L'indemnisation du chômage
des intermittents du spectacle

Allemagne - Italie -
Royaume-Uni (Angleterre et Pays de Galles) - Suède

Cette note a été publiée dans le rapport d'information de Mmes Marie-Christine BLANDIN et Maryvonne BLONDIN : « Régime des intermittents : réformer pour pérenniser », fait au nom de la commission de la Culture, de l'Éducation et de la Communication, n° 256 (2013-2014) - 23 décembre 2013

Ce rapport est disponible sur internet à l'adresse suivante :

www.senat.fr/notice-rapport/2013/r13-256-notice.html

AVERTISSEMENT

Les notes de la division de Législation comparée se fondent sur une étude de la version en langue originale des documents de référence cités dans l'annexe.

Elles présentent de façon synthétique l'état du droit dans les pays européens dont la population est de taille comparable à celle de l'Hexagone ainsi que dans ceux où existe un dispositif législatif spécifique. Elles n'ont donc pas de portée statistique.

Ce document constitue un instrument de travail élaboré à la demande des sénateurs par la division de Législation comparée de la direction de l'Initiative parlementaire et des Délégations. Il a un caractère informatif et ne contient aucune prise de position susceptible d'engager le Sénat.

NOTE DE SYNTHÈSE

Cette note concerne le régime d'indemnisation du chômage applicable aux personnes qui exercent des métiers similaires à ceux que recouvre le concept français d'« intermittents du spectacle » en Allemagne, en Italie, au Royaume-Uni (Angleterre et Pays de Galles) et en Suède.

Elle décrit d'une part les règles applicables au calcul de l'indemnité-chômage et, d'autre part, les règles d'affiliation au régime d'assurance-chômage.

Elle n'évoque pas les autres spécificités qui pourraient exister en ce qui concerne régime social applicable aux personnes qui exercent des métiers similaires à ceux des « intermittents du spectacle », ni les modes de financement du secteur artistique qui peuvent influer sur leur situation professionnelle.

Après avoir rappelé les grands traits du régime applicable en France, elle présente quelques observations tirées de l'analyse comparative.

1. Situation en France

Les règles de prise en charge des professionnels intermittents du spectacle salariés figurent aux annexes VIII et X du règlement général de la convention d'assurance chômage 2011, conclue pour une durée déterminée, du 1 er juin 2011 au 31 décembre 2013.

Le contenu de ces règles spécifiques trouve son origine dans le protocole du 18 janvier 2006 qui a été reconduit quasiment en l'état depuis son entrée en application en 2007 si bien que la convention du 18 janvier 2006 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage continue à y être visée alors qu'elle n'est plus en vigueur, ayant été remplacée par les conventions d'assurance chômage de 2009 puis de 2011 modifiant les règles générales d'assurance chômage.

Pour être indemnisés, les ouvriers et techniciens du spectacle (annexe VIII) ainsi que les artistes (annexe X) doivent justifier d'une période d'affiliation au moins égale à 507 heures au cours respectivement des 304 jours et des 319 jours précédant la fin de contrat alors que, dans le régime général, la durée minimale d'affiliation est de 122 jours (ou 610 heures) au cours des 28 derniers mois pour les moins de 50 ans (36 mois pour les plus de 50 ans).

La durée d'indemnisation est de 243 jours alors que dans le régime général elle est égale à la durée d'affiliation prise en compte pour l'ouverture des droits et ne peut être inférieure à 122 jours ni supérieure à 730 jours (1 095 jours pour les plus de 50 ans).

Le montant de l'allocation journalière versée aux intermittents est calculé à l'aide d'une formule intégrant des paramètres fixes (allocation journalière minimale et SMIC horaire) et des paramètres variables (nombre d'heures travaillées et salaire de référence). L'allocation ne peut excéder 34,4 % du plafond journalier des contributions à l'assurance chômage, soit 139,60 € par jour et ne peut être inférieure à l'allocation journalière minimale entrant dans le calcul précité, fixée à 31,36 €.

Dans le cas général, les modalités de calcul de l'allocation de l'aide au retour à l'emploi pour les moins de 50 ans sont les suivantes :

Montants en vigueur au 1 er janvier 2013

Salaire mensuel brut

Allocation journalière

Inférieur à 1 128 €

75 % du salaire brut

Compris entre 1 128 € et 1 236 €

Allocation minimale 28,21 € par jour

Compris entre 1 236 € et 2 042 €

40,4 % du salaire journalier brut +11,57 € par jour

Compris entre 2 042 € et 12 124 € 1 ( * )

57,4 % du salaire journalier brut

Source : Site de l'Unedic (www.unedic.org)

2. Observations sur les législations étrangères

L'analyse comparative montre que :

- l'indemnisation du chômage résulte de la combinaison de dispositifs reposant sur des logiques variées ;

- aucun des quatre régimes étudiés n'institue une assurance chômage spécifique pour les emplois correspondants à ceux visés par le concept français d'« intermittents du spectacle » ;

- les spécificités des métiers dont les conditions d'exercice sont par nature aléatoires ne sont pas prises en compte par les régimes de droit commun ;

- et que ces législations permettent le rattachement des travailleurs qui ne bénéficient pas d'un emploi stable à un dispositif moins avantageux que le régime de droit commun.

• L'indemnisation du chômage résulte de la combinaison de dispositifs reposant sur des logiques variées

Les quatre pays étudiés ont institué plus d'un mode d'indemnisation du chômage : 3 en Allemagne, 2 en Italie, au Royaume-Uni et en Suède.

En Allemagne existent, en premier lieu, deux allocations fondées sur une obligation de cotiser pendant une durée antérieure (allocation « normale » ou allocation « réduite ») et, en second lieu, une allocation (Hartz IV) qui est semblable à une aide sociale versée sous condition de ressources et qui prend, le cas échéant, le relais des précédentes.

En Italie on trouve deux allocations basées sur des cotisations obligatoires antérieures, l'une consécutive à la perte d'une emploi « stable » et l'autre qui fait suite à la perte d'un emploi aléatoire ou précaire.

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi de 2012 sur la réforme de l`aide sociale, entre octobre 2013 et octobre 2017, des deux allocations existant au Royaume-Uni, la première résulte des cotisations obligatoires versées antérieurement tandis que la seconde se rapproche d'une aide sociale versée sous conditions de ressources aux personnes qui ont travaillé mais dont les cotisations sont insuffisantes.

Enfin coexistent en Suède un régime d'assurance chômage individuel facultatif géré par des caisses professionnelles et basé sur des cotisations d'assurance volontaire assises sur les revenus salariaux, d'une part, et d'autre part, un régime d'aide forfaitaire (indépendant des revenus de la personne qui est devenue chômeur).

Ces quatre exemples illustrent les diverses logiques sur lesquelles repose l'indemnisation du chômage :

- l'assurance collective obligatoire préalable (Allemagne, Italie, Royaume-Uni) ;

- l'assurance individuelle facultative (Suède) ;

- l'indemnisation du chômage par une « allocation de base » fonction de la durée d'emploi antérieur et plafonnée (Suède) ;

- une indemnisation du chômage qui confine à l'aide sociale dans la mesure où son versement est soumis à des conditions de ressources en Allemagne (Hartz IV) et au Royaume-Uni.

Les différentes options (caractère obligatoire ou facultatif, cotisation ou assurance...) se combinent donc de façon variable dans ces quatre systèmes.

• Aucun des régimes étudiés n'institue une assurance chômage spécifique pour les emplois correspondants à ceux des « intermittents du spectacle »

Du point de vue de l'assurance chômage, les personnes qui exercent des activités analogues aux « intermittents du spectacle » - expression qui semble du reste sans équivalent dans les quatre langues des États étudiés - sont soumises aux dispositions du droit commun.

• Les spécificités des métiers dont les conditions d'exercice sont par nature aléatoires ne sont pas prises en compte par les régimes de droit commun

Si, en Suède, prévaut un système d'assurance volontaire, dans les quatre États étudiés l'obtention d'une indemnité de chômage fonction des revenus, « de droit commun » repose sur :

- une durée minimale de travail avant le chômage (12 mois pendant 2 ans en Allemagne, 12 mois en Italie, 12 mois en Suède) ;

- un versement suffisant de cotisations au cours des 2 années complètes précédant le chômage au Royaume-Uni ;

- un montant d'allocation proratisé en fonction des cotisations (Allemagne, Italie, Royaume-Uni, Suède) ;

- et une durée de versement d'allocation qui peut varier en fonction de l'âge du chômeur (Allemagne, Italie, Royaume-Uni, Suède).

• Ces quatre législations permettent le rattachement des travailleurs qui ne bénéficient pas d'un emploi stable à un dispositif d'indemnisation moins avantageux que le régimes de droit commun

Les dispositifs d'indemnisation « réduits » s'inspirent de logiques différentes :

- des conditions de durée d'emploi antérieur moins strictes (6 mois en Allemagne, 13 semaines sur 12 mois en Italie) ;

- un revenu antérieur faible au cours des 2 dernières années (inférieur à quelque 32 000 € pour les Länder de l'ouest de l'Allemagne), pour des personnes dont la durée du travail, connue dès l'entrée dans l'emploi, est limitée à 10 semaines dans la majorité des emplois occupés ;

- une durée d'indemnisation minorée (5 mois en Allemagne, la moitié des périodes travaillées pendant les 12 mois précédents en Italie) ;

- un montant insuffisant de cotisations pendant la période de référence et une condition de ressources (moins de 19 000 € d'économies au Royaume-Uni).

Deux cas apparaissent, sous cet angle, spécifiques :

- la Suède, puisque la perception de l'allocation « forfaitaire » (mais fonction de la durée de travail antérieure) plafonnée à 34 € par jour est soumise aux mêmes conditions de durée de travail antérieur que l'allocation d'assurance qui varie, elle, avec le montant du revenu antérieur ;

- et l'Allemagne, où existe de surcroît une allocation chômage pour les demandeurs d'emploi de longue durée (Hartz IV) sous condition de ressources dont l'objectif a davantage à voir avec la préservation du minimum vital des personnes « en état de nécessité » qu'avec la compensation du « risque chômage » de façon transitoire.

Au total, malgré les initiatives spécifiques observées en Italie et en Allemagne pour prendre en compte le sort des personnes qui ne bénéficient pas d'emplois stables, la comparaison illustre la difficulté qui s'attache à l'indemnisation des parcours professionnels caractérisés par des emplois aléatoires d'une durée variable.


* 1 Le plafond des contributions de l'assurance chômage est fixé à 12 214 €.

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