SERVICE DES ETUDES JURIDIQUES (juin 2004)

AUSTRALIE

Les différentes procédures collectives sont régies par la loi sur les sociétés , dont la dernière version date de 2001. Le chapitre 5 de cette loi, intitulé « Administration extérieure » et relatif aux différents cas où la gestion de l'entreprise peut être confiée à d'autres personnes qu'à ses dirigeants, traite notamment du redressement et de la liquidation des entreprises.

Il n'existe pas de frontières nettes entre les différentes procédures collectives, mais la sauvegarde des entreprises en difficulté s'effectue essentiellement par le biais de deux procédures. L'une, ancienne, consiste en la conclusion avec les créanciers d'un arrangement, qui doit être homologué par le tribunal pour devenir exécutoire. L'autre, introduite en juin 1993 par la loi de 1992 réformant la loi sur les sociétés et dénommée « administration volontaire », permet, sans qu'aucune intervention judiciaire ne soit requise, de confier la gestion de l'entreprise à un administrateur extérieur qui, après avoir étudié la situation, peut proposer aux créanciers un plan de sauvegarde. Cette seconde procédure de redressement est la plus utilisée depuis dix ans.

Actuellement, les pouvoirs publics s'interrogent sur la nécessité de réformer les dispositions relatives aux difficultés des entreprises et ont lancé des consultations qui devraient donner lieu au dépôt de rapports en 2004.

Après avoir présenté les différentes procédures collectives, et en particulier les conditions de leur ouverture, le texte ci-dessous expose les principales caractéristiques de l'arrangement homologué par le tribunal et de l'administration volontaire.

1) Les critères de déclenchement des procédures collectives

Les différentes procédures collectives prévues par la loi sur les sociétés de 2001 sont : l'arrangement homologué par le tribunal, l'administration volontaire, la liquidation judiciaire et la liquidation volontaire. On peut également y inclure la mise sous séquestre privée, même s'il ne s'agit pas à proprement parler d'une procédure collective, puisqu'elle est mise en oeuvre par un seul créancier. La mise sous séquestre privée permet parfois de sauver des entreprises en difficulté.

a) L'arrangement homologué par le tribunal

Cette procédure permet à une entreprise qui a des difficultés financières, mais qui n'est pas nécessairement insolvable, de négocier avec ses créanciers un arrangement que le tribunal rend exécutoire.

b) L'administration volontaire

Cette procédure, introduite par la loi de 1992 réformant la loi sur les sociétés, est entrée en vigueur en juin 1993. Elle a pour objet d' augmenter les chances de survie d'une entreprise insolvable ou sur le point de le devenir , ou tout au moins de rendre possible la poursuite de l'activité, y compris dans le cadre d'une autre structure juridique. À défaut, elle vise à placer les créanciers ou les actionnaires dans une situation plus favorable que celle qui résulterait de la liquidation immédiate de la société.

Aux termes de l'article 459C de la loi sur les sociétés, l'insolvabilité est présumée dans les cas suivants :

- un créancier a fait « une procédure de demande réglementaire » pour exiger le paiement, dans les 21 jours, d'une dette certaine et exigible d'au moins 2 000 dollars australiens (soit environ 1 200 €) et la demande n'a pas été suivie d'effet ;

- un créancier détenteur d'un titre exécutoire n'a pas été réglé ;

- un créancier titulaire d'un privilège flottant (6 ( * )) a mis en oeuvre sa garantie, notamment en nommant un administrateur-séquestre ;

L'administration volontaire commence par la nomination, indépendamment de toute intervention judiciaire, d'un administrateur extérieur choisi parmi les liquidateurs professionnels.

Cet administrateur extérieur assure la gestion de la société pendant le délai prévu par la loi pour examiner la situation de la société et faire une recommandation aux créanciers quant au sort de celle-ci : retour à la situation antérieure, liquidation ou conclusion d'un plan de redressement.

c) La liquidation judiciaire

Elle est en général demandée par un créancier, mais elle peut l'être aussi par la société elle-même, par un dirigeant, par un actionnaire qui s'est engagé à payer les dettes de la société ou par l'ASIC, ( Australian Securities and Investments Commission ), qui est l'organisme indépendant chargé de veiller au bon fonctionnement de l'ensemble des activités économiques et financières.

Le tribunal saisi ne prononce la liquidation que si la société est insolvable au sens déjà défini, ou pour d' autres raisons tenant par exemple à la réalité de l'activité ou à la conduite des dirigeants. Le tribunal peut aussi prononcer la liquidation parce que l'ASIC estime cette décision nécessaire.

Pendant l'instance, le tribunal peut nommer à titre provisoire un liquidateur, dont le rôle consiste à gérer la société afin de sauvegarder les actifs, d'examiner la situation de celle-ci et d'indiquer au tribunal si elle est viable. Dans cette hypothèse, la procédure de l'administration volontaire peut être ouverte, la gestion de la société peut même être de nouveau confiée à ses dirigeants.

d) La liquidation volontaire

Qu'elle ait lieu à la demande des créanciers ou à la demande des associés, la liquidation volontaire se déroule en dehors de toute intervention du tribunal et requiert une décision des actionnaires .

Quand les administrateurs ou les actionnaires de la société considèrent que l' insolvabilité de celle-ci est avérée, l'assemblée générale des actionnaires peut voter une résolution décidant la liquidation à la demande des créanciers et nommant un liquidateur. Cette décision doit être confirmée par une assemblée des créanciers.

La liquidation volontaire à la demande des associés est utilisée pour la liquidation d'une société solvable . Au préalable, la majorité des administrateurs doit rédiger et adopter une déclaration de solvabilité accompagnée d'éléments chiffrés. Dans ce document, ils déclarent qu'ils ont examiné la situation de la société et qu'ils estiment que celle-ci est en état de régler ses dettes dans un délai de douze mois à compter du début de la liquidation.

e) La mise sous séquestre privée

Cette procédure permet à un créancier muni d'un privilège flottant de nommer un administrateur-séquestre, parce qu' un incident de paiement prévu par le contrat créant la garantie s'est réalisé.

L'administrateur-séquestre a pour mission principale d'entrer en possession des biens grevés, de réaliser la garantie et de payer ainsi le créancier qui l'a nommé. À cette fin, la loi sur les sociétés lui accorde le pouvoir de gérer loyalement ces biens et de les vendre. Lorsque les biens représentent une part importante de l'actif, la poursuite de l'activité de l'entreprise peut être la solution la plus intéressante pour le créancier garanti. Dans ce cas, l'administrateur-séquestre prend en charge l'exploitation de la société et agit en qualité de mandataire de celle-ci jusqu'au recouvrement de la dette.

2) Les principales caractéristiques de l'arrangement homologué par le tribunal et de l'administration volontaire

a) La suspension immédiate des poursuites

L'arrangement homologué

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L'administration volontaire

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Lorsqu'un arrangement entre les créanciers et les associés a été négocié et présenté, le tribunal peut, à la demande de la société ou de l'un des créanciers, accorder un moratoire sous les conditions qu'il détermine. Ce moratoire s'applique jusqu'à l'approbation de l'accord.

Pendant la durée de ce moratoire, les poursuites en cours sont suspendues, sauf autorisation judiciaire.

La mise sous administration volontaire entraîne la suspension automatique des poursuites de tous les créanciers , sauf accord écrit de l'administrateur ou autorisation du tribunal.

La mise sous administration volontaire entraîne également la suspension de toutes les actions relatives aux biens détenus ou utilisés par la société et empêche la liquidation.

Cette protection s'applique pendant toute la durée de l'administration volontaire, en principe limitée à 28 jours , mais que le tribunal peut porter à 60 jours.

b) L'administration par le débiteur

L'arrangement homologué

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L'administration volontaire

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Les dirigeants de l'entreprise restent en fonction pendant la négociation du plan de redressement avec les créanciers.

En revanche, une fois celui-ci approuvé, l'entreprise est gérée par l'administrateur chargé d'exécuter le plan.

La procédure commence avec la nomination d'un liquidateur professionnel comme administrateur extérieur .

La désignation est faite par la société, par un liquidateur ou par un créancier pouvant faire jouer sa garantie sur la totalité ou sur une partie substantielle du patrimoine de l'entreprise. La confirmation de cette nomination par les créanciers réunis doit avoir lieu au plus tard dans les cinq jours ouvrables suivants.

Pendant toute la période d'administration volontaire, qui est en principe de 28 jours sauf prolongation, l'administrateur extérieur est à la fois chargé d'examiner la situation de la société en vue de faire des recommandations aux créanciers quant au sort de celle-ci et de gérer l'entreprise.

Par la suite, si les créanciers se prononcent pour un plan de redressement, l'administrateur extérieur est, sauf résolution contraire votée par les créanciers, chargé d'exécuter le plan de redressement.

c) Le plan de redressement

L'arrangement homologué

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L'administration volontaire

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L'arrangement peut consister en un réaménagement de la dette, en une suspension des poursuites ou en une combinaison des deux. Il peut être conclu entre la société et ses créanciers (ou certains d'entre eux) ou bien entre la société et ses associés (ou certains d'entre eux).

Le tribunal saisi du projet d'arrangement ordonne la réunion par classe des créanciers ou des associés en vue de l'examen et du vote de l'accord. La convocation du tribunal est accompagnée du projet et d'un état explicatif. Parallèlement, ces documents sont transmis à l'ASIC, qui peut faire part de ses observations au tribunal.

L'accord doit être approuvé par chaque classe de créanciers (ou d'associés) à une double majorité : majorité des votants représentant 75 % de la valeur des créances (ou du capital).

L'arrangement lie les créanciers ou les associés appartenant aux classes qui l'ont approuvé, à condition d'être homologué par le tribunal et déposé auprès de l'ASIC.

Une fois nommé, l'administrateur dispose en principe de 21 jours pour convoquer les créanciers à une seconde réunion. Ceux-ci décident du sort de l'entreprise.

Les créanciers peuvent opter non seulement pour l'exécution d'un plan de redressement, mais aussi pour le retour à la situation antérieure ou pour la liquidation de la société. La convocation s'accompagne d'un rapport faisant le point sur les trois options offertes aux créanciers et contenant des recommandations, d'un état décrivant la situation financière, patrimoniale et commerciale de la société, ainsi que, le cas échéant, d'un document précisant les dispositions du plan de redressement proposé. Celui-ci peut consister en un réaménagement de la dette, en une suspension des poursuites ou en une combinaison des deux.

Le plan de redressement doit être adopté à une double majorité des créanciers votants : en nombre et en valeur .

L'administrateur qui a préparé le plan est généralement désigné pour l'exécuter et l'administration volontaire prend alors fin.

L'accord n'a pas besoin d'être confirmé par le tribunal : il lie la société, les dirigeants, les associés et l'administrateur chargé de son exécution. Il lie également tous les créanciers ordinaires, mais seulement les créanciers privilégiés ainsi que les propriétaires et les bailleurs de biens qui l'ont voté. Le tribunal peut toutefois s'opposer à ce qu'un créancier privilégié qui ne l'aurait pas voté réalise sa garantie ou à ce qu'un propriétaire ou un bailleur dans le même cas récupère son bien, si cela est préjudiciable au plan de redressement et si les intérêts du demandeur en question sont correctement protégés, notamment par l'accord.

L'accord de redressement peut prendre fin par la réalisation d'une de ses clauses ou par le vote d'une résolution des créanciers, puisque l'administrateur responsable de l'exécution de l'accord peut organiser à tout moment une réunion à cet effet et qu'il est tenu de le faire à la demande écrite des créanciers représentant au moins 10 % de la valeur totale des créances détenues sur la société. Par ailleurs, cet accord peut être modifié par une résolution des créanciers.

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Les pouvoirs publics s'interrogent actuellement sur la nécessité de réformer les dispositions relatives aux difficultés des entreprises et ont lancé en 2003 des consultations qui devraient donner lieu au dépôt de rapports en 2004.

Ainsi, une consultation a été engagée par une commission parlementaire chargée en novembre 2002 d'examiner les lois australiennes sur l'insolvabilité. Dans le document, qui sert de base à la discussion et qui a été publié en mai 2003, cette commission a émis le souhait d'obtenir des commentaires sur la question suivante : « L'Australie doit-elle adopter, à la place ou en complément de l'administration volontaire, un régime de sauvegarde des entreprises analogue à celui du chapitre 11 américain ? ».

Par ailleurs, le Corporations and Markets Advisory Committee , organisme chargé de conseiller le gouvernement sur les problèmes soulevés par la réglementation et la réalité des activités économique et financières, a publié en septembre 2003 un document sur l'adéquation de la procédure de l'administration volontaire au sauvetage des grandes entreprises. Après avoir passé en revue les exemples étrangers, et notamment la procédure américaine du chapitre 11, il y suggère un certain nombre de modifications sur lesquelles il sollicite des commentaires.

* (6) À la différence de la sûreté, le privilège flottant ( floating charge ) ne porte pas sur un bien déterminé. Il s'agit en quelque sorte d'un gage général, qui se « cristallise » et se transforme en gage spécial lorsqu'un événement survient. En règle générale, les banques exigent des privilèges flottants en contrepartie de prêts ou de découverts. L'existence d'un privilège flottant n'empêche pas l'entreprise de disposer librement de tous ses biens, jusqu'au moment de la cristallisation.

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