EXPOSÉ GÉNÉRAL

PREMIÈRE PARTIE - LA POLITIQUE NATIONALE DU HANDICAP, VERS UN ÉTAT-GUICHET

I. LA RÉDUCTION DES MISSIONS DE L'ÉTAT DANS LE DOMAINE DU HANDICAP

Le programme 157 « Handicap et dépendance » fait l'objet dans le projet de loi de finances pour 2017 d'une redéfinition importante de son architecture. Cette dernière révèle une tendance à la concentration des missions de l'État en matière de handicap sur la seule distribution des revenus d'allocation .

Le programme 157 en 2016 et en 2017

Action (en 2016)

Crédits de paiement

Action (en 2017)

Crédits de paiement

Évaluation et orientation personnalisée des personnes handicapées

68 000 000

Fonctionnement des MDPH

1 500 000

Incitation à l'activité professionnelle

2 755 000 000

Allocations et aides en faveur des personnes handicapées

10 600 000 000

Ressources d'existence

8 850 000 000

Pilotage du programme et animation de politiques inclusives

28 000 000

Compensation des conséquences du handicap

17 300 000

Personnes âgées

3 000 000

Pilotage du programme

3 750 000

Source : PAP 2017

A. LE SOUTIEN AUX TRAVAILLEURS HANDICAPÉS

1. La débudgétisation partielle des établissements et services d'aide par le travail
a) L'intégration dans l'Ondam médico-social de la dotation globale de fonctionnement

L'article 74 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 1 ( * ) a transféré le finandement du fonctionnement des établissements et services d'aide par le travail (Esat) du budget de l'État vers celui de l'assurance maladie.

En 2016, l'action « incitation à l'activité professionnelle » rassemblait environ 2,755 milliards d'euros de crédits, distingués en trois volets :

- la dotation globale de fonctionnement des Esat, pour environ 1,480 milliard d'euros ,

- le plan d'aide à l'investissement des Esat, pour 1,5 million d'euros ,

- l'aide au poste au titre de la garantie de rémunération des travailleurs handicapés (GRTH), pour environ 1,275 milliard d'euros .

Seuls les deux premiers volets ont fait l'objet d'une intégration au périmètre de l'Ondam médico-social pour sa partie finançant les établissements accueillant des personnes handicapées, à hauteur de 1,477 milliard d'euros 2 ( * ) . Votre rapporteur souhaiterait à cet égard noter que cette mesure de transfert s'est faite pour des montants strictement identiques sur les crédits alloués en 2016 et 2017 : la débudgétisation des crédits de fonctionnement des Esat a ainsi permis que leur stagnation passe relativement inaperçue.

Le transfert des Esat au budget de l'assurance maladie est une mesure unanimement approuvée par les acteurs du secteur. Elle permet d'unifier au sein d'une même enveloppe l'intégralité des mesures structurelles qui touchent le champ du handicap et ainsi d'adapter les financements aux besoins exprimés. Votre rapporteur déplore néanmoins que cette intégration des Esat à l'Ondam médico-social se traduise par une certaine perte de lisibilité , le budget de l'assurance maladie ne faisant pas l'objet d'une identification par action aussi précise que le budget de l'État.

L'éligibilité des Esat au plan d'aide à l'investissement (PAI) suscite néanmoins une inquiétude plus importante . Alors que cette aide à l'investissement leur était jusqu'en 2016 garantie par une ligne budgétaire inscrite au projet de loi de finances, leur transfert vers l'assurance maladie les fait désormais relever du PAI financé par la section VII du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Or, notre collègue René-Paul Savary, rapporteur pour le secteur médico-social de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, a bien montré que les sources d'alimentation du PAI de la CNSA pourraient s'épuiser dès la fin 2018.

Les conclusions de la Conférence nationale du handicap du 19 mai 2016 annoncent bel et bien un « abondement exceptionnel de 60 millions d'euros » du PAI sur la période 2017-2021, sans pour autant que soit identifiée la part dédiée aux Esat et sans mentionner que cet abondement exceptionnel est intégralement financé par les fonds propres de la CNSA, qui sont promis à une disparition à très court terme. Le transfert des Esat au budget de l'assurance maladie s'est donc fait au profit d'une clarification des acteurs et des financeurs, mais aussi au prix d'une moindre sécurité des investissements .

b) Le financement de l'aide au poste maintenu au budget de l'État

Le financement de l'aide au poste continue de relever de la compétence financière de l'État. Cette aide a vocation à permettre la compensation par l'État des charges supportées en partie par les Esat au titre de la rémunération garantie, des cotisations sociales afférentes, du financement partiel de la formation professionnelle continue et de la prévoyance pour les travailleurs handicapés admis dans ces établissements et services.

2015

2016

2017

Montant des crédits alloués à l'aide au poste

(en millions d'euros)

1 277,3

1 275,95

1 288,5

Source : PAP 2015, 2016 et 2017

L'aide au poste versée par l'État dépend de deux facteurs : la rémunération garantie versée par l'Esat au travailleur handicapé et le niveau du Smic fixé par voie réglementaire . En effet, lorsque la rémunération versée par l'Esat est comprise entre 5 % et 20 % du Smic, le complément de l'aide au poste atteint 50 % du Smic ; le pourcentage de l'aide au poste diminue ensuite de 0,5 point pour chaque élévation d'un point de la rémunération versée par l'Esat, afin de conserver un caractère incitatif à la participation financière de l'établissement.

On constate que le montant de l'aide au poste connaît une évolution notable en 2017, qui s'explique notamment par la revalorisation du niveau du Smic de 0,1 %.

2. L'emploi accompagné : première expérimentation

La troisième action budgétaire du programme 157 remanié pour 2017 concerne « l'animation des politiques inclusives » et comporte notamment une dotation de 5 millions d'euros pour le dispositif d'accompagnement dans l'emploi des personnes handicapées.

Ce dispositif, instauré par l'article 52 de la loi du 8 août 2016 3 ( * ) , vise à sécuriser la relation entre le travailleur handicapé et son employeur, en créant pour les deux parties les conditions d'un dialogue et d'un suivi rapproché. Suite à la préconisation de la CDAPH, une convention tripartite peut être conclue entre la personne morale gestionnaire du dispositif d'emploi accompagné, l'Esat et un organisme de service public de l'emploi (Pôle emploi, Cap emploi ou mission locale). Cette convention permettra notamment l'intervention directe d'intervenants médico-sociaux au sein de l'entreprise pour s'assurer du suivi du salarié et de sa bonne intégration.

La dotation de 5 millions d'euros est destinée à financer la première expérimentation du dispositif d'emploi accompagné sur le territoire.


* 1 Loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale pour 2016.

* 2 Rapport de M. René-Paul Savary, Financement de la sécurité sociale pour 2017, tome 3 - Secteur médico-social, n° 114.

* 3 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

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