IV. UNE AVANCÉE : VERS UN RENFORCEMENT DE L'INDÉPENDANCE DE L'EXPERTISE SCIENTIFIQUE ET DE L'ALERTE EN MATIÈRE DE SANTÉ ET D'ENVIRONNEMENT

S'appuyant notamment sur les obligations définies aux articles 49 et 52 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, Mme Marie-Christine Blandin, présidente de votre commission, et plusieurs de ses collègues ont déposé une proposition de loi relative à la création de la Haute Autorité de l'expertise scientifique et de l'alerte en matière de santé et d'environnement. 21 ( * )

Particulièrement attentive à l'indépendance de l'expertise scientifique et à la lutte contre les conflits d'intérêts, Mme Marie-Christine Blandin a souhaité ainsi concrétiser une recommandation figurant dans de nombreux rapports du Sénat élaborés dans le cadre de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, de missions communes d'information ou de commissions d'enquête. Il s'agit de renforcer le droit de la santé publique et le droit de l'environnement en garantissant l'écoute et la protection des lanceurs d'alerte face aux enjeux des industriels afin d'éviter de nouveaux scandales sanitaires ou environnementaux.

Citant l'exemple du bisphénol A, elle rapporte dans son intervention en séance publique lors de l'examen de cette proposition de loi : « ainsi, près de vingt ans se seront écoulés entre les premières alertes et le retrait de la substance. Vingt ans durant lesquels les manquements dans l'évaluation des risques sanitaires et l'absence de protection des scientifiques alertant sur les dangers pour la santé ont laissé l'industrie chimique jouer avec la santé de nos concitoyens, malgré 700 études concordantes sur la dangerosité du bisphénol A ». 22 ( * )

La proposition de loi, telle qu'adoptée par le Sénat le 21 novembre 2012, crée une Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d'environnement , chargée de veiller aux principes déontologiques de l'expertise scientifique et technique en matière de santé publique et d'environnement, et à leur diffusion.

Elle est composée de parlementaires, de conseillers d'État, de magistrats de la Cour de cassation, de membres du Conseil économique, social et environnemental ainsi que de personnalités qualifiées dans les domaines de l'évaluation des risques, l'éthique ou la déontologie, du droit du travail, du droit de l'environnement ou droit de la santé publique, ou appartenant à des organismes de recherche. Ses membres sont tenus de souscrire une déclaration publique d'intérêts.

Elle transmet les alertes qui lui sont adressées en matière de santé et d'environnement aux ministres compétents. Un registre, à consultation réglementée, des alertes et des suites qui leur sont données est tenu par les établissements et organismes ayant une activité d'expertise et de recherche dans ces domaines.

Elle communique chaque année au Gouvernement et au Parlement un rapport évaluant les suites données à ses avis et aux alertes dont elle a été saisie. Elle peut formuler, le cas échéant, des recommandations en matière d'amélioration du fonctionnement de l'expertise scientifique et technique ainsi que de gestion des alertes.

La proposition de loi traite aussi de l'exercice du droit d'alerte en matière sanitaire et environnementale. Elle prévoit des mesures de protection des « lanceurs d'alerte » , afin de leur assurer le droit de diffuser des informations sans subir des mesures de rétorsion discriminatoires ou d'atteintes à leur liberté d'expression, tout en veillant à ne pas laisser libre cours à toutes les alertes informelles ou calomnieuses. La faculté de saisir le Défenseur des droits leur est ouverte.

Le droit d'alerte reconnu à tout salarié lorsqu'une situation de travail présente « un danger grave et imminent pour sa vie » s'applique désormais en cas de risque sanitaire ou environnemental lié à l'activité de l'établissement.

Une mission de veille et d'alerte en matière de santé publique et d'environnement est confiée au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Il est compétent pour attribuer les alertes sanitaires ou environnementales émanant des salariés de l'entreprise.

Le principe de non discrimination en droit du travail est étendu aux lanceurs d'alerte.

Votre rapporteur se réjouit de cette avancée essentielle et forme le voeu que l'Assemblée nationale adoptera à son tour ce texte dans les meilleurs délais.

Compte tenu à la fois de la sanctuarisation des crédits en faveur de la recherche et d'une politique souhaitant encourager à la fois l'emploi et la croissance par l'innovation, votre rapporteur propose de donner un avis favorable aux crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » pour 2013.


* 21 Proposition de loi n° 747 (2011-2012).

* 22 Séance publique du Sénat du 15 octobre 2012.

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