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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Saisine du Conseil constitutionnel (Question prioritaire de constitutionnalité)

Questions orales (Retrait)

Questions orales

Protection des territoires de montagne

Maintien de la gare de Briare

Aéroport de Cayenne

Accès des personnes handicapées aux établissements et aux transports publics

Irrigation

Situation des personnes handicapées

Associations d'aide à la personne

RGPP dans la Défense

Salaires et Ordre des infirmiers

Profession d'herboriste

Alimentation en eau potable

Découverts bancaires

Offices de tourisme et syndicats d'initiative communaux

Représentation des Parisiens au conseil municipal

Observatoire de la laïcité

Prix des produits agricoles

Enseignement agricole

Disparition du bail à colonat partiaire

Eloge funèbre de Jacqueline Chevé

CMP ( Grand Paris - Candidatures)

Article 65 de la Constitution (Deuxième lecture) et mandat du Conseil supérieur de la magistrature (Procédure accélérée)

Discussion générale commune

Logement (Questions cribles thématiques)

CMP (Grand Paris-Nominations)

Article 65 de la Constitution (Deuxième lecture) et mandat du Conseil supérieur de la magistrature (Procédure accélérée) (Suite)

Discussion des articles (Article 65 de la Constitution)

Article 3

Article 4

Article 6 bis

Article 7

Article 7 bis

Article additionnel

Article 11

Article additionnel

Article 18

Article 25

Discussion de l'article unique (Mandat du CSM)

Conférence des Présidents

Moyens de contrôle du parlement

Discussion générale

Discussion des articles

Article premier

Article additionnel

Article 3

Article additionnel

Renvoi pour avis




SÉANCE

du mardi 27 avril 2010

90e séance de la session ordinaire 2009-2010

présidence de M. Jean-Léonce Dupont,vice-président

Secrétaires :

Mme Monique Cerisier-ben Guiga, Mme Michelle Demessine.

La séance est ouverte à 9 h 35.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Saisine du Conseil constitutionnel (Question prioritaire de constitutionnalité)

M. le président. - M. le président du Conseil constitutionnel a informé M. le président du Sénat qu'en application de l'article 61-1 de la Constitution, le Conseil d'État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d'une question prioritaire de constitutionnalité en date du 23 avril 2010.

Questions orales (Retrait)

M. le président.  - J'informe le Sénat que la question orale n° 854 de M. Jean Boyer est retirée du rôle des questions orales à la demande de son auteur.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses à dix-huit questions orales.

Protection des territoires de montagne

Mme Jacqueline Alquier.  - La loi du 3 janvier 1991 limite la circulation des véhicules à moteur dans les espaces naturels, les principales exceptions concernant les services publics et certaines activités professionnelles.

Les milieux naturels restent vulnérables, au moment où le nombre des quads augmente sans cesse. Or une proposition de loi a été déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale tend à libéraliser l'accès des véhicules tout terrain dans les zones de montagne. La Fédération des parcs naturels régionaux a dit son opposition à ce texte ; le Gouvernement doit d'autant rappeler les fondements de sa politique en la matière que l'auteur de la proposition de loi vient de récidiver.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.  - L'objectif reste bien de protéger les espaces naturels. Les véhicules à moteur ne peuvent circuler que sur les voies ouvertes à la circulation publique, aussi bien en plaine qu'en montagne. Cette limitation a été rappelée par la circulaire du 6 septembre 2005. Tout contrevenant s'expose à une amende de cinquième classe et à l'immobilisation de son véhicule. Il n'est pas envisagé de revenir sur ce dispositif.

Mme Jacqueline Alquier.  - Je me félicite de cette réponse claire et ferme. Encore faut-il se doter des moyens de faire respecter les textes, ce qui n'est pas le cas.

Maintien de la gare de Briare

M. Jean-Pierre Sueur.  - Vous connaissez le célèbre pont-canal de Briare, oeuvre majeure de l'architecture industrielle. Il est question de réduire les services rendus aux usagers de la gare de Briare et de supprimer la présence des agents de la SNCF. Cette gare dessert le Loiret mais aussi le nord du Cher ou encore l'ouest de l'Yonne. Quelles sont les intentions du Gouvernement envers les petites gares situées en milieu rural ? La présence humaine est indispensable, notamment pour les personnes âgées ou handicapées. Aucune machine ne peut remplacer un agent. Pouvez-vous garantir le maintien de cette gare avec présence humaine ? A défaut, ce serait une gare morte.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.  - M. Bussereau connaît votre attachement pour la gare de Briare. Il est bien sûr attentif à l'aménagement du territoire et au développement des transports collectifs en zone rurale.

Le Gouvernement veille à la qualité du service rendu par la SNCF. Ce sera un des thèmes du prochain CIADT. En 2009, 3 639 trains se sont arrêtés à Briare ; 47 300 ont été recensés en 2008.

Aucun projet de suppression de service n'est envisagé à Briare, non plus qu'une restriction de la desserte. La SNCF analyse la situation de ses points de vente pour les adapter à l'évolution de la demande et aux modes de consommation de ses clients. Le Gouvernement ne souhaite pas voir la SNCF déserter le milieu rural. Il refuse tout déménagement du territoire.

M. Jean-Pierre Sueur. - Merci pour cette réponse. Sur l'ensemble du territoire, il ne doit pas y avoir de gare sans agent, nonobstant les possibilités ouvertes par internet et par le téléphone, où l'on compose le 1, puis le 3 et le 2... avant de recommencer parfois ! (Sourires) Aucune technologie ne remplace la présence humaine.

Aéroport de Cayenne

M. Georges Patient. - L'aéroport de Cayenne-Rochambeau rencontre de graves difficultés techniques, matérielles et humaines. Un plan d'action a été lancé par la Direction des services de la navigation aérienne (DSNA), mais nombre d'interrogations demeurent. Pourquoi ce refus de créer un service de navigation propre à la Guyane ? Qu'attendez-vous pour reclasser le Bureau de traitement de l'information de vol en Bureau régional d'information aéronautique et d'assistance en vol ? Il ne disposera bientôt que de six agents au lieu de neuf, conduisant à une fermeture de 21 h 30 à 7 h 30. L'idée de confier temporairement l'espace de Cayenne au Brésil suscite en outre de grandes inquiétudes.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.  - Le SNA d'Antilles Guyane est l'échelon interrégional de la DSNA, qui permet la mutualisation des moyens et des procédures. La création d'un BTIV a été envisagée en novembre pour suppléer l'insuffisance du nombre de contrôleurs, mais il apparaît que la sécurité en pâtirait. Mieux vaut tout confier aux contrôleurs. S'en remettre temporairement au Brésil est une solution aujourd'hui écartée. J'ajoute que trois avis de vacances d'emploi ont été ouverts.

M. Georges Patient. - La spécificité de l'aéroport de Cayenne doit être prise en compte. Or, la situation se dégrade avec l'hémorragie du nombre de contrôleurs : les trois quarts des intéressés ont demandé leur mutation. Ils sont découragés et ressentent un fort sentiment d'abandon.

Accès des personnes handicapées aux établissements et aux transports publics

M. Jacques Mézard. - Ma question porte sur le financement des mises aux normes imposées, à juste titre, par la loi du 11 février 2005. Les collectivités locales ne peuvent faire face à leurs obligations - dont certaines sont tout à fait inutiles - dans les délais impartis, notamment pour l'accès aux transports publics. L'aide de l'État est nécessaire.

La loi autorise des dérogations en cas de difficulté technique avérée, à condition qu'existent des services de substitution. Ne vaudrait-il pas mieux privilégier les services à la demande ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.  - La loi du 11 février 2005 oblige les autorités organisatrices de transport d'assurer en dix ans l'accessibilité des personnes handicapées à leurs réseaux. L'État, pour sa part, a approuvé le 11 juin 2008 le schéma organisant l'accessibilité de plusieurs centaines de gares et de quais, la SNCF et RFF finançant respectivement à hauteur de 500 et 114 millions d'euros. Aucune participation financière de l'État n'est prévue pour les autorités locales organisatrices de transport, qui pourront toutefois bénéficier de sa part d'un appui juridique et technique. L'Observatoire interministériel de l'accessibilité a été créé à cette fin. En cas d'impossibilité technique, l'autorité organisatrice doit instaurer des services de substitution en liaison avec les associations.

M. Jacques Mézard.  - Votre réponse n'est guère positive. Où sont les mesures concrètes ? Beaucoup de normes sont inapplicables : la loi de 2005 ne pourra être appliquée dans de bonnes conditions, y compris par ceux qui ne doutent pas de son utilité.

Irrigation

M. Yvon Collin.  - Le décret du 24 décembre 2007 relatif à l'irrigation doit plus à l'idéologie qu'à la prise en compte des besoins réels de l'agriculture, car il conduit à une baisse spectaculaire - jusqu'à 100% ! - des volumes prélevables dans certains bassins versants. C'est inacceptable. Dans le Tarn-et-Garonne, l'irrigation concerne 85 000 hectares sur 225 000. Après avoir réduit leur consommation de 30 %, les agriculteurs souhaitent que ce décret soit adapté au cas des petites rivières. Il faudrait aussi mettre en oeuvre une vraie politique de stockage de l'eau et prendre en compte le débit plutôt que le volume. Des solutions existent.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.  - Le décret définit les responsabilités ainsi que les procédures applicables en partant des objectifs d'étiage. Ces dix dernières années, des arrêtés de sécheresse ont systématiquement remis en cause les autorisations de prélèvement dans de très nombreux départements. La réforme tend à rétablir la réalité des autorisations afin d'éviter les restrictions à chaud. Loin de s'opposer à l'irrigation, l'État veut que les agriculteurs sachent à quoi s'en tenir au début de chaque saison. Le retour à l'équilibre entre les ressources et les besoins peut être obtenu par des économies d'eau, l'amélioration des pratiques ou la réalisation de retenues. Nous réfléchissons à un plan global pour accompagner les agriculteurs. Des concertations approfondies se déroulent dans le bassin de l'Adour-Garonne.

M. Yvon Collin.  - Votre réponse exprime un esprit d'ouverture. Rien ne serait pire qu'un texte intégriste asséné à nos agriculteurs. Je prends note de la concertation en cours. Je sais que la sensibilité écologiste s'oppose aux grandes réserves mais la réalisation du barrage de Charlas, envisagée depuis un certain temps, devient urgente.

Situation des personnes handicapées

M. Bernard Piras. - Pourquoi la sur-contribution AGEFIPH des entreprises a-t-elle été reportée de six mois ? Pourquoi toutes ces dérogations à la mise aux normes des bâtiments ? Le plan personnalisé de compensation ne doit-il pas rester obligatoire ? Quid des assistants de vie scolaire ? Telles sont quelques unes des questions que soulève l'application de la loi du 11 février 2005. En particulier, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour soutenir les établissements d'aide par le travail ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée des aînées. - Être à la hauteur des ambitions de la loi de 2005 est une priorité du Gouvernement. Le taux d'emploi des personnes handicapées augmente sans cesse, dans le privé comme dans le public, mais l'urgence actuelle est au sauvetage des PME, donc de l'emploi de tous. J'ajoute qu'après le délai de six mois, les entreprises qui n'auront pas embauché de personnes handicapées verseront une sur-contribution calculée sur l'ensemble de l'année 2010.

La France doit tenir le rendez-vous de 2015. L'Observatoire interministériel créé à cette fin y veillera.

La scolarisation concerne 180 000 élèves dans le primaire, 10 000 de plus à chaque rentrée. Les auxiliaires de vie scolaire sont une priorité de Mme Morano.

Enfin, ce Gouvernement restera celui qui aura le plus revalorisé l'AAH : 25 % en cinq ans malgré les contraintes budgétaires. Enfin, le Premier ministre a présidé le 9 février dernier le Comité interministériel du handicap, preuve de l'engagement du Gouvernement tout entier.

M. Bernard Piras. - Je ne suis pas satisfait. Au demeurant, vous devez convaincre le monde du handicap, alors que l'application de la loi de 2005 prend trop de retard.

Associations d'aide à la personne

M. Rachel Mazuir. - Toujours plus sollicitées par les pouvoirs publics, les associations d'aide à domicile voient leur situation financière se dégrader. A juste titre, la professionnalisation des intervenants est encouragée. Or, si les tarifs des conseils généraux prennent en compte les coûts réels, il n'en va pas de même pour ceux des régimes de retraite. L'arrivée dans ce contexte de services d'aide à la personne créé des difficultés dont l'Igas a reconnu la réalité. Le secteur associatif emploie dans ce secteur 300 000 personnes, il ne faut pas l'oublier.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée des aînés.  - L'aide à domicile est financée par les conseils généraux, par les régimes de retraite, des financements privés et aussi par des exonérations fiscales et sociales qui représentent 6,6 milliards en 2009.

Une table ronde a dressé un premier état des lieux, qui débouchera sur des améliorations. M. Woerth a déjà signé des lettres de mission, dans le but de cartographier les besoins des personnes aidées et les difficultés rencontrées sur le terrain. L'efficience des structures sera étudiée pour mieux adapter les services.

Enfin, l'Igas, l'IGF et l'IGA se pencheront sur le financement des services à domicile. Leurs conclusions seront connues le 30 septembre.

M. Rachel Mazuir.  - Cette réponse est intéressante mais il faut aller vite !

RGPP dans la Défense

M. Bernard Piras.  - La RGPP dans la Défense pourrait conduire à supprimer un millier d'emplois à Montpellier. Curieusement, le plan s'est préoccupé des bâtiments avant les salariés ! La RGPP est menacée de façon opaque, parfois improvisée, alors que la réforme de l'État devrait être prévoyante et intelligente. Le reclassement proposé aux intéressés leur impose de déménager alors qu'ils pourraient rejoindre d'autres administrations de l'État ou des collectivités locales. Il n'y a pas d'urgence à fermer le site. Le personnel civil de la garnison demande un moratoire. Pourquoi repoussez-vous cette solution ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée des aînés.  - Je vous prie d'excuser M. Morin, retenu au conseil des ministres. Le Gouvernement a engagé la modernisation de la défense, mais un plan d'accompagnement a été publié en janvier. Les agents des services concernés ont droit à des indemnités et à un accompagnement social. Le personnel civil et militaire constitue la première richesse du ministère. Contrairement à ce que vous prétendez, le processus de reclassement n'a pas pris de retard. Moins de 70 personnes restent donc à reclasser sur 300, grâce à une vraie dynamique des reclassements locaux, auxquels s'ajoutent quelques dizaines de postes dans la gendarmerie et dans certains établissements de la défense.

Le ministère de la défense a des postes vacants à Draguignan et à la caisse de sécurité sociale militaire de Toulon, où M. Falco a facilité l'installation des agents qui souhaitaient s'installer à Toulon. Chaque opération doit respecter les délais pour ne pas retarder les échéances. Il n'est pas possible de prévoir un moratoire, comme cela a été indiqué aux représentants du personnel le 28 juillet à Montpellier.

L'ouverture d'un internat d'excellence et la création de 400 places au profit du Crous imposent de respecter le calendrier. Hélas ! Un seul reclassement a eu lieu dans la fonction publique territoriale, malgré le nombre de postes disponibles et celui des candidats. Si tout le monde se mobilise, il n'y aura plus de problèmes de reclassement à Montpellier. (Rires)

M. Bernard Piras.  - Robert Navarro prendra connaissance de votre réponse et jugera s'il doit relancer le ministère....

Salaires et Ordre des infirmiers

Mme Marie-France Beaufils. - Dans divers établissements d'Ile-de-France et des régions, les personnels infirmiers contestent l'obligation qui leur est faite par la loi HSPT de s'inscrire à un ordre. Les infirmiers anesthésistes sont en grève à Tours, où il manque des postes, dans le service d'hémodyalise en particulier. Ils craignent aussi une remise en cause du droit à la retraite à 55 ans.

Pour vous, l'hôpital doit être rentable, vous allez rendre inopérant notre service public pour confier son activité aux personnels libéraux. La création de cet ordre vise à affaiblir la représentation syndicale.La présidente de l'Ordre national des infirmiers, lors de son audition à l'Assemblée nationale, s'en est prise violemment aux syndicats des infirmiers. Mais les salariés refusent d'être enfermés dans un Ordre dont ils ne veulent pas. Ils demandent l'abrogation de la loi HPST.

Que compte faire le Gouvernement face à ce rejet ?

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports.  - La loi du 21 décembre 2006 a institué un Ordre national des infirmiers qui organise la profession. Cette inscription est une obligation légale. Le montant de la cotisation relève du Conseil national, mais la loi du 21 juillet 2009 permet de moduler le montant de la cotisation pour les jeunes.

En ce qui concerne les moyens donnés aux infirmiers, Mme la ministre a signé le 2 février un protocole permettant aux infirmiers de la fonction publique hospitalière d'intégrer la catégorie A pour une carrière prolongée avec une majoration de revenus d'environ 2000 euros à terme.. Ces mesures devraient leur donner satisfaction.

Mme Marie-France Beaufils. - Le Conseil supérieur des professions paramédicales, mais aussi le Conseil national d'éthique, l'observatoire des professions de santé et de nombreux autres organismes publics peuvent juger de la qualité des intervenants dans les hôpitaux vont être remplacés par un ordre qui ne répond pas aux attentes des personnels.

Certes, il est proposé aux infirmiers de changer de catégorie, mais avec un départ à la retraite plus tardif, ce qu'ils refusent du fait de la pénibilité du travail, accrue par le manque chronique de personnel.

Profession d'herboriste

M. Jean-Luc Fichet. - En 1941, le diplôme d'herboriste a été supprimé à un moment particulièrement sombre de notre histoire. Chaque année 200 étudiants souhaiteraient embrasser cette profession mais les propositions de loi tendant à la rétablir n'ont jamais abouti alors que nos voisins offrent de telles formations. Avec internet, il est possible de commander des plantes, au moment où la population souhaite recourir à des formes de soins moins coûteuses et moins agressives.

A l'heure où le déficit de la sécurité sociale va grandissant, voilà une solution d'avenir. Depuis 2007, les préparations magistrales à base de plantes vendues en pharmacie ne sont plus remboursées. Pourquoi les pharmacies en gardent-elles le monopole ?

Quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre pour promouvoir la médecine des simples ?

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports.  - Aucun diplôme d'herboristerie n'est plus délivré depuis 1941.

La plupart des plantes médicinales ne sont disponibles qu'en pharmacie, car les pharmaciens ont reçu une formation adéquate. Certaines plantes peuvent cependant être vendues en dehors des officines. De 34 en 1979, leur nombre a été porté par décret à 148 en 2008. Ce système garantit un accès large et sûr aux plantes médicinales : il n'est pas envisagé d'aller plus loin.

M. Jean-Luc Fichet.  - Je craignais cette réponse : les pharmaciens ne s'intéressent pas aux plantes, produits sur lesquels ils réalisent de faibles marges. Les conseils qu'ils prodiguent sont quasi nuls. La vente de 148 plantes médicinales est autorisée en dehors des pharmacies, mais sans pouvoir l'accompagner d'aucun conseil thérapeutique. Il faut donc rétablir un diplôme d'herboriste, pour répondre à l'attente de la population et à la demande de jeunes étudiants.

Alimentation en eau potable

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - La présence de périmètres de protection de captages est une contrainte importante, alors que les eaux captées ne bénéficient pas systématiquement aux habitants de la commune concernée. Tel est le cas à Budos  où l'on puise l'eau distribuée dans la communauté urbaine de Bordeaux. Le Code de la santé publique ne permet d'indemniser que les propriétaires privés. Si un préjudice intervient, il revient à la commune de se retourner contre l'État et non contre la CUB qui a bénéficié de la décision du préfet. Entendez-vous remédier à cette situation ?

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports.  - Des contraintes pèsent sur les communes où une déclaration d'utilité publique a défini un périmètre de protection des captages d'eau. Cependant l'accès de nos concitoyens à une eau potable non polluée doit être garanti : les objectifs du premier plan national santé environnement n'ont pu être tenus ; le deuxième prévoit qu'à l'horizon 2012, les 500 captages les plus exposés soient protégés.

L'indemnisation des propriétés privées représente un coût financier certain pour les communes. Aujourd'hui, 19 395 captages bénéficient d'un périmètre de protection. Plus des deux tiers de nos concitoyens consomment une eau provenant de captages protégés. La préservation de l'eau est un devoir pour les collectivités et l'absence d'indemnisation ressort de la solidarité nationale.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - De nombreuses communes sont concernées même si nous n'en connaissons pas le nombre exact. Le législateur devrait se saisir de cette question.

La séance, suspendue à 11 heures, reprend à 11 h 10.

Découverts bancaires

Mme Patricia Schillinger.  - Aujourd'hui, cinq banques se partagent 80 % du marché de la distribution des moyens de paiement et de crédit : les abus sont notables pour les découverts qui s'apparentent à des crédits, avec intérêts, agios et un Taux effectif global (TEG) proche de l'usure. Les commissions d'intervention sont particulièrement élevées. Dans son arrêt du 5 février 2008, la Cour de cassation estime que les commissions d'intervention doivent être incluses dans le calcul du TEG, ce qui n'est pas le cas. Selon un rapport de la Commission européenne, les banques françaises ont les tarifs les plus élevés d'Europe. Malgré le plan de sauvetage, les banques françaises ont admis qu'elles n'augmenteraient pas leurs crédits dans les proportions prévues. Qu'entend faire le Gouvernement ? Les commissions d'intervention vont-elles être enfin incluses dans le TEG ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.  -  Cette question préoccupe les associations de consommateurs et les pouvoirs publics.

S'agissant de l'assiette du TEG, il existe des règles claires dans le code de la consommation. Sont intégrés au TEG l'ensemble des frais directs ou indirects et le juge rappelle régulièrement ces règles qui concernent les frais de forçage, liés aux crédits, mais non les commissions d'intervention en cas de dépassement du découvert, car celui-ci ne débouche pas nécessairement sur un crédit. Les frais qui ne sont pas accessoires au crédit ne sont donc pas intégrés. Pour autant, les consommateurs, notamment les plus fragiles, sont pénalisés. Il faut une réglementation juste et adaptée. Le Gouvernement a déjà prévu le plafonnement des frais en 2008.

Le montant maximum des frais est fixé à 50 euros en cas de rejet d'un chèque de plus de 50 euros, à 30 euros dans les autres cas. Pour les autres incidents de paiement le montant des frais est plafonné à 20 euros.

Chaque année les consommateurs reçoivent un récapitulatif de leurs frais bancaires. En outre, le changement de banque a été facilité.

Une mission, en concertation avec les associations de consommateurs, portera sur l'usage par les Français de leurs comptes. Les découverts feront l'objet d'une attention particulière. Le Gouvernement s'inspirera des conclusions de cette mission pour éventuellement modifier les règles.

Mme Patricia Schillinger. - Des pratiques comme le décalage entre le dépôt d'un chèque et son encaissement mettent les comptes à découvert. Les ménages modestes en font les frais. J'attends beaucoup de cette mission.

Offices de tourisme et syndicats d'initiative communaux

M. Claude Biwer. - J'aurais pu rebondir sur la question de Mme Schillinger parce que outre les ménages modestes, les TPE et PME sont aussi victimes de ces pratiques des banques.

La création d'un office de tourisme par les communautés de communes pénalise les syndicats d'initiative communaux, dès lors vidés de leur substance. Les textes prévoient pourtant un partage des compétences. Tout un réseau de bénévoles oeuvrent dans les communes. Pourquoi casser cet outil qui donne toute satisfaction ? Je pense en particulier au syndicat d'initiative transfrontalier de Marville.

Que compte faire le Gouvernement pour maintenir les syndicats d'initiative communaux ? Les maires regrettent de ne plus pouvoir s'occuper de développement et d'en être réduits à simplement faire passer les consignes ou à jouer un rôle d'officier de police judiciaire... quand ils en ont les moyens.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.  - La loi dispose que si les compétences de tourisme ont été transférées à l'intercommunalité, les syndicats d'initiative doivent disparaître. En revanche, l'office de tourisme communautaire peut se déconcentrer sur l'ensemble du territoire.

Le code du tourisme précise que l'office de tourisme peut implanter un ou plusieurs bureaux permanents ou temporaires, qui ne sont pas dotés de la personnalité juridique.

Le syndicat d'initiative de Marville n'a plus d'existence légale mais peut devenir un bureau de l'office du tourisme du pays de Montmédy. Diverses possibilités sont prévues par la loi : régie avec autonomie financière ou avec aussi personnalité civile, Epic, association loi de 1901, Sem ou Gie ... La procédure de classement des offices de tourisme relève d'une décision du préfet dans les deux mois suivant le dépôt d'un dosseier par une commune.

M. Claude Biwer. - Merci de ces précisions. Que les syndicats d'initiative deviennent des annexes,sous une forme ou sous une autre, pourquoi pas, mais laissons-leur la possibilité de poursuivre leur travail ! J'ai compris que les bénévoles pourraient continuer à oeuvrer, sans être rémunérés ...

Représentation des Parisiens au conseil municipal

M. Roger Madec. - Le recensement de 1982 a fondé la répartition des sièges au Conseil de Paris. Mais la population de la capitale a évolué depuis... Une précédente question écrite n'ayant pas reçu de réponse, j'y reviens aujourd'hui. J'espère que vous ne me renverrez pas au prochain recensement de 2013.

Paris compte 163 conseillers, dont la répartition entre les arrondissements ne respecte pas l'article L. 2121-2 du code général des collectivités territoriales puisque le ratio varie de un conseiller pour 15 515 habitants dans le 19ème arrondissement à un pour 11 848 dans le 16ème. Les Parisiens ne sont pas égaux dans la représentation. La répartition des conseilleurs sera-t-elle corrigée ? Avec la réforme des collectivités territoriales et la création des conseillers territoriaux, le Gouvernement envisage-t-il de réduire le nombre de conseillers de Paris de 163 à 63 ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.  - Les conseillers d'arrondissement ne relèvent pas de l'article L. 2121-2 du code général des collectivités territoriales, mais de la loi du 30 décembre 2002. Les arrondissements n'ayant pas les mêmes compétences que les communes, rien n'impose un effectif de conseillers identique à celui d'une commune de taille équivalente. C'est la réponse qu'ont fait tous les gouvernements à la question que vous posez.

D'autre part, le Conseil constitutionnel a validé, le 28 décembre 1982, la loi dite PLM ; il a de fait validé la répartition des sièges entre les arrondissements. Le scrutin parisien module la proportionnelle par une prime majoritaire.

Enfin, il n'est pas envisageable d'augmenter le nombre d'élus au Conseil de Paris.

Il reste que la loi Jospin-Vaillant de 2002 organise une nouvelle forme de recensement annuel dans les grandes villes. Les prochaines élections municipales en tiendront compte.

M. Roger Madec. - Je n'ai pas demandé que l'on augmente le nombre de conseillers de Paris. Vous ne m'avez pas répondu sur le nombre de conseillers territoriaux à Paris.

Observatoire de la laïcité

Mme Françoise Laborde.  - Je souhaite interroger le Premier ministre sur la mise en place de l'Observatoire de la laïcité dont la constitution avait été décidée en 2003 après les travaux de la commission Stasi. Cet Observatoire devait garantir une approche transversale du sujet, associant la Représentation nationale et les ministères concernés. Le décret de mars 2007 est resté sans suite à ce jour. Plutôt que l'instrumentalisation des questions relatives à la laïcité et à la religion, plutôt que des effets d'annonce, le Gouvernement devrait enfin faire vivre cet outil de promotion de la laïcité. Ce principe fondateur de notre République le vaut bien. Quand nommerez-vous les membres de l'Observatoire ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.  - Le Premier ministre vous prie de l'excuser. Le Gouvernement est extrêmement attaché au principe constitutionnel de laïcité, une des valeurs en lesquelles nos concitoyens se reconnaissent le plus. Le décret du 25 mars 2007 a prévu la création de l'Observatoire mais celui-ci ne s'est jamais réuni. Les exigences de la réforme de l'État et la RGPP conduisant à réduire le nombre des diverses instances administratives, il n'a pas semblé opportun d'en créer une nouvelle. La mission de l'Observatoire pourrait être confiée par exemple au Défenseur des droits ou encore au Haut conseil de l'intégration. La décision ne tardera pas.

Mme Françoise Laborde.  - N'étant pas constitué, l'Observatoire ne pourrait se réunir ! Je constate qu'on met la RGPP à toutes les sauces ; les lieux de vigilance disparaissent les uns après les autres. Les missions du Défenseur des droits ne cessent de s'élargir...

Prix des produits agricoles

M. René-Pierre Signé.  - Alors que les prix agricoles à la production baissent, les prédateurs de la grande distribution mettent la dérégulation à profit pour se servir des marges particulièrement opaques et élevées. Les producteurs veulent vivre de leur travail. Ne pourrait-on étendre l'application du coefficient multiplicateur, qui existe pour les fruits et légumes, aux produits peu transformés ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.  - Vous avez raison, il faut renforcer le pouvoir des producteurs dans les négociations et faire en sorte qu'ils récupèrent une part plus importante de la valeur ajoutée. Des dispositions en ce sens existent dans la loi de modernisation que je présenterai le 18 mai au Sénat. L'Observatoire de la formation des prix sera renforcé et informera chaque année le Parlement ; le recours aux contrats écrits sera généralisé dans toutes les filières ; les organisations de producteurs seront développés, ce qui pour l'instant se heurte au droit communautaire. J'ai saisi Bruxelles de la question. La bataille sera difficile mais elle est indispensable.

En revanche, je ne suis pas favorable à l'extension du coefficient multiplicateur qui risquerait de pénaliser les consommateurs.

M. René-Pierre Signé.  - Merci pour votre réponse encourageante. Sur l'essentiel, nous sommes d'accord.

Il est bon que la formation des prix soit plus transparente ; il faut encadrer les marges, parfois injustifiées. Appliquer au moins temporairement un coefficient multiplicateur pourrait freiner l'envol des prix.

Enseignement agricole

Mme Françoise Férat. - L'enseignement agricole, que je rapporte depuis neuf ans, me tient particulièrement à coeur. Je salue l'organisation de ses assises, mais quelles suites concrètes en attendre ? Je pense notamment aux partenariats à établir avec le ministère de l'éducation nationale. Ils contribueraient à revaloriser l'enseignement agricole et à conforter notre système éducatif.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.  - Je salue votre engagement en faveur de cette filière d'excellence qui assure l'insertion professionnelle de 85 % de ses élèves.

Le 10 décembre, lors de la clôture des assises, j'ai tracé les lignes d'un pacte renouvelé autour des enjeux du développement durable et de la compétitivité. Parmi les 60 mesures concrètes qui seront mises en oeuvre d'ici 2011, je citerai la mise en place d'une formation professionnelle orientée vers les métiers de la croissance verte, des projets pluriannuels régionaux pour l'enseignement agricole et l'accompagnement des élèves de l'enseignement technique vers l'enseignement supérieur et la recherche.

De nombreux partenariats existent déjà avec l'Éducation nationale, qui seront renforcés ; la réforme du bac professionnel y aidera.

Mme Françoise Férat. - Je me félicite que l'avenir de l'enseignement agricole s'éclaircisse.

Disparition du bail à colonat partiaire

Mme Anne-Marie Payet. - La loi de novembre 2005 abolit le colonat partiaire et interdit l'installation de nouveaux colons ; les contrats doivent être reconvertis en baux fermiers. Ce nouveau dispositif rendra leur dignité aux intéressés. Mais les baux signés juste avant la loi n'ont l'obligation de reconversion qu'en 2014. Depuis quarante ans, le nombre d'hectares exploités diminue, de même que celui des exploitants. Comment comptez-vous accélérer la disparition du colonat partiaire ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.  - En effet, la loi de 2006 organise à juste titre la disparition du bail à colonat partiaire. L'agriculture est au coeur de la stratégie du Gouvernement pour l'outre-mer, où nous mettons l'accent sur la hausse de la production et la baisse des prix des produits locaux et la consolidation des filières. Certaines filières sont particulièrement prometteuses outre-mer -aquaculture, pêche, bois. Le Gouvernement soutient activement la modernisation de l'agriculture ultramarine, à hauteur de 630 millions pour la période 2007-2013.

Mme Anne-Marie Payet.  - Il est dommage qu'on ne puisse accélérer la disparition d'un dispositif archaïque hérité de l'esclavage.

La séance est suspendue à midi.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 14 h 35.

Eloge funèbre de Jacqueline Chevé

M. le président.  - Mes chers collègues, (Mesdames et Messieurs les sénateurs se lèvent) c'est avec une profonde émotion et un réel sentiment d'injustice que nous avons appris le décès de Jacqueline Chevé. Elle représentait le département des Côtes d'Armor où elle était née il y a 48 ans. Elle portait les valeurs de la laïcité dont notre République a toujours besoin. Élue il y a dix-huit mois, elle nous a quittés au lendemain du premier tour des élections régionales où elle avait obtenu un brillant résultat sur la liste menée par le président du conseil régional. Nous ne pouvions imaginer qu'elle menait son dernier combat politique ; nous savions qu'elle avait dû affronter la maladie pendant de longs mois avec la force de caractère, le courage et la discrétion que nous lui connaissions. Elle avait repris ses activités au sein de la commission des affaires sociales. Nous voulions tous croire qu'elle avait surmonté le mal qui la rongeait. Sans avoir eu le temps de donner toute sa mesure, notre collègue avait beaucoup apporté à notre institution où elle laisse un souvenir ému : tous ceux qui ont eu la chance de travailler avec elle ont apprécié ses qualités.

C'était une femme de coeur, d'engagement et de dévouement dans sa vie familiale et professionnelle. Très tôt, elle s'était engagée auprès des plus modestes. Elle débuta au sein d'une mission locale pour l'insertion des jeunes. En 2002, elle s'est consacrée à la protection des populations les plus fragiles dans la ville de Dinan. Enfin, elle fut la directrice du foyer logement de Lamballe.

L'inclinaison de Jacqueline Chevé vers les autres et son sens du concret la conduiront naturellement vers l'engagement politique. Elle fut une élue locale de proximité enthousiaste, dévouée et efficace jusqu'à son élection au Sénat. D'abord conseillère municipale de Loudéac, elle fut élue en 2004 conseillère régionale de Bretagne, où elle s'occupa de formation professionnelle. Dès avant son élection au Sénat, elle fut en 1997 l'assistante parlementaire de Didier Chouat, député de la troisième circonscription des Côtes-d'Armor. Elle remplit ses fonctions avec dynamisme durant cinq ans. En 2008, elle fit son entrée au Parlement par la grande porte, celle du Palais du Luxembourg, où elle fut brillamment élue le 28 septembre 2008 avec 57 % des voix. Nous avons vu à Loudéac les images qui montraient sa joie...

Elle avait entamé une brillante carrière politique mais elle nous a été enlevée bien trop tôt. Durant dix-huit mois, elle a démontré qu'elle appartenait à la génération des femmes parlementaires passionnées et modernes.. Espérons que cette trop brève présence lui a apporté des satisfactions à la hauteur de l'estime que nous lui portions.

Membre de la commission des affaires sociales, Jacqueline Chevé trouva immédiatement ses marques au Palais du Luxembourg. Plusieurs d'entre vous l'ont aidée. Par sa jeunesse, sa détermination, son dévouement, elee a représenté l'un des visages du Sénat. Élue de proximité, elle toujours gardé un contact étroit avec ses concitoyens : ainsi, elle posa des dizaines de questions au Gouvernement et intervint plus de mille fois pour ses administrés. L'action politique est toujours passionnante à condition d'aimer les gens, disait-elle.

Elle accordait aussi toute leur importance aux grands débats nationaux : elle intervint ainsi quelques jours avant sa disparition lors du débat sur le mal-être au travail.

Elle intervint aussi lors du projet de loi sur la réforme des collectivités territoriales. En juin dernier, elle portait sur son site internet un jugement sévère mais lucide sur l'inflation législative, « qui déstabilise les citoyens et décrédibilise les hommes politiques... à force de confondre vitesse et précipitation ».

Jacqueline Chevé a transcendé ses épreuves en se mettant au service de ses concitoyens. Cela justifie l'extraordinaire hommage qu'elle reçut en mars dernier au palais de la culture de Loudéac, avec ses proches, en présence de très nombreux élus. À cette occasion, j'ai prononcé son éloge qui devait trouver un écho aujourd'hui.

J'exprime notre sympathie attristée à ses collègues du groupe socialiste, à tous ses amis, à ses proches, à sa famille. « Ne pleure pas celle que tu as perdue, mais réjouis-toi de l'avoir connue » : c'est un peu ce que nous avons ressenti à Loudéac.

Je vous propose de nous recueillir quelques instants à la mémoire de Jacqueline Chevé, rassemblés par les valeurs qui nous étaient communes. (Mesdames et Messieurs les sénateurs observent une minute de silence)

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement.  - Le Gouvernement s'associe à l'hommage légitime que le Sénat rend aujourd'hui à Mme Jacqueline Chevé, sénatrice des Côtes-d'Armor, qui nous a quittés le 15 mars.

Nous conserverons le souvenir d'une femme dont la générosité, le sens du dialogue et le tempérament étaient de nature à rassembler. Guidée par le besoin d'agir et d'apporter sa pierre à une société plus juste et plus humaine, sa vie était tournée vers les autres, notamment les plus modestes. Militante associative, elle menait les combats les plus divers. Défendant les causes qu'elle trouvait justes, elle faisait preuve d'une infatigable ténacité dans les réalités sociales les plus difficiles. Chacun savait qu'il trouverait toujours sa porte ouverte. C'est cette vocation altruiste qui a forgé le lien qui l'unissait aux Côtes-d'Armor et à Loudéac qui lui a rendu un hommage émouvant, poignant, fort, rayonnant.

Elle s'était engagée en politique non pour assouvir une ambition, mais pour continuer à agir. Élue de sa commune, conseillère régionale, cette personnalité expérimentée est élue brillamment sénatrice des Côtes-d'Armor en septembre 2008.

Au sein de la commission des affaires sociales et de la délégation au droit des femmes, elle a poursuivi son combat.

Le 15 mars, la maladie a mis un terme à son engagement. Elle a laissé à ses amis et au Sénat le souvenir d'une femme engagée que ni les épreuves ni la maladie n'ont fait reculer.

J'adresse à sa famille, à son mari, à ses deux enfants, à ses collègues du groupe socialiste, aux habitants de Loudéac, des Côtes-d'Armor et de la Bretagne les condoléances très sincères du Gouvernement.

La séance est suspendue en signe de deuil.

CMP ( Grand Paris - Candidatures)

M. le président.  - J'ai reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au Grand Paris.

La commission spéciale chargée d'examiner ce projet de loi a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à cette commission mixte paritaire.

Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 12 du Règlement.

Article 65 de la Constitution (Deuxième lecture) et mandat du Conseil supérieur de la magistrature (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution et du projet de loi organique adopté par l'Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, prorogeant le mandat des membres du CSM.

Ces deux projets de loi organique font l'objet d'une discussion générale commune.

Discussion générale commune

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - Deux projets de loi organique sont soumis à votre examen. Le premier texte a déjà été adopté en première lecture par le Sénat et l'Assemblée nationale. Le deuxième projet en est le complément ; il tend à proroger le mandat des membres du CSM.

Je ne reviendrai pas longuement sur le premier texte : le débat parlementaire a permis d'en améliorer la rédaction. La réforme du CSM vise à renforcer la confiance de nos concitoyens en leur justice et adapter la justice au monde moderne. Les attributions et la composition du CSM sont modifiées et les justiciables pourront le saisir directement.

Le CSM évolue vers plus d'indépendance, plus de transparence et d'ouverture. Désormais, six personnalités qualifiées sont nommées par le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat.

J'en viens à la transparence : toutes les nominations des magistrats du parquet font l'objet d'un avis. La justice doit être plus proche des citoyens, c'est pourquoi ils pourront saisir le CSM directement quand ils s'estimeront victimes de manquements déontologiques commis par des magistrats. Une procédure disciplinaire pourra dès lors être engagée. Ce droit de saisine doit être effectif, mais encadré. Des exigences de forme sont peu contraignantes, mais un filtrage aura lieu à deux niveaux : d'abord la recevabilité. Les plaintes ne pourront intervenir que lorsque le magistrat n'est plus en charge du dossier. Ensuite, la plainte doit viser un comportement susceptible d'être sanctionné.

Enfin, ce texte vise à assurer la sécurité juridique, d'où des dispositions transitoires. Le mandat actuel des membres du CSM vient à expiration le 3 juin. Le processus électoral exige quatre mois pour que chacun puisse s'exprimer. Il faut donc proroger le mandat actuel de six mois, à compter de la promulgation de cette loi.

La stabilité du CSM sera ainsi garantie. Il n'était pas possible de procéder à une première nomination pour en organiser une seconde quelques mois plus tard. J'ai voulu assurer la continuité du fonctionnement du CSM. La prorogation du mandat des membres actuels permettra de mener à bien les futures élections.

Garant de l'indépendance de la justice, le CSM doit avoir les moyens de sa mission ; nous devons garantir son bon fonctionnement. Je vous demande donc de bien vouloir adopter ces deux projets de loi organique. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Jean-René Lecerf, rapporteur de la commission des lois.  - Nous sommes appelés à examiner deux projets de loi organique étroitement liés.

L'Assemblée nationale a validé l'essentiel du texte réformant l'article 65 que nous avions adopté en première lecture : sur 33 articles, 15 sont conformes et 7 font l'objet de modifications rédactionnelles. Les points d'accord portent sur la proposition de parité, sur les conditions d'admission des requêtes, sur les compétences de la formation plénière du CSM, sur l'abaissement du quorum lors des sanctions.

D'autres dispositions ont été complétées par l'Assemblée nationale : elle a ainsi imposé la règle de parité lors des nominations. Enfin, l'Assemblée a confirmé et complété les améliorations proposées par le Sénat pour les procédures disciplinaires.

Restent quatre points de divergence. Le premier concerne les conditions de nomination du secrétaire général du CSM. Le Sénat accepte la rédaction de nos collègues députés. La deuxième divergence porte sur les moyens dont disposera la formation plénière du CSM pour se prononcer sur le manquement d'un magistrat à ses obligations déontologiques.

Restent deux divergences importantes : en première lecture, le Sénat avait tenu à écarter tout risque de suspicion sur l'indépendance de l'avocat siégeant au CSM, d'où l'interdiction de plaider ou d'être conseil d'une partie à une procédure. L'Assemblée nationale a repoussé ces restrictions. Votre commission estime que le seul fait pour l'avocat de défendre une partie devant un magistrat sur la carrière duquel il peut avoir à se prononcer suffit à jeter un doute sur l'impartialité du jugement.

L'ultime divergence porte sur l'autonomie budgétaire du CSM. Suivant la position constante de M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois de la mission Justice, nous avions décidé que cette autonomie serait assurée dans des conditions déterminées par une loi de finances.

L'Assemblée nationale a supprimé cette disposition qualifiée de « fausse bonne idée », puisque les crédits du CSM ne pourraient plus être abondés en cours d'année, au contraire de la situation actuelle. Votre commission persiste car ce serait une vraie mauvaise idée : une même autorité - la direction des services judiciaires - ne peut à la fois établir le budget du CSM et solliciter son avis sur nominations qu'elle propose. La dernière révision constitutionnelle plaide en ce sens.

J'en viens à la prorogation du mandat des membres du CSM. J'approuve les propos de M. Gélard et regrette que la révision constitutionnelle ne puisse encore s'appliquer dans sa totalité. En l'espèce, il est indispensable de proroger le mandat des membres du CSM, pour assurer leur renouvellement dans les conditions posées par la révision. (Applaudissements à droite et au centre)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous avons combattu, en première lecture, le projet de loi organique mettant en oeuvre l'article 65 de la Constitution, comme nous avions combattu la révision de 2008. Nous ne cautionnerons pas une fausse indépendance de la magistrature. Si la possibilité de saisine du CSM par les justiciables est une indéniable avancée, le texte ne met pas fin à la mainmise de l'exécutif sur cette institution. Les propositions de la commission Outreau restent à satisfaire.

Le Président de la République ne préside plus le CSM, mais il nomme deux de ses membres qualifiés et son secrétaire général. L'Assemblée nationale n'est pas revenue sur les conséquences du partage des voix au sein de la commission d'admission qui aurait dû conduire au classement sans suite de la plainte, à l'instar de ce qui se fait dans la même situation au sein de la formation disciplinaire. Enfin, la réforme consacre une inadmissible immixtion de l'exécutif dans la procédure disciplinaire.

En définitive, le texte de l'Assemblée nationale est plus critiquable encore que celui du Gouvernement et celui voté par le Sénat. Nous avions déploré, en première lecture, que la désignation des membres du CSM ne renforce pas suffisamment sa légitimité et l'impartialité de ses décisions. Depuis, l'Assemblée nationale a même supprimé les maigres limites posées par le Sénat à l'exercice professionnel de l'avocat nommé au CSM.

Il aurait fallu que le secrétaire général du CSM soit nommé sur avis conforme du CSM. En outre, la formation plénière du CSM ne fera que répondre aux demandes d'avis du Président de la République ou du Garde des sceaux sur des sujets touchant à la déontologie, mais ne pourra prendre d'initiative sur des questions portant sur l'indépendance de la justice. La commission des lois du Sénat a bien fait de prévoir qu'elle puisse prononcer la suspension temporaire ou la démission d'office d'un magistrat. C'est bien, mais cela ne suffit pas à sauver le projet, qui fait la part trop belle à l'exécutif.

Nous nous abstiendrons sur la prorogation du mandat des membres du CSM, il faut que celui-ci puisse continuer à fonctionner.

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

M. François Zocchetto.  - Je ne reviendrai pas sur le texte voté en première lecture, mais je regrette comme beaucoup ici que nous n'ayons pas encore examiné toutes les lois organiques consécutives à la réforme constitutionnelle intervenue il y a presque deux ans. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat le confirme) Quelques points de désaccord subsistent avec les députés.

En première lecture, nous avions garanti l'autonomie budgétaire du CSM, afin que ses crédits ne dépendent plus de la direction des services judiciaires. Mieux vaudrait inscrire les crédits dans la mission « Pouvoirs publics », à l'instar de ceux du Conseil constitutionnel.

En première lecture, nous avions limité les situations dans lesquelles l'avocat membre du CSM aurait à se déporter ; il s'agissait de prévenir les conflits d'intérêt et renforcer les gages d'impartialité du CSM. L'Assemblée nationale a souhaité que l'avocat puisse continuer à exercer pleinement sa profession. Nous pourrions sans doute accepter la solution de compromis proposée par la commission des lois : limiter l'activité professionnelle à la mission de conseil.

Enfin, il convient que l'institution puisse garantir l'effectivité des exigences déontologiques imposées à ses membres. Sur ce point aussi, nous soutenons la position de la commission. Enfin, la nécessité de la prorogation est évidente.

Pour finir, je salue l'inlassable travail de notre rapporteur. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean-Pierre Michel. - Nous voterons à nouveau contre le projet de loi organique, après avoir combattu la réforme constitutionnelle.

Hélas, les principales améliorations suggérées par notre rapporteur ont été repoussées par l'Assemblée nationale, sans doute plus sensible que le Sénat aux sirènes gouvernementales. La nomination des membres extérieurs du CSM n'assure pas le pluralisme de mise dans d'autres pays européens. Fallait-il au demeurant un avocat au CSM ? Non, mille fois non ! A tout le moins, il ne devrait plus exercer la moindre activité professionnelle. Enfin, la représentation est très inégalitaire, puisque quatre de ses membres seront issus de la haute hiérarchie de la magistrature, soit 10 % des magistrats, contre trois représentants pour les 90% restant. Enfin, l'autonomie budgétaire du CSM doit être impérativement doit impérativement être assurée vis-à-vis de la Direction des services judiciaires. Je regrette que le secrétaire général soit nommé sans l'avis conforme du CSM. L'exécutif conserve les cordons de la bourse et aura un secrétaire général à sa main.

J'en viens à la suppression du juge d'instruction, qui n'est acceptable qu'à la condition expresse de modifier le statut du parquet. Les plus hautes autorités de la magistrature se sont prononcées en ce sens. Transférer les pouvoirs d'un magistrat indépendant à un autre qui ne l'est pas ne sera pas sans conséquence ; étouffer et manipuler sera plus facile, et pas seulement dans les affaires politico-financières. Que serait devenue dans ces conditions l'affaire de l'hormone de croissance ou celle de l'amiante ?

Il est encore temps de réformer le parquet afin de rendre la carrière des procureurs indépendante du pouvoir politique - étant entendu qu'indépendance statutaire ne veut pas dire indépendance fonctionnelle, et que je suis réservé sur la proposition de M. Fauchon de réer un procureur général de la République, comme en Italie. Aujourd'hui, les justiciables pensent - à tort ou à raison - que l'exécutif peut influencer le cours de la procédure. Les exemples abondent depuis le début de la Ve République. Le groupe socialiste ne votera pas le premier texte ; il s'abstiendra sur le second, qui traduit surtout la mauvaise organisation du travail gouvernemental. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jacques Mézard. - Nous regrettons de devoir proroger une nouvelle fois le mandat d'une autorité constituée parce que le Gouvernement ne tient pas les délais. Nous avons déjà dû proroger celui du Médiateur de la République... Le rapporteur avait d'ailleurs déclaré en première lecture qu'il faudrait y procéder si le premier projet de loi organique n'était pas promulgué avant février 2010.

L'indépendance de la justice est un pilier de l'État de droit. Quelles que soient les opinions sur la révision constitutionnelle, la saisine directe du CSM est un progrès. La justice inquiète nos compatriotes, qui doutent de son indépendance. La suppression du juge d'instruction n'améliorera rien. Pour rétablir la crédibilité, une politique de communication ne suffit pas : il faut une action pragmatique, opiniâtre et constante - et des moyens supplémentaires.

L'autonomie financière n'est pas uniquement symbolique. Les 127 ans d'histoire du CSM illustrent la conception tangentielle que les pouvoirs se font de l'indépendance judiciaire. L'affaire d'Outreau a révélé des dysfonctionnements accumulés pendant des décennies.

L'article 65 ne fait pas disparaître la tutelle du politique. Au sein du CSM, les magistrats seront minoritaires, et le Conseil ne formulera qu'un avis sur les nominations.

Nous approuvons les ambitions de l'article 65 : assurer l'indépendance de la justice et l'autorité du CSM. Comme en première lecture, nous approuvons l'interdiction d'exercice professionnel imposée à l'avocat et la possibilité de saisine du CSM par les justiciables, mais l'engagement de la procédure est subordonnée à la constatation d'une violation par une décision de justice devenue définitive. En outre, nous regrettons notamment le délai trop bref laissé au justiciable.

Enfin, nos interrogations demeurent sur l'accès à l'aide juridictionnelle et l'accompagnement des plaignants par un avocat. Veut-on des justiciables démunis et techniquement désarmés ?

En majorité, les membres du RDSE s'abstiendront sur le premier texte ; les autres voteront pour. Mme Escoffier parlera du deuxième texte.

M. Jean Louis Masson.  - A mon tour, je déplore le retard pris par ce projet de loi organique. Même remarque pour les délais d'application. Mieux vaudrait réformer moins, mais le faire mieux.

Sur le fond, j'approuve le dispositif proposé, qui renforce les garanties offertes aux justiciables. Je redoute la suppression du juge d'instruction, désastreuse pour la démocratie puisque les procureurs de la République sont et resteront aux ordres. Même dans le système actuel, le parquet devrait être indépendant du pouvoir politique. Je m'abstiendrai pour exprimer mon désaccord de principe avec la politique générale du Gouvernement.

M. Patrice Gélard.  - Après l'excellent rapport de M. Lecerf et l'intervention de M. Zocchetto, je n'analyserai pas les divergences entre les deux assemblées, mais j'observe que le désaccord sur l'autonomie budgétaire réapparaîtra sans doute avec le Défenseur des droits.

Une loi organique est faite pour appliquer une disposition constitutionnelle, non la remettre en cause. Les observations sur la réforme à venir de la procédure pénale sont donc hors sujet.

M. Portelli, absent car magistrat à la Cour de justice de la République, a déposé trois amendements humoristiques, mais importants. Ils rappellent qu'il n'y a que deux législateurs : le peuple et le Parlement. Le Conseil d'État et la Cour de cassation n'en sont pas. De même, il n'y a que deux constituants : le peuple et le Parlement réuni en Congrès, le Conseil constitutionnel étant le seul juge de la constitutionnalité des lois.

Contrairement aux engagements pris par le Gouvernement à l'occasion de la révision constitutionnelle de 2008, il faudra au moins 30 mois - et non six ou dix - pour adopter les lois organiques ! SI, par exemple, le Gouvernement ne dépose pas le texte sur le statut pénal du chef de l'État d'ici au 30 juin, la commission des lois prendra ses responsabilités. Aujourd'hui, de nombreuses dispositions de la Constitution sont inopérantes faute de textes organiques. La responsabilité est partagée entre le Gouvernement et le Parlement. Rien ne nous empêchait d'y consacrer deux semaines et d'en finir. Faute de l'avoir fait, nous devons proroger une série de mandats et auditionner, sans vote, des personnalités présentées par le Président de la République. A l'unanimité, le groupe UMP votera les deux projets de loi organiques. (Applaudissements à droite)

Mme Virginie Klès.  - De quoi s'agit-il ? D'appliquer l'article 65 de la Constitution pour rétablir la confiance des citoyens dans la justice. Ma seule originalité est que je ne suis pas juriste. Mais la confiance ne se décrète pas, elle se construit mais se détruit aussi rapidement. J'ai examiné ce texte comme simple citoyenne.

Qu'est-ce que le CSM pour nos concitoyens ? L'instance qui juge les juges.

Elle doit donc être irréprochable, d'où l'importance du projet de loi.

La saisine directe du CSM par les justiciables est une avancée malgré la lourdeur des procédures. De même, j'approuve l'amélioration de la parité hommes-femmes. Que ni le Président de la République, ni le garde des sceaux ne président plus le CSM est avant tout symbolique - les symboles ont leur force - mais ce fait ne suffit pas à garantir l'indépendance du CSM, puisque le Président de la République nommera son secrétaire général. La nomination des personnalités extérieures, dont on ne sait d'ailleurs quelles compétences seront requises, restera aux mains du pouvoir politique. L'indépendance de la justice est mise en cause.

Je suis favorable à l'autonomie budgétaire et financière du CSM : c'est indispensable pour ce juge des juges!

Les procédures sont extrêmement complexes : le citoyen n'y comprend rien.

J'en viens au plus important : l'avocat auprès du CSM pourra toujours exercer son métier. C'est très préoccupant. Inévitablement, ces avocats seront juges et parties.

Pour rétablir la confiance entre les Français et l'institution, le Gouvernement doit être exemplaire : les sanctions doivent être sévères et pleinement compréhensibles. Avec ce texte, ce ne sera pas le cas : l'indépendance du CSM n'apparaît pas totale.

Certes, je reconnais quelques avancées, mais je ne peux que voter contre ce projet de loi.

Mme Anne-Marie Escoffier. - Je ne parlerai que de la prorogation du mandat des membres du CSM. Je regrette le retard pris dans l'adoption du projet de loi organique relatif à l'application de l'article 65 de la Constitution. Notre rapporteur nous avait mis en garde à l'époque. Le simple compte à rebours nécessaire à la conduite des opérations électorales impose cette prorogation.

Pour quelle raison le premier projet de loi organique a tant tardé à être examiné ? Nous nous inquiétons de l'encombrement de l'ordre du jour de nos assemblées, d'autant que les textes votés tardent à être appliqués.

Nous voterons néanmoins ce texte en espérant que ce retard reste exceptionnel. (Applaudissements au centre et sur divers bancs à droite)

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - Je souhaite répondre brièvement à certaines des remarques qui ont été faites.

Mme Borvo a critiqué ces textes, notamment le pointage des voix lorsqu'il y a décision de transmission à la formation du jugement. Mais la commission de requête n'a pour objet que de dire si les conditions sont remplies : il s'agit d'un simple filtre.

Sur la désignation de l'avocat, le président du Conseil national des barreaux représente l'ensemble des avocats. Il est donc normal que ce président puisse désigner l'avocat membre du CSM. En outre, ce choix sera validé par le Parlement.

M. Zocchetto a regretté que toutes les lois découlant de la révision constitutionnelle n'aient pas été adoptées. Il faut du temps. D'ici juin, je remettrai un texte sur la responsabilité pénale du Président de la République.

Nous avons besoin que la France se modernise et donc d'autres projets de loi doivent être examinés.

M. Michel nous a fait savoir d'emblée qu'il est opposé à ces textes car il n'a pas voté la révision constitutionnelle.

Je lui rappelle néanmoins , à propos du mode d'élection du secrétaire général, qu'il y a de nombreux hauts fonctionnaires qui sont nommés par le Président de la République et par décret. Il y a une garantie supplémentaire : les conditions de la proposition conjointe des deux chefs de la Cour de cassation.On ne peut pas non plus dire que le secrétaire général a un rôle déterminant. C'est un simple rôle administratif et gestionnaire.

En ce qui concerne la réforme de la procédure pénale, je la défendrai mais je n'accepte pas les critiques a priori. Ce n'est aujourd'hui pas le temps, comme l'a rappelé M. Gélard. Nous aurons un vrai débat quand ce texte viendra devant vous.

Aujourd'hui, nous sommes dans le temps de la concertation mais je ne transigerai pas. J'aborderai toutes les questions, sans exclusive, y compris s'agissant du statut du Parquet. Je suis sûre de ce qu'il faut faire. (Applaudissements à droite)

M. Mézard a exprimé ses regrets sur le retard. Je le déplore aussi. Il y a beaucoup de choses que l'on peut faire pour améliorer la justice mais je ne peux bousculer l'ordre du jour du Parlement.

Je n'ai pas bien compris la relation que vous faisiez entre Outreau et l'indépendance du CSM. Vous êtes revenus sur la question de l'avocat mais interdire toute activité à un avocat n'est pas dans l'esprit du constituant. Une telle restriction aboutirait sans doute à une censure du Conseil constitutionnel. Vous avez regretté que l'aide juridictionnelle soit exclue en cas de saisine directe du CSM, mais une simple lettre suffit ! Nous avons simplifié la relation entre le citoyen et le CSM.

M. Masson...

M. Jean-Jacques Hyest.  - Il est parti !

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État.  - ...a dénoncé les délais de mise en oeuvre. Je m'évertue aussi souvent que possible de vous soumettre les décrets d'application avec les projets de loi. Cette critique n'est donc pas justifiée.

Je ne saurais admettre que M. Masson parle de procureurs de la République « aux ordres ». C'est injurieux ! (Applaudissements à droite) C'est contraire à la réalité. Une honte pour la République ? Plutôt une honte pour celui qui tient de tels propos ! (Applaudissements à droite) M. Gélard, comme à l'accoutumée, a fait une brillante démonstration juridique. L'autonomie financière du CMS... la révision institutionnelle n'a pas érigé le CSM en pouvoir constitutionnel. Il ne faut donc pas faire figurer son budget avec celui des deux autres instances. Si vous avez une autonomie totale du budget, cela voudra dire que le président du CSM ira à Bercy discuter de son budget. Mais que va-t-il peser avec ses 2 millions d'euros ? Quand vous disposez d'un tel budget, vous pouvez le faire abonder par votre administration de tutelle. Il s'agit donc d'une protection supplémentaire. Cela peut paraître gênant de confier la préparation du budget au ministère de la Justice mais en faire une ligne autonome serait encore plus dangereux pour le CSM.

L'approche de Mme Klès m'a intéressée : elle a défendu le point de vue du non juriste . C'est un point de vue que je m'efforce d'adopter moi-même car le droit est effectivement fait pour tout le monde. Le citoyen doit comprendre le fonctionnement des institutions.

J'ai déjà parlé de la nomination du secrétaire général, dont le rôle n'est jamais décisionnel. En ce qui concerne la nomination des personnalités extérieures, chacune est soumise à l'approbation du Parlement. Je ne reviens pas sur l'autonomie financière. J'ai également évoqué la place de l'avocat. Simple membre du CSM, il ne décide pas seul !

Enfin, je remercie Mme Escoffier de voter le deuxième texte. Certes, il y a du retard, mais comme je l'ai dit, je le regrette et j'essaye de vous soumettre les textes réglementaires dans les meilleurs délais possibles. (Applaudissements à droite)

La discussion générale est close.

La séance est suspendue quelques instants.

présidence de M. Gérard Larcher

Logement (Questions cribles thématiques)

M. le président. - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement aux questions cribles thématiques sur le logement.

M. François Zocchetto. - Va-t-on attendre que les quartiers s'embrasent pour agir contre les ghettos ? Les communes comptant de grands ensembles de HLM sont souvent classées en zones urbaines sensibles. La politique de mixité est sans doute une réponse adéquate. L'accession à la propriété permettrait de résoudre en partie ce problème mais elle pénalise les communes, puisque les logements HLM vendus à leurs locataires concernés des 20 % de la loi SRU. L'article 17 de la loi de mobilisation pour le logement y remédiait mais il n'a pas été adopté. Allez-vous présenter une mesure en ce sens, monsieur le ministre, et plus largement un plan pour l'accession à la propriété ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.  - Pour changer la vie dans les quartiers, il faut davantage de mixité. L'accession à la propriété y contribue. Il faut donc une grande réforme pour les familles modestes.

La vente des HLM est une solution car leurs locataires ont le droit de devenir propriétaires ; de surcroît les organismes auraient ainsi des fonds propres. Je rappelle que les logements ainsi vendus restent comptabilisés cinq ans dans les 20%.

A Roubaix, l'ensemble des partenaires sociaux se sont engagés à vendre 1 % du parc HLM. Pourquoi ? Un locataire HLM a en effet comme tout le monde le droit de devenir propriétaire.

M. Pierre-Yves Collombat. - Pour sous-louer ...

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Nous faciliterons ainsi la mixité sociale.

(Applaudissements à droite)

M. Jacques Mézard. - Votre ministère privilégie le découpage du territoire entre zones de marché tendu et détendu. Mais les critères retenus sont discutables. En outre, il y a de fortes disparités entre les départements.

Avez-vous l'intention de fragiliser les organismes sociaux en leur demandant de vendre leur patrimoine ? Comme président d'une agglomération, mon voeu serait que les citoyens aisés n'aillent pas investir ailleurs dans le dispositif Scellier. Le doublement du prêt à taux zéro est annoncé : allez-vous laisser aux professionnels le temps de s'adapter ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Nous avons effectivement des zones de tension et d'autres qui ne sont pas tendues. Dans ma commune à Chalons en Champagne,, il faut huit mois, à Paris huit ans pour avoir un logement social. Or, nous produisons des logements : un logement pour 156 habitants en Auvergne mais un pour 293 habitants à Paris ! Or, la crise du logement n'est pas la même en Auvergne et à Paris : il faut produire plus là où la demande est forte et moins ailleurs.

Autre exemple : en matière de logement social nous finançons 120 000 logements, dont 75 % se trouvent dans des zones peu tendues. Il faut rééquilibrer la production.

M. Jacques Mézard.  - Vous ne m'avez pas convaincu. Vous voulez faire plus dans les zones tendues, parfait, mais ne faites pas moins ailleurs. Attention aux déséquilibres. Le dispositif Scellier incite les gens qui en ont les moyens à investir dans d'autres communes : leur commune de résidence est doublement pénalisée.

M. Dominique Braye.  - Le 17 novembre 2009 une proposition de loi a été examinée par le Sénat : la taxe sur les logements vacants a été instaurée. Son bilan est positif. Vous vous êtes engagé à réexaminer le décret fixant la liste des communes concernées. Où en êtes-vous de vos réflexions ? S'agissant de la loi de mobilisation pour le logement (MOL), dont j'ai été le rapporteur, treize articles restent inapplicables, concernant en particulier la réforme du 1% logement et la réhabilitation des quartiers anciens dégradés ? Quand cette loi sera-t-elle totalement applicable ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Sur la taxe sur les logements vacants, je me suis engagé à envisager une application plus large car cette taxe a montré son efficacité. Je modifierai le décret dès que la concertation avec les agglomérations qui ont institué une taxe d'habitation sur les logements vacants aura abouti.

En ce qui concerne la loi MOL, nous avons publié 75 % des décrets. Il en reste seize à publier, dont dix le seront d'ici l'été et six avant l'automne. Mais les décrets les plus importants sont déjà publiés. La réhabilitation des quartiers anciens va pouvoir être lancée d'ici la fin de l'année. (Applaudissements à droite)

M. Dominique Braye.  - Il faut bien engager les discussions avec les collectivités locales pour élargir l'application de la TLV.

M. le président.  - Je félicite notre collègue pour sa nomination à l'Agence nationale de l'habitat. (Applaudissements à droite)

M. Thierry Repentin.  - Depuis 2007, plusieurs coups de canif ont été donnés dans le financement du logement social. Ainsi en a-t-il été avec le Livret A qui n'est plus centralisé à la Caisse des dépôts, puis, du fait de la loi MOL, qui ne l'est guère, (Sourires) avec le 1 % qui permet de boucler les financements. Dans les zones touristiques, il permet d'offrir des logements aux saisonniers.

Enfin, ce qui s'appelle désormais Action logement aide nos concitoyens à devenir propriétaires. Pourtant, Mme Boutin lui a ponctionné 770 millions pour l'Anru et 480 pour l'Anah! A Roubaix, le 31 mars, vous avez dit aux partenaires sociaux que vous ne les laisseriez pas mourir. Allez-vous mettre fin à ce hold-up ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Il faut insister sur l'importance du 1 % logement. C'est un partenaire essentiel qui permet de mener une politique ambitieuse pour le logement. Il n'y a pas de désengagement de l'État : ne vous arrêtez pas sur une mesure mais considérez l'ensemble! Oui, nous tenons à assurer la pérennité du 1 % mais comme il disposait de six milliards de trésorerie il pouvait contribuer au financement de l'Anru et de l'Anah sur trois ans. Nous tiendrons compte évidement de la situation financière d'Action logement au moment de prendre des décisions engageant les trois années suivantes.

M. Thierry Repentin.  - Je n'attendais pas que vous me promettiez qu'Action logement va récupérer le milliard et demi ponctionné en trois ans... Je me réjouis qu'une proposition de loi socialiste rejetée il y a un an trouve ici un écho favorable. Il est vrai que la taxe sur les logements vacants abondera l'Anah, présidée par un membre de la majorité sénatoriale... (Rires et applaudissements socialistes)

M. Daniel Raoul.  - Cherchez l'erreur !

Mme Odette Terrade.  - Vous n'avez de cesse d'annoncer monts et merveilles pour le logement mais je constate une baisse continue des investissements publics. Vous ne faites rien pour appliquer la loi Dalo et la hausse des loyers et la fin de la trêve hivernale vont entraîner la multiplication des expulsions. Chaque année 100 000 expulsions sont prononcées, dont 10 000 mises en oeuvre avec le concours de la force publique. L'Insee prévoit un million de chômeurs en plus cette année. Il ne s'agit pas de mauvais payeurs ! Le comité de suivi du Dalo demande des mesures d'accompagnement. Mais vous n'avez mis en place qu'une ligne de téléphone ! La garantie des risques locatifs (GRL) ne défend que les bailleurs privés, alors que les locataires doivent affronter l'érosion de leurs ressources. Vous êtes bien le défenseur de la propriété privée. Nous demandons le gel des loyers et un moratoire pour les expulsions. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - La propriété est un droit constitutionnel que je défends. Le moratoire serait contreproductif. Si les propriétaires ne peuvent récupérer leurs logements en cas d'impayés, ils ne loueront plus.

En revanche, il faut prévenir les expulsions. Nous avons créé des commissions départementales pour éviter les expulsions qui interviennent trop tardivement. Il faut en effet réagir dès le premier mois.

La garantie des risques locatifs a été mise en place à la demande des partenaires sociaux qui veulent que dès le premier mois d'impayé les services sociaux soient prévenus afin qu'ils interviennent le plus vite possible.

Notre politique est humaine ; elle est plus efficace qu'un moratoire.

Mme Odette Terrade. - Cette réponse ne nous satisfait pas. Le droit de propriété est un droit constitutionnel ? Le droit au logement aussi ! Considérer le logement comme une simple marchandise n'est pas acceptable. Revoyez votre copie ! Il est urgent de déclarer le logement grande cause nationale.

M. Philippe Dallier. - Vous avez annoncé une remise des aides fiscales appuyant l'accession à la propriété, inefficaces et couteuses : 7 milliards d'euros par an ! Vous voulez faire mieux en dépensant moins. Je suis d'accord avec vous, mais, je souhaite en savoir plus sur vos intentions : Quel est votre objectif d'économie budgétaire ? Allez-vous revoir le dispositif Scellier ? Comment assurer la cohérence de vos réflexions avec la réduction des niches fiscales ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - La France a douze produits d'accession à la propriété, dont les cinq principaux coûtent 7 milliards d'euros pour une efficacité douteuse. Il nous faut d'autres outils, moins nombreux, plus simples, plus puissants, notamment pour resolvabiliser les classes moyennes, Nous voulons aussi accélérer la sortie de la crise.

Notre calendrier s'inscrit dans le budget pour 2011, sans modifier le dispositif Scellier que nous avons d'ailleurs verdi.

M. Philippe Dallier. - Nous attendons donc la loi de finances, mais ne retardons pas la reprise !

M. Daniel Raoul. - Le quinzième rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre a souligné le besoin de vivre dans un logement décent. Or, deux millions de personnes peinent à régler leur loyer, 500 000 ne le règlent plus !

Le désengagement de l'État perdure malgré le plan de relance de l'économie. Après le hold-up sur la MSA, vous organisez un racket en trois temps sur le 1 % logement. Ainsi, la dotation régionale dont je dispose a baissé. Quels sont vos objectifs et votre calendrier ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Le plan de cohésion sociale a permis de rattraper le retard pris par votre majorité. (Protestations à gauche ; applaudissements à droite) Nous produisons trois fois plus que sous le gouvernement Jospin. En 2000, 40 000 logements sociaux étaient construits, en 2009, 140 000 ! (On le conteste à gauche) Un record. Voilà ce que vous appelez désengagement de l'État ! (Applaudissements à droite)

M. Daniel Raoul.  - Dans mon agglomération, il manque la moitié des crédits. Je ne peux donc atteindre les objectifs de logements sociaux. Or, les entreprises du BTP ont faim. Multiplier les niches fiscales ne crée aucun logement ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Colette Giudicelli.  - Vous avez déjà répondu aux questions que je voulais vous poser, notamment au sujet de l'accession à la propriété, qui a fléchi de 20 % l'an dernier.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Les gens n'ont plus d'argent.

Mme Colette Giudicelli.  - Quand le Gouvernement compte-t-il réaliser l'objectif fixé par le Président de la République : permettre aux deux tiers des Français d'être propriétaires ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Oui, nous croyons à une France de propriétaires ; oui, l'objectif du Président de la République sera atteint. Aujourd'hui, 54% des Français sont déjà propriétaires. Nous souhaitons disposer d'outils plus lisibles et plus efficaces pour resolvabiliser les classes moyennes.

M. Pierre-Yves Collombat.  - C'est noté.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État.  - Le prêt à taux zéro a montré son efficacité ; nous souhaitons faire encore plus ! La réforme se fera avec le Parlement, pour entrer en vigueur le 1er janvier prochain.

M. le président . - Merci à tous d'avoir participé à ce débat.

La séance est suspendue à 17 h 45.

présidence de M. Roger Romani,vice-président

La séance reprend à 18 heures.

CMP (Grand Paris-Nominations)

M. le président.  - Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au Grand Paris.

La liste des candidats établie par la commission spéciale chargée d'examiner ce projet de loi a été affichée conformément à l'article 12 du Règlement. Je n'ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Jean-Paul Emorine, Jean-Pierre Fourcade, Laurent Béteille, Yves Pozzo di Borgo, Mme Nicole Bricq, M. Jean-Pierre Caffet, Mme Eliane Assassi. Suppléants : MM. Roger Romani, Christian Cambon, Jacques Gautier, Dominique Braye, Serge Lagauche, David Assouline, Mme Françoise Laborde.

Article 65 de la Constitution (Deuxième lecture) et mandat du Conseil supérieur de la magistrature (Procédure accélérée) (Suite)

Discussion des articles (Article 65 de la Constitution)

M. le président. - Nous reprenons la discussion du projet de loi organique relatif à l'article 65 de la Constitution. Je rappelle qu'en deuxième lecture, la discussion est limitée aux articles non encore adoptés en termes identiques par les deux Assemblées.

Article 3

M. le président. - Amendement n°11, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2 

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. 5-1. - L'avocat qui siège dans les trois formations du Conseil supérieur de la magistrature est élu par l'assemblée générale du Conseil national des barreaux.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - En première lecture, le Sénat a amélioré le texte initial, mais l'élection de l'avocat par ses pairs reste préférable.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'élection présente des inconvénients non négligeables et n'apporte pas plus de garanties que l'avis conforme. La commission préfère sa rédaction.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - Même avis.

M. Jean-Pierre Michel. - La ratification du choix du président du barreau sera encore plus déstabilisée par votre proposition. Pourquoi craignez-vous une élection ?

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Article 4

M. le président. - Amendement n°12, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2 :

I. - Première phrase

Supprimer les mots :

, à l'exception du membre désigné en cette qualité en application du deuxième alinéa de l'article 65 de la Constitution,

II. - Seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Il n'est pas envisageable que l'avocat membre du CSM continue à exercer.

L'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'homme s'oppose à ce que l'avocat plaide devant un juge dont il pourrait influencer la carrière.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Cette suggestion va trop loin. La commission maintient l'interdiction de plaider devant une juridiction judiciaire. Pourquoi nommer au CSM un avocat dépouillé de ses attributions professionnelles ? Et le risque d'inconstitutionnalité est réel...

M. le président. - Amendement n°17, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 2, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°11 pour les raisons déjà explicitées. Je propose de revenir au texte initial, seul conforme à la volonté du constituant.

Le rapporteur a fait un premier pas. Pourquoi ne pas aller jusqu'au bout de cette logique ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur.  - En ce point, la position du Gouvernement n'est pas en harmonie avec celle de la commission. La justice doit bien sûr être juste, mais aussi en avoir toutes les apparences. Or, il serait anormal qu'un avocat puisse plaider devant un juge dont il appréciera la pratique professionnelle. Le client adverse aurait sans doute l'impression de non-impartialité si le jugement ne le satisfaisait pas.

Mme Klès a raison : pour le citoyen lambda, le CSM est le juge des juges et doit donc être insoupçonnable. Quelles que soient ses qualités, l'avocat est au service du client qui le rémunère. Y a-t-il un risque d'inconstitutionnalité ? J'en doute. En revanche, la Commission européenne des droits de l'homme pourrait être saisie pour atteinte à l'impartialité de la justice.

J'ajoute que l'avocat sera membre de la formation plénière, de celle du siège et de celle du parquet et qu'il percevra en outre quelques indemnités... Je maintiens donc l'avis défavorable de la commission.

M. François Zocchetto.  - Le constituant a voulu désigner un avocat en activité : quand on est avocat, on est inscrit au tableau ; et quand on est inscrit au tableau, on exerce la profession d'avocat. Même les avocats honoraires sont inscrits au barreau ! L'amendement n°12 ne me semble donc pas recevable.

Encore faut-il éviter un conflit d'intérêt... Il s'agit au demeurant d'une question de principe, car les personnalités désignées - très certainement des avocats expérimentés, sauront respecter les obligations déontologiques qui sont les leurs.

La commission a évolué, puisqu'elle se contente maintenant d'interdire l'action devant une juridiction judiciaire. Pourquoi imposer un traitement spécifique à un membre du CSM ?

M. Patrice Gélard.  - Je suivrai le rapporteur : Les parlementaires avocats ne peuvent pas plaider contre l'État. La rédaction de la commission n'est pas contraire à la Constitution.

M. Adrien Gouteyron.  - Je m'engage avec prudence sur un sujet délicat...(Sourires)

J'ai beaucoup apprécié les propos de M. Zocchetto.

La Constitution mentionne un avocat. S'il ne peut plaider devant le juge judiciaire, il n'est pas de plein exercice.

Est-il normal d'imposer des obligations spécifiques à un membre du CSM ? Je soutiens la position du Gouvernement.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Ne faisons pas dire à la révision constitutionnelle ce qu'elle ne dit pas. La situation de l'avocat est spécifique, puisqu'il peut à tout moment plaider devant un magistrat dont il appréciera l'avancement. C'est un cas particulier qu'il faut traiter comme tel. Et ne faisons pas parler la Constitution au-delà de ce qu'elle dit !

M. Jean-Pierre Michel.  - Le débat prend un tour surréaliste. Les magistrats qui siègent au CSM sont dans une situation analogue à celle des membres de toute commission administrative paritaire. Rien à voir avec la situation de l'avocat.

Enfin, M. Zocchetto lui-même a rappelé qu'un avocat honoraire était inscrit au tableau.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État.  - Certes, il faut éviter toute suspicion sur l'impartialité de l'avocat, mais l'interdiction de plaider ne l'évitera pas : un avocat expérimenté appartient à un cabinet, et le problème se posera qu'il plaide ou pas. Faisons confiance aux avocats pour respecter la déontologie. Mon amendement concrétise le besoin d'un minimum de logique.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Dans le face à face entre le magistrat et l'avocat membre du CSM, c'est aussi l'indépendance du magistrat qui est en cause. L'impartialité d'apparence doit s'ajouter à l'impartialité de fond. L'avocat plaide dans l'intérêt de son client devant un magistrat dont la carrière peut dépendre de lui. Il y a vraiment un risque d'invalidation par la Cour européenne.

L'amendement n°12 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°17.

L'article 4 est adopté.

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

Article 6 bis

Mme la présidente. - Amendement n°16, présenté par le Gouvernement.

I. - Alinéa 1

Remplacer les mots :

sont insérés deux articles 10-1 et 10-2 ainsi rédigés

par les mots :

est inséré un article 10-1 ainsi rédigé

II. - Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Aucun membre du Conseil supérieur de la magistrature ne peut délibérer ni procéder à des actes préparatoires sur une affaire lorsque sa présence ou sa participation pourrait entacher d'un doute l'impartialité de la décision rendue.

III. - Alinéa 3

1° Première phrase

Remplacer les mots :

à l'alinéa précédent

par les mots :

aux alinéas précédents

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

prononce, selon la gravité du manquement, sa suspension temporaire ou

par les mots :

peut prononcer

IV. - Alinéas 4 et 5

Supprimer ces alinéas.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - La suspension temporaire est plutôt inadaptée au fonctionnement du CSM. Au Conseil constitutionnel, la sanction - la démission d'office - est définitive. Il vaut mieux aller jusqu'au bout. En outre, il faut éviter de déstabiliser un membre du CSM qui serait exclu contre sa volonté. Et quelle serait l'autorité des décisions s'il revient ensuite siéger ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Le travail du rapporteur est souvent bien ingrat. La suspension temporaire serait trop légère, dit le Gouvernement ; mais tous les manquements ne se valent pas, certains peuvent être commis de bonne foi. La formation plénière doit pouvoir apprécier au cas par cas. Il faut éviter le marteau pilon pour écraser une mouche, comme on disait sous les IIIe et IVe Républiques ; en refusant la démission d'office pour un manquement mineur, le CSM risquerait de laisser celui-ci impuni.

Le CSM doit pouvoir écarter un membre qui refuserait de se déporter de lui-même. Le cas s'est déjà produit. Tous les cas de déport ne sont pas évidents. Une décision prise à la majorité permettra de régler la question. La démission d'office doit sanctionner un manquement grave à la déontologie. L'avis est défavorable.

L'amendement n°16 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°1, présenté par M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, première phrase

Après les mots :

d'impartialité

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

et d'intégrité.

M. Jean-Pierre Michel. - Notre rapporteur avait introduit en première lecture un certain nombre d'exigences déontologiques : l'indépendance, l'impartialité et l'intégrité. Mais le procureur général Nadal a souhaité qu'on remplace l'intégrité par la dignité. L'Assemblée nationale a conservé les deux. Mais que veut dire dignité ? On peut être digne devant la Cour supérieure de la justice ! Cette notion n'a aucun sens.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - L'Assemblée nationale a ajouté cette exigence de dignité, qui est mentionnée dans le serment des magistrats. La dignité veut par exemple que l'on n'emprunte pas la carte bleue de ses collègues pour des extras...

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - La notion de dignité est déjà citée à trois reprises dans l'ordonnance portant statut des magistrats. Avis défavorable.

L'amendement n°1 n'est pas adopté.

L'article 6 bis est adopté.

L'amendement n°10 n'est pas défendu.

Article 7

Mme la présidente. - Amendement n°13, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3, première phrase

Après les mots :

ladite cour

insérer les mots :

, après avis conforme de la formation plénière,

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - La désignation du secrétaire général du CSM par le Président de la République doit s'accompagner d'un avis conforme de la formation plénière.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Nous avions prévu en première lecture un avis simple. Mais l'Assemblée nationale l'a supprimé ; nous ne souhaitons pas y revenir. La nomination conjointe ne sera pas toujours aisée ; ce deviendra très compliqué s'il faut y ajouter un avis conforme de la formation plénière.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - Le premier président et le procureur général de la Cour de cassation sont parfaitement qualifiés pour proposer un candidat ; je rappelle que le secrétaire général ne dispose d'aucun pouvoir de décision.

M. Jean-Pierre Michel. - Le secrétaire général a quand même un grand pouvoir. La carrière de certains de ceux qui ont occupé la fonction en témoigne : Mme Veil, M. Lamanda ou notre ancien collègue Haenel.

L'amendement n°13 n'est pas adopté.

L'article 7 est adopté

Article 7 bis

Mme la présidente. - Amendement n°18, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - Nous avons déjà évoqué cette question.

Nous voulons garantir le financement du CSM mais nous n'avons pas la même approche de la question. Son autonomie budgétaire est aujourd'hui assurée et ses moyens clairement identifiés au sein du programme 166 ; il est autonome dans la gestion des crédits. Vous voulez rapprocher le CSM d'autres institutions, mais son poids n'est pas suffisant pour se défendre devant Bercy. L'inscription au sein du programme 166 est une protection.

J'entends bien le souhait d'une plus grande indépendance du CSM vis-à-vis de la direction des services judiciaires. Faut-il le rattacher au secrétariat général ? Je ne sais. Réfléchissons ensemble pour garantir à la fois l'indépendance et les crédits.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur.  - Aux yeux de l'opinion, le CSM juge les juges ; il doit être au-dessus de tout soupçon. La situation actuelle n'est pas satisfaisante. Mais nous cheminons avec le ministre d'État vers une solution acceptable par tous. Pour continuer en ce sens, il ne faut pas supprimer cet article. Avis défavorable.

L'amendement n°18 n'est pas adopté.

L'article 7 bis est adopté.

L'article 9 est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par M. Portelli et les membres du groupe UMP.

Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 23-6 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel est abrogé.

Mme Catherine Troendle.  - Le projet de loi organique confie de lourdes charges au Premier président de la Cour de cassation en tant que président du CSM. Il faut en conséquence supprimer la formation spéciale de la Cour compétente en matière de question prioritaire de constitutionnalité, qu'il doit toujours présider, et laisser aux formations de droit commun de la Cour le soin d'en juger. Cette procédure est en vigueur au Conseil d'État.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur.  - Cet amendement propose de modifier la loi organique du 10 décembre 2009, dont l'encre est à peine sèche... Le Premier président peut-il cumuler tant de responsabilités ? Déjà 132 questions prioritaires ont été adressées à la Cour de cassation depuis le 1er mars. Le maintien de la formation ad hoc n'apparaît pas indispensable. Avis favorable.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - Sur plus de 220 questions prioritaires de constitutionnalité pendantes devant la Cour de cassation, aucune n'a été transmise au Conseil constitutionnel ni n'a fait l'objet d'un refus de transmission. La cause de ce retard tient sans doute aux charges du premier président. Je m'en remets à l'avis de M. le rapporteur.

L'amendement n°8 rectifié est adopté et devient un article additionnel.

Article 11

Mme la présidente. - Amendement n°14, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7, seconde phrase

Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :

En cas de partage égal des voix, la commission des requêtes décide qu'il n'y a pas lieu à saisir la formation compétente. La décision est notifiée au magistrat visé par la plainte et au justiciable auteur de la plainte.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - En cas de partage des voix devant la commission des requêtes, le magistrat est renvoyé devant la formation disciplinaire. Pourtant, le doute doit bénéficier à la personne mise en cause. Mme la garde des sceaux m'a accusée en première lecture de montrer ma défiance à l'égard des magistrats. C'est faux !

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Si le Sénat a retenu en première lecture qu'en cas de partage égal des voix la plainte était transmise, c'est par souci d'efficacité et d'équilibre. A l'étape du filtrage, le doute doit profiter au justiciable. Il est en outre souhaitable que deux magistrats ne puissent rejeter une plainte. On mettra fin ainsi aux polémiques sur le corporatisme réel ou supposé des magistrats. Au moment de la décision disciplinaire, en revanche, le doute profite au magistrat mis en cause. Avis défavorable.

L'amendement n°14, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 11 est adopté.

L'article 11 ter est adopté.

Article additionnel

Mme la présidente. - Amendement n°9 rectifié, présenté par M. Portelli et Mme Troendle.

Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 35 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « premier président » sont remplacés par les mots : « doyen des présidents de chambre », les mots : « procureur général près » sont remplacés par les mots : « plus ancien des premiers avocats généraux à » et après les mots « à ladite cour » sont ajoutés les mots : « , vice-président. Le vice-président remplace le président en cas d'empêchement de ce dernier » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le doyen des présidents de chambre de la Cour de cassation ou le plus ancien des premiers avocats généraux à ladite Cour est par ailleurs membre du Conseil supérieur de la magistrature en application du 1° de l'article 1 ou du 1° de l'article 2 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, ou lorsqu'il est par ailleurs membre de la commission d'avancement en application du 2° du présent article, la présidence ou la vice-présidence de ladite commission est assurée respectivement par le plus ancien des présidents de chambre ou par le plus ancien des premiers avocats généraux qui n'est pas par ailleurs membre du Conseil supérieur de la magistrature ou de la commission d'avancement en application des mêmes dispositions. »

Mme Catherine Troendle. - Le premier président de la Cour de cassation présidant désormais le CSM, il ne peut conserver la présidence de la commission d'avancement. Les attributions de celle-ci et du CSM diffèrent. Il importe que ces deux institutions, que nul n'a songé à réunir, conservent une composition différente pour exercer leurs missions en toute indépendance. Je souhaite également rectifier cet amendement.

Mme la présidente. - Il s'agira de l'amendement n°9 rectifié bis, ainsi rédigé.

Avant l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 35 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « premier président » sont remplacés par les mots : « doyen des présidents de chambre », les mots : « procureur général près » sont remplacés par les mots : « plus ancien des premiers avocats généraux à » et après les mots : « ladite cour » sont ajoutés les mots : « , vice-président. » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le vice-président remplace le président en cas d'empêchement de ce dernier. Lorsque le doyen des présidents de chambre de la cour de cassation ou le plus ancien des premiers avocats généraux à ladite Cour est par ailleurs membre du Conseil supérieur de la magistrature en application du 1° de l'article 1 ou du 1° de l'article 2 de la loi organique n° 94-100 du 5 février 1994 sur le Conseil supérieur de la magistrature, ou lorsqu'il est par ailleurs membre de la commission d'avancement en application du 2° du présent article, la présidence ou la vice-présidence de ladite commission est assurée respectivement par le plus ancien des présidents de chambre ou par le plus ancien des premiers avocats généraux qui n'est pas par ailleurs membre du Conseil supérieur de la magistrature ou de la commission d'avancement en application des mêmes dispositions. »

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Nous souhaitons entendre le Gouvernement.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - Cette disposition est plus protectrice et plus logique. Avis favorable.

M. Jean-Pierre Michel. - Nous voterons des deux mains cet amendement révolutionnaire, qui porte un coup à la situation hiérarchique des magistrats. Je remercie Mme la garde des sceaux de l'avoir accepté.

L'amendement n°9 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

L'article 14 bis est adopté ainsi que l'article 17.

Article 18

Mme la présidente. - Amendement n°3, présenté par M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, première phrase

Après les mots :

d'une procédure judiciaire

insérer les mots :

devenue définitive

M. Jean-Pierre Michel. - Nous en arrivons à la saisine du CSM par les justiciables. La saisine ne doit être possible que lorsque la procédure est définitivement terminée, même pour les tutelles.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Avis défavorable. La saisine du CSM par le justiciable doit être possible à tous les stades de la procédure, surtout dans l'hypothèse d'une tutelle. La commission a écrit que le CSM ne peut être saisi si le magistrat demeure saisi de la procédure, sauf si le manquement évoqué et la nature de la procédure le justifient. Il faut préserver à la fois la sérénité de la justice et les droits des justiciables.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - Cet amendement n'a pas lieu d'être. Avis défavorable.

L'amendement n°3 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°4, présenté par M. Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2, première phrase

Après les mots :

comportement adopté par un magistrat du siège

insérer les mots :

, à l'exclusion des actes juridictionnels,

M. Jean-Pierre Michel. - Il s'agit du « comportement » du magistrat. De quoi s'agit-il ? Conformément à la jurisprudence du Conseil d'État, le garde des sceaux ne peut sanctionner un magistrat pour un acte juridictionnel. La récusation peut en outre toujours être demandée.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. - Nous avons déjà rejeté en première lecture cet amendement qui serait satisfait, puisque les actes juridictionnels sont déjà exclus des champs de la saisine, sauf lorsque la gravité d'une éventuelle entorse à la procédure disqualifie l'acte lui-même.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. - En effet, le texte est satisfait. Retrait, sinon rejet.

M. Jean-Pierre Michel. - J'attendais ces explications.

L'amendement n°4 est retiré.

Mme la présidente.  - Amendement n°15, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il n'est pas acceptable que le garde des sceaux et les chefs de cour puissent saisir le CSM alors que la commission des requêtes a rejeté la plainte. Il y va de l'indépendance de la justice. A plusieurs reprises, j'ai dénoncé le rôle trop marqué de l'exécutif au sein du CSM. Cette disposition y participe.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur.  - En une seule année, combien y aura-t-il de saisines du CSM ? Cinq, six ? Le garde des sceaux et les chefs de cour doivent pouvoir continuer à saisir le Conseil. Il est préférable de maintenir cet article en l'état.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État.  - Ce n'est pas parce que les citoyens peuvent saisir le CSM qu'il faut empêcher le garde des sceaux de le faire !

L'amendement n°15 n'est pas adopté.

L'article 18 est adopté.

L'article 20 est adopté, ainsi que les articles 21, 22, 23 et 24.

Article 25

L'amendement n°6 devient sans objet, ainsi que l'amendement n°7.

L'article 25 est adopté.

L'article 26 est adopté, ainsi que les articles 28 bis, 29 A et 29.

Le projet de loi organique est mis aux voix par scrutin public de droit.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 319
Majorité absolue des suffrages exprimés 160
Pour l'adoption 178
Contre 141

Le Sénat a adopté.

Discussion de l'article unique (Mandat du CSM)

Mme la présidente.  - Nous allons examiner le projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, prorogeant le mandat des membres du CSM.

Mme la présidente. - Je ne suis saisie d'aucun amendement.

M. Jean-Pierre Michel.  - Nous ne prendrons pas part au vote pour laisser la majorité et le Gouvernement dans le brouillard de leur brouillon. (Sourires)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Même chose en ce qui nous concerne !

Mme la présidente.  - Le vote sur l'article unique a valeur de vote sur l'ensemble du projet de loi organique.

L'article unique est mis aux voix par scrutin public de droit.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 199
Nombre de suffrages exprimés 198
Majorité absolue des suffrages exprimés 100
Pour l'adoption 198
Contre 0

Le Sénat a adopté.

La séance est suspendue à 19 h 30.

présidence de M. Guy Fischer,vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Conférence des Présidents

M. le président.  - Je vous donne lecture des conclusions de la Conférence des Présidents.

Les conclusions de la Conférence des Présidents sont adoptées.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Il y aurait beaucoup à dire...

M. Patrice Gélard.  - C'est insupportable !

Moyens de contrôle du parlement

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques.

Discussion générale

M. Henri de Raincourt, ministre des relations avec le Parlement.  - Le contrôle des politiques publiques est, dans une démocratie moderne, une fonction de plus en plus importante du Parlement. Après la réforme constitutionnelle, il reste à trouver les moyens de rendre évaluateur le Parlement législateur. Tel est l'objet de cette proposition de loi de M. Accoyer.

Le Gouvernement approuve pleinement cette démarche. Toutefois, il rappelle qu'il est seul à pouvoir autoriser les responsables administratifs de l'État à se rendre devant le Parlement. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 juin 2009, a marqué que tel était bien l'esprit de la Constitution. Il serait dangereux de banaliser le recours à de tels pouvoirs du Parlement. Les commissions permanentes n'ont pas, de droit, de telles prérogatives ; il leur faut l'accord de l'Assemblée elle-même.

Je salue avec chaleur le remarquable travail de M. Gélard, ainsi que la qualité des réflexions menées au sein de la commission que préside M. Hyest. La fonction du Parlement n'appelle pas à une multiplication des moyens de contrainte sur le Gouvernement, mais à l'établissement d'un dialogue constructif et confiant avec le pouvoir exécutif. La possibilité désormais offerte aux commissions permanentes de demander la saisine de la Cour des comptes est dans la logique du nouvel article 47-2 de la Constitution. Il importe toutefois de réguler voire de programmer les demandes qui sont faites à la Cour des comptes. La priorité reconnue aux demandes des commissions des finances et des affaires sociales garantira le contrôle de la bonne application des lois de finances et de financement.

Je le dis nettement : l'examen de cette proposition de loi n'est pas le cadre pour un débat approfondi sur l'organisation et les compétences de la Cour des comptes. Le Gouvernement, vous ne l'ignorez pas, prépare une réforme des juridictions financières, dans l'esprit du regretté Premier président Séguin. La proposition de loi tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 25 juin 2009 : ces dispositions ont place non plus dans les règlements des assemblées, mais dans la loi. Cette initiative complète l'engagement du Gouvernement de mettre en oeuvre au plus tôt les nombreuses innovations de la révision constitutionnelle. Le Gouvernement est favorable à l'adoption de cette proposition de loi opportune et prometteuse pour le Parlement. (Applaudissements au centre et à droite)

M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois.  - Je remercie le ministre pour ses compliments. J'ajoute cependant qu'il ne faut pas trop charger le train. La Conférence des Présidents qui vient d'être lue fait craindre qu'il ne déraille.

Cette proposition de loi doit rendre possible l'adoption par l'Assemblée nationale des moyens de contrôle dont elle voulait bénéficier. Le Conseil constitutionnel considère que cela doit désormais relever de la loi et non plus du règlement des assemblées. Les articles 1, 2 et 3 concernaient beaucoup plus l'Assemblée nationale que le Sénat, mais puisque nous entretenons de bons rapports...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Sauf sur l'article 13 !

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - ...nous allons adopter son texte, après toutefois l'adoption de huit amendements à l'article premier. A l'article 3, nous réécrivons le nouvel article L.132-5, qui était un peu lourd.

Enfin, il faut rendre applicable l'article 47-2 de la Constitution. La réforme des juridictions financières , dont Jean Arthuis parlera à propos de son amendement,n'a pas sa place ici.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Un gros cavalier ! (On rit)

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Vous n'avez rien compris !

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Sur le texte, je n'ajouterai rien, après tout ce qu'a dit le ministre ! (Applaudissements au centre et à droite)

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances.  - Le rapporteur vient de présenter le contexte de cette proposition de loi du président de l'Assemblée nationale. C'est évidemment l'article 3 qui a focalisé l'attention de la commission des finances : il attribue à certaines instances parlementaires l'évaluation des politiques publiques, le pouvoir de saisine de la Cour des comptes.

Cette extension risque d'aboutir à une augmentation du nombre de demandes, incompatible avec les moyens de la Cour. Celle-ci serait donc amenée à trier entre les demandes de l'Assemblée nationale et du Sénat. La commission des finances a souhaité écarter le risque d'une trop grande augmentation du nombre de saisines de la Cour. Depuis 2003, notre commission des finances demande à la Cour cinq enquêtes. Celles-ci , remises dans un délai de huit mois,font l'objet de publication. Nos amendements sur ce point ont été adoptés par la commission des lois, ce dont je la remercie.

Nous avons voulu aller plus loin et répondre à certaines dispositions du projet de loi de modernisation des juridictions financières déposé par le Gouvernement sur le bureau des assemblées. Il faut que la Cour ait les moyens de son action. Ce n'est pas un cavalier...

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Le pâté d'alouette...

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - ...que de donner à la Cour la possibilité d'accéder aux administrations territoriales. Il faut avoir une approche globale des comptes publics. Dois-je vous rappeler nos demandes d'enquêtes sur la politique de la ville, les chambres de métier ou le soutien scolaire ? A chaque fois, nous avons buté sur le partage des attributions entre la Cour des comptes et les chambres régionales.

Nos demandes figurent toutes dans le projet de loi élaboré par le Premier président Séguin et adopté par le conseil des ministres.

Mais il s'agit là du domaine privilégié de la commission des lois.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - L'organisation des juridictions est de notre compétence !

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - L'unification organique de la Cour des chambres régionales, avec la création des chambres régionales, cela relève des compétences de la Cour.

M. Jean-Pierre Sueur. - Et le législateur ?

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - Laissons au législateur les grands principes !

M. Jean-Pierre Sueur. - C'est le législateur qui a créé les chambres régionales !

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - On ne peut poser le principe que la Cour certifie les comptes de l'État et non ceux des collectivités territoriales. Il faut aussi que chaque chambre puisse atteindre une taille critique. Celle du Limousin n'a que cinq magistrats, celle de la Corse, quatre.

M. Pierre-Yves Collombat. - Augmentez les effectifs ! (Sourires)

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - Le projet de loi réformant les juridictions financières a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 28 octobre et n'a toujours pas été inscrit à l'ordre du jour. Saisissons l'occasion de cette proposition de loi.

Pour être crédibles, les juridictions financières doivent accepter de se réformer et de s'interroger sur leur mode de fonctionnement. Il serait singulier qu'elles ne soient pas exemplaires de la modernité administrative !

Mme Muguette Dini, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Alain Vasselle.  - Cette proposition de loi, pour brève qu'elle soit, n'en est pas moins importante. Elle donne corps à cette nouvelle mission du Parlement voulue par le législateur constitutionnel.

Notre commission des affaires sociales s'est saisie pour avis de l'article 3 : l'article 47-2 de la Constitution consacre la mission d'assistance de la Cour des comptes au Parlement. L'article 58 de la Lolf prévoit que les deux commissions des finances peuvent solliciter la Cour. L'article L. 133-1 du code des affaires sociales prévoit l'équivalent pour la commission des affaires sociales. La proposition de loi complète ces dispositions.

Pour éviter un engorgement de la Cour, la proposition de loi prévoit un filtre des demandes par les présidents des deux Assemblées. Comme la commission des finances, nous souhaitons reprendre le principe posé par le Conseil constitutionnel selon lequel ce contrôle ne peut porter sur les lois de finances et de financement, pour lesquelles les commissions spécialisées des deux Assemblées sont seules compétentes. Les moyens de la Cour ne sont pas extensibles à l'infini.

Notre commission entretient des relations étroites et fructueuses avec la Cour, dont nous apprécions l'extension du champ de compétences. Elle a procédé à notre demande à une enquête sur la politique de lutte contre le Sida ; elle va le faire sur la pandémie grippale et sur la tarification des établissements médico-sociaux publics et privés, en écho à nos travaux sur la prise en charge de la dépendance.

La commission des affaires sociales est favorable à l'adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements au centre et à droite)

Mme Josiane Mathon-Poinat. - Ce qui était mis en avant il y a deux ans comme une « révolution » démocratique apparaît bien mince. La limitation du droit d'amendement à l'Assemblée nationale, combinée avec une prolifération des textes qui lui sont soumis, restreignent de fait le pouvoir de contrôle du Parlement. On est loin de la réforme profonde qui serait nécessaire pour accroître vraiment les prérogatives parlementaires.

L'Assemblée nationale a créé un comité de contrôle alors que le Sénat a accordé ces pouvoirs à ses commissions permanentes. Je rends hommage à M. Arthuis, qui rappelle qu'à l'Assemblée nationale, au sein du CEC, tous les groupes peuvent rédiger un rapport de contrôle.

Au Sénat les commissions peuvent jouer ce rôle mais elles sont soumises sont soumises au bon vouloir de leur majorité... Il faudra y songer lors de la réforme du règlement. Les rapporteurs n'ont pas toujours les pouvoirs que peuvent avoir ceux des commissions d'enquête.

M. Arthuis tente de supprimer, en fait, les chambres régionales des comptes. C'est une restriction des moyens d'action de l'Etat et des collectivités territoriales. Nous voterons résolument contre cette proposition, mais ne ferons que nous abstenir sur l'ensemble de la proposition de loi.

M. Jean-Pierre Sueur.  - M. Accoyer est un homme avisé et prudent : il a proposé d'accroître la capacité de contrôle du Parlement. Je vais donc défendre sa proposition. (On s'amuse sur les bancs de la commission)

Mais l'Assemblée nationale - quelle surprise ! - n'a pas suivi son président. Le champ de l'article premier a été singulièrement réduit. Connaissant MM. Hyest et Gélard, je pensais que notre commission se porterait au secours de M. Accoyer.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - On n'a pas besoin de cela !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il n'en a rien été. Nous avons donc déposé un amendement pour revenir au texte initial. M. Gélard nous propose un nivellement par le bas, un alignement des régimes des instances de contrôle et des commissions permanentes.

En ce qui concerne les délégations parlementaires communes aux deux assemblées, nous proposons aussi d'en revenir au texte initial. Enfin, comment justifier le fait de limiter le pouvoir de convocation aux seules instances de contrôle transversales ?

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Autrement, c'est la commission !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Il faut là aussi revenir à la rédaction de M. Accoyer. M. de Raincourt en est convaincu, j'en suis sûr. Nous avons pris connaissance avec intérêt des amendements de M. Arthuis, mais ils nous semblent hors sujet.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Il y a un lien et c'est très important.

M. Jean-Pierre Sueur.  - La réforme des chambres des comptes est légitime, mais on ne peut en traiter par raccroc au détour de ce texte. Nous avons reçu les représentants de la Cour et des chambres régionales des comptes.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - C'était très intéressant.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Sur le fond, il y a matière à discuter. Si certaines chambres de compte manquent de magistrats, ce n'est ni inéluctable, ni une raison de diviser par deux le nombre de chambres ! Si on ne crée qu'une seule chambre pour le Centre et le Limousin, nos magistrats devront passer beaucoup de temps dans les transports, entre Brive-la-Gaillarde et Dreux.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Ils se font communiquer les pièces ! Ils se déplacent peu.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cela aura un effet évident sur leur travail. Ce sujet mérite réflexion ; s'il faut sans doute retravailler les liens entre la Cour et les chambres régionales, le sujet mérite un projet de loi spécifique. Il y en a un, d'ailleurs.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Il n'est pas inscrit à l'ordre du jour !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Cela dépend des instances compétentes pour cela...

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Mais il existe...

M. Jean-Pierre Sueur.  - Nous voterons donc contre ces amendements.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis.  - Quel conservatisme !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Respectons la qualité de la loi !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Si ces amendements étaient adoptés par le Sénat, nous saisirions le Conseil constitutionnel, que nous savons sensible à la façon dont nous faisons la loi.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.  - Alors là, bing !

M. Jean-Pierre Sueur.  - Pour le reste, nous nous abstiendrons sur ce texte. (Applaudissements socialistes)

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Cette proposition de loi est la conséquence directe de la révision de 2008 qui devait revaloriser le rôle du Parlement. L'Assemblée nationale a créé, en mai 2009, une nouvelle structure, le comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques.

Ce texte entend parachever le renforcement des pouvoirs du Parlement. Le passage d'une logique de moyens à une logique d'efficience impose de disposer d'outils d'analyse fiables. La loi de règlement a pris une importance nouvelle.

L'assistance à l'évaluation apportée par la Cour des comptes a été renforcée sur une base légale. Je me réjouis donc de la place que le Parlement entend tenir désormais au travers de ses missions de contrôle, trop souvent ignorées dans le passé.

Cette proposition de loi va dans le bon sens et a encore été améliorée par la commission. Les groupes minoritaires doivent néanmoins bénéficier de davantage de droits. Les membres du RDSE regrettent qu'il n'en soit rien.

Les amendements de M. Arthuis ont suscité notre perplexité ; ils proposent en effet une réforme d'ensemble de la Cour des comptes et des chambres régionales. Nous ne sommes pas opposés à une réforme, et nous sommes prêts à y travailler sur le fondement des travaux déjà entrepris au sein de la Cour et de ses chambres. Il n'est pas raisonnable de se passer d'un débat de fond, que le nouveau Premier président doit aussi s'approprier. Notre groupe s'opposera à ces amendements et plaide pour un débat serein. S'ils devaient être adoptés, nous nous abstiendrions sur l'ensemble du texte. Nous osons croire à la sagesse du Gouvernement... (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Yves Détraigne.  - Ce texte est très important pour le Parlement, qui met en oeuvre les dispositions issues de la révision de 2008 et les moyens nécessaires à l'exercice de ses missions de contrôle et d'évaluation des politiques publiques. Le Parlement serait d'ailleurs plus utile au Gouvernement et au pays en prenant le temps du contrôle et de l'évaluation des dispositions législatives existantes. Nous recourons de plus en plus à l'expertise de la Cour des comptes pour le contrôle, mais cette dernière mission n'est pas toujours considérée comme elle le devrait par les parlementaires eux-mêmes - ils ne sont pas encore très présents à Paris lors des semaines de contrôle. Il n'est pas très satisfaisant de dire aux électeurs que « c'est le Gouvernement qui l'a voulu ». Le Parlement se comporte trop souvent en chambre d'enregistrement : il n'est pas assez critique par rapport aux textes qui lui sont soumis et qui ne sont que rarement accompagnés d'études d'impact. Le service après-vote est aussi important que le vote. Les électeurs ne jugent pas le politique sur le nombre de lois votées mais sur la qualité des politiques qui sont menées.

L'article 3 me pose, sur ce point, quelques problèmes. Chaque instance du Parlement pourra saisir la Cour des comptes au titre de sa mission d'assistance ; c'est légitime. Mais ne risque-t-on pas l'engorgement ? J'approuve le filtrage par le président de chaque assemblée.

Les chambres régionales des comptes ont été créées en 1982 pour contrôler les collectivités territoriales ; depuis lors, les pouvoirs de celles-ci ont considérablement augmenté. Il ne faudrait pas que la multiplication des interventions de la Cour des comptes et des chambres régionales demandées par le Parlement se fasse au détriment de leurs missions traditionnelles. Je me réjouis donc de la sage position de la commission. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Patrice Gélard, rapporteur. - N'oubliez pas le filtre !

M. François Pillet. - Cette proposition de loi met en oeuvre la révision constitutionnelle afin que les organes parlementaires disposent des moyens nécessaires pour contrôler l'exécutif. Elle fait suite à la décision du Conseil constitutionnel du 25 juin 2009 sur la résolution de mai 2009 modifiant le Règlement de l'Assemblée nationale.

La commission des lois a amélioré ce texte de diverses manières. Ainsi en est-il des convocations et des comptes rendus des auditions en commission d'enquête. Les rapporteurs des instances permanentes de contrôle et d'évaluation bénéficieront des mêmes pouvoirs que les rapporteurs des commissions d'enquête. Il faudra néanmoins une autorisation de l'Assemblée concernée.

Un filtre a été instauré pour les demandes d'assistance à la Cour des comptes, celle-ci devant assurer en priorité le traitement de celles émanant des commissions des finances et des affaires sociales. Les membres de l'UMP voteront le texte tel que modifié par la commission. (Applaudissements à droite)

Mme Nicole Bricq - M. Frécon aurait voulu intervenir ce soir : il est rapporteur spécial pour la mission « Conseil et contrôle de l'État » et rapporte depuis cinq ans le budget de la Cour des comptes. Depuis la Lolf, de nouvelles formes de coopération entre la Cour et la commission des finances sont en vigueur. Chaque année, la Cour conduit à la demande de celle-ci cinq enquêtes, qui donnent lieu à des auditions pour suite ouvertes à la presse. Elles enrichissent la réflexion du Sénat. Les sujets traités renvoient tous à une exigence de transparence et d'efficacité des politiques publiques. La mission d'assistance au titre de l'article 58-1 de la Lolf est plus lente à se mettre en place.

Les rencontres entre les rapporteurs spéciaux et les magistrats de la Cour se multiplient. M. Frécon insiste sur les relations de confiance qu'il avait nouées avec Philippe Séguin et ses équipes et ne doute pas qu'il en ira de même avec M. Migaud, qui est le co-auteur avec M. Lambert de la Lolf. (M. Jean Arthuis approuve)

Personne ne peut douter des synergies instaurées entre le Sénat et la Cour des comptes. Nous sommes installés dans une relation de long terme chaque jour plus solide, ce qui contribue à renforcer encore l'efficacité du contrôle et de l'évaluation des politiques publiques - qui sont bien parmi les missions du Parlement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article premier

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

Après l'article 5 bis de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Les instances créées au sein du Parlement ou de l'une de ses deux assemblées pour contrôler l'action du Gouvernement et évaluer les politiques publiques peuvent convoquer toute personne dont elles estiment l'audition nécessaire, sous les réserves prévues par l'article 5 bis.

« Les rapporteurs de ces instances exercent leur mission dans les conditions prévues au deuxième alinéa du II de l'article 6.

« Le fait de faire obstacle à l'exercice des prérogatives prévues par le présent article est puni de 7 500 € d'amende. »

M. Jean-Pierre Sueur.  - J'ai déjà présenté cet amendement lors de la discussion générale. Il faut redonner toute sa portée au dispositif voulu par M. Accoyer.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

et les instances

supprimer le mot :

permanentes

M. Jean-Pierre Sueur. - Nous étendons le dispositif aux missions d'information et autres missions d'évaluation et de contrôle.

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

au sein

insérer les mots :

du Parlement ou

M. Jean-Pierre Sueur. - Je l'ai également déjà présenté : il faut en revenir au texte de M. Accoyer, et viser tant les structures propres à chaque assemblée que celles communes aux deux chambres.

M. le président. - On aura rarement autant entendu ici le nom de M. Accoyer ! (Sourires)

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Supprimer les mots :

dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente

M. Jean-Pierre Sueur. - Nous ne comprenons pas cette restriction.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II. - Les rapporteurs désignés par les instances permanentes créées au sein de l'une des deux assemblées parlementaires pour contrôler l'action du Gouvernement ou évaluer des politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente disposent, dans les conditions définies à l'alinéa précédent, des prérogatives visées à l'article 6. »

M. Jean-Pierre Sueur.  - L'Assemblée nationale a précisé que les pouvoirs conférés aux rapporteurs des instances de contrôle et d'évaluation des politiques publiques devaient être exercés conjointement. Cette exigence, qui signifie qu'un contrôle ne pourra être exercé par l'un que si l'autre ne s'y oppose pas, est contestable. L'association d'un rapporteur de la majorité et d'un autre issu d'un groupe minoritaire est une avancée démocratique - je rends d'ailleurs hommage aux pratiques initiées par le président de notre commission des lois. Chacun des rapporteurs doit pouvoir agir à sa guise. La recherche du consensus peut être un frein.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Je suis défavorable à tous ces amendements.

M. Jean-Pierre Sueur. - Sauvez-en quelques-uns !

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Non, car ils ont tous pour effet le déclin des commissions permanentes. Il faut respecter la hiérarchie : les commissions d'enquête, les commissions permanentes puis tout le reste. Or ce reste, nous le mettons au même niveau que les commissions permanentes s'agissant des pouvoirs d'enquête. C'est un progrès par rapport au texte de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Pierre Sueur. - M. Accoyer est derrière moi !

M. Henri de Raincourt, ministre. - Je suis également défavorable à ces amendements. Les 3 à 6 ne sont pas nécessaires, tandis que l'intérêt du 7 m'échappe. L'association de membres de la majorité et de l'opposition a fait la preuve de son efficacité et de son utilité démocratique. Les parlementaires sont gens intelligents et dévoués à l'intérêt général : il ne saurait y avoir risque de blocage.

L'amendement n°3 n'est pas adopté, non plus que les amendements n°s4, 5, 6 et 7.

L'article premier est adopté.

Article additionnel

M. le président. - Amendement n°10, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa du I de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires est supprimé.

M. Pierre-Yves Collombat. - Il convient de supprimer l'interdiction de la création d'une commission d'enquête lorsque les faits donnent lieu à des poursuites judiciaires. Les commissions d'enquête sont tout en haut de la hiérarchie, dit M. Gélard ; donnons-leur le maximum de pouvoirs.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois - Le principe de séparation des pouvoirs est encore au-dessus !

M. Patrice Gélard, rapporteur. - C'est vrai !

M. Pierre-Yves Collombat. - Je viens en renfort de la commission Balladur. De grâce, ne nous dites pas qu'il s'agit de la séparation des pouvoirs !

M. Patrice Gélard, rapporteur. - Si, justement. C'est une règle constitutionnelle incontournable. Je suis défavorable. Il faudrait une loi constitutionnelle.

M. Henri de Raincourt, ministre. - En 2008, lors de la révision, de tels amendements avaient été déposés, et rejetés ! Même avis.

M. Jean-Pierre Sueur. - Dans l'affaire d'Outreau, l'Assemblée nationale a dû se livrer à des grands efforts d'interprétation pour mettre en place la commission d'enquête dont chacun mesure aujourd'hui l'importance, mais dont les préconisations sont encore devant nous.

Ensuite le dispositif actuel peut donner lieu à des manipulations : pour échapper à une commission d'enquête, il suffit de saisir la justice. C'est très facile. Quant à la séparation des pouvoirs, j'ai l'impression que la vérité d'hier n'est pas celle d'aujourd'hui, M Gélard est moins sourcilleux sur l'indépendance du parquet.

Enfin, comment M. Balladur aurait-il pu faire une proposition contraire au principe de séparation des pouvoirs ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - La proposition 40 du comité Balladur n'est pas vraiment celle-là. Pour Outreau, il n'y avait plus d'instances judiciaires en cours. Si une commission d'enquête intervenait sur des faits soumis à une juridiction, l'État de droit n'existerait plus. Il s'agit quand même d'un principe général de toutes les démocraties ! Si vous n'y croyez plus, je suis inquiet... pour vous !

M. Jean-Pierre Sueur. - Que de sollicitude !

M. Pierre-Yves Collombat. - Vous seriez plus crédible si vous défendiez la séparation des pouvoirs de l'exécutif et du judiciaire ! Tant que cette hypothèque ne sera pas levée nous rappellerons que quelque chose ne va pas. La séparation des pouvoirs ne doit pas fonctionner dans un seul sens.

M. Patrice Gélard, rapporteur. - Là-dessus, nous sommes d'accord.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Mais ce n'est pas une raison pour la supprimer dans l'autre sens !

L'amendement n°10 n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

Article 3

M. le président. - Amendement n°8, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

Président du Sénat

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ou par une commission permanente dans son domaine de compétence ou par toute instance créée au sein du Parlement ou de l'une de ses deux assemblées pour procéder à l'évaluation des politiques publiques.

M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement se justifie par son texte même.

M. Patrice Gélard, rapporteur. - Avis défavorable : s'il n'y a plus de filtre, la Cour des comptes connaîtra immanquablement des embouteillages.

M. Henri de Raincourt, ministre. - Le filtre doit être maintenu. Il faut faire confiance aux présidents des Assemblées. A quelque sensibilité qu'ils appartiennent, ce sont des personnalités éminentes qui sont les présidents de tous les députés et de tous les sénateurs. En outre, il faut éviter l'engorgement.

Avis défavorable.

L'amendement n°8 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°9, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

M. Pierre-Yves Collombat. - Il faut supprimer l'alinéa qui donne la priorité à la commission des finances. Ou alors, il serait plus simple de dire que, compte tenu de la charge de travail de la Cour des comptes, seules les demandes de la commission des finances seront traitées.

M. le président. - N'oubliez pas la commission des affaires sociales.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - Merci.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Je dois encore donner un avis défavorable : cette priorité relève de la loi organique !

M. Henri de Raincourt, ministre. - Même avis.

M. Pierre-Yves Collombat. - Pourquoi alors délibérer si on ne change rien du tout ?

L'amendement n°9 n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par M. Arthuis, au nom de la commission des finances.

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le code des juridictions financières est ainsi modifié :

1° L'article L. 111-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En outre, la Cour des comptes exerce, selon la procédure définie par le présent code, le contrôle de la gestion des collectivités territoriales et de leurs groupements, ainsi que des établissements publics locaux à caractère administratif. » ;

2° Après l'article L. 111-3, sont insérés trois articles ainsi rédigés :

« Art. L. 111-3-1. - La Cour des comptes contribue à l'évaluation des politiques publiques dans les conditions prévues par le présent code.

« Art. L. 111-3-2. - La Cour des comptes s'assure que les comptes des administrations publiques sont réguliers, sincères et donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière, soit en certifiant elle-même les comptes, soit en rendant compte au Parlement de la qualité des comptes des administrations publiques dont elle n'assure pas la certification.

« Art. L. 111-3-3. - La Cour des comptes concourt au contrôle des actes budgétaires et de l'exécution du budget des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et des établissements publics de santé. » ;

3° Après l'article L. 112-1, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. 112-1-1. - La Cour des comptes est composée de chambres.

« Les chambres en région, dénommées chambres des comptes, ont un ressort interrégional, sauf si des particularités géographiques justifient un ressort différent. Leur ressort et leur siège sont fixés par décret.

« Sans préjudice des autres missions qui peuvent leur être confiées au sein de la Cour des comptes, et dans le respect du pouvoir d'organisation des travaux exercé par son premier président, elles exercent seules dans leur ressort la compétence de jugement des comptes des comptables publics des collectivités territoriales et de leurs établissements publics et la mission de contrôle budgétaire de ces collectivités et établissements définie au chapitre II du titre Ier du livre VI de la première partie du code général des collectivités territoriales et celle de contrôle de la gestion des collectivités territoriales régie par le second alinéa de l'article L. 111-3 du présent code.

« Leur président est un conseiller-maître qui ne peut simultanément présider une autre chambre de la Cour des comptes. »

4° L'intitulé du livre II est ainsi rédigé : « Les chambres territoriales des comptes » ;

5° La première partie du livre II est abrogée ;

6° L'article L. 120-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 120-1. - Les membres de la Cour des comptes ont la qualité de magistrats.

« Ils ont vocation à être affectés dans une des chambres de la Cour des comptes définies à l'article L. 112-1-1.

« Les magistrats du siège sont inamovibles. Ils ne peuvent, sans leur consentement, même en avancement, recevoir une affectation les faisant passer d'une chambre des comptes à une autre chambre ou inversement, non plus qu'une affectation entraînant un changement de résidence administrative. » ;

7° Après l'article L. 120-1, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. 120-1-1. - Les grades des magistrats de la Cour des comptes sont : premier président, président de chambre, conseiller maître, conseiller référendaire et auditeur et, pendant la période de transition prévue à l'article .. de la loi n°        du          tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques, président de section, premier conseiller et conseiller.

« Le grade de président de chambre est un grade fonctionnel. Ce grade peut comprendre plusieurs catégories dépendant des fonctions exercées, définies par décret en Conseil d'État. » ;

8° L'article L. 121-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les présidents de chambre sont nommés parmi les conseillers maîtres ayant au moins trois ans de services effectifs dans ce grade. Pour ces nominations, une liste comprenant plusieurs noms est transmise, après avis des présidents de chambres et du procureur général près la Cour des comptes, par le premier président de la Cour des comptes.

« Le premier président affecte à la présidence d'une chambre de la Cour des comptes un président de chambre pour une durée de six ans, ou pour la durée restant à courir jusqu'à la limite d'âge qui lui est applicable si elle est inférieure. Au terme de la durée de six ans, ce magistrat a vocation à occuper un emploi de président d'une autre chambre de la Cour des comptes. A défaut, il peut, après avis des présidents de chambres et du procureur général près la Cour des comptes, se voir confier par le premier président toute autre fonction d'encadrement ou de responsabilité ou les fonctions correspondant au grade de conseiller maître. »

II. - La Cour des comptes coordonne une expérimentation de dispositifs destinés à assurer la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes des collectivités et établissements territoriaux dont les produits de fonctionnement excèdent 200 millions d'euros pour l'exercice 2008. Cette expérimentation est ouverte pour une durée de cinq ans commençant trois ans après la publication de la présente loi.

Les collectivités territoriales peuvent se porter candidates à cette expérimentation auprès du ministre chargé des collectivités territoriales, dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. Le ministre chargé des collectivités territoriales se prononce sur les candidatures, après avoir pris l'avis du ministre chargé des comptes publics et du premier président de la Cour des comptes, dans le délai de quatre mois suivant leur dépôt.

Une convention est conclue entre le premier président de la Cour des comptes et l'exécutif de la collectivité territoriale participant à l'expérimentation, après avis du ministre chargé des collectivités territoriales et de celui chargé des comptes publics. Elle en définit les modalités de mise en oeuvre et précise les moyens en crédits, ou en personnels, ou à ce double titre, qui l'accompagnent. Elle précise également les normes comptables applicables.

L'expérimentation fait l'objet d'un bilan intermédiaire au terme des trois ans mentionnés ci-dessus, puis d'un bilan définitif au terme de huit ans. Ces bilans font l'objet d'un rapport du Gouvernement qui le transmet au Parlement, avec les observations des collectivités territoriales concernées et de la Cour des comptes.

III. - A l'issue d'un délai de quinze ans à compter de la publication de la présente loi, les présidents de section et premiers conseillers sont nommés dans un autre grade de la Cour des comptes dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

Chaque année, à compter de l'entrée en vigueur du décret pris pour l'application de l'article L. 112-1-1 du code des juridictions financières issu de la présente loi, sont nommés conseillers référendaires cinq présidents de section ou premiers conseillers, âgés de trente-cinq ans au moins et justifiant, à la date de nomination, de dix ans au moins de services publics effectifs. Ces nominations sont prononcées sur proposition du premier président de la Cour des comptes, après avis du conseil supérieur de la Cour des comptes. La nomination dans le grade de conseiller référendaire ne peut intervenir dans la chambre des comptes dans laquelle le magistrat est affecté au moment de sa promotion.

Les conditions d'application des deux alinéas qui précèdent sont définies par décret en Conseil d'État.

Les procédures juridictionnelles engagées devant les chambres régionales des comptes à la date d'entrée en vigueur de la présente loi et qui n'ont pas été inscrites au rôle de ces chambres, sont, à cette date, transmises à la Cour des comptes.

Les procédures administratives engagées devant les chambres régionales des comptes à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, et sur lesquelles une délibération n'est pas encore intervenue, sont, à cette date, transmises à la Cour des comptes.

Il est délibéré sur les affaires qui ne sont pas transmises à la Cour des comptes en application des alinéas précédents selon les dispositions du code des juridictions financières applicables aux chambres régionales des comptes avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

Les procédures relatives aux appels formés avant l'entrée en vigueur de la présente loi devant la Cour des comptes contre les décisions juridictionnelles des chambres régionales des comptes sont poursuivies jusqu'à leur terme selon les dispositions du code des juridictions financières applicables avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis. - C'est un amendement de conséquence (Sourires au banc des commissions) qui répond à l'interrogation de M. Collombat : faire en sorte que cette proposition de loi change vraiment les choses pour satisfaire l'attente du Parlement. La tâche du ministre ne doit pas être commode mais quelque plein que soit l'agenda parlementaire, la situation financière de l'Union européenne appelle à agir vite. Nous pouvons être contraints de hâter le pas. La Grèce aujourd'hui, demain peut-être un problème de dettes souveraines.

Nous avons besoin d'un corps d'experts indépendants. La concertation a duré deux ans ; le Premier président Séguin a peaufiné le travail ; le conseil des ministres a approuvé ce projet de loi le 28 octobre ; j'ai reçu les organisations professionnelles ; je me suis assuré que M. Migaud était là-dessus en phase avec son prédécesseur. J'ai entendu des critiques mal fondées : les juridictions financières ne sont pas pour ou contre telle ou telle instance, elles certifient les comptes. C'est pour venir à votre secours, monsieur le ministre, que la commission des finances a pris cette initiative.

Les magistrats financiers sont préoccupés par l'échéance. Faites nous connaître votre calendrier. Il n'est pas de bonne administration de faire savoir qu'un texte est prêt sans dire quand il sera discuté. Mon amendement n'a rien d'un cavalier : le lien est clair avec ce texte.

M. Patrice Gélard, rapporteur.  - Ce n'est pas un cavalier, c'est une écurie ! (Sourires)

Il nous est difficile de prendre un train en marche et de court-circuiter l'Assemblée nationale sur le projet de loi dont celle-ci est saisie. Il nous est arrivé de renvoyer en commission des propositions de loi pour ce motif.

La réforme des juridictions financières incombe à la commission des lois et non à celle des finances. J'ai rencontré le Premier président Migaud qui était favorable à ce texte. Nombre de magistrats le trouvent cependant prématuré ; la concertation n'est pas achevée. La fusion de la Cour des comptes et des chambres régionales est vraiment un très gros morceau. Nous ne sommes pas défavorables à l'idée d'adopter un tel texte, mais l'amendement d'aujourd'hui est à la fois prématuré et partiel. Retrait.

M. Henri de Raincourt, ministre. - Le président Arthuis a retracé la genèse de cette réforme : le fait est que tout un processus est engagé. Son amendement reprend une partie de ce travail, non sa totalité. S'il était adopté, il faudrait réécrire le texte dont est aujourd'hui saisie la commission des lois de l'Assemblée nationale !

Je mesure bien l'urgence soulignée par M. Arthuis. Mais les magistrats se sont émus que le problème soit ainsi abordé par le petit bout de la lorgnette.

Le Gouvernement partage l'esprit des dispositions proposées par le président Arthuis. Je suis ému de sa sollicitude à mon endroit mais j'éprouve un réel bonheur à cette tâche, au contact quotidien des parlementaires.

Il est clair que, depuis la réforme constitutionnelle, le Gouvernement ne peut faire entrer dans deux semaines de travail parlementaire ce qui en prenait quatre. Il faut changer les habitudes de travail pour accourcir le délai entre l'adoption en Conseil des ministres et le débat au parlement.

En début de séance M. Gélard a craint que le train de l'ordre du jour sénatorial ne déraille ; le président Arthuis me demande d'ajouter la charge d'un wagon supplémentaire... La franchise m'impose de dire qu'aucune date n'est arrêtée pour ce projet de loi avant fin juin, ni même avant fin juillet s'il devait y avoir une session extraordinaire.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances. - C'est bien triste !

M. Henri de Raincourt, ministre. - A mon tour, je demande le retrait de cet amendement.

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances. - La procédure n'est pas nouvelle. A l'Assemblée M.Warjsman y a eu recours

Mme Nicole Bricq. - Très bien.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. - Il n'est pas utile de faire aussi mal...

M. Jean Arthuis, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Ce n'est donc pas une novation absolue. On pourrait commencer la concertation, dès l'adoption en Conseil des ministres, avant l'inscription d'un projet de loi à l'ordre du jour du Parlement.

Mon amendement est partiel, certes, pour ne pas empiéter sur les compétences de la commission des lois. J'ai entendu l'appel et je mesure l'embarras du Gouvernement. Je n'ai d'autre désir que servir la France et aider le Gouvernement. Pourquoi ne pas transformer cet amendement en proposition de loi ? J'y suis prêt, et à partager cette initiative avec le président Hyest....

Mais il y a urgence. Il n'est pas de bonne administration de laisser les magistrats dans l'incertitude. Ils savent que se prépare la réforme la plus importante depuis 1807, aux dires de M. Séguin lui-même ! En tout cas, grâce à mon initiative, la concertation est peut-être lancée. Vous recherchez un véhicule, Monsieur le Ministre : je vous proposais d'utiliser ce train-ci, qui passait fort opportunément.

L'amendement n°1 rectifié est retiré, ainsi que l'amendement n°2.

L'article 4 est adopté.

La proposition de loi est adoptée.

Renvoi pour avis

M. le président. - J'informe le Sénat que le projet de loi n°414 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des affaires sociales.

Prochaine séance demain, mercredi 28 avril 2010, à 14 h 30.

La séance est levée à 23 h 55.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du mercredi 28 avril 2010

Séance publique

A 14 HEURES 30

1. Désignation des 26 membres de la mission commune d'information sur la désindustrialisation des territoires.

2. Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale (n° 454 rectifié, 2008-2009).

Rapport de M. François Zocchetto, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (n° 328, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 329, 2009-2010).