D. UNE BAISSE DES CRÉDITS DE LA FORÊT PROPOSÉE AU PIRE MOMENT

Le budget pour 2020 propose une baisse des crédits de la forêt au pire moment.

Tout d'abord, les dotations allouées à la forêt par l'action n° 26 « Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois » représentent 8 % des 3 milliards de crédits du budget de l'agriculture. Non seulement le niveau des crédits alloués à la forêt est faible, pour la forêt qui occupe plus de 30 % de la superficie de l'hexagone, mais le projet de loi de finances propose pour 2020 de les diminuer de 2,5 % - avec 247,5 M€ en crédits de paiements contre 253,7 en 2019 - alors que la forêt doit faire face à un niveau de risque et à une multiplication de catastrophes rarement atteints par le passé.

En effet, les épisodes de sécheresse ont affaibli les défenses naturelles des peuplements forestiers qui cèdent, par pans entiers, aux attaques des insectes ravageurs, et en particulier des scolytes qui se présentent sous la forme de petits scarabées.

Les forestiers doivent donc déployer plus de moyens pour endiguer les attaques sanitaires et prélever le bois mort. Du côté de leurs recettes, l'augmentation des volumes de bois mis sur le marché fait mécaniquement plonger les cours et le bois scolyté prend une teinte bleue qui risque également de faire baisser leur valeur.

Ensuite, l'essentiel des dotations est alloué à la forêt publique . Les crédits alloués à l'Office national des forêts (ONF), établissement public industriel et commercial (EPIC) chargé de la gestion des forêts publiques, sont maintenus avec :

- un versement compensateur de 140,4 M€ ;

- une dotation pour ses missions d'intérêt général (MIG) de 26 M€ ;

- et une contribution exceptionnelle de 12,4 M€.

Pour sa part, le Centre national de la propriété forestière (CNPF), établissement public administratif (EPA) qui se charge de dynamiser la gestion des forêts privées - celle-ci représente 75 % de la superficie forestière de l'hexagone - recueillerait 14 M€ (contre 15 l'an dernier) soit moins de 5 millièmes du budget de l'Agriculture.

Une telle diminution de crédits d'un million d'euros serait très mal venue car, si elle était confirmée, elle obligerait le CNPF à réduire ses effectifs sur le terrain, au moment où la forêt privée en a le plus besoin pour gérer les crises sanitaires, savoir quelles essences replanter et continuer à lutter contre le morcellement de la forêt privée. Le CNPF fait aujourd'hui travailler 465 salariés pour un équivalent plein temps contractuel de 451,6 emplois.

Par ailleurs, ce budget propose de maintenir les autres dotations à un niveau insuffisant mais stable avec, en particulier, 29,5 M€ consacrés au financement des sept axes prioritaires du programme national de la forêt et du bois (PNFB 2016-2020) et 18,5 M€ affectés au fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB), pour l'amélioration de la desserte forestière, le renforcement des peuplements à faible valeur économique, la signature de prêts participatifs de développement entre Bpifrance et les scieries ou entreprises de travaux forestiers et le nouveau fonds de prêts sans garantie en faveur de l'aval forestier, déployé dans le cadre du GPI.

Pour éviter une catastrophe forestière, adapter nos forêts et leur permettre d'alimenter en matière première une filière d'activité économique rurale et décarbonée, les rapporteurs pour avis estiment nécessaire de définir une politique forestière de choc.

Tel n'est pas encore le cas puisqu'afin d'endiguer la contamination des bois scolytés et replanter des essences plus résistantes aux nouvelles conditions climatiques, le Gouvernement a annoncé le 8 octobre dernier des mesures de soutien d'un montant de 16 M€ sur trois ans alors que nos voisins allemands ont décidé de mobiliser sur quatre ans environ 800 M€ répartis à peu près à parts égales entre l'État fédéral et les Länder.

Il convient donc de « changer de braquet » et de définir une méthode adaptée aux enjeux en territorialisant mieux l'action de l'ONF et en décloisonnant, autant que faire se peut, la gestion des forêts privées et publiques dans une logique de massifs ; en effet, les attaques d'insectes ravageurs ne connaissent pas de frontière entre parcelles publiques et privées.

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