B. UNE NOUVELLE RÉFORME DE L'ADMINISTRATION TERRITORIALE QUI VISE LA RATIONALISATION DES MOYENS

1. La création des secrétariats généraux communs : une nouvelle tentative de rationalisation des services déconcentrés

La création des secrétariats généraux communs, première étape de la réforme de l'organisation territoriale de l'État décidée par le Gouvernement en 2019, s'inscrit donc dans la continuité des nombreuses mesures qui ont fragilisé et rendu illisible l'action de l'État dans les territoires.

L'objectif de cette restructuration est de permettre de générer de nouvelles économies par la mutualisation des fonctions support des préfectures et des directions départementales, et de briser la logique du fonctionnement en « silos » pour créer des synergies entre services et accroître l'efficacité de l'action publique.

Toutefois, des interrogations subsistent sur le calendrier de mise en oeuvre de la réforme (initialement prévue en juin 2020 et repoussée au 1 er janvier 2021), les gains attendus et les conséquences d'une telle restructuration sur les agents concernés . Le ministère de l'intérieur a d'ores et déjà indiqué qu'il ne serait pas en mesure d'assurer le versement des payes des agents au 1 er janvier 2021, celui-ci continuant à être géré, à court terme, par les ministères d'origine.

La mise en place d'une véritable administration commune nécessite par ailleurs de mener une réflexion sur l'harmonisation des régimes indemnitaires et de l'action sociale entre les agents afin de faire émerger une culture de travail commune . Il semble donc qu'il soit trop tôt pour estimer les chances de succès d'une telle réforme.

2. Un budget qui ne permet pas de renforcer l'administration territoriale de l'État dans un contexte de sollicitations croissantes des services
a) Les objectifs du plan préfectures nouvelle génération n'ont pas été atteints pour les missions prioritaires

Le plan préfectures nouvelle génération a permis, grâce à la dématérialisation de la délivrance des titres sécurisés et à la fermeture des services accueillant du public, de générer des économies d'emplois de l'ordre de 1 300 ETP entre 2016 et 2018 . Les moyens ainsi dégagés devaient être en partie redéployés au sein des quatre missions prioritaires que sont le contrôle de légalité, la fraude, la sécurité et la coordination des politiques publiques.

Or, le plan préfectures nouvelle génération est désormais achevé et un effort de 231 ETP reste à fournir pour atteindre les objectifs fixés pour les missions prioritaires. Cela s'explique à la fois par la sévérité des schémas d'emplois successifs et l'avènement de la crise migratoire en 2016, qui a nécessité le déploiement de 327 ETP pour renforcer les services étrangers des préfectures.

Cette inflexion de la trajectoire des effectifs génère des conséquences importantes en termes de qualité du service public. Ainsi, faute d'effectifs suffisants, la prévision des taux de contrôle des actes prioritaires reçus en préfecture a été revue à la baisse jusqu'en 2023 (90 % contre 90,4 % en 2018).

b) Une administration sous-dimensionnée pour faire face à la crise sanitaire

Malgré la stabilisation des effectifs prévue pour 2021, l'administration territoriale de l'État ne se trouve donc pas en état de faire face à une recrudescence des sollicitations et à une désorganisation de ses services dans le contexte de l'épidémie de covid-19 .

Les préfectures ont su faire preuve de réactivité en mettant en place, dès le 13 mars 2020, des schémas d'accueil des usagers en nombre restreint afin de concilier la continuité du service public et le respect des précautions sanitaires. En parallèle, deux instructions du ministre de l'intérieur des 16 et 20 mars ont restreint le champ des missions essentielles pour permettre à un maximum d'agents de travailler à domicile ou, en cas d'impossibilité, d'être placés en autorisation spéciale d'absence. 24 % des effectifs ont été maintenus au sein des préfectures et des sous-préfectures . La mise en oeuvre du plan de continuité de l'activité (PCA) ministériel a entraîné un surcoût de 7,5 millions d'euros pour financer les équipements informatiques et de 26,1 millions d'euros pour doter les 79 000 agents concernés de protections sanitaires , en partie compensé par les économies sur certains postes de dépenses (frais de mission, entretien des véhicules, etc.) pendant le confinement.

En dépit du recours massif au télétravail, certains missions ont été impactées par la crise, notamment le contrôle des actes prioritaires et des actes budgétaires. 74 % des actes prioritaires ont fait l'objet d'un contrôle de légalité au premier semestre 2020, soit 17 % de moins qu'au premier semestre 2019. Même si les contraintes de transmission des actes ont été allégées et que de nombreuses collectivités territoriales ont eu recours à la télétransmission, les difficultés des agents de l'État à se connecter au système d'information @CTES depuis leur domicile ont ralenti l'exercice du contrôle de légalité.

En ce qui concerne la délivrance des titres, la prolongation de la durée de validité des documents de séjour par l'ordonnance n° 2020-328 du 25 mars 2020 a permis de limiter l'impact de la fermeture des services durant le confinement sur les délais de traitement des demandes. Bien qu'allégée, l'activité a été maintenue durant le confinement en matière de délivrance des titres sécurisés (carte nationale d'identité, passeport, certificat d'immatriculation des véhicules, permis de conduire) puis renforcée pour soutenir la reprise d'activité et maîtriser l'augmentation du stock de demandes.

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