Article 92 (art. L. 5133-1 à L. 5133-7 et L. 5423-24 du code du travail) - Alignement du dispositif d'intéressement de l'allocation de solidarité spécifique sur celui du revenu de solidarité active

Objet : Cet article propose de supprimer la prime de retour à l'emploi dont bénéficient les titulaires de l'allocation de solidarité spécifique qui reprennent une activité professionnelle.

I - Le dispositif proposé :

L'article 1 er de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 pour le retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux a institué une prime de retour à l'emploi, dont le régime est fixé par les articles L. 5133-1 à L. 5133-7 du code du travail.

Cette prime, d'un montant de 1 000 euros, est attribuée aux bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) qui reprennent une activité professionnelle. Son versement est soumis à certaines conditions : le bénéficiaire doit avoir travaillé quatre mois consécutifs et doit, s'il est salarié, travailler au moins soixante-dix-huit heures par mois ; elle peut, par exception, être versée au terme du premier mois d'activité.

Comme l'écrivait notre ancien collègue Bernard Seillier 11 ( * ) , cette prime a « un double objet : grâce à son montant élevé, elle est censée avoir un effet psychologique sur les bénéficiaires de minima sociaux et jouer un rôle de déclencheur pour le retour à l'emploi. Par ailleurs, bien que totalement libre d'emploi, elle a été conçue pour permettre aux intéressés de faire face aux frais de toute nature qui peuvent survenir lors d'une reprise d'activité (habillement, transport, frais de garde...) ».

Il est aujourd'hui proposé de supprimer cette prime et d'abroger, en conséquence, les articles L. 5133-1 à L. 5133-7 du code du travail. Par coordination, serait également supprimé le 1° de l'article L. 5423-24 du même code, qui dispose que le fonds de solidarité gère les moyens de financement de la prime de retour à l'emploi. Cette mesure de suppression entrerait en vigueur le 1 er janvier 2011.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements à caractère technique :

- le premier est de nature rédactionnelle : plutôt que d'abroger les articles L. 5133-1 à L. 5133-7 du code du travail, il propose d'abroger la section du code du travail qui regroupe ces articles ;

- le deuxième est de coordination : il abroge l'article L. 5135-1 du code du travail, qui punit de 4 000 euros d'amende le fait de bénéficier frauduleusement de la prime pour l'emploi, puis modifie les articles L. 5312-1 et L. 5426-5 du même code, qui ont pour objet, respectivement, de préciser que Pôle emploi est chargé d'assurer le service de cette prime et que le fait de fournir délibérément des informations inexactes dans le but de percevoir la prime est puni d'une pénalité de 3 000 euros ;

- le dernier est également de coordination : il modifie l'article 81 du code général des impôts, qui prévoit que la prime n'est pas soumise à l'impôt sur le revenu.

III - La position de la commission

A l'origine, la prime de retour à l'emploi bénéficiait également aux titulaires du revenu minimum d'insertion (RMI) et de l'allocation parent isolé (API), deux minima sociaux qui ont été remplacés, en 2009, par le revenu de solidarité active (RSA). Or, les bénéficiaires du RSA, lorsqu'ils retrouvent un emploi, ne perçoivent pas cette prime, ce qui crée une différence de traitement peu compréhensible avec les titulaires de l'ASS.

Sa suppression permettra donc de simplifier le dispositif d'incitation à la reprise d'emploi, tout en rétablissant une égalité entre les titulaires de minima sociaux. Bien sûr, certains pourraient souhaiter que l'égalité soit rétablie par le biais d'une généralisation de la prime à tous les titulaires de minima sociaux. Cette proposition, généreuse, serait cependant difficile à financer dans le contexte actuel ; elle serait, en outre, impossible à justifier au regard de la faible efficacité de cette prime en termes de retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la prime de retour à l'emploi n'est qu'un élément, parmi d'autres, du dispositif d'intéressement qui a été progressivement mis en place pour inciter les bénéficiaires de l'ASS à reprendre un emploi. En cas de reprise d'une activité réduite (moins de soixante-dix-huit heures par mois), un bénéficiaire de l'ASS peut cumuler, pendant douze mois, une partie de son allocation avec son revenu d'activité ; en cas de reprise d'un emploi avec une durée du travail qui dépasse ce seuil, le bénéficiaire peut aussi cumuler, pour partie, son allocation avec son revenu d'activité pendant douze mois, tout en percevant une prime forfaitaire pour reprise d'activité de 150 euros par mois. Enfin, il peut prétendre au bénéfice du mécanisme d'intéressement du RSA, s'il lui est plus favorable que celui de l'ASS.

Pour ces raisons, votre commission estime que la proposition de supprimer la prime de retour à l'emploi ne remet pas en cause l'objectif d'encouragement à la reprise d'activité des bénéficiaires de minima sociaux. Elle permettra de rationaliser les dispositifs d'intéressement et de réaliser, de surcroît, une économie évaluée à une cinquantaine de millions d'euros par an.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 11 Cf. le rapport Sénat n° 161 (2005-2006) de Bernard Seillier, fait au nom de la commission des affaires sociales.

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