C. LA POSITION DE LA COMMISSION

Souscrivant à l'élan qui a porté ce texte devant le Parlement, votre commission souligne toutefois les risques d'une reconnaissance du droit au logement opposable qui ne serait pas assortie du développement d'une offre de logements adaptée à la demande.

Elle vous propose, pour y parer, d'apporter au projet de loi des aménagements substantiels et quelques compléments, qui s'articulent autour de trois axes :

- distinguer clairement le droit à l'hébergement du droit au logement et prévoir un calendrier réaliste pour l'exercice de ces droits ;

- affirmer la responsabilité exclusive de l'Etat comme garant du droit au logement et du droit à l'hébergement mais permettre et donner les moyens aux établissements publics de coopération intercommunale qui le souhaitent d'assumer cette responsabilité à titre expérimental ;

- créer les conditions pour adapter l'offre de logements à la demande et éviter les procédures contentieuses.

1. Ne pas sous-estimer les risques de l'institution du droit opposable au logement

Quatre risques peuvent être mis en exergue.

Le premier est de provoquer une concentration des demandes sur les communes qui disposent déjà de logements locatifs sociaux . Il importe donc de développer une offre de logements accessibles sur l'ensemble du territoire.

Le deuxième est d'assister à une remise en cause des efforts déployés , notamment par les maires et les bailleurs sociaux, pour assurer la mixité sociale et la rénovation urbaine des quartiers . Confrontés à des injonctions, sous astreinte, de loger des centaines de demandeurs défavorisés, les préfets n'auront peut-être pas d'autre choix que d'utiliser massivement, et parfois aveuglément, leur contingent de droits à réservation de logements locatifs sociaux.

Le troisième risque est de provoquer des tensions très vives au sein de la société . La déception des personnes défavorisées sera immense si, au terme d'un long parcours jalonné par la constitution d'un dossier de demande de logement locatif social, d'une saisine de la commission de médiation puis du juge administratif, elles ne parviennent qu'à obtenir des indemnités pour elles-mêmes et le versement du produit des astreintes aux fonds régionaux d'aménagement urbain. A l'inverse, et la presse s'en est déjà fait l'écho, les personnes qui, sans être les plus défavorisées, ne parviennent pas à se loger dans le parc privé et attendent depuis des années une réponse à leur demande de logement social, pourraient éprouver un grand ressentiment à l'endroit de celles, plus défavorisées encore, dont les demandes seront examinées avant les leurs.

La saturation des juridictions administratives constitue un quatrième risque, non négligeable. Sans effectifs supplémentaires conséquents, elles ne pourront traiter convenablement un contentieux qui s'annonce massif. Inéluctablement, les délais et la qualité d'examen des autres recours s'en ressentiront eux aussi.

L'enjeu majeur de l'institution d'une possibilité de recours juridictionnel pour assurer l'effectivité du droit au logement est de créer les conditions pour que ce recours soit rarement exercé.

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