B. UNE PRÉSENTATION OPPORTUNE DES COMPTES CONJUGUÉE À UNE DYNAMIQUE CONJONCTURELLE AMÉLIORE LES COMPTES SOCIAUX EN 2016

1. Un retour à l'équilibre des administrations de sécurité sociale moins marqué que prévu

En 2016, les comptes des administrations de sécurité sociale devraient retrouver l'équilibre , comme le retrace le tableau ci-dessous. Aux économies de 7,4 milliards d'euros initialement programmées s'est ajouté un montant complémentaire d'un milliard d'euros annoncé dans le programme de stabilité adressé aux institutions européennes en avril dernier, résultant notamment sur l'effet de base positif entraîné par des résultats d'exécution en 2015 in fine meilleurs qu'anticipés. De surcroît, un rebond inattendu de la croissance de la masse salariale privée au début du second semestre a augmenté les ressources assises sur les salaires.

Évolution du solde, des recettes et des dépenses des ASSO

(en milliards d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

Solde

-12,7

-9,1

-7,8

- 6,2

+ 0,4

Recettes

536,4

552,0

566,3

573,7

583,8

Dépenses

549,1

561,2

574,1

579,9

583,4

Source : rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2017

Toutefois, ce résultat est inférieur aux prévisions initiales du Gouvernement, qui tablait à l'automne 2015 sur un solde positif à hauteur de 1,3 milliard d'euros , grâce à un effort d'économies de 7,4 milliards d'euros sur un total de 16 milliards d'euros pour l'ensemble des administrations publiques.

Ce retour à l'équilibre plus faible que projeté traduit notamment le respect difficile de l'ONDAM , pour lequel les tensions sont plus fortes que les exercices précédents, conduisant le Haut Conseil des finances publiques à alerter sur « d'éventuels dépassements sur ces dépenses [qui] pourraient conduire à dégrader le déficit public des années ultérieures » 8 ( * ) .

2. Une amélioration des comptes des régimes de sécurité sociale à nuancer en raison de biais favorables

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 prévoyait initialement un renforcement du rythme de réduction du déficit des régimes de base de la sécurité sociale et du FSV à hauteur de 3,1 milliards d'euros par rapport à 2015. Pour ce faire, l'effort devait désormais se concentrer sur la dépense et non plus prioritairement sur des mesures supplémentaires en recettes comme lors des exercices précédents. En particulier, un objectif de 3,4 milliards d'euros d'économies par rapport à l'évolution tendancielle était déterminé pour les dépenses entrant dans le champ de l'ONDAM, fixé à 1,75 % contre 2 % en 2015.

Cette trajectoire reposait toutefois sur la prévision d'exécution pour 2015 corrigée par la loi de financement de 2016 . Or cette prévision s'est révélée assez éloignée de l'exécution enregistrée , en particulier concernant les dépenses de la branche maladie, pour laquelle l'écart s'est élevé à 1,7 milliard d'euros. Cet écart réduit d'autant l'effort de consolidation nécessaire pour atteindre le solde projeté pour l'exercice 2016 par la loi de financement de 2016. La prévision d'exécution présentée dans le présent projet de loi de financement bénéficie de facto d'un effet de base positif lié au surcroît de recettes enregistré en 2015 .

Comparaison des prévisions et de l'exécution 2016 des régimes

de sécurité sociale

(en milliards d'euros)

2015

2016

Écart 2016 (PLFSS 2017) avec

Prévision PLFSS 2016

Exécution

Prévision LFSS 2016

Prévision PLFSS 2017

Exécution 2015

Prévision

LFSS 2016

Maladie

-7,5

- 5,8

- 6,2

- 4,1

1,7

2,1

AT-MP

0,6

0,7

0,5

0,7

0

0,2

Famille

-1,6

- 1,5

- 0,8

- 1

0,5

- 0,2

Vieillesse

-0,6

- 0,3

0,5

1,1

1,4

0,6

Régime général

-9,0

- 6,8

- 6

- 3,4

3,4

2,6

FSV

-3,8

- 3,9

- 3,7

- 3,8

0,1

- 0,1

Total régime général et FSV

-12,8

- 10,8

- 9,7

- 7,1

3,7

2,6

Total ensemble des régimes obligatoires de base et FSV

-12,4

- 10,2

- 9,3

- 6,9

3,3

2,4

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des annexes B à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 et au projet de loi de financement pour 2017)

Les prévisions de la loi de financement pour 2016 reposaient sur une hypothèse de progression globale des recettes de 1,1 %, contre 2 % retenus par la commission des comptes de la sécurité sociale en septembre 2015. La conjugaison d'une prudence dans la prévision des recettes et d'une estimation des économies attendues par rapport à un tendanciel dont la Cour des comptes note la portée relative, conduit à reporter l'effort projeté en amont sur les dépenses . C'est à l'aune de ces prévisions erratiques qu'il convient de lire l'amélioration du solde prévisionnel des régimes de base pour 2016.

De surcroît, l'évolution de la masse salariale a été nettement plus dynamique en 2016 qu'en 2015, progressant de 2,6 % contre 1,7 %, permettant des recettes supérieures au niveau anticipé initialement. Cet apport conjoncturel justifie en partie la correction à la baisse de la prévision de solde des régimes obligatoires de base et du FSV à - 6,9 milliards d'euros pour 2016 par le présent projet de loi de financement. L'écart entre les prévisions d'exécution présentées en loi de financement pour 2016 et les prévisions actualisées dans le présent projet de loi de financement atteste de cette consolidation conjoncturelle dans la mesure où il se concentre sur les recettes , in fine supérieures de 1,6 milliard d'euros. À l'exception de la branche vieillesse, les dépenses ont été exécutées au niveau prévu à l'automne 2015 .

Écart entre les prévisions actualisées du présent projet de loi et les prévisions initiales de la loi de financement pour 2016 pour l'ensemble des régimes

(en milliards d'euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

+ 2,1

0

+ 2

AT-MP

+ 0,1

0

+ 0,1

Famille

- 0,1

+ 0,1

- 0,2

Vieillesse

- 0,4

- 0,7

+ 0,3

Régimes obligatoires

+ 1,6

- 0,7

+ 2,5

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des annexes B à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 et au projet de loi de financement pour 2017)

Parallèlement, alors même que la réduction du déficit des comptes sociaux devait porter prioritairement sur les dépenses, l'exécution provisoire conduit à nuancer ce propos. Si les dépenses portées par les branches famille et vieillesse bénéficient de l'absence d'inflation pour la deuxième année consécutive, les dépenses de la branche maladie demeurent marquées par l'absence de maîtrise des dépenses de soins de ville , compensée par l'annulation de crédits en gestion infra-annuelle. À ce titre, le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie souligne dans son troisième avis 9 ( * ) que « la prévision de respect de l'ONDAM repose sur l'annulation de crédits mis en réserve en début d'année (558 millions d'euros) et de crédits disponibles d'ici la fin de l'année 2016 pour couvrir les dépassements attendus de 245 millions d'euros sur les soins de ville et de 500 millions d'euros (hors crédits mis en réserve) pour l'ONDAM hospitalier (...). Le comité d'alerte estime que cette prévision reste sujette à des aléas significatifs compte tenu du fort dynamisme des dépenses. Ainsi, la prévision d'exécution de l'ONDAM soins de ville suppose un net ralentissement de la croissance des dépenses au second semestre 2016, après un premier semestre particulièrement dynamique ».

Encore, comme le relève la Cour des comptes 10 ( * ) , ce résultat intègre-t-il un produit exceptionnel de CSG d'un montant de 0,7 milliard d'euros , non prévu lors de l'élaboration de la loi de financement pour 2016, au bénéfice de la branche maladie. Ainsi corrigé, le solde de la branche ne s'améliorerait que d'un milliard d'euros entre 2015 et 2016 . De même, comme votre rapporteur pour avis l'avait souligné à l'automne 2015, les recettes se trouvent majorées d'un apport de 0,65 milliard d'euros au titre d'une mesure d'accélération du versement des congés payés, n'ayant qu'un effet ponctuel.

Votre rapporteur pour avis déplore qu'en dépit d'une amélioration comptable du solde du régime général, ce mouvement participe d'une prévision opportunément orientée conjuguée à des éléments conjoncturels, avec en particulier un dynamisme en partie inattendu des recettes et la poursuite de la modération des dépenses des branches famille et vieillesse. La branche maladie et le FSV demeurent caractérisés par un très fort déséquilibre, non compensé par des réformes de structure d'envergure.


* 8 Avis du Comité d'alerte n° 2016-3 du 12 octobre 2016 sur le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, rendu en application de l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale.

* 9 Avis du Comité d'alerte n° 2016-3 du 12 octobre 2016 sur le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, rendu en application de l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale.

* 10 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2016.

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