’instauration d’un passe vaccinal n’est pas une solution viable. Le ciblage et la protection des publics à risque devraient être privilégiés ; la pédagogie auprès des plus réfractaires devrait continuer ; l’utilisation des masques FFP2 devrait être renforcée et le traitement médical, développé.

Le Gouvernement oublie de prendre en compte le caractère international de la lutte contre l’épidémie. Le variant delta venait d’Inde ; omicron vient d’Afrique du Sud. Dans ces pays, le taux de vaccination reste faible. Une levée des brevets est indispensable pour limiter la circulation des variants. Bien sûr, la France ne peut l’obtenir à elle seule, vu que nous ne fabriquons pas de vaccin… Il faut donc un accord européen, et un accord avec les États-Unis, qui sont les principaux fabricants de vaccins.

M. le président. Il est temps de conclure.

Mme Esther Benbassa. Je reste persuadée de l’efficacité du vaccin. Pour ma part, j’ai reçu trois doses.

M. le président. Il faut conclure.

Mme Esther Benbassa. Pour autant, il n’est jamais bon d’instrumentaliser le médical pour faire de la politique.

M. le président. Concluez, à présent.

Mme Esther Benbassa. Je finis ! Il n’est pas bon, non plus, de manipuler les Français pour occulter les errements du gouvernement de M. Macron.

Je ne prends pas la parole souvent, monsieur le président… (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Je m’excuse d’avoir dépassé mon temps de parole. Je voterai contre cet article.

M. le président. Je demande à chacun de respecter le temps de parole qui lui est imparti.

La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote sur l’article.

M. Loïc Hervé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant de formuler mon explication de vote sur cet article, je voudrais saluer l’évolution réalisée en séance hier soir sur la question des contrôles d’identité. À mes yeux, donner la faculté à des responsables d’établissement de contrôler l’identité de nos compatriotes était l’un des deux problèmes principaux de ce texte, comme l’a bien montré la question préalable que j’avais déposée, monsieur le président. Le Sénat, dans sa sagesse, est revenu sur cette disposition. Merci, monsieur le rapporteur – et je compte absolument sur les sénatrices et sénateurs qui représenteront la Haute Assemblée dans la commission mixte paritaire pour que cet élément soit conservé dans le texte final.

Mais il reste le passe vaccinal. Or, depuis le début de cette crise, je n’ai jamais voté pour le passe sanitaire, sous aucune forme, parce que j’estime que cela pose des problèmes considérables, philosophiquement comme politiquement. Au-delà de ces dimensions politiques et philosophiques, sur lesquelles je suis revenu hier, ce passe pose le problème concret de son utilité sanitaire : il ne limitera en rien la diffusion d’un virus qui se propage entre vaccinés ! Je suis bien placé pour vous en parler puisque, alors que je suis vacciné, j’ai contracté cette maladie…

M. Alain Milon. Et vous n’en êtes pas mort !

M. Loïc Hervé. Non, et je m’en félicite !

Je souhaite enfin alerter le rapporteur sur le fait que les sanctions pénales prévues lorsque le passe sanitaire est utilisé à mauvais escient ou au mauvais endroit ne sont quasiment pas appliquées. On combat, comme il est normal, les faux passes. Nous devrions aussi combattre la mauvaise utilisation du passe sanitaire, et demain vaccinal, dans notre pays. Les sanctions pénales prévues dans la loi sont très lourdes.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote sur l’article.

Mme Françoise Gatel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec gravité, en conscience et en responsabilité, beaucoup de sénateurs centristes voteront cet article 1er, avec une profonde gratitude pour le travail remarquable et raisonnable qui a été accompli par nos commissions des lois et des affaires sociales.

Aucun d’entre nous n’a voulu, n’a choisi, n’a provoqué une telle situation. Mais il nous appartient, tout en respectant les convictions des uns et des autres, et tout en saluant la qualité du débat dans cet hémicycle, de reconnaître que, face à cette difficulté, il convient d’accepter et d’adopter des mesures sans doute discutables, mais qui permettront, sinon d’enrayer, du moins de vivre cette situation de la manière la moins difficile possible.

Je me réjouis quand je vois de quelle dignité notre assemblée fait preuve, car nous avons une responsabilité à l’égard d’un certain nombre de rumeurs ou d’emballements qui nous font parfois perdre le sens commun.