C. L'APPLICATION NORMATIVE ET BUDGÉTAIRE DE LA LOI « ÉGALITÉ RÉELLE » : L'URGENCE DE LA MISE EN oeUVRE DU « SMALL BUSINESS ACT ».

La loi dite « EROM » n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dans son article premier « reconnaît aux populations des outre-mer le droit à l'égalité réelle au sein du peuple français » ainsi que « le droit d'adopter un modèle propre de développement » . Votre rapporteur pour avis attire l'attention sur l'impact encore limité des 148 articles de ce texte.

En effet, sur le plan budgétaire , les plans de convergence qui doivent être élaborés ne se traduisent pas, dans le présent projet de loi de finances, par une croissance des crédits de la mission en programmation pluriannuelle. Il en va de même pour le développement de la formation professionnelle avec une réduction des crédits gérés par l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) pour 2018.

Du point de vue juridique , l'échéancier de mise en application de la loi indique que seuls trois décrets d'application ont été publiés sur les 30 prévus par la loi. Votre rapporteur pour avis se préoccupe particulièrement de la nécessité de publier le texte réglementaire requis par le dispositif qui favorise la participation des petites et moyennes entreprises locales à de grosses opérations. Il s'agit du volet de la « stratégie du bon achat » (Small Business Act) prévu par l'article 73 de la loi : introduit à l'initiative du Sénat, il impose, pour les marchés de plus de 500 000 euros, la présentation d'un plan de sous-traitance précis sur la contribution des entreprises locales . Cette innovation en droit français peut trouver toute son utilité pour la reconstruction des îles frappées par les cyclones comme en témoigne la cinquième des 19 propositions formulées dans le récent rapport du Délégué interministériel à la reconstruction des îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin 6 ( * ) qui appelle à « Favoriser les entreprises locales durant la phase de reconstruction ».

D. COMPENSER L'ÉVENTUELLE DISPARITION DU CICE POUR MAINTENIR LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES ULTRAMARINES

Il convient de rappeler que, l'article 42 du projet de loi de finances pour 2018 vise à supprimer le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) au 1 er janvier 2019. Entre temps, le taux du CICE est ramené à 6 % pour les rémunérations versées en 2018, afin de contenir la dépense fiscale. En compensation, l'article 8 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018 instaure une réduction forfaitaire de la cotisation patronale maladie de 6 points assortie d'un élargissement du champ des charges de l'allégement général qui interviendront à la clôture du CICE.

Pour l'année 2018, les outre-mer ne sont pas concernés par la baisse du taux de CICE de 7 % à 6 % et conserveront le taux de 9 % en 2018 7 ( * ) . En effet, l'article 42 du PLF prévoit de laisser intacte la dérogation prévue en faveur des départements d'outre-mer au paragraphe III (2°) de l'article 244 quater C du code général des impôts.

En revanche, pour 2019 , la suppression du CICE est envisagée de façon globale, y compris pour les DOM.

S'agissant du débat général sur la suppression du CICE à l'horizon 2019, votre rapporteur pour avis estime qu'à l'origine, on a eu raison de critiquer sa complexité mais à présent que les intervenants ont consenti les efforts d'adaptation nécessaires, on soumet les entreprises, d'une part, à l'instabilité de la législation puisqu'on leur annonce à la fois que le crédit d'impôt va disparaître et, d'autre part, à un manque à gagner en compétitivité.

S'ajoute, pour les outre-mer, une difficulté supplémentaire puisque le taux du CICE y est majoré, ce qui impose de trouver des compensations adéquates. La tâche est si compliquée - pour articuler les différentes formes de diminution du coût du travail - que le Gouvernement préfère soumettre la question au débat dans les Assises de l'Outre-mer.

Pour donner un aperçu des difficultés induites par le principe de la « bascule » du CICE en allègements de charge, il convient de rappeler que l'intensité de l'aide apportée aux entreprises ultramarines au titre des exonérations de cotisations a été modulée, au cours des années précédentes, en fonction de leur éligibilité ou non au CICE. De ce fait, le dispositif d'exonérations spécifique aux outre-mer est passé de trois catégories d'entreprises à six catégories.

Les différents niveaux d'exonérations et d'allègements de charges en vigueur dans les outre-mer.

Source : réponses au questionnaire budgétaire.

Pour l'avenir du dispositif d'allègements et d'exonérations de charges patronales de sécurité sociale spécifique aux outre-mer, votre rapporteur pour avis estime qu'il faudra prendre en considération deux principales idées. D'une part, le rapport Gallois a clairement démontré que pour favoriser les secteurs « haut de gamme » il faudrait appliquer les allègements jusqu'à 3,5 smic . D'autre part, et pour limiter le coût explosif d'une telle mesure, la solution est connue : c'est le ciblage des allègements ou des soutiens sur certains secteurs essentiels pour le développement des territoires et sur certains projets.


* 6 Repenser les Iles du Nord pour une reconstruction durable. Rapport de M. Philippe GUSTIN, préfet, délégué interministériel à la reconstruction des îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin

9 novembre 2017.

* 7 Ce taux majoré est applicable depuis le 1 er janvier 2016

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