INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

De tous les rendez-vous que notre démocratie se fixe à elle-même, la conjonction, désormais régulière, tous les cinq ans, des élections présidentielles et législatives, est de loin le plus important.

Aussi devons-nous veiller à ce qu'il se déroule dans des conditions d'efficacité, d'équité et de probité indiscutables. L'examen des crédits budgétaires du Ministère de l'Intérieur doit en être l'occasion, la mission dont l'examen a été confié à votre rapporteur s'étendant cependant à d'autres crédits comme les cultes ou les associations.

Le programme « Vie politique, cultuelle et associative » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » (AGTE) -analysée de 2008 à 2010 par notre excellent collègue Alain Anziani- regroupe en effet principalement les crédits destinés à la mise en oeuvre des lois de 1901 sur la liberté associative, de 1905 sur la séparation des églises et de l'État, et de 1988, 1990 et 1995 sur le financement de la vie politique.

Le programme est composé de cinq actions :

- l'action n° 1 « financement des partis » correspond à la mise en oeuvre des lois n° 88-227 du 11 mars 1988 et n° 90-55 du 15 janvier 1990 sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales ;

- l'action n° 2 « organisation des élections » correspond aux activités de mise en oeuvre des dispositions relatives au déroulement des scrutins ;

- l'action n° 3 « Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques » (CNCCFP) retrace les activités de cette Commission, autorité administrative indépendante qui, conformément à la loi du 15 janvier 1990 précitée, est chargée de réceptionner et contrôler les comptes de campagne des candidats à l'élection présidentielle en application de la loi organique n°2006-404 du 5 avril 2006, et aux élections européennes, législatives, régionales, cantonales et municipales pour les communes et les cantons de plus de 9.000 habitants, ainsi qu'aux élections aux assemblées territoriales ou provinciales de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie. La CNCCFP veille également au respect des obligations comptables légales des partis et groupements politiques et des associations de financement de ceux-ci ;

- l'action n° 4 « cultes » recouvre le suivi des affaires relatives aux différents cultes : tutelle administrative sur les congrégations et collectivités religieuses, application du Concordat dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;

- l'action n° 5 « vie associative et soutien » regroupe les activités liées au respect de la législation relative aux associations et aux établissements d'utilité publique.

En premier lieu, votre rapporteur constate que les crédits affectés au programme pour 2012 connaissent une hausse très marquée , passant en autorisations d'engagement de 191 071 374 euros à 430 076 360 euros (+ 225 %) et en crédit de paiement de 184 770 667 euros à 428 051 952 euros (+ 230%), principalement en raison de l'organisation de l'élection présidentielle et des élections législatives.

Présentation des crédits du programme « vie politique, cultuelle et associative »

(source : Projet annuel de performance de la mission « AGTE»)

Cette hausse des crédits, qu'il convient de souligner au regard du contexte économique difficile que nous connaissons, ne doit pas masquer les difficultés et les interrogations liées au financement de la vie politique , cultuelle et associative , et aux règles qui s'y attachent.

À ce stade, votre rapporteur s'efforcera de répondre principalement à deux séries de questions.

I. LA NATION S'EST-ELLE DOTÉE D'UN CADRE JURIDIQUE ET BUDGÉTAIRE LUI PERMETTANT D'ASSUMER LE COÛT D'UNE DÉMOCRATIE TRANSPARENTE ?

A. UN FINANCEMENT DES PARTIS ENCORE INSUFFISAMMENT CONTRÔLÉ

1. La mise en place, à compter de 1988, d'un cadre législatif garantissant une plus grande transparence du financement de la vie politique

Jusqu'en 1988, le financement des partis politiques n'était pas encadré par un régime juridique précis. Cette lacune avait favorisé certaines dérives auxquelles le Parlement a entendu mettre un terme, d'où la mise en place progressive d'un cadre qui a donné lieu à pas moins de treize lois ( cf . encadré).

Les nombreuses dispositions législatives
encadrant le financement de la vie politique

- loi organique et loi ordinaire du 11 mars 1988 relatives au financement de la vie politique ;

- loi du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques ;

- loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques ;

- loi du 19 janvier 1995 relative au financement de la vie politique ;

- loi organique du 20 janvier 1995 relative au financement de la campagne en vue de l'élection du Président de la République ;

- loi du 8 février 1995 relative à la déclaration du patrimoine des membres du Gouvernement et des titulaires de certaines fonctions ;

- loi du 29 janvier 1996 prise pour l'application des dispositions de la loi constitutionnelle no 95-880 du 4 août 1995 qui ont institué une session parlementaire ordinaire unique et modifié le régime de l'inviolabilité parlementaire ;

- loi du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives ;

- loi du 10 juillet 2000 relative à l'élection des sénateurs ;

- loi organique du 5 février 2001 modifiant la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel ;

- loi du 11 avril 2003 (dispositions relatives au financement des partis politiques) et ordonnance du 8 décembre 2003 portant simplification administrative en matière électorale

- loi organique du 5 avril 2006 (élection présidentielle) ;

- loi du 14 avril 2011 portant simplification de dispositions du code électoral et relative à la transparence financière de la vie politique

Pour financer leurs dépenses, les partis disposent désormais de deux sources principales de revenus : un financement privé , généralement modeste, et l'aide publique de l'Éta t, dont la part est devenue déterminante. Selon des estimations approximatives, les cotisations des adhérents et des militants représenteraient environ 15 % des ressources des formations percevant l'aide publique (cf. infra ).

a) Le financement privé

Le financement privé des partis provient principalement des cotisations des adhérents ainsi que de la cotisation perçue auprès des élus locaux et des parlementaires adhérents, la pratique variant toutefois beaucoup d'un parti à l'autre sur ce point.

Les partis peuvent disposer d'autres revenus privés, mais dans les limites étroites d'une législation de plus en plus restrictive : ressources provenant d'activités commerciales ou industrielles du parti, legs , etc. Entrent également dans cette catégorie les « dons des personnes physiques » régis par les lois de 1995, étant entendu que depuis cette même date les personnes morales, quelles qu'elles soient à l'exception des partis eux-mêmes, ne sont plus autorisées à verser le moindre don ni à consentir le moindre avantage en nature aux partis politiques.

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