Table des matières


Mercredi 10 mars 1999

- Présidence de M. Adrien Gouteyron, président, puis de M. Jean-Léonce Dupont, vice-président.

Audition de M. Olivier Schrameck, directeur du cabinet du Premier ministre

La commission a d'abord procédé à l'audition de M. Olivier Schrameck, directeur du cabinet du Premier ministre.

M. Adrien Gouteyron, président,
a rappelé que M. Lionel Jospin, lorsqu'il était ministre de l'éducation nationale, avait engagé une revalorisation importante de la profession enseignante. Il a souhaité obtenir des précisions sur les objectifs poursuivis par cette revalorisation et s'est demandé si elle n'aurait pas dû être accompagnée d'une réforme des obligations de service des enseignants. 

M. Xavier Darcos a constaté que le plan de revalorisation était aujourd'hui regardé comme nécessaire et allant de soi, mais a estimé qu'il avait engendré des tensions dans le premier degré, les professeurs des écoles étant plus rémunérés que les instituteurs. Il s'est interrogé sur la logique purement quantitative qui régit le système éducatif, rappelant que l'éducation nationale coûtait un milliard de francs chaque jour à l'Etat. Il a rappelé les difficultés croissantes auxquelles étaient confrontés les chefs d'établissement, notamment dans les collèges, et s'est demandé s'il ne fallait pas s'orienter vers une nouvelle conception de leur rôle et leur accorder davantage d'autorité sur les enseignants. Enfin, il a souligné que la bivalence était une solution souvent avancée pour remédier aux dysfonctionnements constatés dans l'affectation des postes, et a jugé peu pertinente la suppression du corps des professeurs d'enseignement général des collèges (PEGC).

M. Francis Grignon, rapporteur, a constaté que le système éducatif faisait l'objet de multiples réformes dont l'empilement nuisait à la lisibilité de l'ensemble. Puis il s'est interrogé sur l'avenir des aides-éducateurs recrutés dans l'éducation nationale dans le cadre du dispositif des emplois-jeunes.

Mme Hélène Luc a déclaré partager la crainte des enseignants à l'égard de certaines propositions consistant à accroître les pouvoirs hiérarchiques des chefs d'établissement. Elle a cependant constaté que les enseignants, comme les chefs d'établissement, devaient exercer leurs fonctions dans des conditions de plus en plus difficiles, les seconds étant insuffisamment rémunérés et considérés. Elle a souhaité obtenir des précisions sur la façon dont les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) devraient s'adapter pour assurer la qualité de l'enseignement. Elle s'est interrogée sur les véritables raisons de la baisse de la rémunération des heures supplémentaires décidée par le ministre en juillet 1998. Elle a enfin rappelé que le dispositif des aides-éducateurs avait permis à de nombreux jeunes de sortir du chômage mais a voulu savoir si leurs postes seraient pérennisés et si la préparation de ces aides-éducateurs aux concours d'enseignant était envisagée.

Après avoir prêté serment, M. Olivier Schrameck a souhaité replacer le débat dans le contexte des années 1987 et 1988. Il a rappelé que la revalorisation de la rémunération des enseignants était une promesse de M. René Monory, lorsque celui-ci était ministre de l'éducation nationale, pendant la première cohabitation. Cette promesse, si elle a suscité le scepticisme des syndicats enseignants, a toutefois été renouvelée au cours de la campagne pour les élections présidentielles de 1988, un accord général se dégageant pour faire de l'éducation nationale la première priorité nationale. Il a ensuite voulu rappeler l'état d'esprit des enseignants de l'époque, caractérisé par un sentiment de dévalorisation, de méconnaissance de leurs fonctions par l'opinion publique, et d'une certaine détresse matérielle et psychologique. Leurs rémunérations étaient jugées insuffisantes et leurs conditions de travail de plus en plus difficiles ; en outre, les enseignants ne se reconnaissaient pas dans les valeurs à l'époque privilégiées, qui tendaient à promouvoir l'entreprise au détriment du service public.

M. Olivier Schrameck a rappelé que cette situation avait des répercussions au niveau des concours de recrutement, seuls 60 % des postes inscrits au concours externe du CAPES étant pourvus. En outre, beaucoup de candidats inscrits ne se présentaient pas aux épreuves, tandis que les jurys déploraient la mauvaise qualité de nombre d'entre eux. Le contexte plaidait ainsi pour une amélioration des conditions matérielles des enseignants, le ministre de l'époque ayant annoncé qu'elle serait réalisée grâce à l'augmentation de la rémunération des heures supplémentaires. Ainsi, lors de son arrivée rue de Grenelle, M. Lionel Jospin se trouvait-il face à des interlocuteurs très revendicatifs.

M. Olivier Schrameck  a rappelé que la revalorisation de la rémunération des enseignants, souvent qualifiée de " Plan Jospin ", poursuivait trois objectifs.

D'abord, il s'agissait de rétablir la reconnaissance de la fonction enseignante au sein de la nation, y compris sur le plan financier. En second lieu, le " Plan Jospin " visait à améliorer la formation des enseignants. Le ministre, en effet, avait estimé que les modalités de la formation étaient insuffisantes et que cette formation devait être dispensée dans des lieux adaptés. Cette analyse s'est traduite, d'une part, par des exigences universitaires accrues pour les futurs maîtres du premier degré, le premier et le second degrés devant bénéficier d'une égale dignité, et, d'autre part, par la création des IUFM qui ont vocation à former l'ensemble des futurs enseignants.

M. Olivier Schrameck a souligné que l'amélioration de la gestion des enseignants, mais également leur mobilisation au bénéfice des tâches les plus urgentes et les plus difficiles pouvaient passer, soit par une meilleure rémunération des heures supplémentaires, soit par une revalorisation indiciaire. M. Lionel Jospin a préféré créer en 1988 un régime indemnitaire afin d'introduire davantage de souplesse dans la politique de rémunérations. C'est ainsi que furent créées l'indemnité de zone d'éducation prioritaire (ZEP), dans le cadre de la politique de relance des ZEP, l'indemnité de première affectation pour inciter les enseignants à s'orienter vers des disciplines déficitaires, ainsi que des indemnités péri-éducatives. Les dispositions de nature indiciaire n'étaient pas absentes du " Plan Jospin ", mais l'accent a été porté sur l'allongement de la durée des carrières, en particulier par la création de la " hors classe " qui, en principe, ne devait pas être automatiquement pourvue à l'ancienneté.

Abordant les résultats de ce plan de revalorisation, M. Olivier Schrameck a observé que le thème de la revalorisation avait disparu après deux ou trois ans des discours des organisations syndicales. Non seulement le sentiment d'insatisfaction matérielle n'est plus évoqué, mais le nombre de candidatures aux concours a considérablement augmenté, le rôle des IUFM étant désormais reconnu. Il a ainsi considéré que la crise de recrutement dans l'éducation nationale était terminée. Il a tenu à relativiser le coût de ce plan, au regard des masses budgétaires affectées à l'éducation nationale dans son ensemble. Il a rappelé que le coût initial du plan devait être de 17 milliards de francs sur dix ans, son coût réel ayant été de 19 milliards de francs, soit une augmentation de la rémunération des enseignants de 1,6 % par an en moyenne.

M. Olivier Schrameck a affirmé que M. Lionel Jospin n'avait pas pensé qu'il était nécessaire d'accompagner cette revalorisation d'une réforme du service des enseignants, les organisations syndicales n'étant pas disposées à une telle réforme : ni la FEN ni le SNES en particulier n'avaient formulé de telles revendications. La démarche adoptée fut inverse : elle consistait à prendre appui sur un geste matériel en faveur des enseignants pour développer une pédagogie nouvelle. C'est le même esprit qui a présidé à l'élaboration de la loi d'orientation sur l'éducation de 1989, qui a introduit d'importantes réformes relatives, notamment, au travail en équipe, à l'amélioration de l'encadrement des élèves, à la création des IUFM.

M. Olivier Schrameck a rappelé que l'amélioration des conditions des enseignants du premier degré pouvait passer soit par la revalorisation de la rémunération des instituteurs, soit par la création d'un corps nouveau bénéficiant d'une formation nouvelle. C'est cette deuxième solution qui a été retenue, les professeurs des écoles recevant désormais une formation dans les IUFM et bénéficiant de rémunérations comparables à celles des enseignants du second degré. Il a été décidé d'étaler dans le temps la charge financière induite par la création de ce corps nouveau, même si est apparu un problème inévitable au cours de la période de transition, un protocole d'accord ayant été récemment signé afin d'accélérer l'extinction du corps des instituteurs, aujourd'hui prévu en 2007 au lieu de 2017.

Il a considéré que la revendication quantitative, qui était effectivement très présente, n'était pas seulement le fait des organisations syndicales et des enseignants, mais aussi de l'opinion publique, même si le contribuable pouvait être plus réservé. Il a cité l'exemple des dernières rentrées qui, malgré une diminution importante des effectifs du premier degré, ont été l'occasion d'une forte demande sociale en termes de postes et d'équipements nouveaux.

M. Olivier Schrameck a estimé que la question des chefs d'établissement était aujourd'hui cruciale, beaucoup de parents d'élèves considérant que la qualité d'un établissement est liée à celle de son responsable. Il a jugé que le concours de recrutement des chefs d'établissement mis en place en 1987 avait été une erreur, les critères retenus par ce concours n'étant pas, selon lui, adaptés au recrutement de personnels affectés sur ce type de poste. Il a par ailleurs rappelé que les chefs d'établissement avaient bénéficié de quatre revalorisations depuis 1988. Il a observé qu'il existait souvent une méfiance très grande des enseignants à l'égard des chefs d'établissement, dont la légitimité sur les plans hiérarchique et pédagogique est souvent contestée.

M. Olivier Schrameck a souhaité que la déconcentration du mouvement des enseignants du second degré permette d'améliorer la gestion des carrières, même si des difficultés apparaîtront probablement au cours des premières années d'application. Il a considéré qu'il était légitime de proposer un regroupement des options, d'autant plus que ces dernières sont à l'origine de nombreuses inégalités entre les établissements.

Il a rappelé que M. Lionel Jospin, en 1988, n'avait pas voulu créer un corps de professeurs de collège, d'une part, en raison d'un refus catégorique de la part des organisations syndicales, et, d'autre part, car il avait estimé qu'un tels corps serait la source de nouvelles difficultés de gestion. Il a considéré que la bivalence pour les petites classes du collège ne devait pas être imposée mais seulement favorisée, car elle présente un double intérêt, tenant à la gestion mais aussi à la pédagogie, ajoutant qu'il ne serait pas judicieux de donner une dimension statutaire à une question purement pédagogique.

M. Olivier Schrameck a jugé qu'il était difficile d'évaluer précisément les conséquences budgétaires des différentes réformes du système éducatif. Il a rappelé que M. Lionel Jospin avait créé, dans la loi d'orientation sur l'éducation, le conseil national des programmes qui a pour mission de mener une réflexion permanente sur la simplification des cursus d'enseignement et sur l'allégement des programmes qui ont fait l'objet d'une stratification excessive, les débats actuels autour de la réforme des lycées en constituant une bonne illustration.

Il a estimé qu'il était trop tôt pour se prononcer sur l'avenir des aides éducateurs, un bilan approfondi ne pouvant être établi qu'au terme des deux ou trois années à venir, notamment dans le cadre de la réforme de l'école du XXIe siècle.

M. Olivier Schrameck a rappelé que le Gouvernement avait abandonné, en 1988, le projet de réforme du statut des directeurs d'école mais il a observé que leur situation ne s'était guère améliorée depuis lors, les exigences accrues envers l'école se cristallisant sur la personne du directeur. Il a estimé que l'évolution du métier d'enseignant était due en grande partie à la démocratisation de l'enseignement, le lycée accueillant des catégories sociales défavorisées qui, auparavant, n'y avaient pas accès. Il a estimé que les IUFM étaient aujourd'hui perçus comme l'instrument légitime et indispensable de la formation des enseignants.

M. Olivier Schrameck a rappelé que le dernier conseil de sécurité intérieure avait décidé de recruter 10.000 aides-éducateurs supplémentaires et a insisté sur le fait que ces emplois-jeunes devaient avoir un profil nouveau et différent de celui des maîtres d'internat-surveillants d'externat afin que les intéressés puissent se préparer aux concours d'enseignants et de non-enseignants. Il a également considéré que les aides-éducateurs nouvellement recrutés devraient davantage venir des quartiers sensibles.

Il a estimé que la modification des modalités de rémunération des heures supplémentaires s'inscrivait dans le cadre plus général d'une meilleure répartition des moyens affectés à l'éducation nationale. Cette décision a été en partie motivée par des raisons de solidarité et a permis notamment de financer les 60.000 emplois-jeunes recrutés dans l'éducation nationale. En outre, ce système des heures supplémentaires avait mal vieilli et n'était plus adapté.

Il a cependant reconnu que l'effet psychologique et matériel pour les enseignants avait été désastreux et il a annoncé que la question serait de nouveau débattue avec les organisations syndicales, compte tenu toutefois des contraintes du budget de l'éducation nationale, rappelant que les crédits affectés à la rémunération des heures supplémentaires s'élevaient à 700 millions de francs.

Audition de M. Roger Belot, président-directeur général de la MAIF (mutuelle d'assurance des instituteurs de France)

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Roger Belot, président-directeur général de la MAIF (mutuelle d'assurance des instituteurs de France).

Après avoir prêté serment, M. Roger Belot a rappelé que la MAIF avait été créée en 1934 pour assurer les instituteurs contre les risques de dommage matériel et qu'elle avait depuis été étendue notamment aux personnels de l'éducation nationale, de la recherche et de la culture. Il a ensuite indiqué que la MAIF employait 4.800 salariés et que 550 enseignants délégués départementaux participaient bénévolement au développement de la mutuelle. Il a souligné que la MAIF bénéficiait, selon les termes de la convention passée avec le ministère de l'éducation nationale, de dix mises à disposition, dont sept à temps partiel. Il a rappelé que la mutuelle remboursait intégralement leurs salaires, charges comprises, et a noté que ces mises à disposition permettaient aux intéressés d'exercer leur mandat d'administrateur.

Un débat s'est ensuite instauré.

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président, a souhaité connaître les avantages pour la MAIF d'un recours aux personnels de l'éducation nationale, notamment sur le plan financier. Il a également demandé si la mutuelle recevait des subventions du ministère de l'éducation nationale.

M. Francis Grignon, rapporteur, s'est enquis d'éventuelles mises à disposition supplémentaires consenties par les rectorats. Il a souhaité savoir si la structure de la mutuelle ne privilégiait pas à l'excès l'éducation nationale et si l'utilisation de ces personnels ne conduisait pas à fausser la concurrence avec les autres mutuelles.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint, a souhaité connaître la durée moyenne des mises à disposition et s'est interrogé sur la possibilité pour certains enseignants d'exercer la totalité de leur carrière au sein de la MAIF. Il a également demandé des précisions sur l'organisation départementale de la mutuelle.

M. Jean Bernadaux s'est demandé si les enseignants participant au fonctionnement de la MAIF à l'échelon départemental étaient rémunérés et si la CAMIF (Coopérative des adhérents à la mutuelle des instituteurs de France) bénéficiait de personnels mis à disposition.

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président, a souhaité savoir s'il existait des liens, notamment financiers, entre la MAIF et d'autres mutuelles proches de l'éducation nationale telle que la MAE (Mutuelle d'assurance des élèves). Il s'est ensuite interrogé sur la place de la MAIF sur le marché des assurances et sur les conditions d'affiliation à cette mutuelle. Il a également demandé si la MAIF et ses filiales bénéficiaient de personnels mis à disposition n'appartenant pas au ministère de l'éducation nationale, et si les emplois jeunes pouvaient adhérer à la MAIF.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint, a demandé si la MAIF offrait d'autres services que l'assurance dommage et s'est également enquis de sa place sur le marché des assurances et mutuelles.

M. Jean Bernadaux a souligné que les adhérents de la MAIF constituaient une population à faible risque pour les assureurs.

M. Pierre Martin s'est interrogé sur les qualités gestionnaires des enseignants mis à la disposition de la MAIF et s'est demandé si un certain clientélisme n'était pas privilégié par rapport au professionnalisme.

Répondant à ces interventions, M. Roger Belot a notamment apporté les précisions suivantes :

- la MAIF ne reçoit aucune subvention du ministère de l'éducation nationale. Au contraire, elle finance certaines actions de prévention menées en partenariat avec le ministère ;

- la mutuelle rembourse intégralement les salaires des personnels mis à disposition et ne bénéficie d'aucun avantage d'ordre financier ou susceptible de fausser la concurrence ;

- le conseil d'administration de la MAIF est composé de 21 membres, enseignants mis à disposition ou enseignants retraités. L'élection d'administrateurs appartenant à d'autres corps est théoriquement envisageable, mais en fait l'essentiel des adhérents est constitué de personnels de l'éducation nationale ;

- les mises à disposition sont subordonnées à l'élection et à la reconduction du mandat des administrateurs ; ces derniers doivent avoir fait leurs preuves au sein des délégations départementales ; ils sont âgés en moyenne de 50 ans et la durée de leur mise à disposition s'échelonne entre cinq et dix ans ;

- la MAIF dispose de 135 délégations départementales qui rassemblent dans une double structure 550 enseignants bénévoles et des salariés qui sont des techniciens de l'assurance. Les administrateurs contrôlent notamment le fonctionnement des délégations départementales et le respect des valeurs mutualistes ;

- les délégués départementaux de la MAIF ne sont pas rémunérés, mais perçoivent des indemnités pour leurs frais ;

- la CAMIF qui a été créée par la MAIF pour les sociétaires en difficulté dispose désormais d'une totale indépendance financière et institutionnelle et ne bénéficie d'aucun personnel mis à disposition ;

- la MAIF n'entretient aucune relation financière avec les mutuelles telles que la MAE ou la MGEN (Mutuelle générale de l'éducation nationale), chacune de ces mutuelles offrant des prestations spécifiques et complémentaires ;

- la MAIF a créé une filiale (FILIA-MAIF) pour assurer les enfants de plus de 26 ans de ses sociétaires ainsi que les personnels qui quittent l'éducation nationale ;

- la MAIF propose des services d'assurance mais a aussi créé une filiale assurance-vie afin de fidéliser ses sociétaires ;

- 7.000 aides-éducateurs ont adhéré à la mutuelle en 1998 ;

- avec 2 millions d'assurés, la MAIF occupe la huitième place sur le marché des assureurs de dommages.

Audition de M. Pierre Tournemire, secrétaire général adjoint de la Ligue française de l'enseignement et de l'éducation permanente

La commission a enfin procédé à l'audition de M. Pierre Tournemire, secrétaire général adjoint de la Ligue française de l'enseignement et de l'éducation permanente.

Après avoir prêté serment, M. Pierre Tournemire a présenté son organisation avant d'évoquer les emplois de la Ligue qui sont financés par l'éducation nationale.

Il a rappelé que la Ligue de l'enseignement, fondée en 1866, était une des plus anciennes associations françaises et avait contribué à la mise en place de l'école républicaine sous l'égide notamment de Gambetta, Jules Ferry, Paul Bert ou Ferdinand Buisson. Dissoute par le gouvernement de Vichy, elle renaît à la Libération et développe depuis des activités sociales et culturelles.

Il a indiqué que la Ligue de l'enseignement regroupait aujourd'hui 2 millions d'adhérents au sein de 33.000 associations locales affiliées à une fédération départementale. Il a précisé que la Ligue était à la fois un partenaire de l'éducation nationale, une fédération d'associations et un mouvement de réflexion sur la citoyenneté et la laïcité. Il a remarqué que cette association bénéficiait du soutien du ministère de l'éducation nationale qui avait toujours mis à sa disposition des personnels, gérés par les inspecteurs d'académie.

M. Pierre Tournemire a ensuite rappelé que, depuis 1984, les mises à disposition dont bénéficiaient la Ligue faisaient l'objet d'une convention avec le ministère de l'éducation nationale. Il a noté qu'en 1986, à l'initiative de M. René Monory, les mises à disposition avaient été remplacées par une subvention directe et qu'en 1988, M. Lionel Jospin avait partiellement rétabli les mises à disposition en maintenant une subvention pour les autres postes. La Ligue dispose aujourd'hui de 628 postes financés par l'éducation nationale dont 200 mises à disposition et d'une subvention de 98,7 millions de francs permettant de financer 428 postes de salariés comprenant 151 fonctionnaires détachés. Ces postes sont répartis pour l'essentiel dans les 102 fédérations départementales.

Il a indiqué que ces personnels exerçaient diverses fonctions, notamment de soutien aux associations locales pour l'organisation d'activités péri-scolaires, sportives ou culturelles et pour le développement de classes de découvertes ou de centres de vacances. Il a noté que ces activités s'inscrivaient dans le prolongement du service public d'éducation défini par la loi d'orientation du 10 juillet 1989, ce qui justifiait le soutien apporté par le ministère de l'éducation nationale.

Un débat s'est ensuite instauré.

M. Francis Grignon, rapporteur, s'est interrogé sur la nature des tâches confiées aux personnels mis à disposition et sur la part de la subvention accordée par le ministère dans le budget annuel de la Ligue.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint, s'est enquis de la durée moyenne des mises à disposition. Il s'est demandé si certains enseignants exerçaient la majeure partie de leur carrière au sein de l'association, si certaines de ses activités commerciales étaient soumises à l'impôt et si la Ligue utilisait des emplois-jeunes.

M. Jean-Léonce Dupont, vice-président, a souhaité savoir si les 33.000 associations locales fédérées par la Ligue de l'enseignement bénéficiaient de personnels mis à disposition ou du soutien financier du ministère de l'éducation. Il a également demandé des précisions sur l'origine des personnels mis à disposition de l'association. Enfin, il a évoqué le problème du financement des emplois-jeunes et exprimé la crainte que leur pérennisation ne se traduise dans l'avenir par une participation financière des collectivités locales.

M. Pierre Martin a souhaité connaître le nombre de postes FONJEP (Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire) attribués à la ligue de l'enseignement. Il s'est inquiété de l'éventuelle pérennisation des emplois-jeunes, et s'est demandé si la Ligue en supportait les charges sociales. Il s'est également inquiété des perspectives de financement de ces emplois par les collectivités locales.

En réponse à ces interventions, M. Pierre Tournemire a notamment apporté les précisions suivantes :

- la Ligue de l'enseignement emploie au total 42.000 salariés, pour des activités plus ou moins longues ; les fonctionnaires qui sont mis à sa disposition sont donc très minoritaires mais exercent les fonctions d'encadrement des activités de nature éducative ;

- la subvention allouée par le ministère de l'éducation nationale ne représente qu'une part réduite dans un budget annuel qui s'élève à 3 milliards de francs. Les ressources de la Ligue résultent pour l'essentiel de ses activités qui sont financées également par les collectivités territoriales, et proviennent aussi des subventions des ministères chargés de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et de la culture ;

- la durée moyenne des mises à disposition est très variable : les personnels souhaitant retrouver leur fonction enseignante ne collaborent en moyenne pas plus de sept ans avec l'association ; si certains personnels exercent la majeure partie de leur carrière au sein de la Ligue, ils ont préalablement consacré 10 ou 15 ans à leur fonction enseignante ;

- les activités de l'association sont pour l'essentiel non lucratives et donc non soumises à la fiscalité, à l'exception des actions en matière de tourisme et de vacances ; une instruction fiscale est en préparation concernant la fiscalité des activités de tourisme social ;

- les personnels mis à disposition sont gérés par le ministère ; les associations locales fédérées par la Ligue n'en bénéficient pas, sauf rares exceptions ;

- la Ligue de l'enseignement dispose de 300 postes FONJEP qui bénéficient d'une aide forfaitaire de 45.000 francs ;

- les personnels mis à disposition de l'association et détachés sont en majorité des enseignants du premier degré ;

- la Ligue utilise 700 emplois-jeunes et en supporte les charges sociales ; leur financement est partagé entre l'Etat, les collectivités locales et l'association qui prend en charge le solde ;

- la pérennisation des emplois-jeunes est envisageable, dans la mesure où ceux-ci répondent à de nouveaux besoins ; elle devra s'accompagner d'une réelle professionnalisation de ces emplois et de la recherche de financements diversifiés.