N° 727

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 juin 2023

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi relatif à l'industrie verte (procédure accélérée),

Par Mme Christine LAVARDE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Sénat :

607 et 725 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

· Première lecture

66 milliards d'euros. C'est, selon le rapport de France Stratégie remis à la Première ministre1(*), le montant minimum des investissements supplémentaires qui seraient nécessaires chaque année pour que la France atteigne l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050.

77,8 millions de tonnes d'équivalent CO2. C'est le volume des émissions de gaz à effet de serre de l'industrie manufacturière et de construction en France en 2021, soit 18,6 % des émissions totales, derrière le transport routier et l'agriculture, mais devant le bâtiment. Pour décarboner les quatre secteurs de l'industrie lourde à l'origine de la moitié des émissions (ciment, acier, plastiques et ammoniac), ce serait jusqu'à 14 milliards d'euros par an qu'il faudrait mobiliser, selon les hypothèses de l'Institut de l'économie pour le climat2(*).

Déposé au Sénat le 16 mai 2023, le projet de loi n° 607 (2022-2023) relatif à l'industrie verte s'inscrit dans ce contexte. La commission des finances a reçu de la commission des affaires économiques une délégation au fond pour examiner les articles du titre III du projet de loi, « Financer l'industrie verte » (articles 15 à 19). Réunie le mardi 13 juin 2023, elle a examiné, sous la présidence de Claude Raynal, le rapport de Christine Lavarde, rapporteur pour avis.

Avec l'objectif de donner leur pleine portée opérationnelle aux dispositifs du titre III, la commission des finances a proposé à la commission des affaires économiques d'adopter onze amendements, dont neuf amendements du rapporteur :

· un amendement ( COM-369) à l'article 15 visant à ce que tout nouveau label reconnu par l'État et destiné à certifier des fonds concourant au financement de la transition écologique ou à l'investissement socialement responsable soit d'abord soumis à l'avis de l'Autorité des marchés financiers, avant que les fonds ainsi labellisés ne soient proposés dans les unités de compte des contrats d'assurance vie ;

· un amendement ( COM-371) à l'article 16 réécrivant entièrement cet article, qui instaure un nouveau produit d'épargne réservé aux mineurs, le plan d'épargne avenir climat. Le dispositif présenté au Sénat ne permettait pas de connaître précisément les modalités de fonctionnement de ce plan, qui s'inspirera concrètement du plan épargne retraite (PER), avec la mise en place d'une gestion pilotée par horizon. L'amendement supprime également l'abondement de l'État pour toute ouverture d'un plan et prévoit que les produits des versements sont exonérés d'impôt sur le revenu ;

· un amendement ( COM-372) à l'article 17 visant à encadrer davantage le mandat d'arbitrage, à assurer une plus grande transparence sur les frais des produits d'épargne et à consolider le devoir de conseil - en y intégrant notamment les préférences en matière de durabilité de l'épargnant - en contrepartie du renforcement de la place du non coté dans les contrats d'assurance vie en unités de compte et dans les PER, des actifs par nature plus risqués. Deux amendements du rapporteur ( COM-373) et de Mme Paoli-Gagin ( COM-93) visent par ailleurs à garantir une allocation minimale d'une part des contrats d'assurance vie et des PER vers le non coté, pour les profils adaptés ;

· un amendement de Mme Paoli-Gagin ( COM-97) créant un article 17 bis et visant à garantir qu'une part minimale des actifs des sociétés de capital-risque contribue au financement de l'économie productive et de la transition écologique ;

· un amendement ( COM-376) à l'article 18 visant à sécuriser l'éligibilité des fonds de capital-investissement et des fonds européens d'investissement à long terme (ELTIF) au plan d'épargne en actions (PEA) et au PEA-PME ;

· un amendement ( COM-377) à l'article 19 abaissant de douze mois à six mois le délai d'habilitation du Gouvernement pour prendre par ordonnance les mesures visant à adapter le droit français au règlement européen sur les ELTIF et à moderniser la gamme des fonds français ;

· trois amendements de précision rédactionnelle ( COM-370, COM-374 et COM-375).

I. DES MESURES DONT L'EFFICACITÉ POUR FINANCER L'INDUSTRIE VERTE ET LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE RESTERA À DÉMONTRER

A. COMMENT FINANCER LA TRANSITION ET LA DÉCARBONATION DE NOTRE INDUSTRIE ?

Présenté par le Gouvernement au terme d'une importante séquence de communication et à grand renfort de superlatifs, le présent projet de loi entend concilier l'impérieuse réindustrialisation de la France et le non moins indispensable verdissement de son économie.

Pour respecter l'accord de Paris, la France devra
baisser de

 

En 2021, les investissements climatiques ont représenté

 

Les émissions du secteur industriel ont diminué de

 
 
 
 
 

ses émissions de gaz à effet de serre sur la période 2022-2030

 

en France, toutes origines confondues, soit une hausse de 27 % par rapport à 2020

 

d'équivalents CO2 entre 2010 et 2019, soit un rythme annuel moyen de 2 % 

Pour parvenir à décarboner l'industrie, le Gouvernement propose un financement assis sur deux piliers, public et privé. Si le premier sera consolidé lors du projet de loi de finances pour 2024, le second devait constituer une part essentielle du projet de loi relatif à l'industrie verte. Force est de constater que les mesures proposées apparaissent moins ambitieuses que les objectifs affichés par le Gouvernement.

B. LE TITRE III N'APPORTE PAS TOUTES LES GARANTIES ANNONCÉES EN MATIÈRE DE FINANCEMENT DE L'INDUSTRIE VERTE

L'objectif des dispositions du titre III de ce projet est de mobiliser une partie conséquente de l'épargne privée des ménages pour la réorienter vers le financement de la transition écologique, de la décarbonation des industries et du soutien au tissu industriel. L'enjeu n'est pas de trouver de nouveaux capitaux mais de réorienter les financements disponibles, y compris vers des produits d'épargne financière, potentiellement moins liquides que les livrets d'épargne règlementée.

La mobilisation de 5 milliards d'euros d'épargne privée par an, un effet d'annonce ou un objectif atteignable ? À quel horizon ?

Le Gouvernement estime que les mesures du titre III du projet de loi relatif à l'industrie verte permettront de mobiliser 5 milliards d'euros d'épargne privée supplémentaires par an. Ce volume apparaît particulièrement ambitieux au regard des dispositions présentées et de leurs effets attendus : si l'obligation générale de référencement des labels d'État concourant au financement de la transition écologique et à l'investissement responsable ainsi que la création d'un plan d'épargne avenir climat dédié aux mineurs présentent un lien direct avec la réorientation de l'épargne vers la transition et l'industrie verte, tel n'est pas le cas des articles 17 à 19. Ces trois dispositions visent à renforcer la place du non coté et des fonds européens d'investissement de long terme dans les produits financiers : l'effet apparaît au mieux indirect, l'accroissement des sources de financement pour les petites et moyennes entreprises (PME), les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les fonds d'infrastructures étant supposé être au moins partiellement mobilisé pour financer la transition.

Le Gouvernement estime que le projet de loi devrait permettre de réduire de

 

Les mesures relatives au financement de l'industrie verte ne contribueraient qu'à

 
 
 

de CO2 l'empreinte carbone française à horizon 2030

 

de la réduction de l'empreinte carbone, soit 0,3 million de tonnes de CO2 par an

Le rapporteur souligne enfin qu'une partie des dispositions présentées au Sénat se révèlent incomplètes et insuffisamment préparées en amont. Dès lors, et d'autant plus que les effets de ces mesures risquent d'être limités, il était impératif d'au moins leur donner leur pleine portée opérationnelle. Les amendements adoptés par la commission répondent à cette préoccupation.

II. LA LABELLISATION DES ACTIFS ET LA CRÉATION DU PLAN D'ÉPARGNE CLIMAT POUR LES MINEURS, DES EFFETS LIMITÉS À COURT TERME

Les articles 15 et 16 sont les seules dispositions du titre III présentant un lien direct avec le financement de l'industrie verte et, plus généralement, de la transition écologique. D'importantes clarifications ont toutefois été apportées par la commission.

A. FACILITER L'ACCESSIBILITÉ DES UNITÉS DE COMPTE CONSTITUÉES DE FONDS LABELLISÉS DANS LES CONTRATS D'ASSURANCE VIE

L'article 15 prolonge l'article 72 de la loi « Pacte », qui avait introduit l'obligation, pour les contrats d'assurance vie multi-supports, d'accueillir au sein de leur gamme d'unités de compte des fonds participant au financement de l'économie solidaire, des fonds labellisés pour le financement de la transition écologique et énergétique, et des fonds labellisés en matière d'investissement socialement responsable (ISR). De la sorte, chaque souscripteur ou adhérent à un contrat se voit proposer d'investir dans ces fonds.

L'article 15 élargit cette obligation de référencement à tous les labels qui pourraient être reconnus par l'État en matière de financement de la transition écologique et énergétique ou d'investissement socialement responsable - alors que le champ est actuellement limité aux labels Greenfin et ISR. La liste des labels pourrait ainsi être plus étendue.

Or, de nombreuses critiques avaient été émises à l'encontre de ces labels, en particulier contre le label ISR, qui ne respectait pas entièrement la promesse d'investissement durable qu'il porte. De ce point de vue, la reconnaissance par l'État de nouveaux labels par un simple décret ne paraît pas offrir de garantie suffisante quant à la contribution au financement de la transition énergétique et écologique ou au caractère socialement responsable de l'investissement.

(en milliards d'euros)

L'amendement COM-369 prévoit ainsi que le décret soit soumis à l'avis de l'Autorité des marchés financiers.

B. LE PLAN D'ÉPARGNE AVENIR CLIMAT, L'EFFET D'ANNONCE D'UN PRODUIT PRÉSENTÉ PAR LE GOUVERNEMENT COMME « GRAND PUBLIC »

L'article 16 entend créer un plan d'épargne avenir climat (PEAC) à destination des mineurs. Cet article a régulièrement été présenté par le Gouvernement comme l'une des dispositions phares du projet de loi pour mobiliser l'épargne privée et financer l'industrie verte. Le Gouvernement évoquait ainsi publiquement le rôle qui serait confié à la Caisse des dépôts et consignations pour gérer ces encours et s'assurer qu'ils soient bien investis en faveur de la transition écologique mais aussi du tissu industriel.

Or, lors de ses travaux, le rapporteur a eu la confirmation que la version présentée par le Gouvernement au Sénat était obsolète, et à tout le moins incomplète. Aucune des caractéristiques fondamentales de ce nouveau produit d'épargne n'était prévue, pas même celles relatives à son support ou à sa gestion. À peine savait-on que ce produit bénéficierait d'un abondement public de l'État pour toute ouverture d'un PEAC l'année de naissance du titulaire, sans précision supplémentaire.

Le plan d'épargne avenir climat, la forme sans le fond ?

Par conséquent, et après des échanges avec le Gouvernement, la commission a adopté l'amendement COM-371, qui apporte les ajustements nécessaires à ce dispositif pour le rendre pleinement opérationnel. Concrètement, le PEAC s'inspirera du PER avec une gestion pilotée à horizon et une désensibilisation progressive du risque au fur et à mesure que le déblocage des fonds se rapprochera ; la Caisse des dépôts n'intervenant plus dans la gestion de ce produit. L'investissement dans des actifs plus risqués au début de la vie du produit devrait en parallèle offrir une perspective de rendement plus élevé pour les mineurs.

Le plafond du PEAC serait fixé à

Les sommes seront bloquées jusqu'aux

Les flux de collecte annuelle s'élèveraient à

 
 
 

soit le même plafond que le livret A

du titulaire, ou au moins pendant cinq ans à compter de la date d'ouverture du plan

d'euros, selon les hypothèses les plus optimistes du Gouvernement

Au regard des caractéristiques de ce produit, il ne s'agit pas d'un produit « grand public » mais d'un produit d'épargne financière qui sera surtout mobilisé par les ménages les plus avertis et disposant d'une épargne suffisamment importante pour s'orienter vers ce PEAC une fois les livrets règlementés ouverts pour leurs enfants. Dans ce contexte, l'abondement de l'État apparaît superfétatoire et son effet incitatif faible. La commission l'a donc supprimé. Le risque assorti à ce nouveau produit d'épargne sera contrebalancé par une fiscalité avantageuse à la liquidation, soit la défiscalisation des produits des versements effectués sur le PEAC, qui bénéficiera au titulaire.

Un produit pour les ménages les plus avertis ?

De fait, les hypothèses de collecte du Gouvernement apparaissent très ambitieuses. Surtout, il conviendra de préciser, d'ici à la séance publique, les actifs dans lesquels les versements effectués sur le plan pourront être investis, notamment pour ce qui concerne la transition et l'économie productive, deux notions à préciser.

III. LE FINANCEMENT DE L'INDUSTRIE VERTE ET DE LA TRANSITION, UN OBJECTIF DE SECOND RANG DES DISPOSITIONS VISANT À RENFORCER LES INVESTISSEMENTS DE LONG TERME ET DANS LE NON COTÉ

Les trois dernières mesures du titre III - les articles 17 à 19 - présentent une cohérence interne, ils ont tous pour but de renforcer la place du non coté et des ELTIF mis à disposition des épargnants, mais font apparaître une certaine dissonance avec les objectifs du projet de loi.

A. RENFORCER LA PLACE DU NON COTÉ ET DES FONDS EUROPÉENS D'INVESTISSEMENT DE LONG TERME DANS LES PRODUITS D'ÉPARGNE

L'article 17 vise à encourager l'orientation de l'épargne placée dans les contrats d'assurance vie et les plans d'épargne retraite (PER) vers les petites et moyennes entreprises, en particulier celles qui ne sont pas cotées en bourse.

Soutenir les capacités de financement des PME, condition nécessaire mais pas suffisante pour le verdissement et la transition de l'industrie

Il introduit ainsi une obligation, dans les contrats d'assurance vie, de proposer une stratégie d'investissement prenant en compte l'horizon de détention et qui soit adaptée au profil de risque de l'épargnant (gestion pilotée), les PER faisant déjà l'objet, par défaut, d'une gestion pilotée par horizon. Les allocations associées, tant pour les contrats d'assurance vie que pour les PER, pourraient comprendre une part minimale d'unités de compte investies dans des actifs non cotés ou des titres éligibles au PEA-PME - qui incluent des titres de sociétés dont la capitalisation boursière n'excède pas un milliard d'euros.

Cette part, définie par arrêté, varierait selon la nature des profils de risques et serait plus élevée pour les profils « dynamiques ». Les actifs non cotés sont en effet par nature risqués et peu liquides. Les amendements COM-373 et COM-93 visent simplement à garantir que, tant pour les contrats d'assurance vie que pour les PER, la part minimale soit composée d'actifs non cotés dans une proportion ne pouvant pas être inférieure à un seuil fixé par arrêté.

En contrepartie du renforcement de la place du non coté, par définition plus illiquide et risqué, la protection des épargnants doit être garantie et consolidée. Le Gouvernement avait ainsi intégré aux dispositions de l'article 17 le devoir de conseil en cours de contrat, en reprenant l'une des dispositions de la proposition de loi relative à la protection des épargnants de nos collègues Jean-François Husson et Albéric de Montgolfier, adoptée par le Sénat le 31 janvier dernier. L'amendement COM-372 poursuit ce travail, en reprenant les articles 2 et 4 de la proposition de loi : il définit le mandat d'arbitrage et prévoit, pour renforcer la transparence sur les frais, la création d'un observatoire des produits d'épargne dont la compétence est élargie au PEAC. Il consolide enfin le devoir de conseil, en prévoyant que doivent être prises en compte les préférences de l'épargnant en matière de durabilité.

B. FAVORISER LES FONDS EUROPÉENS D'INVESTISSEMENT À LONG TERME, UN EFFET PROBABLE MAIS INDIRECT SUR LA TRANSITION

Les articles 18 et 19 ont un objectif commun : développer le label ELTIF (fonds européens d'investissement à long terme) en France. Ces fonds sont constitués d'actifs de long terme et, surtout, bénéficient d'un passeport européen leur permettant d'être commercialisés aux investisseurs de détail (non professionnels) dans toute l'Union européenne. Trois dispositifs complémentaires sont prévus, visant à :

instaurer une clause dérogatoire de deux ans pour inciter les fonds communs de placement à risque et les organismes de placement collectif immobilier à se labelliser ELTIF, en bénéficiant de règles de gestion plus souples ;

renforcer la place du non coté et des ELTIF dans le PEA et dans le PEA-PME. La commission a proposé, par l'amendement COM-376, de sécuriser l'éligibilité de ces titres et, reprenant une disposition de la proposition de loi relative à la protection des épargnants, de laisser aux fonds de capital-investissement un temps supplémentaire pour atteindre leurs obligations en matière de quota d'investissements ;

3. habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant de la loi pour adapter le droit français à la révision du règlement européen sur les ELTIF du 15 mars 2023 et moderniser la gamme des fonds français. La commission a adopté l'amendement  COM-377 afin de ramener le délai d'habilitation de douze à six mois, les travaux ayant déjà commencé et ce sujet représentant un enjeu de concurrence pour la place de Paris.

Les ELTIF, des véhicules dédiés à l'investissement de long terme, mais pas spécifiquement à la transition ou à la décarbonation

Comme pour l'article 17, le lien des articles 18 et 19 avec l'industrie verte apparaît indirect : le développement des ELTIF devrait permettre d'alléger les contraintes de financement des PME et des entreprises de taille intermédiaire, dans l'hypothèse qu'elles mobilisent ensuite ces financements pour décarboner leurs activités, ce qui suppose des investissements massifs. Il en va de même pour le financement des infrastructures, dont certaines sont liées à la transition et à la production d'énergies renouvelables. Rien n'empêche toutefois que ces capitaux soient utilisés pour d'autres activités.

Il s'agit donc principalement d'un enjeu de concurrence : alors que plusieurs pays, et surtout le Luxembourg, profitent de la révision du règlement ELTIF pour attirer ces fonds et l'épargne européenne, la France doit pouvoir mettre en place un cadre à la fois attractif et protecteur, plusieurs observateurs estimant que les encours des ELTIF pourraient s'élever à 100 milliards d'euros d'ici 2030, contre 11,8 milliards d'euros à la fin de l'année 2022.


* 1 Jean Pisani-Ferry, Selma Mafouz, «  Les incidences économiques de l'action pour le climat », 22 mai 2023.

* 2 I4CE, «  Investissements pour décarboner l'industrie lourde en France : quoi, combien et quand ? », mai 2023.