Vendredi 3 août 2018, le Président de la République a promulgué la loi n° 2018-703 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

 Les étapes de la discussion

  Promulgation de la loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes (3 août 2018)

Vendredi 3 août 2018, le Président de la République a promulgué la loi n° 2018-703 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Elle est parue au Journal officiel n° 179 du 5 août 2018.

Examen des conclusions de la commission mixte paritaire (31 juillet 2018)

Mardi 31 juillet 2018, le Sénat a adopté, par 252 voix pour et 0 voix contre (voir les résultats du scrutin public), les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’orientation et de programmation renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. L'Assemblée nationale les ayant adoptées dans les mêmes termes le 1er août, le projet de loi est définitivement adopté.

Lundi 23 juillet 2018, la commission mixte chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation et de programmation renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes s'est réunie. Elle est parvenue à un accord.

 Première lecture au Sénat (4 et 5 juillet 2018)

La discussion générale

Mercredi 4 juillet 2018, les sénateurs ont procédé à la discussion générale du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

L'examen des articles

Au cours de cet examen, les sénateurs ont apporté des modifications visant à :

  • affirmer le caractère transversal et obligatoire de la politique de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, qui relève de l’Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics (amt 18 rect. bis – amt 1er A) ;
  • prévoir que la commission de nouveaux crimes interrompra la prescription des crimes les plus anciens, afin d’éviter l’impunité des personnes qui commettent, pendant de très longues périodes, des crimes sexuels de façon répétée sur des mineurs (amt 127 du Gvt - art 1er) ;
  • rétablir l’augmentation de la prescription de vingt à trente ans pour le crime de violences sur un mineur de quinze ans ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, et étendre celle-ci aux crimes de meurtre ou d’assassinat commis sur un mineur, alors qu’actuellement ne sont visés que les meurtres sur mineurs qui sont précédés ou accompagnés d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie (amt 127 du Gvt - art 1er) ;
  • allonger le délai de prescription de l’action publique de six à dix ans avec comme point de départ la majorité pour le délit de non dénonciation de privations, mauvais traitements ou d'agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur (amt 28 rect. bis - art add après art 1er) ;
  • clarifier les définitions des notions de violence, menace et surprise, qui permettent d’apprécier la commission du viol et des autres agressions sexuelles (amt 58 - art 2) ;
  • permettre, lors d’une procédure judiciaire l’accompagnement des victimes mineurs d’infractions sexuelles par une association d’aide aux victimes (amt 70 rect. bis – art 2) ;
  • étendre l’enregistrement audiovisuel de l’audition au cours d’une enquête, actuellement prévu pour les mineurs, à toutes les victimes de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47, notamment de viol, quel que soit leur âge (amt 25 rect. –art add après art 2) ;
  • sanctionner le fait d’administrer ou de tenter d’administrer à son insu à une personne une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle, en précisant que ces faits seront punis de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende et, s’ils sont commis sur un mineur de quinze ans ou une personne particulièrement vulnérable, de sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende (amt 131 du Gvt – art add après art 2) ;
  • aggraver les peines encourues par les auteurs de crimes ou d’agression sexuelles lorsque celles-ci visent des personnes en détresse économique, et notamment les personnes sans domicile fixe, en raison de leur particulière vulnérabilité (amt 5 rect. bis – art add après art 2 bis D) ;
  • intégrer dans tous les projets régionaux de santé, un volet obligatoire concernant la prévention des violences sexuelles, l’accès aux soins et au suivi médical des victimes de violences sexuelles (amt 30 rect. – art add après art 2 bis D) ;
  • prévoir la remise d’un rapport évaluant la part de responsabilité des violences visées par le texte sur la commission d’un suicide, ou tentatives de suicides, par les victimes desdites violences (amt 32 rect. – art add après art 2 bis D) ;
  • instaurer, dans le code de l’Éducation nationale, une obligation de sensibilisation des personnels enseignants aux violences sexistes et sexuelles et à la formation au respect du non-consentement (amt 54 rect. – art add après art 2 bis E) ;
  • ajouter, dans l’article du Code de l’Éducation nationale créant l’obligation d’initiation à la technologie et aux usages numériques, une sensibilisation aux problématiques de cyberharcèlement (amt 61 rect. bis, art add après art 3) ;
  • créer une circonstance aggravante pour les agressions sexuelles autres que le viol ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) supérieure à huit jours (amt 63, 78 rect. quater, 87 rect., 115 rect. bis – art add après art 3 bis) ;
  • créer un nouveau de délit de « captation d’images impudiques », notamment dans les transports en commun, qui sera puni d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende, portées à deux ans et 30 000 euros en cas de circonstances aggravantes (amt 135 du Gvt – art add après art 4) ;
  • préciser que les missions des services de l’Aide sociale à l’enfance comprennent explicitement le repérage et l’orientation des mineures victimes ou menacées de mutilations sexuelles amt 6 rect. bis, amt 7 rect. sexies, amt 81 rect bis, amt 93 rect, amt 108 rect. bis – art add après art 4) ;
  • renforcer la prévention des violences faites aux femmes en rendant effectives les trois séances d’éducation à la sexualité prévues par l’article 312-16 du Code de l’éducation et en intégrant à ce dispositif une information consacrée à l’égalité entre les femmes et les hommes (amts 64 rect bis., amt 88 rect bis, 82 rect quinquies et 113 rect. – art add après art 4 ter).

Le Sénat a adopté ce texte avec modifications par 224 voix et 22 contre (scrutin public).

 Examen en commission au Sénat (20 juin 2018)

Mercredi 20 juin 2018, la commission des lois a examiné le rapport de Marie MERCIER et établi son texte sur le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée.

Sur le rapport de Marie MERCIER, la commission des lois a complété le projet de loi notamment en intégrant des dispositions prévues dans la proposition de loi d’orientation et de programmation pour une meilleure protection des mineurs victimes d’infractions sexuelles, présentée par Philippe BAS à la suite d’un rapport d’un groupe de travail pluraliste de la commission des lois présidé par Marie MERCIER. Elle a apporté des modifications visant à :
- renforcer la prévention des violences sexuelles et sexistes ;
- améliorer l’accompagnement des victimes ;
- allonger à 30 ans la durée de la prescription des crimes à caractère sexuel commis à l’encontre des mineurs ;
- instituer une présomption de contrainte en cas de relation sexuelle entre un majeur et un mineur, quel que soit son âge. Cette présomption simple tiendra à la différence d’âge entre le majeur et le mineur ou à l’absence de maturité de ce dernier ;
- transformer la contravention d’outrage sexiste en un délit, puni d’une amende de 3 750 euros ;
- mieux lutter contre le cyberharcèlement en conférant de nouvelles obligations aux plateformes et aux hébergeurs sur Internet.

Nomination d'un rapporteur

Mercredi 16 mai 2018, la commission des lois a nommé Marie MERCIER rapporteur sur le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée.

Première lecture à l’Assemblée nationale (14 au 16 mai 2018)

Mercredi 16 mai 2018, l'Assemblée nationale a adopté le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, après engagement de la procédure accélérée.

  Les travaux du Sénat sur le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes

Les travaux de la délégation aux droits des femmes sur les violences faites aux femmes

Présentation de l'avis de la délégation aux droits des femmes (20 juin 2018)

Mercredi 20 juin 2018, Annick BILLON et Laurence ROSSIGNOL, co-rapporteures, ont présenté devant la commission des lois l'avis de la délégation aux droits des femmes sur le projet de loi renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée.

La délégation aux droits des femmes, soucieuse de contribuer à l'amélioration de ce projet de loi, a formulé 22 recommandations en vue de sa discussion, visant notamment à :

  • mieux défendre les enfants. La délégation se prononce ainsi :
    - en faveur de l'instauration d'un seuil d'âge de treize ans dans le code pénal (recommandation n°1) ;
    - pour l’introduction des circonstances aggravantes en cas de non-assistance à personne en danger et de non-dénonciation des mauvais traitements et agressions sexuelles sur les mineurs, si la victime est âgée de moins de quinze ans (recommandation n°3) ;
    - et pour l’extension des missions des services de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) au repérage et à l'orientation des mineures victimes ou menacées de mutilations sexuelles féminines (recommandation n°5) ;
  • renforcer la protection des victimes de violences sexuelles. La délégation propose ainsi :
    - d’allonger le délai de prescription des crimes de nature sexuelle ou violente sur mineurs, jusqu'à trente années à compter de la majorité des victimes (recommandation n°6) ;
    - de reconnaître l'amnésie traumatique comme "obstacle insurmontable" (recommandation n°8) ; d’étendre aux victimes majeures de la définition du viol incestueux notamment (recommandation n°11) ;
    - d’introduire dans le code pénal une circonstance aggravante en cas d'agression sexuelle ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) supérieure à huit jours (recommandation n°13) ;
    - de porter de six à douze mois le montant de l'indemnité plancher qui constitue le minimum qu'une personne victime de harcèlement sexuel puisse recevoir à la suite d'un licenciement dans le cadre d'un contentieux devant les prud'hommes (recommandation n°17) ;
  • créer un délit autonome d'agissement sexiste (recommandation n°19) ;
  • améliorer la prévention des violences sexuelles. La délégation estime ainsi nécessaire de compléter le projet de loi par un volet préventif, insistant également sur la question des moyens de la Justice et de l'accompagnement des victimes (recommandation n°20).

Par ailleurs, la délégation regrette que, face à une question aussi grave et complexe, le Gouvernement ait fait le choix de la procédure accélérée, au lieu de laisser au Parlement le temps de la réflexion et du débat qu'implique le fait de légiférer sur des sujets aussi complexes.

Audition de Nicole BELLOUBET et Marlène SCHIAPPA (11 juin 2018)

Lundi 11 juin 2018, la commission des lois et la délégation aux droits des femmes ont entendu :

- Nicole BELLOUBET, garde des Sceaux, ministre de la justice ;
- Marlène SCHIAPPA, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes.

 Comprendre les enjeux

Un renforcement de l’arsenal législatif souhaité par le Président de la République

Dans son discours du 25 novembre 2017, le Président de la République a annoncé un projet de loi consacré aux violences sexuelles et sexistes.

Le 21 mars 2018, Nicole BELLOUBET, Garde des Sceaux, ministre de la justice, et Marlène SCHIAPPA, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, ont déposé un projet de loi à l'Assemblée Nationale afin de renforcer l’arsenal législatif sur quatre points :

L’allongement du délai de prescription

L’article 1er du projet de loi porte de vingt à trente ans le délai de prescription de l’action publique de certains crimes commis sur les mineurs.

- Voir le reportage vidéo sur l’audition de Flavie FLAMENT, co-présidente de la mission de consensus sur le délai de prescription applicable aux crimes sexuels commis sur les mineur.e.s, par la délégation aux droits des femmes

L’amélioration de la répression des viols et autres abus sexuels commis sur les mineurs

L’article 2 renforce la répression des abus sexuels sur les mineurs à travers trois modifications du droit existant :

  • il précise que la contrainte morale ou la surprise, qui figurent parmi les éléments constitutifs des agressions sexuelles, peuvent résulter de l’abus de l’ignorance de la victime ne disposant pas de la maturité ou du discernement nécessaire pour consentir à ces actes lorsqu’elle est âgée de moins de 15 ans ;
  • il porte de cinq à dix ans d’emprisonnement la sanction du délit d’atteinte sexuelle sur mineur de moins de 15 ans lorsque l’atteinte comporte un acte de pénétration sexuelle, dans le cas où le viol ne pourrait être constitué ;
  • il oblige la cour d’assises statuant sur un viol commis sur un mineur de moins de 15 ans à statuer sur la culpabilité de la personne mise en cause du chef d’atteinte sexuelle si les éléments constitutifs du viol sont contestés au cours des débats, afin d’éviter un acquittement.

- Voir le reportage sur les conclusions du groupe de travail de la commission des lois sur les violences sexuelles commises à l'encontre des mineurs

L’adaptation du droit aux nouvelles formes de harcèlement, notamment sur internet

L’article 3 complète les définitions du délit de harcèlement moral et du délit de harcèlement sexuel en indiquant que l’infraction sera également constituée lorsque ces propos ou comportements seront imposés à une même victime de manière concertée par plusieurs personnes, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée.

La répression du harcèlement dit "de rue"

L’article 4 institue une contravention pour outrage sexiste.

Ces faits constitueront selon les cas :

  • une contravention de la quatrième classe, punie d’une amende maximale de 750 € ;
  • ou, s’ils sont commis avec certaines circonstances aggravantes, une contravention de la cinquième classe punie d’une amende maximale de 1 500 €, ou de 3 000 € en cas de récidive.

Des dispositions applicables dans les collectivités d’outre-mer

L’article 5 du projet de loi prévoit l’application des nouvelles dispositions du code de procédure pénale et du code pénal dans les collectivités d’outre-mer.

Un projet de loi examiné en procédure accélérée

Le Gouvernement ayant engagé la procédure accélérée le 21 mars 2018, le projet de loi pourrait ne faire l’objet que d’une seule lecture au Parlement.

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