B. L'ANNONCE DU DOUBLEMENT DE LA RÉSERVE OPÉRATIONNELLE D'EMPLOI DOIT ÊTRE ACCOMPAGNÉE D'UNE RÉFORME GLOBALE DE LA RÉSERVE POUR OPTIMISER SA CONTRIBUTION OPÉRATIONNELLE

1. Le manque d'épaisseur de la réserve d'emploi et la rigidité des critères d'engagement limitent actuellement sa portée opérationnelle au sein des armées et formations rattachées

Dans son format actuel, la réserve opérationnelle de premier niveau (RO1) ne permet pas de renforcer l'épaisseur des forces armées . En effet, si l'armée de terre comporte certaines unités opérationnelles composées de réservistes, les réservistes opérationnels sont principalement mobilisés en tant que complément individuels au sein de leur organisme de rattachement.

Cette doctrine d'emploi, sur laquelle les armées se sont appuyées pour faire face aux réductions successives d'effectifs intervenues notamment dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), consolide le rôle essentiel joué par la réserve pour permettre aux armées de réaliser leur contrat opérationnel. Toutefois, elle ne permet pas à la réserve de constituer un véritable levier supplémentaire à même de renforcer la liberté d'action de nos états-majors.

Les rapporteurs suivront à ce titre avec une attention particulière les projets de création d'unités opérationnelles de réservistes dans l'ensemble des forces armées, ainsi que dans certaines formations rattachées à l'image du service de l'énergie opérationnelle (SEO) qui envisage, dans le cadre du doublement de la réserve opérationnelle, la création d'une unité de soutien pétrolier de réserve sur la base interarmées de Chalon-sur-Saône .

Parallèlement, la portée de la contribution des réservistes opérationnels est aujourd'hui limitée par la rigidité des conditions de service . En premier lieu, les rapporteurs relèvent que les candidats à la réserve opérationnelle de premier niveau doivent passer une série de tests sportifs exigeants. Si ces tests d'aptitude physique se justifient pleinement au regard de certaines fonctions exercées par les militaires de la réserve opérationnelle, ils peuvent en revanche constituer un frein regrettable à l'intégration dans la réserve d'emploi de certains profils hautement qualifiés dont la qualité du service ne dépend pas directement de leur aptitude physique, à l'image de certaines fonctions assurées par les réservistes opérationnels dans le domaine cyber.

L'obligation pour les employeurs d'accorder un minimum de huit jours d'autorisation d'absence par an à leurs employés réservistes opérationnels a une portée limitée

En second lieu, il est à relever que les employeurs des secteurs public et privé ont un rôle déterminant à jouer dans la montée en puissance de la réserve opérationnelle. Les rapporteurs soulignent à ce titre que l'obligation minimale de 8 jours d'autorisation d'absence que l'employeur doit accorder à ses employés réservistes opérationnels est limitée 9 ( * ) . Le niveau élevé de technicité des fonctions exercées par les réservistes opérationnels et l'ampleur de la formation et des entraînements qu'elles induisent nécessitent que les réservistes opérationnels disposent d'un temps suffisant pendant lequel leur employeur les décharge de leurs obligations professionnelles civiles.

Les rapporteurs seront attentifs à ce que la réflexion menée dans le cadre du doublement de la réserve opérationnelle associe les entreprises et administrations qui emploient les réservistes pour assurer aux réservistes opérationnels un temps annuel de service suffisant, le cas échéant en faisant évoluer le cadre juridique actuellement en vigueur.

2. La perspective de doublement de la réserve opérationnelle de premier niveau doit être accompagnée des efforts nécessaires sur le plan budgétaire et en matière de recrutement

À l'occasion de son discours aux armées le 13 juillet 2022 , le Président de la République a annoncé un objectif de doublement du volume des réserves opérationnelles des armées 10 ( * ) . Cette trajectoire, qui fera l'objet d'une attention particulière des rapporteurs dans le cadre des travaux sur la prochaine programmation militaire annoncée pour 2023, impliquerait la fixation d'une nouvelle cible de 80 000 réservistes opérationnels dans les armées et formations rattachées à échéance 2030.

Selon les estimations transmises aux rapporteurs par le délégué interarmées aux réserves (DIAR), cette nouvelle trajectoire impliquerait une augmentation substantielle du volume de recrutement des réservistes opérationnels qui passerait de 4 700 recrutements annuels à plus de 9 000 .

La dynamisation du recrutement des réservistes opérationnels des armées ne pourra être atteinte qu'en adaptant notre modèle de réserve et en tenant compte des attentes des candidats à la réserve opérationnelle.

En premier lieu, les rapporteurs seront attentifs au fait que les instruments de communication relatifs à la réserve opérationnelle soient améliorés. Alors que le recrutement des réservistes fait actuellement l'objet d'une communication dédiée réduite, la nouvelle trajectoire de recrutement impliquera de développer rapidement des instruments de recrutement adaptés.

En second lieu, les rapporteurs seront attentifs à ce que la réserve opérationnelle des armées s'adapte à des parcours individualisés , tenant compte des profils différentiés des candidats à la réserve et des besoins opérationnels des armées.

Enfin, les rapporteurs suivront avec attention le déploiement du projet de « Volontaires du territoire national » annoncé par le chef d'état-major de l'armée de terre en juillet 2022 et qui devrait participer à moyen terme à la constitution d'un vivier de recrutement de futurs réservistes opérationnels pour l'armée de terre.


* 9 v. art. L. 3142-89 du code du travail, cette durée peut être ramenée à cinq jours pour les entreprises de moins de 250 salariés

* 10 Discours du Président de la République aux armées du 13 juillet 2022

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