EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 18 NOVEMBRE 2020

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur pour avis . - Le budget de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », est composé de trois programmes cette année. Le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental », dont le budget s'élève dans le projet de loi de finances pour 2021 à 710 millions d'euros, est en hausse de 2,8 % et ses effectifs en diminution de 132 équivalents temps plein travaillé (ETPT). La moitié de ces crédits est affectée à la coordination de la sécurité et de la défense. Le programme 308 « Protection des droits et des libertés », en hausse de 2,3 %, atteindra 103 millions d'euros et verra ses effectifs croître de 26 ETPT. Ce programme comprend notamment les budgets du CSA à hauteur de 37 millions d'euros, du Défenseur des droits, 22 millions, de la CNIL, 20 millions et de la HATVP, 7 millions. Les autres budgets sont inférieurs. Figure cette année dans la mission un nouveau programme 359 « Présidence française du Conseil de l'Union européenne », avec 126 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 47 millions d'euros de crédits de paiement. Il financera le soutien logistique à la présidence française du Conseil de l'Union européenne durant le 1 er semestre 2022.

Globalement, l'exécution de cette mission a été impactée cette année par la crise sanitaire. Des frais de déplacement ou de formation qui n'ont pu se concrétiser ont permis l'équipement en informatique nomade.

La diminution des emplois du programme 129 n'est qu'un trompe-l'oeil. C'est la conséquence du rattachement au programme 212 « Soutien de la politique de la défense » de 230 ETPT qui restent cependant mis à disposition du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.

Le budget annexe « Publications officielles et information administrative » connaît cette année, en raison de la crise économique, une diminution de ses recettes issues de la publication d'annonces légales et de la vente de publications et abonnements. Il devrait cependant atteindre l'équilibre. La DILA a déployé en septembre 2020 la nouvelle version de Légifrance qui a soulevé beaucoup de critiques. En se voulant plus accessible au grand public, Légifrance ne doit pas rendre plus complexes les recherches effectuées par les professionnels du droit. Parmi les autres projets en cours de la DILA, on peut noter la mise en place d'un système interministériel de gestion des amendements législatifs, SIGNALE, ou la refonte complète de la démarche en ligne d'inscription sur les listes électorales, DILE.

Dans la mission « Direction de l'action du Gouvernement », des efforts significatifs sont faits en matière de sécurité, ce qui est impératif avec la multiplication cette année des visioconférences et du travail à distance qui ne sont pas sans risque sur le plan de la sécurité informatique. L'agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) sera dotée de 50 emplois supplémentaires ainsi que des moyens pour mener à bien l'ouverture d'une antenne à Rennes, et participer au cyber-campus qui devrait voir le jour à l'automne 2021 en région parisienne. Sur ces 50 ETPT, 10 seront reversés par l'Agence à l'OSIIC, opérateur des systèmes d'information interministériels classifiés, chargé notamment de sécuriser les communications du Président de la République et du Gouvernement.

Concernant le programme 308, je déplore que la nomination de Dominique Simonnot, en qualité de Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, soit intervenue au terme d'une vacance de près de trois mois après la fin du mandat d'Adeline Hazan. C'est regrettable en cette période d'état d'urgence sanitaire. Je note aussi que Dominique Simonnot et Claire Hédon, nouvelle Défenseure des droits, sont des militantes dont l'engagement est incontestable mais qui sont peu rompues aux relations avec l'administration, en particulier lors des arbitrages budgétaires.

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a obtenu par mesure de gestion en 2020 ce que la commission des lois avait demandé par amendement au projet de loi de finances pour 2020, amendement auquel le Gouvernement s'est opposé et qui n'a pas été adopté. La HATVP a obtenu une partie des effectifs et moyens de la commission de déontologie de la fonction publique dont elle a repris partiellement les missions au 1 er février 2020.

Vous vous souvenez que nous avons voté en mars 2020 la prorogation, jusqu'au 25 janvier 2021, du mandat des membres d'HADOPI expirant le 30 juin 2020, dont celui du président. Il s'agissait de pérenniser le collège de la Haute autorité jusqu'à sa fusion avec le CSA qui devait figurer dans le projet de loi audiovisuelle annoncé pour 2020. Or, nous ne voyons pas ce texte arriver et la question va de nouveau se poser en janvier prochain. Par ailleurs, je réitère les réserves que j'ai déjà eu l'occasion d'émettre s'agissant du pouvoir de sanction du CSA. L'annulation par le Conseil d'État en juin 2018 de la privation de recettes publicitaires prononcée par le CSA à l'encontre de la chaîne C8 a conduit l'État à prendre en charge le préjudice qu'il en est résulté pour la chaîne, soit 1,1 million d'euros. Ce type de sanction qui, contrairement à l'amende, implique une prise en charge par l'État en cas d'annulation, ne me semble pas compatible avec le statut d'autorité publique indépendante du CSA.

Je veux saluer l'engagement de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) confrontée à des difficultés dans l'exécution de sa mission dans la mesure où, pour des raisons de sécurité, le travail à distance n'a pas été possible. Néanmoins, la commission a toujours rendu au Premier ministre, dans les délais requis, son avis sur une demande d'autorisation d'une technique de renseignement.

Je veux rappeler un principe pour lequel je me bats depuis plusieurs années qui est la fin des mises à disposition au bénéfice des autorités administratives, afin de préserver leur indépendance. Seule désormais la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) en dispose, ce qui semble lui convenir afin de recruter des profils particuliers.

La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) disposera de 20 postes supplémentaires en 2021, ce qui me paraît justifié dans un contexte d'accélération de la numérisation de la société. Les plaintes adressées le plus souvent par des particuliers pour signaler le non-respect du règlement général sur la protection des données (RGPD) sont en hausse de 30 % chaque année. La CNIL doit avoir les moyens de faire face à cette gestion quotidienne des plaintes mais aussi de réfléchir à des sujets de fond comme la biométrie, les données de santé ou l'intelligence artificielle.

Je suis favorable à l'adoption des crédits de cette mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative », sous quelques réserves. Certains choix budgétaires me paraissent critiquables. Les dépenses du Service d'information du Gouvernement ont dépassé en 2020 les prévisions en raison de la crise sanitaire et le Gouvernement a créé un haut-commissariat au plan, doté de 12 ETPT. Dans le même temps, sous prétexte de rationalisation, il a rattaché la MIVILUDES au comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR). Je m'interroge aussi sur la place du Haut conseil pour le climat alors que figure, dans le projet de réforme du Conseil économique, social et environnemental, en cours d'examen au Parlement, un principe de subrogation au profit du CESE. Il existe également un problème de sincérité budgétaire car figurent dans la nouvelle mission « Plan de relance » des crédits destinés à la sécurité numérique qui auraient dû figurer dans la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».

M. Alain Richard . - Les autorités administratives indépendantes sont des autorités de l'État, il est donc normal que leurs décisions, prises au nom de l'État, soient soumises au juge administratif.

Mme Laurence Harribey . - Nous sommes, au groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, favorables à l'adoption de ces crédits. Il est vrai que le périmètre de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » est mouvant, ce qui est compréhensible car l'action du Gouvernement doit s'adapter. Nous sommes favorables au renforcement des effectifs de l'ANSSI sachant que son directeur, Guillaume Poupard, a estimé il y a quelques années ses besoins en personnels à 750 ETPT. La difficulté reste de trouver ces compétences. La participation à un futur cyber-campus est une bonne réponse. La création d'une antenne à Rennes nous semble intéressante.

Nous constatons aussi une dispersion des crédits qui peut nuire à la lisibilité. Est créé un programme 359 « Présidence française du Conseil de l'Union européenne » et dans le même temps, le secrétariat général aux affaires européennes bénéficie, temporairement, de 10 ETPT supplémentaires afin de constituer l'équipe éditoriale du site internet dédié à la présidence française de l'UE.

J'insisterai moi aussi sur les prétendues rationalisations qui sont opérées. On supprime de petits organismes mais on en crée d'autres. Avec le transfert de la MIVILUDES au CIPDR, on confond les enjeux.

La CNIL sera dotée de postes supplémentaires justifiés par la démultiplication des saisines passées de 5 800 en 2014 à 14 000 en 2019.

M. François-Noël Buffet , président . - L'audition de la CNIL par la commission des lois serait fort utile pour évoquer ces problématiques.

Il est exact que les recrutements à l'ANSSI sont difficiles en raison des rémunérations proposées. La concurrence est très forte avec le secteur privé qui propose de meilleurs salaires.

Mme Laurence Harribey . - Il faut être en mesure de garder les compétences à l'ANSSI.

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur pour avis . - Parmi ses homologues européens, la CNIL a le plus faible ratio d'effectifs par rapport à la population. Elle doit être étoffée pour influer sur l'interprétation du RGPD au plan européen.

Je ne remets pas en cause le contrôle administratif des décisions des autorités administratives indépendantes. Je souligne que certaines sanctions sont à utiliser avec précaution car, en cas d'annulation, l'État doit se substituer financièrement à l'autorité, ce qui me semble porter atteinte à son indépendance.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes 129 « Coordination du travail gouvernemental », 308 « Protection des droits et des libertés » et 359 « Présidence française du Conseil de l'Union européenne » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et budget annexe « Publications officielles et information administrative ».

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