D. LA POLITIQUE D'ACHATS DU MINISTÈRE ET L'ACCÈS DES PME AUX MARCHÉS DE DÉFENSE : VERS UN « SMART BUSINESS ACT » ?

1. Une part de 10 % pour les PME mais des retards de paiement qui ne se résorbent que progressivement
a) Un euro d'achat sur dix pour les PME

D'après les chiffres communiqués par le ministère de la défense, la part des PME dans les achats du ministère en 2011 (17 800 millions d'euros) s'élève à 10,4 % (1 850 millions d'euros) tous services confondus et hors part des PME dans la sous-traitance. Elle se montait à 8,8 % en 2010 (1 540 millions d'euros pour un volume d'achats de 17 500 millions d'euros).

Ce chiffre global recouvre toutefois de fortes disparités selon les services.

La part directe des PME dans la fonction achat-programmes de la DGA (environ 10 000 millions d'euros) est de l'ordre de 1,2 % en 2011 (soit autour de 120 millions d'euros), comme en 2010. Mais les PME sont plus fortement impliquées dans les chaînes de sous-traitance des opérations d'armement sur lesquelles le ministère ne dispose que d'évaluations : 4 000 PME y interviendraient pour un montant pouvant se situer entre 2 000 et 3 000 millions d'euros.

Hors DGA, la part des PME comme fournisseurs directs est plus élevée.

Pour les plus importants services acheteurs du ministère hors DGA, elle était :

- de l'ordre de 8 % en 2011 dans les services de maintien en condition opérationnelle (254 millions d'euros sur 3 170 millions d'euros d'achats en 2011), en légère augmentation par rapport à 2010 (7,8 %, soit 208 millions d'euros pour un volume global d'achats de 2 650 millions d'euros)

- pour le service d'infrastructure de la défense, de 44,4 % en 2011 (479 millions d'euros sur 1 079 millions d'euros d'achats) et de 43,4 % en 2010 (385 millions d'euros sur 887 millions d'euros d'achats).

- pour le service du commissariat des armées , de 27 % en 2011 (416 millions d'euros sur 1536 millions d'euros d'achats) et 22,7 % en 2010 (254 millions d'euros sur 1 118 millions d'euros d'achats).

b) Des difficultés de paiement qui pénalisent surtout les petites PME

Le diagnostic de l'engorgement du circuit achat-finances du ministère de la défense a déjà été largement dressé dans le rapport d'information précité sur les bases de défense. Inutile d'y revenir aujourd'hui.

Vos rapporteurs se sont toutefois intéressés à l'impact budgétaire des intérêts moratoires pour les bases de défense. Leur montant est détaillé dans le tableau ci-dessous :

2011

1 er semestre 2012*

1,95

0,49

* : Données en date du 23 juillet 2012.

Les 2 millions d'intérêts moratoires payés en 2011 peuvent paraître modestes rapportés aux crédits totaux (0,3 % du budget des bases de défense), mais ce montant est significatif quand on le compare aux efforts qui sont faits par ailleurs pour économiser parfois quelques dizaines de milliers d'euros.

c) Le lent déploiement des cartes achats-finances

Initialement utilisées par la marine nationale, la direction générale pour l'armement et le service de santé des armées, les cartes achats sont un outil bancaire de soutien pour le fonctionnement des bases de défense permettant d'effectuer des achats aussi bien auprès d'opérateurs économiques (titulaires de marchés publics) qu'auprès de fournisseurs locaux. Outre l'intérêt de cette dématérialisation pour les chaînes achats et finances du ministère, l'utilisation des cartes achats représente également un dispositif économiquement intéressant pour les fournisseurs qui sont ainsi payés en seulement quatre jours environ.

Les deux types de carte achats déployés au sein des bases de défense :

- la carte achats dite de niveau 1 permet d'effectuer des achats auprès de commerçants de proximité, préalablement référencés et utilisant un terminal de paiement électronique (TPE), dans des conditions fixées par la base de défense. En général, elles sont utilisées pour les achats urgents ou imprévus et d'un montant inférieur au seuil de mise en concurrence des marchés publics ;

- la carte achats de niveau 3 permet uniquement la passation d'achats sur marchés publics à bons de commande et sur conventions auprès des centrales d'achat (UGAP, Economat des armées). L'achat est déclenché, comme pour les bons de commande papier, par le biais d'une délégation du représentant du pouvoir adjudicateur au porteur de la carte.

Au premier semestre 2012 et pour l'ensemble du ministère de la défense, le total des dépenses réalisées par l'intermédiaire de la carte achats s'élève à 47 millions d'euros, représentant près de 85 000 actes d'achats.

Pour les seules bases de défense, 35 152 555 € ont été dépensés via les 5 233 cartes achats déployées en leur sein :

- 4 120 cartes achats sont dédiées au soutien commun pour une volumétrie financière de 21 768 694 €, dont 4 462 096 € en niveau 1 ;

- 1 113 cartes achats sont dédiées aux achats "métiers" pour une volumétrie financière de 13 383 861 €, dont 1 577 073 € en niveau 1.

Au vu de ces chiffres, on peut dire que ce dispositif nouveau n'a pas encore totalement atteint sa pleine maturité.

Pourtant, les avantages pour chacune des parties ne sont plus à démontrer : satisfaction rapide du besoin et paiement rapide du fournisseur, diminution en conséquence des intérêts moratoires malgré une règlementation qui se durcit.

Votre commission estime que le déploiement de cette carte devrait être une priorité, notamment pour renouer les liens entre le tissu économique local et les bases de défense, au bénéfice des PME.

2. Vers un « Smart business act » ?

Le ministère de la défense travaille actuellement à compléter ce dispositif afin d'élaborer un véritable « Smart business act » au bénéfice des PME. A ce titre, il a notamment été créé une mission ministérielle PME, rattachée directement au ministre, qui anime ce dispositif de soutien, avec le concours de tous les organismes du ministère.

Dans l'attente des orientations plus précises sur le contenu que pourrait prendre ce dispositif, vos rapporteurs se sont renseignés sur l'état actuel des dispositifs du ministère de la défense. Il faut relever que le ministère a mis en place trois types d'actions :

L'action pour les PME au sein du ministère de la Défense

- les interlocuteurs « entreprises » dans chacune des entités d'achat du ministère (134 au total). Ils sont destinés à orienter les PME vers les organismes susceptibles d'acheter leurs prestations et à les aider, le cas échéant, à résoudre les difficultés pouvant survenir à l'occasion de l'attribution ou de l'exécution de contrat. Cadres placés à haut niveau dans les services, devant être visibles sur les portails et les annuaires, ces interlocuteurs ont vocation à traiter, avec obligation de première réponse dans un délai de 15 jours, toutes les demandes. Ils travaillent dans le cadre d'un engagement qualitatif de service dont la mise en oeuvre est contrôlée par la mission ministérielle PME. Les délais de paiement aux PME font également l'objet de la part de ce dispositif d'une attention soutenue. Cette composante permanente de proximité a été renforcée récemment au niveau de l'administration territoriale par la création d'un échelon local intermédiaire de soutien supplémentaire : les 10 délégués régionaux aux restructurations de la défense placés auprès de certains préfets de région assurent désormais aussi le rôle de premier point de contact régional pour les PME ignorant totalement l'organisation du ministère et peuvent les orienter vers le service compétent du ministère. Ces délégués sont aussi chargés d'entretenir des liens avec les acteurs économiques locaux pour mieux faire connaître le dispositif de soutien économique du ministère. Ils prennent notamment une part active à l'organisation des campagnes d'information sur les achats du ministère de la défense;

- l'accès des PME aux marchés du ministère de la défense est facilité dans l'organisation des consultations . Le ministère de la défense demande aux services acheteurs d'appliquer, à l'occasion de leurs procédures d'acquisition, le plus systématiquement possible les dispositions du code des marchés publics augmentant les possibilités d'accès pour les PME, en particulier l'allotissement, l'autorisation des regroupements d'entreprises et les variantes. Les dispositions du code des marchés publics visant à limiter au juste nécessaire les charges pesant sur les entreprises en matière de constitution de dossiers d'accès aux consultations font l'objet d'une insistance particulière auprès des services.

Il est notamment demandé aux services acheteurs de respecter un principe de proportionnalité entre l'exigence de garanties professionnelles, techniques et financières et l'objet du marché et ses conditions d'exécution.

- une analyse préalable de l'impact sur les PME des politiques d'achat du ministère est toujours conduite . Dans un contexte général de rationalisation des achats du ministère pour en réduire les coûts, les stratégies d'achat sont précédées d'une analyse de l'impact sur les PME d'une modification des modalités d'acquisition (concentration, transfert sur un seul pouvoir adjudicateur d'achats autrefois fractionnés entre de très nombreuses entités locales). L'objectif est de pouvoir informer le tissu des PME concernées de la modification de leur contexte commercial habituel, de façon à ce qu'elles puissent l'anticiper et y faire face. Les opérations d'acquisition correspondant à ces stratégies s'efforcent alors de faire toute leur place aux dispositions du code des marchés publics permettant aux PME de candidater utilement.

Source : ministère de la défense, réponse au questionnaire budgétaire

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