EXAMEN EN COMMISSION

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MARDI 28 NOVEMBRE 2023

M. François-Noël Buffet, président. - Nous examinons ce matin le programme « Fonction publique » de la mission « Transformation et fonction publiques » du projet de loi de finances (PLF) pour 2024.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour avis. - Cet avis budgétaire porte prioritairement sur la fonction publique de l'État et précisément sur le programme 148, destiné à compléter les actions des ministères en matière de ressources humaines.

Mon propos sera structuré en trois parties : premièrement, les effectifs et la masse salariale de l'État ; deuxièmement, le programme 148 en tant que tel ; et, troisièmement, la qualité de vie au travail et la santé des agents publics.

Concernant les effectifs, au 31 décembre 2021, la fonction publique compte près de 5,72 millions d'agents, dont 44,1 % dans la fonction publique de l'État (FPE), 34,6 % dans la fonction publique territoriale (FPT) et 21,3 % dans la fonction publique hospitalière (FPH). Par rapport à la fin de l'année 2020, les effectifs ont augmenté de 0,03 %.

Cette légère augmentation s'explique par la hausse du nombre de contractuels, dont la part au sein de l'ensemble des agents publics est passée de 21 % en 2020 à 21,5 % en 2021.

La dynamique s'agissant des effectifs de l'État pour 2024 est comparable à celle qui est poursuivie en 2023, confirmant ainsi l'abandon par le pouvoir exécutif de l'objectif de suppression de postes précédemment affiché.

Pour 2024, est prévue la création de 8 301 emplois en équivalents temps plein (ETP), dont plus de 80 % pour l'État - 6 731 ETP -, notamment dans les ministères régaliens, avec 2 661 ETP pour l'intérieur et l'outre-mer, et 1 918 ETP pour la justice.

Concernant la durée légale de travail, vous le savez, la loi de 2019 de transformation de la fonction publique a abrogé les régimes légaux dérogatoires de travail antérieurs à la loi du 3 janvier 2001 et a imposé aux collectivités territoriales concernées de définir de nouvelles règles de travail. Toutefois, comme le souligne la Cour des comptes dans son bilan d'étape de novembre 2023 sur l'application de cette loi, les régularisations sont en cours.

La Cour note également qu'aucun bilan relatif aux régimes de travail des services de l'État n'a été dressé depuis 2019. De plus, le rapport, prévu par la loi, sur les actions mises en oeuvre au sein de la fonction publique de l'État pour assurer le respect des dispositions sur la durée de travail effectif n'a toujours pas été remis au Parlement, près de trois ans et demi après l'échéance fixée par la loi.

S'agissant de la masse salariale de l'État, dans le projet de loi de finances pour 2024, elle progresse de près de 6 % par rapport au PLF pour 2023, pour atteindre, hors pensions, 106,415 milliards d'euros.

Cette forte augmentation est liée, à titre principal, à la revalorisation du point d'indice de 1,5 %, entrée en vigueur le 1er juillet 2023, succédant à une revalorisation de 3,5 % intervenue au 1er juillet 2022. Son coût est estimé en année pleine à 1,5 milliard d'euros pour le versant étatique.

De plus, au 1er janvier 2024, 5 points d'indice supplémentaires seront attribués à tous les agents publics, pour un coût estimé à 2,15 milliards d'euros en 2024.

Par ailleurs, le solde du glissement vieillesse technicité (GVT) correspondra en 2024 à une augmentation de 505 millions d'euros, tandis que le coût des créations de postes s'élèvera à 447 millions d'euros.

À cela, s'ajoutent plusieurs mesures catégorielles annoncées lors de la conférence salariale de juin 2023, dont la prime de pouvoir d'achat exceptionnelle pour les agents de la FPE et la FPH dont la rémunération perçue entre le 1er juillet 2022 et le 30 juin 2023 est inférieure à 39 000 euros bruts. Le versement de cette prime n'est pas obligatoire dans la FPT, en vertu du principe de la libre administration territoriale.

Figurent également, parmi les mesures annoncées en juin 2023, la reconduction pour 2023 de la garantie individuelle du pouvoir d'achat (GIPA) ; la revalorisation des frais de mission ; le relèvement de 50 % à 75 % de la prise en charge des transports collectifs des agents de l'État ; et la revalorisation de 10 % du barème de monétisation des jours de compte épargne-temps (CET).

Le coût prévisionnel de l'ensemble des mesures catégorielles pour 2024 s'élève à 3,705 milliards d'euros pour le versant étatique, soit une augmentation de 119 % par rapport au PLF pour 2023.

Permettez-moi de faire un premier focus sur le chantier dit « APR », relatif à l'accès, aux parcours et aux rémunérations, qui a été ouvert par le ministre de la transformation et de la fonction publiques en février 2023.

Il s'est d'abord traduit par une première phase de concertation avec les employeurs publics représentant les trois versants ; »les premiers travaux devraient aboutir dans le courant de l'année 2024.

Ce chantier vise à fluidifier l'accès à la fonction publique, à dynamiser les parcours professionnels et à rendre plus agile le système de rémunération. Concernant ce dernier item, il me semble indispensable de refondre les grilles indiciaires, eu égard notamment au phénomène de « tassement des grilles » induit par les revalorisations successives du Smic et de l'indice minimum de traitement, dans un contexte d'inflation élevée. Cette refonte doit concerner les grilles des trois catégories afin que l'ensemble des rémunérations soit cohérent avec la progression de carrière des agents et les exigences propres à chaque catégorie.

Par ailleurs, concernant les accords du Ségur de la santé et du social, s'il est vrai que la situation salariale d'une grande partie des personnels non médicaux a été améliorée, il n'en demeure pas moins qu'environ 3 000 agents restent exclus du bénéfice du complément de traitement indiciaire (CTI), notamment les agents publics titulaires et contractuels des filières administrative, technique et ouvrière, ainsi que les agents des services hospitaliers qualifiés de la filière soignante des établissements publics sociaux et médico-sociaux autonomes. Le Conseil d'État devrait se prononcer demain sur la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée à ce sujet par la Fédération hospitalière de France (FHF).

J'évoquerai maintenant le programme 148.

Il finance les actions interministérielles en matière de formation des fonctionnaires, d'action sociale et de gestion des ressources humaines. Piloté par la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), il est mobilisé en complément des initiatives de chaque ministère. Aucun emploi n'y est inscrit.

Le montant des autorisations d'engagement (AE) prévues par le PLF pour 2024 est en diminution de près de 7 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2023, passant de 295,5 millions d'euros à 275,8 millions d'euros.

L'action « Formation des fonctionnaires » représente 32,2 % des crédits du programme en AE, contre 41,3 % en LFI de 2023, car les crédits afférents à l'Institut national du service public (INSP) ont été transférés sur le programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » pour 40,1 millions d'euros en AE.

En conséquence, l'action « Action sociale interministérielle » représente 57,5 % des crédits du programme en AE, contre 48,7 % en LFI de 2023.

À périmètre constant, en tenant compte de l'ensemble des transferts de crédits sortants et de crédits entrants, le montant du programme 148 connaît une augmentation de près de 6,8 % en AE.

L'action « Formation des fonctionnaires » concerne l'organisation des sessions de concours d'accès aux cinq instituts régionaux d'administration (IRA), des prépas Talents du service public et des bourses Talents, ainsi que des plans de formation interministérielle. Le montant des crédits alloués aux dépenses d'intervention connaît une augmentation de 41 %, passant de 22,8 millions à 38,7 millions d'euros en AE.

Les subventions allouées aux prépas Talents et aux bourses Talents sont stables. Ce dispositif vise à renforcer l'égalité des chances pour l'accès à la fonction publique. Les prépas Talents, autrefois classes préparatoires intégrées, reçoivent une subvention de 6 500 euros par élève effectivement accueilli, pour un total de 12,2 millions d'euros en AE. Chaque étudiant reçoit une bourse d'un montant de 4 000 euros. Le montant des subventions correspondantes versées par la DGAFP s'élève à 8,3 millions d'euros en AE.

Mon second focus porte sur l'apprentissage dans la fonction publique territoriale.

Pour la première fois, l'action « Formation des fonctionnaires » porte les crédits relatifs au financement de l'apprentissage dans la fonction publique territoriale, pour un montant de 15 millions d'euros versés au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).

L'inscription de ces crédits au PLF pour 2024 ne doit pas faire oublier la modification fondamentale, apportée par un amendement du Gouvernement au PLF pour 2023, aux règles de financement de l'apprentissage dans la fonction publique territoriale. En séance, nous avions supprimé cet amendement, mais il a été rétabli par l'Assemblée nationale, actant ainsi le désengagement financier de l'État.

D'une part, la contribution versée par l'État au CNFPT a désormais un simple caractère facultatif, de même que la contribution annuelle versée par France compétences. D'autre part, la convention d'objectifs et de moyens conclue à cette fin entre l'État et le CNFPT n'a plus nécessairement un caractère annuel.

La convention d'objectifs et de moyens pour les années 2023 à 2025, signée à la mi-novembre, maintient, pour ces trois années, l'engagement de l'État à hauteur de 15 millions d'euros par an, sous réserve de l'inscription annuelle des crédits en loi de finances.

En revanche, dans une circulaire du 10 mars 2023, la Première ministre a annoncé la dégressivité de la contribution versée par France compétences, qui serait plafonnée à 10 millions d'euros en 2024 et à 5 millions en 2025, contre 15 millions en 2023.

Dans les faits, depuis le 1er janvier 2023, la seule contribution assurée dont bénéficie le CNFPT consiste donc en la cotisation complémentaire plafonnée à 0,1 % et assise sur la masse salariale des collectivités territoriales. Le montant de cette cotisation s'élève à 45 millions d'euros, permettant le financement de 4 500 contrats environ ; or plus de 12 600 contrats ont été conclus en 2022.

La volte-face du Gouvernement à l'automne 2022 demeure incompréhensible. Je rappelle que le Gouvernement soutient l'apprentissage dans le secteur privé par le versement d'une aide aux employeurs privés de 6 000 euros par apprenti et d'une subvention annuelle d'équilibre à France compétences comprise entre 1 et 2 milliards d'euros.

Ainsi, les nouvelles règles de financement font peser un risque majeur sur le développement de l'apprentissage public local, alors que 18 000 intentions de recrutement ont été recensées en 2023.

À l'heure où l'apprentissage constitue une composante à part entière de la politique des ressources humaines des collectivités territoriales, ainsi qu'une voie majeure d'insertion professionnelle des jeunes, cette situation est plus que regrettable.

C'est pourquoi je présenterai en séance, en mon nom propre, un amendement sur les crédits non rattachés afin de rétablir des conditions financières satisfaisantes pour le développement de l'apprentissage dans la fonction publique territoriale.

Le deuxième volet du programme 148 concerne l'action sociale interministérielle.

À ce titre, ce programme finance quatre prestations individuelles, directement gérées par la DGAFP au niveau central, et cinq dispositifs collectifs, qui font l'objet de délégations de crédits vers le niveau déconcentré.

Dans le PLF pour 2024, le montant des prestations individuelles s'élève à 93,8 millions d'euros en AE, soit une diminution de 6 % par rapport au PLF pour 2023.

Cette baisse s'explique principalement par le recentrage de la prestation des chèques-vacances pour les agents actifs de l'État à compter du 1er octobre 2023, qui entraînera une économie estimée à 5,8 millions d'euros en 2024.

L'autre aide aux familles correspond au chèque emploi service universel (CESU) pour la garde d'enfants de moins de six ans ; le montant de cette dotation est stable, avec des AE à hauteur de 40,1 millions d'euros.

Enfin, deux prestations individuelles relèvent de l'aide au logement : l'aide à l'installation des personnels de l'État et le logement temporaire ; leurs montants sont également stables.

La dotation pour les prestations d'action sociale collective s'élève, quant à elle, à 29,6 millions d'euros en AE, soit une hausse de 15 % par rapport au PLF pour 2023.

Les réservations de berceaux en crèche bénéficient ainsi d'une augmentation des crédits de 4,6 millions d'euros, pour 4 930 places offertes, soit un nombre stable.

Les réservations de logements sociaux bénéficient de près de 1 million d'euros complémentaires pour favoriser l'accès au logement des agents publics en Île-de-France.

L'action sociale interministérielle est adossée, dans le programme de performances annexé au PLF pour 2024, à un objectif, « optimiser la réponse aux besoins des agents en matière d'action sociale », et à un indicateur, le « taux de satisfaction des bénéficiaires de certaines prestations d'action sociale ».

Comme en 2023, j'émets des réserves quant à la pertinence de cet indicateur, qui ne permet notamment pas de connaître les coûts de gestion des prestations d'action sociale, dont la maîtrise demeure un enjeu important. En outre, cet indicateur est partiel, en ne portant que sur le Cesu pour la garde d'enfants de moins de six ans ; il est également peu révélateur en ce qu'il atteint, depuis son introduction en 2022, un niveau très élevé, si bien que les marges de progression pour les années à venir sont faibles.

Comme l'an passé, je vous proposerai un amendement visant à réintroduire les deux indicateurs de performance relatifs à l'action sociale tels qu'ils figuraient dans le PLF pour 2021.

J'en viens au troisième volet du programme 148, à savoir l'appui en matière de ressources humaines.

En plus des crédits relatifs au centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines (CISIRH), l'action « Appui et innovation des ressources humaines » comprend les crédits relatifs à un certain nombre de fonds à vocation interministérielle, voire inter-versants.

Les années 2023 et 2024 sont marquées par la suppression de deux de ces fonds. Le fonds d'accompagnement interministériel des ressources humaines (FAIRH), créé pour promouvoir les outils introduits par la loi de transformation de la fonction publique, a été supprimé par la loi de finances pour 2023, tandis que le fonds d'innovation des ressources humaines (FIRH), créé en 2016, est, à son tour, supprimé dans le PLF pour 2024. Aussi, la création de fonds gagnerait probablement à être moins systématique, pour éviter de devoir les supprimer dès lors que l'on constate leur faible valeur ajoutée.

Enfin, je vous rappelle que, depuis le 14 avril 2023, le site Place de l'emploi public a été remplacé par le site Choisir le service public (CSP), afin de valoriser la marque employeur des services publics. Toutefois, ce simple changement de nom ne suffira probablement pas à faire émerger un espace numérique unique qui favorise les mobilités entre les versants. Là encore, je ne suis pas certaine que le nouvel indicateur « Recrutement dans la fonction publique » et le sous-indicateur « Nombre moyen de candidats ayant consulté une fiche de poste publiée sur CSP » soient entièrement pertinents. D'une part, la consultation d'une fiche n'est pas, en tant que telle, signe de l'attractivité d'un poste ; et, d'autre part, la cible, fixée à vingt candidats pour les trois prochaines années, semble assez peu ambitieuse. Aussi, je vous proposerai un amendement visant à remplacer cet indicateur par un indicateur relatif au taux de candidatures reçues pour une fiche de poste publiée par rapport au nombre de consultations de cette même fiche de poste.

Avant d'aborder la troisième partie de mon intervention, je tiens à déplorer les conséquences de la suppression, dans la loi de finances de 2023, du rapport sur l'état de la fonction publique et les rémunérations, qui était annexé au PLF. L'année dernière, le Gouvernement avait argué qu'il faisait doublon avec le rapport annuel de la DGAFP. Or la date de parution de ce dernier est très aléatoire : j'en veux pour preuve qu'il n'est toujours pas publié à ce jour, alors même que nous devons donner notre avis sur les crédits du programme 148 !

Enfin, j'évoquerai la qualité de vie au travail et la santé des agents publics.

Depuis plusieurs années, la question de l'attractivité de la fonction publique fait débat, de nombreux employeurs publics rencontrent des difficultés de recrutement.

Au-delà des inévitables considérations salariales, le renforcement de l'attractivité de la fonction publique passera également par l'amélioration des conditions de travail offertes aux agents, celles-ci devenant de plus en plus déterminantes dans les choix de carrière effectués par les candidats et les agents en poste.

Initié par le ministre de la transformation et de la fonction publiques, le programme « Fonction publique + » vise ainsi à améliorer la qualité de vie et les conditions de travail des agents publics. L'été dernier, tous les agents publics ont été invités à répondre à une consultation en ligne sur les modes et les conditions de travail. Seuls 110 253 agents y ont participé.

Ce programme repose sur les six axes suivants : l'évolution des pratiques managériales ; l'amélioration du cadre de travail et de la santé au travail ; l'adaptation des espaces de travail aux nouveaux usages collaboratifs et numériques et au télétravail ; la simplification du quotidien des agents en matière de ressources humaines ; la poursuite de l'engagement pour l'égalité professionnelle ; et l'amélioration de l'offre de logement à destination des agents publics.

En outre, la protection sociale complémentaire est un outil managérial important. L'ordonnance du 17 février 2021 a rendu obligatoire la participation des employeurs publics en santé à hauteur d'au moins 50 %, a fixé des conditions socles des contrats éligibles en santé et a prévu la participation facultative en matière de prévoyance dans la fonction publique d'État, ainsi que la participation obligatoire en matière de prévoyance dans la fonction publique territoriale à hauteur de 20 % d'un montant de référence.

Le calendrier et l'avancement des négociations diffèrent sensiblement d'un versant à l'autre.

Pour la FPE et la FPT, les nouvelles règles en matière de santé et de prévoyance entrent en vigueur progressivement. En revanche, dans la FPH, la seule certitude à ce jour concerne la date d'entrée en vigueur de la protection sociale complémentaire (PSC), au 1er janvier 2026 ; les négociations sur ses modalités et son champ doivent encore avoir lieu. Notons que les fonctionnaires hospitaliers bénéficient déjà de la gratuité des soins et des médicaments dans l'établissement où ils sont en activité. Le cas échéant, cette disposition pourrait être élargie à l'ensemble des établissements du territoire national ainsi qu'à leurs ayants droit .

Je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Fonction publique », sous réserve des deux amendements que je vous présenterai dans un instant.

Mme Françoise Gatel. - Je remercie Catherine Di Folco pour sa rigueur et sa précision. Je veux parler de la fonction publique territoriale et de l'apprentissage.

Les collectivités locales participent largement à l'effort national d'intégration professionnelle et de formation des jeunes. Or elles sont confrontées à un déficit d'attractivité. Il importe qu'elles créent un vivier d'apprentis. Une collectivité qui forme un apprenti en fera bénéficier une autre ultérieurement. À cet égard, je ne comprends pas qu'il y ait deux catégories d'apprentis et d'employeurs, selon qu'il s'agisse du secteur public ou du secteur privé. N'oublions pas que les collectivités doivent également participer au financement de la formation et qu'elles ont supporté des charges supplémentaires à hauteur de 2,5 milliards d'euros entre 2017 et 2021 pour faire face à la complexité des normes et à la revalorisation du point d'indice.

L'apprentissage est un enjeu majeur pour la société. Face au déficit de citoyenneté et de civisme observé chez les jeunes, l'apprentissage leur permettra d'avoir un regard différent sur la sphère publique. Aussi, je soutiendrai avec enthousiasme et conviction les amendements proposés par le rapporteur.

M. Hussein Bourgi. - Je remercie le rapporteur, car c'est toujours avec minutie et perspicacité qu'elle nous présente son avis budgétaire. Je partage l'ensemble de ses propos et j'ajouterai trois observations.

Concernant l'attractivité de la fonction publique territoriale, nous espérons que le projet de loi annoncé par le ministre Stanislas Guerini n'est pas l'Arlésienne. Un nombre de plus en plus important de contractuels sont recrutés dans les collectivités, car les métiers de la FPT n'attirent plus. Or cette situation pose des difficultés en matière de productivité et de compétences.

J'évoquerai aussi la question de l'apprentissage. En tant que délégué du CNFPT au titre de la région Occitanie, je reçois quotidiennement des courriers des élus locaux exprimant leur mécontentement. Alors que les collectivités étaient proactives et assuraient un accompagnement humain des apprentis, elles doivent aujourd'hui limiter leur action à un apprenti par collectivité à cause du désengagement de l'État, ce que nombre de communes ne comprennent pas. Elles se retrouvent donc privées de cette main-d'oeuvre.

Enfin, le ministre de l'intérieur a annoncé la création d'une école de police municipale. Or je rappelle que le Président de la République avait annoncé la création d'une académie de police, dont nous attendons toujours de connaître les contours. D'ailleurs, en quoi cette école sera-t-elle différente des délégations régionales du CNFPT ? Cet opérateur fait bien son travail et investit des montants considérables. La création de cette énième école m'interpelle..

Nous suivrons l'avis du rapporteur.

M. Philippe Bas. - Je salue le travail du rapporteur, qui maîtrise bien ces questions complexes relatives aux trois fonctions publiques.

Je veux revenir sur l'évolution des effectifs de la fonction publique, qui ne diminuent pas depuis très longtemps. Cette question était au coeur du débat politique il y a quelques années. Vous avez indiqué que les effectifs allaient augmenter l'an prochain - il est important de renforcer nos ressources humaines dans les secteurs de la justice, de la police et de la gendarmerie -, mais on ne saurait s'en contenter sans en diminuer par ailleurs. Cette augmentation ne peut pas continuer indéfiniment à ce rythme, même s'il est moins important.

Aussi, je suggère que nous fassions part au Gouvernement de notre mécontentement de voir qu'aucune réforme de l'État n'est mise en oeuvre pour maîtriser la dépense de la fonction publique, qui est le principal poste de dépenses de l'État - outre les intérêts de la dette.

M. Olivier Bitz. - Merci au rapporteur pour le travail réalisé. Je partage ses inquiétudes sur la question de l'apprentissage dans les collectivités locales. Nous sommes manifestement dans un bras de fer entre l'État et le CNFPT. Il faut que nous nous penchions de près sur cette question, car les textes prévoient expressément que le CNPFT assume des responsabilités en la matière, et bénéficie en conséquence de recettes pérennes. La question est donc de savoir s'il rencontre des difficultés pour assumer ses compétences, car ce sont les jeunes qui en font les frais. Nous sommes les garants de l'équilibre des comptes de l'État, et devons savoir qui va assumer ces missions, alors même que les crédits qui lui sont octroyés sont identiques à ceux qui étaient prévus pour 2023 et en 2022.

M. Alain Marc. - Balayons aussi devant notre porte ! Chaque fois que la loi nous a obligés à modifier l'architecture de nos institutions, cela s'est traduit par l'augmentation du nombre de fonctionnaires. Aux termes de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), la compétence « eau » et « assainissement » va revenir aux intercommunalités, avec pour conséquence l'augmentation du nombre de fonctionnaires dans les intercommunalités.

J'aimerais que l'on crée une mission d'information sur l'augmentation du nombre de fonctionnaires territoriaux. Parallèlement au transfert de compétences, constate-t-on une baisse du nombre de fonctionnaires dans la fonction publique d'État ? Outre le fait que la loi NOTRe a fait beaucoup de dégâts, il serait très intéressant de connaître l'évolution des effectifs en fonction des lois qui ont été adoptées.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour avis. - Monsieur Bourgi, le projet de loi que nous attendons devrait être présenté au début de l'année prochaine ; ses trois axes seraient le recours au contrat, la rémunération et la protection fonctionnelle.

Concernant l'apprentissage, le CNPFT comble jusqu'à présent le déficit, grâce à la cotisation complémentaire des collectivités territoriales à hauteur de 0,1 % de la masse salariale, alors que sa principale mission concerne la formation des agents. Le montant de cette cotisation permet le financement de quelque 4 500 contrats par an ; or plus de 12 000 contrats ont été conclus en 2022 et 18 000 intentions de recrutement ont été recensées pour 2023. Veut-on augmenter la cotisation complémentaire ? Je ne suis pas sûre que les collectivités y soient favorables étant donné leurs charges accrues dans bien d'autres domaines.

Le CNPFT puise pour l'instant dans ses réserves, avec une contribution de 30 millions d'euros pour 2023, dont la moitié pour financer des contrats conclus en 2021 et 2022.

J'ai parlé de désengagement de l'État, car la convention d'objectifs et de moyens revêt maintenant un simple caractère facultatif, ce qui est de nature à créer une incertitude permanente. Pour les années 2023 à 2025, l'État s'est engagé à hauteur de 15 millions d'euros, mais la contribution de France compétences va diminuer, jusqu'à extinction.

Article 38 (État G)

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour avis. - Les amendements LOIS.1 et LOIS.2 visent à remplacer l'indicateur de performance relatif à l'action sociale interministérielle, d'une part, et l'indicateur de performance relatif au recrutement dans la fonction publique, d'autre part, par des indicateurs plus précis et opérationnels.

Les amendements LOIS.1 et LOIS.2 sont adoptés.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Fonction publique » de la mission « Transformation et fonction publiques », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

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