SECTION 4 LES SUBVENTIONS PUBLIQUES
Article 10 (art. 10 A [nouveau] et 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations) - Définition de la subvention

L'article 10 du projet de loi complète la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 afin de définir, pour la première fois, la notion de subvention. Répondant à une forte demande du monde associatif , il prolonge ainsi l'initiative du précédent Gouvernement, qui avait souhaité « clarifier et sécuriser le cadre juridique des relations financières entre les pouvoirs publics et les associations, notamment au regard de la réglementation européenne relative aux aides d'État », en publiant la circulaire du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations 21 ( * ) . Cette circulaire comprenait ainsi en annexe un modèle de convention d'objectifs accompagné d'un manuel d'utilisation, à l'usage des administrations et des associations, destiné à faciliter l'établissement du dossier de demande de subvention et la rédaction de la convention.

L'objectif poursuivi par le Gouvernement est de définir au niveau de la loi la subvention afin de rendre son périmètre et son usage plus sûrs et d'ainsi mieux distinguer son champ d'utilisation par rapport à celui des marchés publics . La période récente a en effet mis à jour un mouvement d'ampleur auprès des collectivités territoriales et leurs établissements publics et conduisant, par crainte d'une requalification de l'aide accordée en marché public, à un recours ab initio à une procédure de passation de ce marché plutôt qu'au recours à une subvention.

Cette définition reprend les critères essentiels permettant de distinguer la notion de subvention. La subvention serait ainsi définie comme une contribution facultative, l'administration disposant d'un pouvoir discrétionnaire pour son attribution, ce qui écarte de ce fait la constitution de tout droit acquis à son attribution. Sur ce point, la subvention se rapproche du marché public car le pouvoir adjudicateur reste juridiquement maître de la définition de ses besoins. Ces contributions qui pourraient être « financières, matérielles ou en personnel » devraient alors être « valorisées » dans l'acte d'attribution.

Cependant, cette définition reprend un élément fondamental qui distingue la subvention du marché public : les projets subventionnés devraient être « initiés, définis et mis en oeuvre » par le bénéficiaire. Dans le cas contraire, la subvention serait une voie de contournement du droit de la commande publique, l'association agissant alors comme un « faux nez » de l'administration. La subvention s'exposerait alors à une requalification par le juge en marché public, ce qui conduirait à la restitution des sommes versées et à la responsabilité des agents publics et des élus ayant choisi le recours à la subvention en matière pénale 22 ( * ) ou de comptabilité publique 23 ( * ) . La disposition proposée prévoit donc d'écarter ce risque d'empiètement sur le périmètre des marchés publics en rappelant que les subventions « ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités qui les accordent ».

S'agissant du champ d'application de cette nouvelle définition, le Gouvernement a fait le choix de ne viser qu'une partie des transferts financiers actuellement dénommés, dans le langage courant, subventions. En effet, les bénéficiaires concernés par cette définition ne seraient que les personnes morales de droit privé, excluant du champ de cette définition les versements aux particuliers pour lesquels le risque de requalification en marché public paraît rarissime. De même, ne sont pas compris dans cette définition les transferts financiers entre personnes publiques.

En outre, ne seraient visées par cette définition que les subventions versées par les administrations de l'État, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale, les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif. A cette liste traditionnelle des autorités administratives au sens de l'article 1 er de la loi du 12 avril 2000, l'article 10 du présent projet de loi propose d'ajouter les organismes chargés de la gestion d'un service public industriel et commercial, intégrant par coordination ces organismes à l'obligation prévue par l'article 10 de la loi du 12 avril 2000 de conclure une convention entre le financeur et le bénéficiaire de la subvention 24 ( * ) .

Enfin, la convention conclue entre l'autorité accordant la subvention et le bénéficiaire, prévue à l'article 10 de la loi du 12 avril 2000, devrait désormais mentionner la durée de la subvention, comme tel est le cas d'ores et déjà s'agissant de l'objet, du montant et des conditions d'utilisation de la subvention attribuée. Cet ajout répare donc une omission dans la liste des mentions obligatoires de la convention et qui, en pratique, y figure souvent tant la durée constitue un élément important du versement de la subvention.

Votre commission partage la volonté de clarification affichée par le Gouvernement même si elle reste consciente que cette seule définition ne peut définitivement épuiser la question du partage entre subvention publique et commande publique, ni justifier un empiètement sur le droit des marchés publics dont le fondement repose sur les directives dites « Marchés publics » qui s'imposent aux pouvoirs adjudicateurs.

À l'initiative de son rapporteur, votre commission a néanmoins adopté un amendement de simplification et de précisions rédactionnelles.

Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 10, sous réserve de l'adoption de son amendement.


* 21 Circulaire du Premier ministre du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations : conventions d'objectifs et simplification des démarches relatives aux procédures d'agrément.

* 22 En effet, le versement d'une subvention pour éluder la passation d'un marché public peut « procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics », ce que sanctionne l'article 432-14 du code pénal.

* 23 Le fait de confier à une association des missions relevant normalement de la puissance publique et soumise de ce fait aux règles de la comptabilité publique peut aboutir à la constatation d'une gestion de fait par le juge des comptes et à la mise en débet du gestionnaire de fait ou à sa condamnation à des amendes, comme le prévoit l'article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963.

* 24 En application de l'article 1 er du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001, une convention est obligatoire entre l'autorité administrative qui attribue une subvention et l'organisme de droit privé qui en bénéficie dès lors que le montant de la subvention dépasse 23 000 euros.

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