Proposition de loi relative aux conditions de l' élection des sénateurs .

La proposition de loi relative aux conditions de l'élection des sénateurs, déposée sur le Bureau du Sénat par MM. Jean-Pierre Bel, Bernard Frimat et les membres du groupe socialiste et apparentés le 7 mai 2008, envisage de modifier la répartition entre mode proportionnel et mode majoritaire dans le scrutin sénatorial en réservant l'élection des sénateurs au scrutin majoritaire aux seuls départements où sont élus deux sénateurs au plus. Elle prévoit la désignation, d'une part, de délégués des conseils municipaux dans le collège électoral sénatorial à raison d'un délégué pour 300 habitants ainsi que, d'autre part, de délégués supplémentaires des conseils généraux et des conseils régionaux. Elle précise enfin que les membres élus de l'Assemblée des Français établis hors de France désignent des délégués supplémentaires à raison d'un pour 300 Français inscrits au registre mondial des Français établis hors de France.

Rejet de la proposition de loi par le Sénat.

Inscrite à l' ordre du jour réservé du 4 juin 2008 au titre du droit de tirage du groupe socialiste, la proposition de loi relative aux conditions de l'élection des sénateurs a permis d'entendre dans la discussion générale , après le premier signataire de la proposition de loi, M. Jean-Pierre Bel, Président du groupe socialiste, le rapporteur de la commission des lois, M. Jean-René Lecerf, et M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, M. Hugues Portelli, Mme Eliane Assassi, MM. Michel Mercier, Bernard Frimat et Pierre Mauroy.

Faisant état des interrogations formulées de façon récurrente sur la question de la représentativité du Sénat eu égard à la composition de son collège électoral, M. Jean-Pierre Bel, auteur de la proposition de loi, a indiqué que cette dernière conduisait à un triple rééquilibrage : celui du poids relatif des différentes catégories de communes au sein du collège électoral, celui du poids relatif des trois catégories de collectivités territoriales et celui de la représentation politique et de la parité. Il a vigoureusement déploré le refus opposé par la majorité sénatoriale à ces propositions d'évolution, en décalage avec le discours sur la modernisation des institutions.

Après avoir considéré que la proposition de loi se présentait « comme indissociable du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la V ème République » qui allait prochainement venir en discussion au Sénat, M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a estimé que « la légitimité du Sénat devait être appréciée à l'aune du bicamérisme, qui trouve sa raison d'être en ce qu'il est différencié » et que celui-ci était « à la fois le gardien de la modération et de la continuité des institutions » et « le représentant de la nation au travers des collectivités territoriales ». Evoquant la principale modification du collège électoral prévue par la proposition de loi consistant à attribuer un délégué supplémentaire pour 300 habitants, le rapporteur a rappelé qu'une décision du Conseil constitutionnel du 6 juillet 2000 avait déclaré non conforme à la Constitution une disposition similaire. Tout en admettant que « la proposition de créer des délégués supplémentaires des conseils généraux et régionaux [...] méritait qu'on s'y arrête », il a objecté la faiblesse de la « place laissée aux élus du suffrage universel dans le dispositif » et les difficultés matérielles liées à l'élargissement du collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France.

A l'issue de la discussion générale, le Sénat a été saisi par la commission des lois d'une motion tendant à opposer la question préalable . Après avoir estimé que toute modification du collège électoral sénatorial devrait, notamment, être précédée de la définition d'une nouvelle carte cantonale et prendre en considération la montée en puissance des établissements publics de coopération intercommunale et après avoir esquissé quelques pistes de réflexion complémentaires, M. Jean-René Lecerf, rapporteur, a déclaré que « l'importance des réformes inscrites dans la proposition de loi » rendait « tout à fait illusoire la possibilité d'en débattre avant d'aborder l'examen de la révision constitutionnelle ». Après vérification du quorum demandée par M. Jean-Pierre Bel, le Sénat , après un rappel au Règlement de M. Jean-Luc Mélenchon et les explications de vote de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et de M. Jean-Pierre Sueur, a adopté la motion tendant à opposer la question préalable par le scrutin public n° 94 demandé par le groupe UMP, rejetant par voie de conséquence la proposition de loi relative aux conditions de l'élection des sénateurs.