EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 60 - Financement de la partie socle du revenu de solidarité active en faveur des jeunes par le fonds national des solidarités actives

Objet : Cet article a pour objet de reconduire en 2015 le mode de financement dérogatoire du RSA « jeunes ».

I - Le dispositif proposé

L'article L. 262-24 du code de l'action sociale et des familles fixe les règles de financement du revenu de solidarité active (RSA). La partie « socle », qui correspond à la fusion du revenu minimum d'insertion (RMI) et de l'allocation parent isolé (API) est à la charge des départements. La partie « activité » est financée par l'Etat via le fonds national des solidarités actives (FNSA).

Par dérogation à cette règle générale, le FNSA prend en charge l'ensemble du RSA « jeunes », qu'il s'agisse de la partie « socle » ou « activité ». Peuvent bénéficier de cette prestation les personnes âgées de 18 à 25 ans qui ont travaillé au moins deux ans au cours des trois années précédant leur demande.

Compte tenu du caractère particulièrement restrictif de ces critères d'admission au bénéfice de la prestation, seuls 7 882 jeunes la touchaient en mars 2014, un chiffre en diminution de 23 % par rapport à 2011. Le coût de la prise en charge du RSA « jeunes » devrait s'élever à 26 millions d'euros l'année prochaine pour le FNSA.

II - Les modifications introduites par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de votre commission

Le Gouvernement justifie le maintien de ce dispositif de financement dérogatoire par les incertitudes qui pèsent sur l'avenir de cette prestation et sur les réformes qui pourraient lui être apportées. Or ces incertitudes figurent justement parmi les éléments qui ont conduit votre commission à donner un avis négatif à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Par cohérence avec la position qu'elle a adoptée sur l'ensemble de la mission, la commission a émis un avis défavorable à l'adoption de cet article rattaché.

EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 19 novembre 2012, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Philippe Mouiller sur le projet de loi de finances pour 2014, mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis . - Dotée de 15,7 milliards d'euros en 2015, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » constitue l'un des principaux vecteurs d'intervention de l'Etat en matière de politiques sociales. Ses quatre programmes, de taille très inégale, couvrent des champs variés qui ont pour point commun la lutte contre l'exclusion sociale et la protection des personnes les plus vulnérables.

Le programme « Handicap et dépendance », qui devrait bénéficier de 11,6 milliards d'euros, soit une hausse de 1,4 %, regroupe près des trois quarts des crédits. Il a pour principal objet le financement de l'allocation aux adulte handicapé (AAH), pour un montant de 8,8 milliards d'euros, mais retrace également celui des établissements et services d'aide par le travail (Esat), à hauteur de 2,7 milliards d'euros, ainsi que la participation de l'Etat au fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), qui devrait s'élever à 66 millions d'euros. S'agissant de ces dernières, j'attire votre attention sur le fait que, si le Gouvernement prévoit une augmentation faciale des dépenses allouées par l'Etat au fonctionnement des MDPH, celle-ci n'est obtenue que grâce à un apport de 10 millions d'euros de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). En réalité, la dotation de l'Etat diminue d'un peu plus de 8 millions d'euros. Une telle mesure doit nous interroger : cette ponction sur le budget de la CNSA est-elle exceptionnelle ou marque-t-elle la première étape d'un désengagement de l'Etat du financement des MDPH ? Les conseils généraux prennent déjà en charge plus de 40 % de leurs dépenses de fonctionnement. Cette part est-elle amenée à s'alourdir dans les années à venir ?

Deuxième par la taille, le programme « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire », doté de 2,6 milliards d'euros, vient avant tout abonder le fonds national des solidarités actives (FNSA), qui est chargé d'assurer le financement de la partie activité du revenu de solidarité active (RSA). Le programme regroupe également des enveloppes de taille plus limitée, dont les principales sont destinées au financement des services chargés d'assurer la protection juridique des majeurs, pour un peu plus de 240 millions d'euros, ainsi qu'à la participation de la France au programme européen d'aide alimentaire, pour 32,6 millions d'euros. Il comporte également 4,7 millions d'euros de subventions destinées au secteur de l'économie sociale et solidaire, en diminution de près de 5 % par rapport à 2014.

Cette évolution est paradoxale au regard de l'importance qu'accorde le Gouvernement au développement de ce secteur. J'estime par ailleurs que l'économie sociale et solidaire doit pouvoir pleinement trouver sa place au sein de la mission « Economie » du budget de l'Etat et qu'il est par conséquent contreproductif de maintenir certains crédits au sein de la présente mission.

En 2015, 2,3 milliards d'euros seront alloués au FNSA, soit quasiment quatre fois plus qu'en 2014. Cette hausse considérable des crédits est en réalité le résultat d'un changement dans le mode de financement du FNSA. Jusqu'à présent, celui-ci était alimenté par une fraction du prélèvement de solidarité sur les produits de placement et les revenus du patrimoine, l'Etat apportant une contribution d'équilibre dont le montant s'élevait à 595 millions d'euros en 2014. Le prélèvement de solidarité est désormais entièrement versé à la sécurité sociale et le FNSA est donc financé dans sa totalité par une dotation de l'Etat.

Il s'agit là d'une simplification bienvenue qui permettra de lisser la contribution de l'Etat, puisqu'elle ne dépendra plus des fluctuations d'une recette qui s'avérait volatile. Elle améliorera également la visibilité dont dispose le Parlement pour apprécier chaque année l'évolution des dépenses de RSA « activité ». Un financement complémentaire de 200 millions d'euros doit permettre de tenir compte de l'impact de la revalorisation exceptionnelle du RSA. Je regrette cependant qu'il soit issu de la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires. Au final, l'année prochaine, 1,9 milliard d'euros seront consacrés par le FNSA au financement du RSA « activité », 26 millions d'euros à celui du RSA « jeunes » et 513 millions d'euros à celui de la prime de Noël.

D'une ampleur bien moindre, puisque ses crédits doivent s'élever à 25,2 millions d'euros, le programme « Egalité entre les femmes et les hommes » comporte essentiellement des subventions destinées à des associations agissant au plan national ou local. Au-delà de la reconduction annuelle de ces subventions, il apparaît difficile de voir se dessiner une stratégie d'ensemble au sein de ce programme, alors même que le Gouvernement s'est fixé des objectifs ambitieux en la matière. L'enveloppe allouée, après avoir augmenté d'un peu plus de 14 % en 2014, sera stable l'année prochaine. Pourtant, c'est à partir de l'action « Prévention et lutte contre la prostitution et la traite des êtres humains », créée en 2014, que devrait logiquement être financé le volet accompagnement social de la proposition de loi relative à la lutte contre le système prostitutionnel. Or, à aucun moment, le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances ne fait mention des dépenses supplémentaires qui pourraient être engendrées par l'adoption de ce texte.

Enfin, un quatrième programme regroupe des crédits de fonctionnement destinés aux ministères sociaux, à leurs antennes territoriales ainsi qu'aux agences régionales de santé (ARS). 1,5 milliard d'euros lui seront alloués en 2015, essentiellement pour financer les dépenses de personnel, ainsi que la modernisation des systèmes d'information dans les ministères sociaux. Le niveau des crédits se fonde sur un objectif de diminution du plafond d'emplois de 253 équivalents temps plein l'année prochaine.

J'en viens à quelques observations plus précises sur la mission. La première porte sur la sincérité des prévisions effectuées par le Gouvernement. Les crédits consacrés au financement de l'AAH et du RSA « activité » représentent à eux seuls 70 % du montant total de la mission. Notre commission est donc appelée à donner un avis sur une mission qui comprend, pour l'essentiel, des dépenses de « guichet » dont l'évolution tendancielle est, par définition, difficile à maîtriser. Quelle est cette évolution ? Les dépenses d'AAH ont connu une hausse continue au cours des dernières années qui devrait se poursuivre à l'avenir. Or, la sous-évaluation des crédits pourrait être d'environ 200 millions d'euros. S'agissant du RSA, le Gouvernement a fait le choix de revaloriser de 10 % le montant du RSA « socle » sur la durée du quinquennat, décision qui aura un impact indirect de 230 millions d'euros sur les dépenses de l'Etat au titre du RSA « activité » entre 2015 et 2017. D'autre part, nous savons que 68 % des bénéficiaires potentiels n'ont pas recours au RSA « activité », ce qui signifie que le niveau réel des dépenses est très largement inférieur à ce qu'il pourrait être. De la même façon, avec 7 882 bénéficiaires au mois de mars 2014, le RSA « jeunes » est loin d'avoir atteint ses objectifs. Or, comme l'a très justement souligné le rapporteur spécial de la commission des finances, le Gouvernement prévoit une hausse de 2,9 % des crédits de la mission sur la période 2015 à 2017, sans commune mesure avec celle de 7,9 % qui a été observée au cours des trois années passées. Ces éléments conduisent nécessairement à conclure au manque de sincérité des prévisions formulées par le Gouvernement dans ce projet de loi de finances.

Comment renouer avec la sincérité dans le contexte que nous connaissons de fortes contraintes sur l'évolution de nos finances publiques ? En engageant une réforme profonde des minima sociaux. Le 20 août dernier, le Président de la République a fait part de son intention de fusionner le RSA « activité » avec la prime pour l'emploi (PPE). Le projet de loi de finances rectificative pour 2014 prévoit bien de mettre fin au versement de la PPE, en 2016. Le Gouvernement vient d'annoncer la création d'une prime d'activité qui remplacerait la prime pour l'emploi et le RSA « activité » à partir du 1 er janvier 2016. Cette prime devrait être réservée aux bas salaires et devrait bénéficier également aux moins de 25 ans. Elle devrait être versée chaque mois, aux personnes gagnant moins d'environ 1,2 fois le smic et selon les conditions de ressource du ménage. Toutefois les modalités précises restent à définir avec les parlementaires, en tenant compte du fait que, pour l'instant, le RSA n'a pas atteint ses objectifs en matière de retour à l'emploi, que la gestion administrative de la prestation reste très complexe et que les contrôles demeurent perfectibles. En 2012, les conseils généraux ont dépensé 7,2 milliards d'euros au titre du RSA « socle », soit 31,4 % de plus qu'en 2008. Lors du dernier congrès de l'Assemblée des départements de France (ADF), le Premier ministre a annoncé la création d'un groupe de travail qui aura notamment pour mission de trancher la question d'une éventuelle recentralisation de la prestation. J'estime qu'il s'agit là d'une piste qui doit être sérieusement étudiée, compte tenu de l'absence de marges de manoeuvre à la disposition des départements, qui les conduit à ne plus assumer qu'un rôle de guichets.

Dans le champ de la politique du handicap, la réunion du comité interministériel du 25 septembre 2013 avait suscité des attentes et des espoirs nombreux chez les acteurs du secteur. Les auditions m'ont permis de mesurer l'ampleur de leur déception. Les associations ont en particulier regretté que le rapport de Denis Piveteau, publié en juin dernier et qui formule un certain nombre des préconisations visant à éviter les ruptures de prise en charge des personnes handicapées, n'ait pas encore trouvé de traduction concrète. Pour ce qui concerne le fonctionnement des MDPH, nous savons qu'elles sont confrontées à une augmentation soutenue de leur charge de travail. Or des mesures de rationalisation pourraient aisément être mises en oeuvre afin de générer des économies de fonctionnement. Je pense en particulier à l'obligation qu'ont les MDPH de réexaminer tous les deux ans la situation des bénéficiaires de l'AAH dont le taux d'incapacité est compris entre 50 % et 79 %. Des améliorations substantielles pourraient également être apportées au fonctionnement des MDPH grâce à l'harmonisation de leurs systèmes d'information, sujet que traite le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.

S'agissant des Esat, dont le financement repose entièrement sur l'Etat, je ne peux que relayer les craintes qui ont été formulées devant moi. La censure par le Conseil d'Etat en 2013 du niveau des tarifs plafonds fixés pour 2012 a mis en lumière les limites d'un système de tarification qui devrait être entièrement revu sur la base d'une véritable étude nationale de coûts. Une telle évolution apparaît indissociable d'une réflexion sur la place et le rôle des Esat dans les parcours de vie des personnes handicapées afin qu'ils puissent notamment, lorsque cela est possible, assurer pleinement leur mission de tremplin vers le travail en milieu ordinaire. A l'occasion de la semaine pour l'emploi des personnes handicapées, qui se déroule actuellement, nombreuses sont les associations qui font part de leurs inquiétudes sur cette question. Comme les années précédentes, le Gouvernement prévoit de maintenir la suspension du programme de création de places en Esat qui avait été lancé en 2008. L'objectif officiel est de concentrer les moyens sur la modernisation des structures. Or le montant total du plan d'aide à l'investissement s'élèvera à 2 millions d'euros l'année prochaine, soit une subvention moyenne d'un peu moins de 1 500 euros par établissement. L'effet levier sur l'investissement risque par conséquent d'être fort limité.

Plus globalement, je ne peux que vous faire part de mes préoccupations quant au manque de dispositifs adaptés pour accompagner les personnes handicapées vieillissantes. Comment former au mieux les professionnels chargés de les accompagner ? Quelles solutions de prise en charge mettre en place ? Dans quelle mesure les Esat, les maisons d'accueil spécialisées (MAS) ou les Ehpad peuvent-ils être des lieux de vie adaptés ? Autant de questions auxquelles, malheureusement, le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement n'apporte pas de réponses.

Au regard de ces observations, je vous proposerai de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ainsi qu'à celle de l'article 60 qui lui est rattaché et vise à reconduire en 2015 le financement dérogatoire du RSA jeunes via le seul FNSA. Ma position se fonde sur les incertitudes nombreuses qui entourent cette mission - réforme du RSA « activité », financement des MDPH, réforme de la tarification des Esat, financement des mesures contenues dans la proposition de loi relative à la lutte contre le système prostitutionnel - ainsi que sur la certitude que, pour une grande part, les crédits qui lui seront alloués en 2015 s'avèreront insuffisants pour couvrir les besoins existants.

M. Jean-Marie Morisset . - Je partage la position du rapporteur tendant à donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission. La Cour des comptes a bien souligné qu'en 2014, il manquerait 500 millions d'euros pour abonder le FNSA. La sous-évaluation est également patente s'agissant de l'AAH. Si les MDPH fonctionnent bien, elles font face à un afflux de demandes difficile à absorber et leur gestion pèse de plus en plus sur les conseils généraux. Je regrette que, une fois de plus, le projet de loi de finances ne prévoie pas d'ouvertures de places en Esat alors que les besoins existent. S'agissant des personnes handicapées vieillissantes, j'insiste sur le fait que les départements ne doivent pas avoir à combler les lacunes de l'Etat en la matière.

M. René-Paul Savary . - Vous dites que les conseils généraux financent environ 40 % du fonctionnement des MDPH. Notons que dans certains départements, la proportion est bien supérieure. Le statut de groupement d'intérêt public (GIP) des MDPH complique considérablement leur fonctionnement : on oblige des personnels d'horizons différents à travailler ensemble et les structures n'ont souvent pas la taille critique pour mobiliser toutes les ressources humaines dont elles ont besoin. Je suis personnellement favorable à une intégration des MDPH au sein des conseils généraux, afin que les moyens humains et de fonctionnement puissent être mutualisés.

La gestion des Esat par les départements a, un temps, été évoquée. Sans doute serait-il bien plus pertinent que ces structures relèvent des collectivités territoriales qui sont compétentes en matière de formation professionnelle et de développement économique.

Quelles sont les économies attendues de la suppression de la PPE annoncée par le Gouvernement ?

Nous savons tous que le RSA « jeunes » n'a pas atteint ses objectifs. De là à considérer qu'il a été conçu de façon à ne pas fonctionner, il n'y a qu'un pas... En revanche, la garantie jeunes peut permettre d'apporter un soutien à certaines catégories de publics.

Mme Elisabeth Doineau . - La fusion du RSA « activité » et de la PPE est nécessaire et mérite d'être saluée. En effet, la PPE était saupoudrée entre un grand nombre de bénéficiaires et la coexistence de deux dispositifs distincts aux objectifs proches entraînait une dispersion des moyens. J'appelle cependant votre attention sur le mode de calcul de la future prime d'activité, qui ne doit pas défavoriser les familles monoparentales.

Je suis par ailleurs réservée quant à l'idée de confier aux caisses d'allocations familiales (Caf) la gestion du RSA dans son ensemble. Il ne me semble en effet pas pertinent de confier à des acteurs distincts, d'une part la gestion de l'allocation, d'autre part la mise en oeuvre des politiques d'accompagnement liées au versement de celle-ci.

Mme Nicole Bricq . - Je m'étonne que le rapporteur parle du manque de sincérité budgétaire de la mission. Attention à ne pas confondre la sincérité et la sous-évaluation, qui est effectuée par tous les Gouvernements et généralement corrigée en loi de finances rectificative.

S'agissant de la PPE, je tiens à rappeler que le dispositif, tel qu'il avait été pensé initialement par le Gouvernement de Lionel Jospin, devait permettre de donner un véritable coup d'accélérateur à l'emploi. Il était conçu comme un impôt négatif. Mais le dispositif a évolué. Il coûte aujourd'hui très cher sans que les ménages concernés soient toujours en mesure de comprendre pourquoi ils perçoivent la PPE. C'est bien pour cette raison que le Sénat demande depuis plusieurs années la fusion du RSA « activité » et de la PPE. Le rapporteur nous dit qu'il faut engager une réforme profonde des minima sociaux. J'aimerais que la majorité sénatoriale nous éclaire sur ses propositions en la matière.

Mme Isabelle Debré . - Le rapport que j'avais écrit en 2012 avec Claire-Lise Campion sur l'application de la loi de 2005 soulignait déjà que le réexamen tous les deux ans de la situation des bénéficiaires de l'AAH ayant un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79 % posait problème. Nous avions également recommandé que la compétence de délivrance des cartes européennes de stationnement soit transférée aux directions départementales de la cohésion sociale. Monsieur le rapporteur, savez-vous si cette recommandation a été mise en oeuvre ?

M. Michel Forissier . - En tant que chef d'entreprise, j'ai toujours été très réservé quant aux vertus des dispositifs incitatifs en matière d'emploi. Les fonds publics sont bien trop souvent déviés pour ce type de mesures alors que les efforts doivent avant tout porter sur le développement de la formation professionnelle continue.

S'agissant de l'égalité entre les femmes et les hommes, je pense qu'il faut intégrer cet enjeu dans l'ensemble des textes que nous examinons plutôt que de mettre en oeuvre des mesures qui s'apparentent davantage à de la communication.

M. Yves Daudigny . - Concernant les MDPH, le GIP constitue la seule forme juridique permettant d'associer pleinement les associations à la prise de décisions. Ces dernières sont très attachées à ce qu'aucune modification ne soit apportée au statut des MDPH et souhaiteraient que ce modèle puisse être copié s'agissant des futures maisons départementales de l'autonomie (MDA).

S'agissant du RSA, j'insiste sur le fait que les départements ne sont absolument pas en mesure d'apporter une plus-value à sa gestion, ce qui n'est pas le cas s'agissant de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Une reprise par l'Etat de cette compétence ne serait donc pas problématique.

M. Daniel Chasseing . - Nous manquons de structures d'accompagnement pour les personnes handicapées vieillissantes. L'Ehpad n'est pas nécessairement la solution la plus adaptée pour celles qui ne sont plus en mesure de travailler en Esat mais nous manquons de places en foyers occupationnels.

L'économie sociale et solidaire joue un rôle essentiel. Je regrette que les crédits inscrits dans cette mission soient en diminution.

M. Michel Vergoz . - Je suis déçu que le rapporteur ne formule aucune proposition concernant la réforme des minima sociaux. Certains départements sont très en difficulté pour la gestion du RSA. J'aimerais savoir si, oui ou non, le rapporteur soutient l'idée d'un transfert à l'Etat de la gestion de la prestation.

Mme Corinne Imbert . - Le vieillissement des personnes handicapées est une préoccupation de l'ensemble des conseils généraux. Nous manquons de places en foyers occupationnels et le maintien de la suspension du programme de créations de places en Esat n'est pas une bonne nouvelle car certaines auraient pu être réservées à ce type de public. Mon département expérimente l'accueil des personnes handicapées vieillissantes dans des résidences pour personnes âgées du type foyers-logements. Mais cela peut susciter des craintes car les structures ne sont pas nécessairement adaptées au départ et il existe un risque de rupture de parcours. Il s'agit pourtant d'une solution intéressante pour que soient utilisées les places qui sont libres dans certaines structures tout en évitant un engorgement dans les Esat ou les foyers occupationnels.

M. René-Paul Savary . - Je partage les propos de Michel Vergoz concernant la recentralisation du RSA. L'examen du projet de relatif à la nouvelle organisation territoriale de la République sera d'ailleurs l'occasion d'aborder cette question. Il nous faut être particulièrement attentif aux conditions financières dans lesquelles pourrait s'effectuer ce transfert de compétences.

M. Alain Milon, Président . - Je tiens à rassurer Michel Vergoz, la majorité sénatoriale a des idées. Elle les a exposées au cours de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Elle le fera à nouveau pour le projet de loi de finances.

M. Philippe Mouiller, rapporteur pour avis . - En réponse à René-Paul Savary, le pourcentage de 40 % correspond bien à la participation moyenne de l'Etat au financement des MDPH au niveau national en 2012. Concernant leur statut, je rejoins plutôt la position d'Yves Daudigny : le GIP présente un grand nombre de qualités et il convient de conserver un certain degré d'autonomie aux MDPH.

La PPE étant versée avec une année de décalage - c'est-à-dire sur les revenus de l'année précédente -, si la réforme est bien applicable dès le 1 er janvier 2016, la suppression de la PPE n'aura pas généré d'économies pour le budget de l'Etat. Notons que la prime d'activité annoncée par le Gouvernement pourrait toucher les jeunes dès l'âge de 18 ans, ce qui devrait permettre de pallier les lacunes du RSA « jeunes ». Je rejoins Elisabeth Doineau pour souligner la vigilance dont nous devons faire preuve s'agissant des foyers monoparentaux. En réponse à Michel Vergoz, je confirme que je suis bien favorable au transfert à l'Etat de la gestion du RSA. J'estime en revanche que la mission d'accompagnement doit continuer d'être exercée par les départements.

En réponse à Nicole Bricq, il me semble que lorsque le Gouvernement sait pertinemment qu'il sous-évalue un certain nombre de dépenses, il y a là un manque de sincérité.

Concernant la réforme des minima sociaux, nous sommes prêts à faire des propositions, notamment dans le cadre du groupe de travail que vient d'annoncer le Gouvernement.

Isabelle Debré a fait part des recommandations qu'elle avait formulées concernant la simplification des tâches des MDPH. Je sais que ces recommandations reçoivent un accueil favorable auprès des acteurs du secteur mais n'ont pas trouvé, pour le moment, de traduction concrète.

Concernant les personnes handicapées vieillissantes, préoccupation en effet partagée par tous, l'expérimentation dont a parlé Corinne Imbert mériterait en effet d'être examinée plus avant, notamment lorsque nous aurons à nous pencher sur le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.

Suivant la proposition du rapporteur pour avis, la commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », ainsi qu'à l'article 60 rattaché.

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