PATRIMOINES

PREMIÈRE PARTIE - LE PROGRAMME 175 « PATRIMOINES »

La politique de l'État en matière de patrimoine culturel poursuit les objectifs d'accessibilité, de sauvegarde, de protection et de mise en valeur du patrimoine défini largement, ainsi que d'amélioration du cadre de vie et de « la qualité architecturale » sur l'ensemble du territoire.

Pour 2016, les orientations stratégiques du projet annuel de performance s'inscrivent dans les trois orientations que le ministère a fixées pour les années 2015-2017 :


• pour contribuer au projet national d'éducation artistique et culturelle (EAC) et à la qualité de l'accueil des publics, le ministère souligne son ambition de favoriser la diversité des publics qui fréquentent les institutions patrimoniales (politique tarifaire adaptée, coopération renforcée avec les associations) et de développer « la compréhension de ce qui est vu [pour] susciter le désir de nouvelles visites » (dispositifs de médiation de qualité, services éducatifs adaptés aux différents registres d'attente des publics) ; les scolaires seront ainsi, à titre expérimental, accueillis le jour de fermeture (le lundi) dans les trois établissements hexagonaux les plus fréquentés : le Louvre, le château de Versailles et le musée d'Orsay ;


• pour assurer la transmission du patrimoine aux générations futures, le ministère met en avant les mesures du projet de loi « création, architecture et patrimoine » visant à renforcer le contrôle scientifique et technique de la politique patrimoniale dans son ensemble (en particulier en archéologie préventive), à consolider le régime juridique du patrimoine mondial de l'humanité , ainsi que les mesures renforçant la protection des ensembles mobiliers ou encore la lutte contre le trafic illicite d'objets d'art ; sont également rattachées à cet objectif la généralisation des stratégies pluriannuelles régionales d'intervention en matière de monuments historiques et la poursuite de la modernisation des musées .


• pour que la mise en valeur patrimoniale et architecturale contribue à l'égalité et au développement des territoires, le projet stratégique donne la priorité aux « projets structurants qui contribuent à l'accès du plus grand nombre à la culture et à l'attractivité économique de ces territoires » et qui « irriguent » leur territoire de référence, tout en soulignant le rôle des outils classiques ( dispositif fiscal « Malraux », labels ), récents ( stratégie nationale pour l'architecture ) et ceux qui seront réformés dans le cadre de la loi « création, architecture et patrimoine » - au premier chef l'accompagnement des collectivités territoriales dans le volet patrimonial des PLU .

Le ton est ainsi donné : les crédits budgétaires du programme « Patrimoines » pour 2016 seraient en hausse, à la veille d'une réforme importante dans la loi « création, architecture et patrimoine »; hélas, cette concomitance est loin d'être avérée : en fait, la hausse des crédits budgétaire est en trompe-l'oeil, les missions des opérateurs sont élargies et les défis demandent une mobilisation bien plus forte de politiques publiques , en particulier pour l'entretien et la valorisation de notre patrimoine. Ceci est d'autant plus vrai qu'en deuxième délibération, le 13 novembre 2015, l'Assemblée nationale a enlevé 10 millions d'euros à la mission « culture », dont 5 millions d'euros au programme 175 .

I. UNE HAUSSE DES CRÉDITS EN TROMPE-L'OEIL ET DES MISSIONS ÉLARGIES

Après deux années de baisse et une année de stabilisation, le programme 175 voit ses crédits progresser pour 2016 : les autorisations d'engagement (AE) gagnent 166 millions d'euros, à 912 millions d'euros (+18 %) et les crédits de paiement (CP) 122 millions d'euros , à 873 millions d'euros (+16 %). Cependant, cette hausse tient essentiellement à la budgétisation de 118 millions d'euros pour la redevance pour l'archéologie préventive (RAP) ; pour le reste, les crédits ne paraissent pas à la hauteur des réformes importantes que le projet de loi « création, architecture et patrimoine » se propose d'engager.

A. DES LIGNES BUDGÉTAIRES PRÉSERVÉES PLUTÔT QU'AUGMENTÉES SIGNIFICATIVEMENT

1. Patrimoine monumental (action 1)

Les crédits de l'action 1 « Patrimoine monumental » progressent de 11,32 millions d'euros en autorisations d'engagement, à 352,72 millions d'euros (+3,32%) mais perdent 1,5 million d'euros en crédits de paiement, à 327,35 millions d'euros (-0,47%). Ces chiffres, cependant, ne tiennent pas compte du « rabot » de 5 millions d'euros sur le programme 175 qui, d'après la réponse faite par Mme la ministre le 17 novembre 2015 à votre rapporteur pour avis, pourrait toucher principalement l'action 1.

Ce niveau budgétaire correspond à celui atteint en 2012, mais il est encore loin du seuil de 400 millions que votre rapporteur avait estimé nécessaire dans son rapport de 2014 pour entretenir le parc monumental de la France.

Début 2015, la France compte 43 609 immeubles (14 135 classés et 29 474 inscrits) et quelque 290 000 objets mobiliers (environ 140 000 objets classés et 150 000 objets inscrits) protégés au titre des monuments historiques.

Comme le précise le projet annuel de performances pour 2016, les crédits d'entretien et de restauration des monuments historiques gagnent 10 millions d'euros (+3 %) en AE, à 338 millions d'euros, et ils sont stables en CP, 313 millions d'euros . En fait, l'augmentation est imputable à l'opération de rénovation du Grand Palais (+8 millions d'euros) : pour le reste, les crédits sont stables, répartis entre (en AE) 48 millions d'euros pour l'entretien (14%) et 247 millions d'euros pour la restauration (86%).

Les « grands chantiers » suivants sont en cours ou ont été lancés cette année (31 millions d'AE) :

- La restauration et l'aménagement du Grand Palais , à Paris : présenté au Président de la République en mars 2014 par l'équipe lauréate (cabinet d'architecture LAN), le projet a passé l'étape de la contre-expertise du commissariat général à l'investissement 1 ( * ) , et celle de la Commission ministérielle des projets immobiliers. Reste que le financement des quelque 130 millions de travaux doivent encore faire l'objet d'un arbitrage interministériel et que, sur la période 2015-2017, seuls les crédits relatifs aux travaux d'urgence et aux études ont été budgétés.

- La restauration du château de Fontainebleau, d'un montant global de 114 millions d'euros sur douze ans et lancée l'an passé, est entrée en phase opérationnelle, avec des travaux qui devraient s'échelonner jusqu'en 2026 ; 12 millions d'euros en AE et 11 millions d'euros en CP sont inscrits en 2016.

- La construction d'un centre de conservation et d'études en Lorraine (CCEL), commencée l'an passé et qui doit s'achever l'an prochain, doit compléter, avec la Maison de l'archéologie et du patrimoine de Metz Métropole (inaugurée en 2012) le Pôle régional interdisciplinaire archéologique de Moselle (PRIAM), pour un coût total de 7 millions d'euros, engagés intégralement en 2014 (2 millions d'euros sont prévus en 2016).

- La restauration de l'ancien hôpital Jean Martial à Cayenne (classé monument historique en 2012) pour y créer la « Maison des cultures et des mémoires de la Guyane Jean-Martial » d'ici 2022, représente un coût total de 60 millions d'euros, dont le programme 175 prendrait le tiers à sa charge. Entre 2015 et 2016, 4,4 millions d'euros en AE et 3,4 millions d'euros en CP y sont consacrés.

- La reconstitution de la grotte de Lascaux et la création d'un centre international d'art pariétal à Montignac (Dordogne), dont l'ouverture est prévue fin 2016, fait intervenir les crédits « Patrimoines » à hauteur de 4 millions d'euros sur la période 2014-2016, dont 1 million d'euros en CP pour 2016.

- La modernisation du musée de Cluny , à Paris (« Cluny IV »), a commencé avec la restauration de la chapelle et va se poursuivre, l'an prochain, par celle des thermes gallo-romains, et par d'autres opérations jusqu'en 2020 : 1,2 million d'euros en CP sont programmés en 2015 et en 1,1 million d'euros en 2016.

- Le projet d' une plateforme d'archivage numérique « VITAM » pour les archives de l'État - dans un premier temps les ministères des affaires étrangères, de la défense et de la culture - est en phase de lancement. Pour 2016, le PLF prévoit 2,6 millions d'euros en CP, sur un total de 12,5 millions entre 2014 et 2019.

2. Architecture (action 2)

Les crédits de l'action 2 « Architecture » progressent de 987 000 euros en AE comme en CP, à 28,8 millions d'euros (+3,5%).

Les principaux postes de dépenses, comme l'an passé, sont :

- la subvention pour charges de service public à la Cité de l'architecture et du patrimoine : 16,46 millions d'euros, soit 57 % des crédits ;

- le cofinancement des études pour la constitution des AVAP (3,65 millions d'euros, 12,6 %) ;

- le soutien aux réseaux de promotion de la qualité architecturale, comme les CAUE et les 184 « Villes et Pays d'art et d'histoire » (3,5 millions d'euros, 12,1 %).

La « Stratégie nationale pour l'architecture »

Élaborée à partir d'une réflexion conduite par des architectes et des urbanistes entre février et juillet 2015, la stratégie nationale pour l'architecture identifie cinq objectifs appelés à « structurer » l'intervention de l'État en matière d'architecture :


• développer la sensibilisation et la formation à l'architecture du grand public et de l'ensemble des acteurs publics et privés de la construction et du cadre de vie ;


• renforcer la reconnaissance du patrimoine architectural des XX e et XXI e siècles et développer la capacité d'intervention architecturale sur la transformation du cadre bâti existant ;


• soutenir la démarche expérimentale de projets architecturaux et urbains ;


• encourager les passerelles entre les différents univers professionnels du cadre de vie et les liens avec les acteurs de la formation et de la recherche ;


• favoriser les évolutions en matière de structuration de la profession d'architecte afin, notamment, de pouvoir répondre aux enjeux sociétaux et aux mutations de la commande.

Source : Réponse au questionnaire budgétaire, octobre 2015

3. Patrimoine des musées de France (action 3)

Les crédits de l'action 3 « Patrimoine des musées de France » progressent de 13,15 millions d'euros en autorisations d'engagement, à 344,44 millions d'euros (+3,97%) mais ils reculent de 323 000 euros en crédits de paiement, à 339,38 millions d'euros.

À noter que 263,4 millions d'euros, soit les trois quarts de ces crédits, sont des subventions pour charges de service public, dont 220 millions vont à cinq établissements publics , par ordre d'importance : le Louvre (92 millions d'euros), le Centre Pompidou (68,5 millions d'euros), le Musée du Quai de Branly (22,7 millions d'euros) et le Grand Palais (20,5 millions d'euros).

Ces crédits financent également les actions menées en faveur des collections, au travers des plans de récolement - qui se prolongent jusqu'en décembre 2015 -, des plans d'informatisation des collections, de la mise aux normes de certains équipements et de plans de conservation préventive.

Ils abondent aussi la politique de promotion d'un égal accès à la culture, au travers de la politique de gratuité de l'accès aux collections permanentes des musées pour les jeunes de 18 à 25 ans résidant dans l'Union européenne, mais aussi d'actions de diffusion culturelle et de médiation reposant sur le développement de services aux publics.

L'accent est également mis cette année, sur « la politique de rééquilibrage territorial », pour, selon le document d'orientation stratégique, « irriguer les régions de projets culturels et muséaux de qualité ». Cette politique passe en particulier par :

- la création de réserve pour le musée du Louvre à Lens ;

- la poursuite du plan national d'investissement dans les musées en région, lancé en 2011 ;

- le soutien scientifique et technique des DRAC à certaines expositions, via en particulier le label « exposition d'intérêt national » ;

- la recherche d'une articulation entre projets et actions des musées nationaux et territoriaux en matière d'expositions, de dépôts et de collaborations scientifiques.

Les crédits d'investissement (11,61 millions d'euros en autorisations de programme et 12,90 millions en crédits de paiement) servent la poursuite ou l'achèvement de certaines opérations : pour 2016, il s'agira en particulier du réaménagement de l'accueil au musée national du Moyen-Âge de Cluny (1,10 million d'euros en CP).

4. Patrimoine archivistique et célébrations nationales (Action 4)

L'action 4 gagne 20 millions d'euros en autorisation d'engagement, à 43,75 millions d'euros (+83%) et 3,58 millions d'euros en crédits de paiement, à 28,36 millions d'euros (+14,5%). Ce bond spectaculaire des autorisations d'engagement tient à ce que les crédits d'investissements passent de 6,51 à 25,70 millions d'euros, dont 17,45 millions d'euros pour les archives nationales ( aménagement du site de Pierrefitte-sur-Seine ) et 3,1 millions d'euros pour le projet interministériel de plateforme d'archivage numérique VITAM.

La politique relative au patrimoine archivistique est marquée par :

- le renforcement de la politique interministérielle de gestion des archives dans les administrations, marqué notamment par l'élaboration de cadres stratégiques communs et d'un guide méthodologique pour l'évaluation et la sélection des archives ;

- la mise en oeuvre de la plateforme d'archivage numérique VITAM (valeurs immatérielles transférées aux archives pour la mémoire), qui, lorsqu'elle sera déployée à la fin de l'année 2016, constituera le point d'accès unique pour le public aux millions de pages accessibles ;

Le site des archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine

Construit entre 2009 et 2012 par l'architecte Massimiliano Fuksas et ouvert au public le 21 janvier 2013, le site des archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine se déploie sur 4,4 ha et développe 3 800 m² de bureaux et salles de réunion, 46 348 m² de magasins de conservation d'archives et 4 356 m² ouverts au public.

En 2014, le site de Pierrefitte a accueilli 15 309 séances de travail et 3 552 scolaires.

La fréquentation de la salle de lecture présente un rythme saisonnier, lié aux périodes de travaux universitaires ou à la disponibilité des publics pour se déplacer de la province vers les Archives nationales. Depuis le 19 août 2013, les Archives nationales ont rendu gratuite la carte de lecteur, facilitant l'accès aux archives.

Le démarrage des ateliers du service éducatif sur le site de Pierrefitte en 2013 a conduit à diversifier l'offre sur place en 2014, à destination de tous les niveaux, de la maternelle au lycée ; l'activité s'est fortement développée et représente 30 % environ de l'activité globale du service (Paris-Pierrefitte). Le service éducatif a, en outre, accueilli 224 enseignants dans le cadre de leur formation professionnelle.

Pour le premier trimestre de 2015, on enregistre déjà 5 000 séances de travail en salle de lecture et 1 100 élèves accueillis.

La provenance des lecteurs ayant travaillé à Pierrefitte-sur-Seine est la suivante : 84 % de Français, 16 % d'étrangers.

L'action 4 comprend également les crédits alloués à la mission des commémorations nationales, placé au sein du Service interministériel des archives de France à la direction générale des patrimoines. Cette mission a, pour 2016, sélectionné 112 anniversaires (contre 116 en 2015) susceptibles d'être célébrés avec l'aide et sous le patronage du ministère de la culture et de la communication et touchant tous les domaines de l'histoire (institutions et vie politique, littérature et sciences humaines, arts, sciences et techniques, économie et société). Comme en 2014 et en 2015, une attention spéciale est accordée pour l'an prochain au centenaire de la Grande Guerre à l'occasion duquel se côtoient les personnalités et les événements de 1916 : Henri Dutilleux, la bataille de Verdun, Mounet-Sully, Pierre Messmer, Joseph Gallieni, Odilon Redon, Marcel Cerdan, Léo Ferré, Françoise Giroud, François Mitterrand ; figurent également les anniversaires de la fondation de l'abbaye du Mont-Saint-Michel (966), l'accession au trône d'Angleterre de Guillaume le Conquérant (1066), l'arrivée de Léonard de Vinci en France (1516), la mort de Diane de Poitiers et de Nostradamus (1566), la naissance d'Eustache Le Sueur (1616), la mort d'Anne d'Autriche et de François Mansart, la fondation de Lorient, du port de Sète et le début du creusement du Canal du Midi (1666), la mort de Charles de La Fosse (1716), la mort du roi Stanislas Leczinski et de Jean-Marc Nattier (1766), le naufrage de La Méduse et l'invention du stéthoscope par René Laennec (1816) ainsi que la découverte du site préhistorique de Solutré et la naissance de Vassili Kandinsky (1866).

5. Patrimoine linguistique (action 7)

Les crédits de l'action 7 sont stables, à 2,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ils abondent les actions menées par la délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF), rattachée au ministère de la culture et de la communication, et qui assure la coordination et l'animation de la politique linguistique de l'État au plan interministériel.

La délégation générale joue un rôle d'observation, de veille, d'impulsion et de proposition sur tous les dossiers impliquant l'emploi de la langue française dans notre société et sa place dans le monde, et s'appuie pour ce faire sur des correspondants ministériels. Elle est par ailleurs chargée de définir une politique de promotion de la pluralité linguistique dans notre pays.

6. Acquisition et enrichissement des collections publiques (Action 8)

Les crédits de l'action 8 gagnent 0,5 million d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, à 8,85 millions d'euros (+6 %), après une année de stabilité qui avait suivi une coupe particulièrement sévère (de moitié) en la loi de finances pour 2013.

Ces crédits s'insèrent dans une politique d'enrichissement des collections publiques qui se compose des outils suivants :

1. Les ressources propres des musées nationaux et les subventions annuelles pour acquisitions :

- Cinq musées (musées du Louvre, du Quai Branly, Rodin, d'Orsay et de l'Orangerie, Versailles) consacrent aux acquisitions un pourcentage des recettes de droits d'entrée des collections permanentes, fixé par décret statutaire (entre 16 et 20 %) ;

- Le musée de la Musique établit son budget destiné aux acquisitions à partir de la subvention globale de fonctionnement versée par le MCC à la Cité de la musique à laquelle il est rattaché ;

- Les ressources propres du musée Rodin et du château, musée et domaine national de Versailles sont susceptibles de comprendre les fonds disponibles sur les dons et legs affectés à ces musées, qui ne font pas l'objet, dans ces EP, d'une comptabilisation séparée ;

- Deux subventions pour charge de service public (titre 7) sont attribuées au musée Guimet (0,5 million d'euros depuis 2013, avant mise en réserve) et au musée national d'art moderne au centre Pompidou (1,29 million d'euros en 2013, 2014 et 2015, avant mise en réserve ; cette subvention a été portée à 1,64 million d'euros au PLF 2016) ;

- Deux dotations annuelles sur le Fonds du patrimoine sont réservées à l'enrichissement des collections du palais de la Porte-Dorée-CNHI (0,14 million d'euros en 2013, pas de dotation depuis 2014) et du musée du Quai Branly (0,28 million d'euros depuis 2013), ce dernier recevant une subvention complémentaire de la part du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche (MENESR) de l'ordre de 0,3 million d'euros depuis 2014 ;

- Une subvention (dépenses pour immobilisations corporelles de l'État) est versée à la RMN-GP pour le règlement des acquisitions réalisées pour le compte de l'État et affectées dans les musées services à compétence nationale (SCN) et dans les musées du château de Fontainebleau et la Cité de la céramique-Sèvres & Limoges, récemment devenus des EP. La dotation, après mise en réserve (6 % en 2013, 7 % en 2014, 8 % en 2015) est de 0,99 million d'euros en 2013, 0,98 million d'euros en 2014 et 0,97 million d'euros en 2015.

2. Les subventions du Fonds du patrimoine , issues de l'action 8 du programme 175 servent à acquérir des oeuvres présentant un intérêt majeur pour les collections patrimoniales publiques. La dotation du Fonds du patrimoine s'est élevée, après mise en réserve (6 % en 2013, 7 % en 2014, 8 % en 2015) à 3,10 millions d'euros en 2013, 3,09 millions d'euros en 2014 et 3,08 millions d'euros en 2015. Elle est stable en 2016.

3. Le dispositif fiscal dit de « mécénat d'entreprise » de l'article 238 bis 0A du code général des impôts (CGI) permet aux entreprises de bénéficier d'une réduction d'impôt si elles participent à l'acquisition par l'État ou par une personne publique d'un « trésor national » ou bien d'un bien culturel situé en France ou à l'étranger, dont l'acquisition présente un intérêt majeur pour le patrimoine national au point de vue de l'histoire, de l'art ou de l'archéologie (dit « oeuvre d'intérêt patrimonial majeur »). En 2013, ces dispositions ont permis de réunir 12,96 millions d'euros, dont 9,2 millions d'euros pour les musées nationaux, pour financer des oeuvres et objets d'art d'une valeur totale de 18,13 millions d'euros. En 2014, ces montants sont respectivement de 4,96 millions d'euros, 4,19 millions d'euros et 12,72 millions d'euros.

4. Les crédits déconcentrés : Fonds régionaux d'acquisition pour les musées (FRAM) et Fonds régionaux d'aide à la restauration (FRAR). L'État affecte des crédits inscrits à l'action 8 du programme 175 à l'enrichissement des collections des musées de France dépendant des collectivités territoriales, par l'intermédiaire des FRAM et des FRAR, qu'il alimente en principe à parité avec les conseils régionaux. Les crédits du FRAM sont attribués par le comité de gestion du FRAM, présidé par le préfet ou le directeur régional des affaires culturelles, aux acquisitions jugées prioritaires et qui ont préalablement été soumises pour avis consultatif à la commission régionale compétente en matière d'acquisitions. Ces crédits viennent compléter les crédits votés par les collectivités territoriales propriétaires des musées de France. Le montant des crédits affectés à la part État du FRAM (qui comprend également un pourcentage marginal destiné aux FRAR) était respectivement de 1,04 million d'euros en 2013, 1,03 million d'euros en 2014 et 1,02 en 2015 (après mise en réserve). Il est stable au PLF 2016.

5. La dation en paiement d'oeuvres d'art , instituée par la loi du 31 décembre 1968, permet l'acquittement d'impôts (essentiellement les droits de succession et l'impôt de solidarité sur la fortune - ISF) par la remise à l'État d'oeuvres d'art « de haute valeur artistique ou historique ». La valeur libératoire totale des offres de dations affectées en 2013 a été de 2,81 millions d'euros et de 20,36 millions d'euros en 2014.

6. D'autres sources de financement complètent ces dispositifs : mécénats divers propres aux établissements, contributions des sociétés d'amis des musées, dons, donations et legs en numéraire (ou en nature) des entreprises et des personnes privées, etc.

7. Patrimoine archéologique (action 9)

Les crédits de l'action 9 passent de 11,29 à 131 millions d'euros en autorisation d'engagement et de 19,7 à 137,8 millions d'euros en crédits de paiement du fait qu'ils intègrent désormais la redevance d'archéologie préventive (RAP), provisionnée de 118 millions d'euros.

Hors cette budgétisation de la RAP, les crédits de l'action 9 sont stables , le million d'euros supplémentaire en autorisation d'engagement étant promis au remboursement de l'avance consentie par l'Agence France Trésor à l'Inrap.

D'après les informations transmises à votre rapporteur pour avis, les efforts de l'État en matière d'archéologie porteront sur :


• La reconnaissance du rôle des collectivités locales dans le domaine préventif, par une meilleure distinction de leur rôle par rapport aux autres opérateurs d'archéologie, et dans le domaine de l'exploitation scientifique et de la valorisation. Cette reconnaissance constituera une véritable assise pour le développement de collaborations publiques ;


• La valorisation de la recherche et notamment des actions de médiation en direction du public à travers des subventions accordées à la publication ou à l'organisation d'expositions, des actions de communication (Journées nationales du patrimoine, Journées nationales de l'archéologie, séminaires et ateliers dédiés) et l'édition numérique, notamment sur le site du ministère de la Culture et de la Communication ;


• La mise en place d'une maîtrise d'ouvrage scientifique des opérations en matière d'archéologie préventive ;


• Une meilleure harmonisation des pratiques de prescription et de contrôle scientifique et technique en archéologie au sein des SRA, en donnant tout son sens à la logique de la réforme territoriale. En créant de grandes régions, celle-ci offre l'opportunité de travailler à une meilleure cohérence des approches archéologiques ;


• Le rehaussement des exigences, tant pour la formulation des prescriptions que pour le contrôle scientifique et technique, visera à conforter la qualité de la chaîne opératoire de l'archéologie préventive. Il s'agit d'assurer un haut niveau de conservation par l'étude, malgré les tensions économiques qui pèsent sur le marché. Dans ce domaine, le déploiement du nouvel outil de gestion de la procédure d'archéologie (ARP) et la reprise du développement du système d'information portant la carte archéologique nationale (Patriarche) constituent une priorité pour 2016 ;


• La consolidation de la politique de conservation et de valorisation des vestiges : il s'agit là à la fois de tirer les conclusions des études menées en 2014 et 2015 sur les besoins de stockage et de conservation, de consolider une véritable exploitation scientifique de ces matériaux et de coordonner et d'amplifier la lutte contre le pillage des sites archéologiques.

Votre rapporteur pour avis avait signalé, depuis plusieurs années, les dysfonctionnements liés au recouvrement de la RAP depuis la loi de finances rectificative du 28 décembre 2011, qui adossait une partie de la RAP à la taxe d'aménagement, une réforme qui n'avait pas suffi, loin s'en faut, à combler le trop faible rendement de cette redevance - autour de 70 millions d'euros, loin des besoins évalués alors à 125 millions par l'inspection générale des finances et même de l'objectif d'un rendement de 122 millions d'euros.

Pour assurer une continuité du service et éviter tout défaut de paiement du salaire aux 2 100 agents de l'Inrap , le ministère a dû mobiliser 49 millions d'euros entre 2013 et 2014 pour abonder la trésorerie de l'Institut. En 2013, 25 millions avaient été apportés par le programme 175, au détriment de ses autres objectifs, et le ministère avait dû y ponctionner encore 10 millions d'euros, faute d'une ouverture de crédit pourtant annoncée pour le collectif budgétaire. En 2014, le ministère de la culture et de la communication avait dû consentir des avances de trésorerie à l'Inrap pour lui éviter la cessation de paiement (fin 2014, quelque 10 millions d'euros de factures étaient en attente, un montant qui avait doublé dans l'année).

Cette année encore, selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, le besoin de l'Inrap pour couvrir le manque de rendement de la RAP ont été évalués à 30 millions d'euros : 4 millions d'euros ont été alloués au mois de mars et 15 millions en août par gage sur les subventions pour charges de service public au Centre national d'art et de culture Georges Pompidou, du MuCEM et la dotation en fonds propres du CMN. Dans le même temps, la dette du Fonds national pour l'archéologie préventive (Fnap) est évaluée à 40 millions d'euros et le ministère prévoit de provisionner 25 millions d'euros sur la réserve de précaution du programme pour faire face aux contentieux en cours.

Dans ces conditions, la « rebudgétisation » de la RAP est un gage de stabilité et de prévisibilité , autant que d'augmentation des moyens de l'archéologie préventive puisque les crédits sont portés au plafond de 118 millions d'euros . La réforme, cependant, ne doit pas servir à rétablir un monopole pour l'opérateur historique, dont on a vu par le passé quels ont été les inconvénients : votre rapporteur pour avis y sera particulièrement attentif dans les réformes à venir.


* 1 Prévue par le décret n° 2013-1211 du 23 décembre 2013 pour les investissements publics d'un montant supérieur à 100 millions d'euros.

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