D. INSCRIRE LA RÉDUCTION DES RISQUES DANS LE CADRE PLUS LARGE DU TRAITEMENT DES NOUVELLES TOXICOMANIES

La réduction des risques repose sur l'idée qu'il faut offrir aux personnes souffrant d'une addiction des mesures de santé publique adaptées à leurs besoins et qui correspondent à leur mode de vie. Il ne faut pas qu'elles soient imposées de l'extérieur.

La France a ceci de particulier qu'elle l'a inscrite au coeur de sa politique de santé nationale depuis la loi du 9 août 2004 relative à la santé publique. Selon l'article L. 3121-4 du code de la santé publique qui en résulte, « la politique de réduction des risques en direction des usagers de drogue vise à prévenir la transmission des infections, la mortalité par surdose par injection de drogue intraveineuse et les dommages sociaux et psychologiques liés à la toxicomanie par des substances classées comme stupéfiants ».

Cette approche assure la pérennité de cette politique et a contribué à l'amélioration de la situation sanitaire des usagers de drogues jusqu'au milieu des années 2000. Elle reste toutefois, au moins dans les textes, exclusivement centrée sur la consommation de produits stupéfiants et ne prend pas en compte les problématiques liées aux nouvelles formes d'addiction . Ainsi, la question de la prévention dans le monde du travail, où la consommation de drogues peut mettre en danger la sécurité des salariés, est encore insuffisamment traitée : les initiatives en la matière sont trop rares.

Plus encore, les addictions sans substance , si elles sont identifiées depuis de nombreuses années, sont récemment devenues un sujet de préoccupation pour les professionnels, notamment du monde médical, qui traitent des questions d'addiction en général, et ce alors que certains interdits sont progressivement assouplis. L'usage excessif d'internet et des jeux vidéo par certains adolescents est une source d'inquiétude supplémentaire, malgré les connaissances scientifiques limitées de ce phénomène, car les risques qu'ils font courir ne doivent pas être sous-estimés.

L'exemple des jeux d'argent en ligne est l'illustration la plus marquante de cette situation. La loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 a ouvert à la concurrence le secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne et a organisé sa régulation, sous la supervision de l'autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel). Elle a également prévu la création d'un comité consultatif des jeux, accompagné d'un observatoire, afin d'assurer un suivi des conséquences économiques, sociales et de santé publique de cette réforme.

Ce n'est pas anodin car, selon les experts auditionnés par votre rapporteure, l'addiction au jeu est de même ampleur que l'usage problématique de drogues : plus de deux cent mille personnes seraient concernées. Qui plus est, les comorbidités sont nombreuses : un lien est souvent constaté avec des addictions à d'autres produits, en particulier l'alcool. Enfin, les conséquences financières pour le joueur et sa famille peuvent être très graves en raison du risque accru de surendettement qui peut en résulter. Le jeu pathologique est donc un problème de santé publique majeur, au même titre que la consommation abusive de stupéfiants.

La légalisation des jeux de poker et des paris hippiques et sportifs en ligne a donné lieu à une augmentation importante de la publicité en faveur de ces activités. Comme le conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) l'a noté dans le rapport sur les conséquences de cette publicité qu'il a récemment remis au Parlement en application de l'article 8 de la loi de 2010, des dérives ont été constatées, notamment la dénaturation, par la promotion des paris sportifs, du contenu de certaines émissions consacrées au sport.

La question des addictions comportementales mériterait donc d'être mieux intégrée dans la politique de réduction des risques en France, comme l'expérience en a été faite dans le cadre de l'ouverture à la concurrence du secteur des jeux d'argent en ligne. Il serait donc légitime qu'elles entrent dans le champ de compétence de la Mildt, afin que celle-ci réoriente son action et ses moyens - qu'il conviendrait de renforcer - vers une politique de prévention et de traitement des addictions en général et de coordination des moyens ministériels de santé publique y concourant.

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En raison de la répartition, de l'utilisation et de l'insuffisance des crédits de l'action « Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) » du programme « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », la commission a donné un avis défavorable à leur adoption.

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