B. LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI : PERMETTRE L'INDEMNISATION DES ACCIDENTS NON FAUTIFS GRAVES

Le titre III du projet de loi, dont votre commission s'est saisie pour avis au titre de sa compétence en matière de responsabilité civile, consacre le principe d'une indemnisation des accidents médicaux non fautifs les plus graves et tend à créer une procédure d'indemnisation entièrement nouvelle destinée à permettre aux victimes de recevoir rapidement une indemnisation.

1. Une définition législative des règles de la responsabilité en matière d'accidents médicaux

Le projet de loi, dans son article 58 (article L. 1142-1 du code de la santé publique), établit tout d'abord les règles de responsabilité applicables en matière d'accidents médicaux. Une telle définition législative aurait le mérite d'unifier les jurisprudences des juridictions judiciaires et administratives . Dans sa rédaction initiale, le projet de loi prévoyait que :

- la responsabilité des professionnels de santé pour des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins n'est engagée qu'en cas de faute ; naturellement, le mode d'établissement de la faute continuerait à relever, comme actuellement, des juridictions ;

- en l'absence de faute, les accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales 5 ( * ) donnent lieu, lorsqu'elles présentent un certain caractère de gravité, à une réparation au titre de la solidarité nationale.

L'Assemblée nationale, animée par un souci de ne pas déresponsabiliser les professionnels de santé par une définition trop restrictive des situations permettant d'engager leur responsabilité a complété ces dispositions pour prévoir que la responsabilité de ces professionnels était engagée en cas de faute « ou de manquement quels que soient, selon l'appréciation du juge compétent, la nature ou le mode d'établissement de cette faute ou de ce manquement, prouvé ou présumé ».

Cette rédaction avait pour objectif de consacrer les acquis jurisprudentiels permettant, dans certaines situations, d'engager la responsabilité des médecins en l'absence de faute médicale prouvée.

2. Une procédure d'indemnisation entièrement nouvelle

Le projet de loi prévoit la mise en place d'une procédure d'indemnisation entièrement nouvelle, destinée à éviter aux victimes d'accidents médicaux les contraintes imposées par la procédure judiciaire.

Les principales étapes de la procédure proposée sont les suivantes :

- toute victime d'un accident médical, d'une affection iatrogène ou d'une infection nosocomiale peut saisir une commission régionale de conciliation et d'indemnisation, présidée par un magistrat et composée notamment de représentants des malades et de professionnels de santé ;

- la commission n'accueille que les dommages présentant un caractère de gravité, fixé par décret en Conseil d'Etat, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles ; rien n'est dit sur la manière dont est apprécié ce caractère de gravité, une expertise n'étant prévue que si cette première étape est franchie ;

- lorsque la commission régionale accueille une demande, elle émet un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l'étendue des dommages, ainsi que sur le régime d'indemnisation applicable ;

- avant d'émettre son avis, la commission peut diligenter une expertise ;

- lorsque la commission conclut à l'existence d'une faute et que le dommage est grave, l'assureur du professionnel de santé considéré comme responsable doit faire une offre d'indemnisation à la victime. L'acceptation de l'offre vaut transaction. Si la victime n'accepte pas l'offre, elle peut former un recours devant la juridiction compétente. Si l'assureur refuse de faire une offre, l'Office national d'indemnisation se substitue à lui pour faire une offre à la victime et peut ensuite se retourner contre l'assureur. Les assureurs faisant des offres manifestement insuffisantes ou refusant à tort de faire des offres peuvent être condamnés à des pénalités civiles par le juge ;

- lorsque la commission conclut à l'existence d'une faute et que le dommage n'atteint pas le seuil de gravité prévu par le texte, la victime se voit renvoyée devant les juridictions de droit commun ;

- lorsque la commission conclut, en l'absence de faute, à l'existence d'un dommage grave lié à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins, l'office national d'indemnisation fait une offre de réparation à la victime. Il peut par la suite exercer une action récursoire s'il estime qu'une faute a été commise.

Le déroulement de la procédure est enfermé dans des délais très stricts . L'avis de la commission doit être rendu dans les six mois suivant la demande. L'offre d'indemnisation doit intervenir dans les quatre mois suivant la réception de l'avis. Enfin, le versement des indemnités doit intervenir dans le mois suivant l'acceptation de l'offre.

A tout moment, la victime peut renoncer à cette procédure pour saisir le juge.

* 5 Un accident médical peut être défini comme un événement imprévu causant un dommage accidentel ayant un lien de causalité certain avec un acte médical ;

Une affection iatrogène peut être définie comme le dommage subi par le patient lié au traitement suivi ;

Une infection nosocomiale peut être définie comme une maladie provoquée par des micro-organismes contractée dans un établissement de soins.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page