B. LA RECONNAISSANCE DES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES

Enfin, la prise de conscience collective du phénomène passe aussi par la reconnaissance juridique de violences trop souvent invisibles.

1. La création du délit de violences psychologiques reconnaît l'existence d'un phénomène longtemps nié

Parmi les violences faites aux femmes, les atteintes psychologiques sont évidemment les plus difficiles à détecter. Les psychiatres 4 ( * ) définissent ce processus comme la mise en place progressive et discrète de mécanismes de dévalorisation systématique. La victime se trouve peu à peu dans une situation de dépendance affective, sociale et financière, lui faisant perdre repères et autonomie. Cette dépendance procède d'agressions subtiles et, partant, rarement décelables par la victime elle-même, et plus encore par son entourage : absence de communication, promesses non tenues, discours moralisateurs, menaces, chantages, reproches, isolement...

Or, dans ce cas de figure, la victime ne trouve ni interlocuteur ni outil pour l'aider à sortir de sa situation. C'est la raison pour laquelle la création d'un délit de violences psychologiques, ici proposée, peut être efficace pour lutter contre ces situations dramatiques. Le fait de nommer le phénomène constitue la reconnaissance du statut de victime. Son identification juridique libérera la parole et favorisera la sortie de situations intolérables.

Votre commission est donc favorable à l'introduction de ce délit dans le code pénal. Elle tient à insister néanmoins sur le soin extrême qui doit être apporté à son application. Les modalités de recueil de la plainte doivent s'adapter aux termes introduits dans la loi, afin que l'identification des délits soit effective. Si les questionnaires mis en place par les brigades de protection des familles permettent d'identifier certains actes, il convient de mener une réflexion sur les autres éléments à prendre en compte, pour identifier l'emprise financière par exemple.

2. L'accompagnement des femmes doit se poursuivre

Au terme du processus, la sortie définitive de la violence conjugale, nécessite une reconnaissance effective des faits par les femmes elles-mêmes. Au déni de la société répond la difficulté des femmes à accepter leur situation, présente ou passée. Ce refus découle du sentiment de culpabilité qu'elles ressentent, celui de ne pas correspondre à un schéma familial ou social, celui de ne pas être capable de tout endurer.

De plus, la pression du groupe social et la peur de perdre un certain statut, pour elles et pour leurs enfants, constituent souvent un frein à la sortie de situations insoutenables.

L'accompagnement vers l'autonomie est donc la condition sine qua non pour mettre définitivement fin aux situations de dépendance et de violences. Comme le montre le psychiatre Gérard Lopez 5 ( * ) , selon l'enquête Enveff, on trouve en général des antécédents de violence familiale non seulement chez les agresseurs mais aussi chez les personnes agressées. Ce contexte doit être pris en compte pour aider les victimes à devenir indépendantes. Au-delà de la plainte et des poursuites, il faut donc réfléchir à la mise en place de processus d'accompagnement social et psychologique des auteurs de violences et de leurs victimes. Cette action doit désormais être l'une des priorités des acteurs institutionnels et des associations.

* 4 « Crimes impunis ou Néonta: histoire d'un amour manipulé », Dr Geneviève Pagnard, Prime Fluo Editions, 2004.

* 5 « La violence dans le couple : aspects psychologiques », Dr Gérard Lopez, psychiatre, Actualité juridique Famille 2003, p. 416.

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