EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI

TITRE IER
L'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection
CHAPITRE IER
Missions et fonctionnement de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection
Section 1
Dispositions modifiant le code de l'environnement
Article 1er (avis)
Institution de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection
(ASNR) et définition de ses principales missions

Cet article vise à instituer une Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) regroupant l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), et à définir ses principales missions.

Approuvant le principe d'une fusion, qui doit permettre de fluidifier les processus, à niveau inchangé de sûreté et de sécurité nucléaires, mais aussi de radioprotection, le rapporteur a proposé cinq amendements visant à consolider la nouvelle autorité en :

- préférant la référence à la « santé publique » à celle de la « santé humaine » dans la nouvelle définition de la sûreté nucléaire, sans changer la référence à la « protection de l'environnement » également proposée ( COM-63) ;

- proposant la dénomination d'« Autorité indépendante de sûreté nucléaire et de radioprotection » (AISNR) pour la future autorité, afin de réaffirmer son caractère indépendant, gage de la confiance du public, selon les recommandations du rapport de l'Opecst issu de la saisine de la commission des affaires économiques ( COM-64) ;

- confiant à l'ASNR la mission de tenir compte, sur le plan procédural, des projets de production et de recherche nucléaires innovants, afin de faciliter les démarches des porteurs de projets de petits réacteurs modulaires (SMR) ou de réacteurs de 4e génération notamment ( COM-65).

- mentionnant l'Opecst, mais aussi les commissions permanentes compétentes, comme destinataires de la mission d'information du Parlement de l'ASNR, selon les recommandations du rapport précité ( COM-66) ;

- clarifiant le champ de la mission d'information du public et de transparence de l'ASNR, en précisant qu'elle s'applique à son domaine de compétences ( COM-72).

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 1er vise à instituer une Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) regroupant l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Pour ce faire, il prévoit :

- l'application à la nouvelle autorité du statut d'autorité administrative indépendante (AAI), dont bénéficie actuellement l'ASN, mais pas l'IRSN, ce dernier étant un établissement public à industriel et commercial (EPIC) ;

- la reprise par la nouvelle autorité des missions de l'ASN telles que définies à l'article L. 592-1 du code de l'environnement, en y intégrant en sus les missions d'expertise et de recherche de l'IRSN ;

- la modification de plusieurs intitulés du chapitre II du titre IX du code de l'environnement mentionnant l'ASN et l'IRSN.

L'article 1er modifie également la définition de la sûreté nucléaire prévue par l'article L. 591-1 du code de l'environnement pour y intégrer l'objectif de protection de la santé humaine et de l'environnement.

En l'état actuel du droit, le système français de contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection des activités nucléaires civiles repose à la fois sur l'ASN, AAI dotée de missions de contrôle, d'inspection et de sanction, et sur l'IRSN, EPIC lui apportant, sur ce point, un concours technique.

D'une part, l'ASN est chargée, au nom de l'État, de contrôler les activités nucléaires civiles au titre de la sûreté nucléaire et de la radioprotection1(*).

Créée par la loi dite « TSN » du 13 juin 20062(*), elle dispose du statut d'AAI et exerce, en sa qualité d'autorité décisionnaire, cinq missions principales dans son domaine de compétence : la réglementation, les décisions ou autorisations individuelles, le contrôle du respect des normes par les exploitants, l'information du public et l'assistance au Gouvernement en cas de situation d'urgence.

Sa principale base légale est l'article L. 592-1 du code de l'environnement qui dispose que « l'Autorité de sûreté nucléaire est une autorité administrative indépendante qui participe au contrôle de la sûreté nucléaire, de la radioprotection et des activités nucléaires mentionnées à l'article L. 1333-1 du code de la santé publique. »

Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, l'ASN compte un effectif de 516 agents et un budget annuel de 68,30 millions d'euros en 2022.

D'autre part, l'IRSN exerce des activités d'expertise et de recherche en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection3(*).

Instituée par la loi dite « AFSSE », du 9 mai 20014(*), il dispose du statut d'EPIC et est placé sous la tutelle des ministres chargés de l'environnement, de la défense, de l'énergie, de la recherche et de la santé, exerçant quatre missions principales : l'expertise technique, la recherche, l'information du public et l'assistance aux pouvoirs publics en cas d'accident ou d'incident impliquant des sources de rayonnements ionisants.

Sa principale base légale est définie aux articles L. 592-45, L. 592-46-1 et L. 592-47 du code de l'environnement, qui disposent respectivement que « l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial qui exerce, à l'exclusion de toute responsabilité d'exploitant nucléaire, des missions d'expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire définie à l'article L. 591-1 », mais aussi qu'il « est chargé d'une mission d'expertise d'une situation d'exposition potentielle ou avérée aux rayonnements ionisants » et qu'il « contribue à l'information du public ».

Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, l'IRSN dispose d'un effectif de 1744 personnes et d'un budget annuel de 285 millions d'euros en 2022.

L'ASN et l'IRSN sont structurellement distincts, mais sont néanmoins liés par un dialogue continu et régulier. L'article L. 592-46 du code de l'environnement dispose en effet que « l'Autorité de sûreté nucléaire a recours à l'appui technique, sous la forme d'activités d'expertise soutenues par des activités de recherche, de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire ». Ce lien se matérialise par une convention et par le fait que le président de l'ASN est membre du conseil d'administration de l'IRSN et que la direction de l'ASN est membre du comité d'orientation des recherches de cet établissement.

Ainsi que l'a rappelé l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), dans son rapport issu de la saisine de la commission des affaires économiques, le système français de contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, caractérisé par une autorité de sûreté et un organisme d'expertise séparés, « est la résultante de réorganisations successives intervenues depuis plus d'un demi-siècle, afin de prendre en compte les évolutions de la politique industrielle française, les normes internationales de sûreté et le retour d'expérience d'accidents survenus à l'étranger »5(*).

Origine du système français de contrôle de la sûreté nucléaire6(*)

L'institutionnalisation de la sûreté nucléaire débute en France dans les années 1950 par la constitution, au sein du Commissariat à l'énergie atomique (CEA)7(*), d'un service spécifique en 1951, du groupe technique de sûreté des piles (GTSP) en 1957, puis d'une commission de sûreté des installations atomiques (CSIA) en 1960. Dans le même temps, un service central de protection contre les rayonnements ionisants (SCPRI) est créé au sein de l'Institut national d'hygiène (INH)8(*) en 1956.

Dans les années 1960, ce système est consolidé avec l'institution d'un groupe d'experts ad hoc, au sein du CEA, composé de représentants du CEA, mais aussi du ministère de l'industrie et d'EDF, qui deviendront des groupes permanents d'experts en 1973.

Dans les années 1970, le lancement du « plan Messmer » s'accompagne la création, au sein du ministère de l'industrie, d'un service central de sûreté des installations nucléaires (SCIN) en 1973, et de la création, au sein du CEA, d'un département de la sûreté nucléaire (DSN) en 1970, puis d'un Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) en 1976.

Au lendemain de l'accident de Tchernobyl, en 1986, le SCIN est transformé en une Direction de la sûreté des installations nucléaires (DSIN), sous tutelle des ministères de l'industrie et de l'environnement en 1991, et le SCPRI est transformé en un Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI), comme établissement public à caractère administratif (EPA) sous tutelle du ministère de la santé et du ministère du travail.

En 2002, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est créé, en tant qu'EPIC, en regroupant l'IPSN et l'OPRI, et la DSIN est remplacée par une Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR). En 2006, la DGSNR est remplacée par l'ASN, AAI exerçant des missions de contrôle, d'inspection et de sanction.

Reconnue pour son efficacité au cours de la décennie écoulée, y compris par le Gouvernement9(*), cette organisation partagée entre l'ASN, l'IRSN, mais aussi l'exploitant10(*) s'apprête néanmoins à être confrontée à une relance de la filière française du nucléaire s'accompagnant de défis nouveaux qui posent la question de son optimisation : la construction de nouveaux réacteurs électronucléaires, la prolongation des réacteurs électronucléaires, l'adaptation des réacteurs électronucléaires face aux risques climatique ou numérique, la diversification des opérateurs et des technologies, le dimensionnement des installations de stockage et de gestion des combustibles usés, le démantèlement et la réhabilitation des anciens réacteurs électronucléaires notamment.

Dans ce contexte, le Gouvernement a souhaité, depuis le Conseil de politique nucléaire (CPN) du 8 février 2023, fusionner l'ASN et l'IRSN ; cela signifie, en substance, le passage d'un système où l'expertise est « externalisée » à un système où elle est « intégrée ».

Lors de l'examen de la loi dite « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 202311(*), le Gouvernement avait déposé à l'Assemblée nationale deux amendements procédant à un premier projet de fusion. En commission mixte paritaire (CMP), la commission des affaires économiques du Sénat s'est opposée à la fusion. Son rapporteur a expurgé le texte de toute référence à la fusion pour lui préférer un rapport sur l'évolution des besoins humains et financiers de l'ASN, de l'IRSN et du CEA (article 19) et la faculté pour l'ASN de recruter différentes catégories de personnel (article 24). De plus, sa présidente a saisi l'Opecst d'un rapport sur les conséquences de la fusion sur les plans scientifiques et technologiques, ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection. En rejetant les amendements présentés à la hâte par le Gouvernement, après le vote massif du Sénat sur ce texte, la commission s'est opposée à une réforme mal anticipée et mal évaluée. En saisissant l'Opecst, elle a remis les parlementaires au coeur des enjeux. In fine, l'ensemble du premier projet de fusion, introduit par le Gouvernement, a été censuré, au titre de l'article 45 de la Constitution12(*).

Ainsi que l'a relevé le Conseil d'État, dans son avis sur le présent projet de loi, les normes constitutionnelles, de même que les instruments internationaux régissant la sûreté nucléaire et la radioprotection13(*), le droit dérivé du Traité Euratom14(*) et les « normes de sûreté » élaborées par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), « laissent, en tout état de cause, ouvert le choix pour les États d'opter soit pour un modèle où l'organisme chargé d'élaborer les normes en matière de sûreté et de radioprotection et d'en contrôler l'application est structurellement distinct de l'organisme chargé de lui apporter un soutien technique en matière d'expertise [...], soit pour un modèle où ces deux fonctions sont réunies au sein d'une même entité ».

L'indépendance, la prévention des conflits d'intérêts et la transparence des prises de décisions sont des exigences communes aux pays occidentaux nucléarisés, mais les structures retenues varient ainsi, avec différentes nuances, autour des modèles « intégré » et « externalisé ».

Les systèmes étrangers de contrôle de la sûreté nucléaire

Une rapide comparaison internationale met en avant les spécificités organisationnelles de chaque pays. Les pays répertoriés ci-après exploitent ou ont exploité l'énergie nucléaire en quantité importante.

Les États-Unis15(*), tout d'abord, incarnent un modèle différent de celui français. Le contrôle et l'expertise y reposent sur une unique autorité créée en 1974, la Nuclear Regulatory Commission (NRC). Agence indépendante du gouvernement américain, la NRC dispose, comme l'ASN, d'un collège de cinq commissaires et exerce des missions similaires de réglementation, d'autorisations individuelles, d'information du public et de contrôle des installations civiles. L'expertise technique y est néanmoins internalisée et plusieurs structures internes exercent des activités faisant écho à celles de l'IRSN, à l'image de l'Advisory Committee on Reactor Safeguards (ACRS), chargé de conseiller le collège de la NRC sur des questions liées à la sûreté des réacteurs, ou encore de l'Office of Nuclear Regulatory Research (RES), notamment chargé de coordonner des programmes de recherche en matière de réglementation nucléaire et de conseiller le collège sur ces questions.

Le Japon16(*) dispose d'un modèle moins identifiable que les modèles français ou américain. Le contrôle y repose en premier lieu sur une autorité de sûreté, la Nuclear Regulation Authority (NRA), créée en 2012 au lendemain de l'accident de Fukushima et à la tête de laquelle on retrouve aussi cinq commissaires. La NRA a cependant à sa disposition à la fois une expertise technique interne, assurée par un département dédié, le Regulatory Standard and Research Department (RSRD), et deux principaux organismes chargés de l'expertise technique, le Japan Atomic Energy Agency (JAEA) et le National Institute for Quantum and Radiological Science and Technology (QST). Ces organismes sont externes à la NRA, mais leurs activités de support technique n'en sont pas complètement indépendantes, puisque la NRA est compétente pour superviser les divisions respectives du JAEA et du QST chargées de lui venir en appui. Le système japonais peut, pour ces raisons, être qualifié de partiellement intégré.

Au Canada17(*), en revanche, la gouvernance de la sûreté nucléaire suit un modèle pleinement intégré. Comme aux États-Unis, elle s'appuie sur une unique autorité : la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN), créée en 2000. La CCSN est un organisme de réglementation qui dispose d'une expertise technique interne, assurée par sa Direction générale du soutien technique (DGST).

Au Royaume-Uni18(*), la gouvernance de la sûreté nucléaire s'appuie sur l'Office for Nuclear Regulation (ONR), créé en 2011, dans un contexte de relance du nucléaire civil. L'ONR a le statut de société statutaire indépendante, rattachée au département chargé du travail. Il détient des compétences d'expertise internes, assurées par sa Technical Division (TD), mais s'appuie aussi sur des organismes externes, notamment privés, pour approfondir cette expertise.

La Belgique19(*) repose sur un modèle plutôt externalisé. Elle dispose d'une autorité de sûreté nucléaire, l'Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN), rattachée au ministère chargé de l'intérieur. Les missions techniques de l'AFCN sont confiées via un contrat de gestion à un organisme externe, Bel V, fondation de droit privé placée sous la tutelle de l'AFCN.

En Espagne20(*), la gouvernance de la sûreté nucléaire suit un modèle intégré. Elle repose sur le Conseil de sûreté nucléaire (CSN), lequel dispose d'un personnel technique interne et peut également mener des projets de recherche.

En Allemagne21(*), le système de gouvernance est plutôt externalisé. L'autorité compétente en la matière est le ministère fédéral de l'environnement, de la protection de la nature, de la sûreté nucléaire et de la protection des consommateurs (BMUV). Organisé en six sections, le BMU ne se consacre pas exclusivement à la sûreté nucléaire, mais dispose d'une section dédiée, la Section S. Il coopère avec deux autres autorités, l'Autorité fédérale de contrôle des radiations (BfS) et le Bureau fédéral pour la sûreté nucléaire et l'élimination des déchets nucléaires (BASE), qui concernent des secteurs plus précis. En matière de sûreté des installations, l'expertise fournie au BMUV est externalisée. Elle est essentiellement exercée par la Société pour la sûreté des installations et des réacteurs nucléaires (GRS), organisation à but non lucratif détenue par divers acteurs publics allemands.

La Hongrie22(*) dispose d'une autorité de contrôle, l'Autorité hongroise d'énergie atomique (OAH). L'OAH est avant tout une autorité en charge de la réglementation et du contrôle. Elle est en charge du financement des activités techniques et de contrôle, mais recourt à un réseau de plusieurs supports techniques externes pour soutenir son activité.

Enfin, la Suisse23(*) repose sur un système centré autour de l'Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN), autorité chargée à la fois de la régulation et de l'expertise. L'IFSN dispose de moyens internes capables de fournir un soutien technique à ses activités et de mener une stratégie de recherche propre. Néanmoins, bien que l'expertise technique soit internalisée au sein de l'autorité de sûreté, le système suisse n'est pas pour autant unique. L'IFSN a en effet la particularité de devoir cohabiter avec la Commission fédérale de sécurité nucléaire (CSN), un organe consultatif qui peut prendre position sur les expertises menées par l'IFSN en matière de sûreté et transmettre ses avis notamment au Conseil fédéral et au département en charge de l'environnement.

Le rapporteur constate que la réforme proposée aujourd'hui est plus aboutie que la précédente : elle est le fruit des travaux préalables de l'Opecst, d'une dizaine de consultations formelles et d'un an de concertation sociale.

À l'issue de ses auditions, le rapporteur constate que la réforme est accueillie de manière positive par les acteurs économiques (CEA, Groupement des industriels français de l'énergie nucléaire - Gifen), mais critiquée par certains acteurs environnementaux ou liés à la transparence (Haut comité pour l'information et la transparence sur la sûreté nucléaire - HCITSN, Association nationale des comités et commissions locales d'information - Anccli), ainsi que les représentants du personnel (ASN, IRSN).

Plus précisément, les acteurs administratifs interrogés (Direction générale de la prévention des risques - DGPR, Direction générale de l'énergie et du climat - DGEC, Délégation interministérielle au nouveau nucléaire - DINN) se sont montrés favorables au projet de fusion, mettant notamment en avant l'argument d'un renforcement de l'indépendance, des moyens et de l'attractivité de l'autorité de sûreté en lien avec le passage à une structure unique. Un sentiment comparable a été relevé par plusieurs acteurs institutionnels concernés au premier chef, dont l'ASN, le CEA, le Délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et les installations intéressant la Défense (DSND) et le Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA).

De même, les acteurs industriels auditionnés (Électricité de France - EDF, Orano, GIFEN, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs - Andra, et plusieurs sociétés de SMR) n'affichent aucune opposition à la réforme, qui permet en somme d'accompagner la relance de la filière française du nucléaire. Pour autant, le groupe EDF et l'Andra observent une stricte réserve sur ce sujet.

Des positions plus critiques sont également ressorties des auditions. C'est le cas des acteurs liés à la transparence, dont le HCTISN et l'Anccli. Tous deux saluent certains principes retenus par le Gouvernement en matière de transparence et de participation du public, mais critiquent le renvoi de modalités au règlement intérieur de la future autorité. De plus, certains acteurs économiques, tels que l'Andra ou le projet ITER, sans remettre en rien en cause le principe de la réforme, s'inquiètent sur ses conséquences s'agissant de l'instruction des dossiers en cours.

Enfin, plusieurs personnalités, essentiellement des acteurs environnementaux et sociaux, ont fait part au rapporteur de leur opposition à la réforme. Les syndicats de l'IRSN ont indiqué leur opposition de principe au projet, tandis que les représentants de l'ASN ont fait part d'inquiétudes sur ses modalités. Les organisations Les Amis de la Terre France (ADT-France), France Nature Environnement (FNE), Greenpeace et Réseau Sortir du Nucléaire (RSN) ont également indiqué leur opposition sur le principe au projet.

Le rapporteur déplore que le Gouvernement ne précise pas clairement les objectifs poursuivis par la création de l'ASNR.

Dans l'étude d'impact, il reconnaît lui-même que « le système actuel a donné satisfaction au cours de la précédente décennie ».

Pour autant, il souligne que l'existence d'un établissement d'expertise distinct de l'autorité de sûreté conduit à un double niveau de pilotage, peu efficace et efficient, induisant une dispersion des services, des informations et des compétences. Il en résulte des processus d'instruction des dossiers complexes et illisibles, pour les exploitants comme les collectivités.

C'est pourquoi il indique que « l'objectif premier de cet article, et des articles suivants, est [...] de fluidifier les processus d'instruction » ; il précise également que son but est d'intégrer les activités dans une même autorité, à l'exception des activités commerciales et de défense, de répondre à l'exigence d'indépendance, en conférant un statut d'autorité administrative indépendante (AAI) et de mobiliser les personnels autour d'un nouveau cadre.

De plus, le rapporteur relève que la création l'ASNR pose plusieurs défis :

- le premier tient à la nécessité de garantir la continuité de l'instruction des dossiers pour les exploitants nucléaires, qu'ils s'agissent des grands donneurs d'ordre comme des start-up porteuses de projets innovants ;

- le deuxième porte sur l'exigence de maintenir un niveau inchangé de sûreté et de sécurité nucléaires, de même que d'information et de transparence, de manière à ce que la nouvelle autorité soit adaptée aux besoins des acteurs ;

- le dernier a trait au besoin de maintenir un niveau élevé de compétences, en évitant des départs de personnel ou des pertes d'expertise, la relance de la filière française du nucléaire nécessitant une augmentation des personnels en charge de l'instruction ou du contrôle.

Cependant, le rapporteur souscrit à la réforme, sur le principe, tout en appelant à consolider certaines modalités.

Pour le rapporteur, la relance de la filière française du nucléaire rend aujourd'hui nécessaire l'évolution du système de contrôle et de radioprotection.

Il ne s'agit pas de remettre en cause l'efficacité du modèle actuel, lequel a unanimement fait ses preuves par le passé, mais de l'adapter au changement d'échelle à venir. Car le parc électronucléaire français va être confronté à un défi industriel inédit, nécessitant, pour être relevé, un investissement dans les installations, les compétences ainsi que la recherche et le développement (R&D).

Alors que les échanges seront amenés à se multiplier et les compétences techniques à se spécialiser, le rapporteur estime que la construction d'une structure unique, si elle s'accompagne effectivement des garanties qui s'imposent, pourrait éventuellement être de nature à renforcer l'efficacité du système actuel, en particulier concernant la lisibilité des procédures, l'attractivité des carrières et l'influence de la voix française dans les échanges internationaux.

Le rapporteur rappelle que cette fusion est conforme aux recommandations du rapport de l'Opecst, issu de la saisine de la commission des affaires économiques24(*). Pour autant, il constate que les propositions faites par l'Opecst s'agissant de la dénomination de la future instance ou de l'association du Parlement à son fonctionnement n'ont pas été totalement reprises.

Pour le rapporteur, l'application du statut d'AAI à l'ASNR est satisfaisante au regard de l'exigence d'indépendance à laquelle le contrôle de la sûreté et de la radioprotection est tenu. Il note sur ce point que le statut d'autorité publique indépendante (API), qui aurait pu être retenu à raison de son intérêt sur le plan budgétaire, fragiliserait la position des fonctionnaires au sein de la future autorité, qui devraient y être placés en situation de détachement.

Autre point, le rapporteur partage le choix du Gouvernement de ne pas modifier, à l'occasion de ce projet de loi, les autorités compétentes en matière de sécurité nucléaire. Si l'ASN a exprimé son souhait d'un tel transfert, il estime, quant à lui, que cela complexifierait les relations avec les ministères en charge de l'énergie, mais aussi des armées, sans gain évident sur le plan de la sécurité nucléaire.

Enfin, le rapporteur appelle à consolider, chaque fois que cela est pertinent, le niveau d'exigences en matière de sûreté et de sécurité nucléaires, mais aussi d'information, de participation et de transparence, à l'occasion de ce projet de loi. En effet, la relance de la filière française du nucléaire ne peut aboutir sans un système de contrôle de la sûreté nucléaire et de radioprotection exemplaire, gage de la confiance du public.

Au total, le rapporteur a proposé cinq amendements pour consolider les missions de l'ASNR.

Un premier amendement (COM-63) propose de clarifier la définition de la sûreté nucléaire en préférant la référence à la « santé publique » plutôt qu'à celle de la « santé humaine », dans la nouvelle définition de la sûreté nucléaire, sans changer la référence à la « protection de l'environnement » également proposée.

Un deuxième amendement (COM-64) a pour objet de réaffirmer le caractère indépendant de la future autorité, gage de la confiance du public, en proposant la dénomination « Autorité indépendante de sûreté nucléaire et de radioprotection », selon les recommandations du rapport précité de l'Opecst.

Plus encore, un autre amendement (COM-65) tend à confier à l'ASNR la mission de tenir compte, sur le plan procédural, des projets de production et de recherche nucléaires innovants, afin de faciliter les démarches des porteurs de projets de SMR ou de réacteurs de 4e génération notamment.

Un quatrième amendement (COM-66) vise à mentionner l'Opecst, comme les commissions permanentes compétentes, comme destinataires de la mission d'information du Parlement de l'ASNR, selon les recommandations du rapport susmentionné de l'Opecst.

Enfin, un amendement (COM-72) entend clarifier le champ de la mission d'information du public et de transparence de l'ASNR, en précisant qu'elle s'applique à son domaine de compétences.

Le dernier amendement a été déposé à l'identique avec le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 2 (avis)

Fixation de règles d'organisation, de transparence, de déontologie
et de prévention des conflits d'intérêts dans le règlement intérieur
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Cet article vise à fixer des règles d'organisation, de transparence, de déontologie et de prévention des conflits d'intérêts dans le règlement intérieur de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

Afin de renforcer les exigences prévues par ce règlement intérieur, le rapporteur a proposé sept amendements visant à :

- garantir que l'ASNR sépare ses processus d'expertise de ceux d'instruction, tant pour les décisions de son collège que pour les décisions déléguées et celles soumises à participation du public ( COM-73) ;

- permettre à l'ASNR de recourir à des rapports, pour les résultats de ces travaux d'expertise, et à des décisions, pour ceux de ces travaux d'instruction ( COM-74) ;

- prévoir que l'ASNR publie de manière concomitante les résultats de ses travaux d'expertise et ceux des travaux d'instruction, lorsqu'ils concernent un même objet ( COM-75) ;

- garantir que les conditions de publication des autorités de saisine de l'ASNR soient fixées par ces dernières ( COM-76) ;

- consacrer des règles légales minimales de déontologie pour les activités de recherche et d'expertise de l'ASNR ( COM-77) ;

- prévoir que l'ASNR institue une commission d'éthique et de déontologie ( COM-78) ;

- prévoir que l'ASNR puisse s'appuyer sur des groupes permanents d'experts ( COM-85).

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 2 prévoit que le règlement intérieur de la future Autorité de sûreté et de radioprotection (ASNR) :

- permette à son collège de donner une délégation de pouvoirs à son président, un autre membre du collège ou un membre des services, et à son président de donner une telle délégation à des agents des services25(*) ;

- définisse les règles de déontologie, y compris pour les activités de recherche et d'expertise, afin de prévenir les conflits d'intérêts ;

- distingue le processus d'expertise et d'instruction, qui est conduit par ses services, du processus d'avis et de décision, qui est délibéré par son collège ;

- définisse les modalités de publication des résultats de ses activités d'expertise et d'instruction26(*).

Le rapporteur observe que beaucoup d'éléments d'organisation et de fonctionnement importants de l'ASNR sont renvoyés à son règlement intérieur : la distinction du processus d'expertise de celui de décision, les modalités de publication des résultats des activités d'expertise ou de décision ou encore les règles de déontologie ou les modalités de délégation.

Même s'il faut se garder de rigidifier l'organisation et le fonctionnement de l'ASNR, le rapporteur considère que le recours au règlement intérieur n'est pas toujours satisfaisant du point de vue de la sécurité du droit et de la confiance du public.

C'est également le point de vue de l'Opecst, à la lecture de ses rapports et de sa contribution écrite.

Dans son rapport d'information, du 11 juillet 202327(*), issu de la saisine de la commission des affaires économiques, l'Opecst a formulé plusieurs recommandations avec : une publication distincte, mais concomitante, des rapports d'expertise et des décisions du collège ; le renforcement des groupes permanents d'experts ; la création d'un département dédié à la recherche ; l'institution d'un centre de crise unique.

Auparavant, dans une communication du 28 février 202328(*), il avait proposé le maintien des compétences, la séparation entre les « rôles exécutifs » du contrôle et de l'expertise et les rôles de décision et de pilotage, et des garanties sur l'information, la transparence et le dialogue avec la société.

Dans sa contribution adressée au rapporteur, l'Opecst29(*) a ajouté plusieurs éléments à prendre en compte :

- sur la séparation entre le processus d'expertise et celui de décision, il a indiqué que « cette rédaction souffre d'un biais, car elle distingue ce qui se passe au niveau des services et ce qui se passe au niveau du collège. Il serait sans doute souhaitable de mieux distinguer un processus d'expertise scientifique, un processus d'instruction technico-juridique et un processus de construction des décisions et avis du collège » ;

- de plus, en matière de lutte contre les conflits d'intérêts, il a ajouté que « la nouvelle autorité pouvant prodiguer des services contre rémunération, il serait souhaitable qu'elle dispose d'un conseil d'éthique et de déontologie indépendant, à l'égal de celui dont est aujourd'hui doté l'IRSN » ;

- enfin, pour ce qui concerne le rôle des groupes permanents d'experts, il a précisé qu'« il conviendrait de prévoir un renforcement du rôle des groupes permanents d'experts, à la fois en termes de composition et de fréquence de leurs réunions ».

Parmi les autres acteurs institutionnels, le Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) a déploré les trop nombreux renvois au règlement intérieur : « Le HCTISN note avec satisfaction la volonté exprimée de maintenir, voire renforcer, le niveau de transparence et d'implication de la société civile. Mais il pointe diverses dispositions aux termes desquelles cette ambition pourrait ne pas être suivie d'effet, étant donné notamment que de nombreux points cruciaux en termes de transparence relèveront du règlement intérieur de la future autorité. »

Il en va de même de l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (Anccli) : « À ce stade, si le projet de loi indique vouloir maintenir et même progresser en matière d'information et de transparence, l'ANCCLI note que ce sujet serait relégué dans le règlement intérieur de l'ASNR. Il serait pour le moins logique que ces acquis et progrès indéniables, et reconnus comme participant au renforcement de la sûreté, soient intégrés dans la loi. »

S'agissant des représentants du personnel, les syndicats de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) ont regretté une insuffisante séparation du processus d'expertise de celui de décision : « Le renvoi à un futur règlement intérieur n'offre aucune garantie. L'expertise et la décision seront sous la même autorité hiérarchique. Ce changement va mettre l'expertise sous le contrôle total du décideur et risque de dégrader la qualité de certaines expertises complexes. Il va dégrader la confiance du public gagnée au cours des deux dernières décennies, confiance du public indispensable dans un contexte de relance du nucléaire. Il faut préciser que l'ASN prend chaque année environ 2 300 décisions, dont une trentaine sont prises par le collège, alors que l'IRSN formule environ 300 avis. Cela signifie que 2 270 décisions sont prises chaque année par les services de l'ASN. On voit donc que séparer les décisions prises par le collège est insuffisant pour protéger de pressions les expertises nécessaires à l'établissement de quelque 270 avis de l'IRSN sur 300. »

Dans le même esprit, les représentants du personnel de l'ASN30(*) se sont exprimés en ces termes : « Le maintien d'une séparation claire des processus d'expertise et de décision est indispensable pour le fonctionnement de la future autorité. Une expertise indépendante de la décision est importante pour garantir que l'expertise ne soit pas orientée par la décision. Dans le cadre des missions de l'ASN, il existe un large spectre dans lequel des décisions sont prises, les schémas de décisions diffèrent d'un domaine à un autre ».

Dans ce contexte, le rapporteur a interrogé la direction générale de la prévention des risques (DGPR) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur l'opportunité de renforcer le règlement intérieur.

Ils n'ont pas estimé souhaitable de mentionner une « séparation » des processus, plutôt que leur « distinction », ou encore de viser des groupes permanents d'experts, une cellule de crise unique ou un département dédié à la recherche.

Pour autant, ils ont précisé aux rapporteurs les règles de déontologie envisagées par le règlement intérieur.

Tout d'abord, l'ASN a indiqué : « Afin de prendre en compte l'évolution du périmètre des missions exercées par la future autorité, il paraît utile de préciser les règles de déontologie qui seront applicables aux interventions des services dans le cadre des nouvelles activités pouvant donner lieu à des rémunérations pour services rendus. Une des règles déontologiques envisagées concerne l'absence de toute action de démarchage commercial, par exemple pour des activités de formation, et qui pourrait entrer en contradiction avec les activités de contrôle menées par ailleurs par la future autorité. L'objectif étant de veiller à ce qu'elles soient en lien avec les missions de la future autorité et de s'assurer du respect des règles de concurrence, notamment l'absence de conflits d'intérêts. Ces règles auront également pour vocation de prohiber toute activité commerciale susceptible de résulter de prescriptions imposées par l'autorité ou de faire l'objet par la suite d'un contrôle dans le cadre de ses attributions. »

De plus, la DGPR a ajouté qu'« il s'agit d'assurer la sécurité des membres de l'ASNR au regard d'un éventuel soupçon de prise illégale d'intérêts, notamment si des formations ou des opérations de mesurage sont dispensées à des opérateurs économiques par ailleurs soumis au contrôle de l'ASNR et font l'objet d'une facturation. Les règles de déontologie peuvent passer par l'absence de démarchage en vue de promouvoir ce type de prestations auprès [des] acteurs du secteur, par une séparation entre les services chargés de formaliser la mise en paiement [ ; elles] pourraient être pilotées par des fonctions support dédiées et les chaînes décisionnelles concernant l'analyse de dossiers ou les inspections de ces mêmes acteurs économiques. Il pourra également être envisagé du rapportage sur ce type de rémunérations et de contrats auprès d'un référent ou d'une commission de déontologie positionnée auprès de la future structure, afin de s'assurer que ces activités ne rentrent pas dans le champ de contrôle de la future autorité. »

Convaincu de la nécessité de renforcer l'efficacité et la transparence du dispositif proposé, le rapporteur estime nécessaire d'apporter des compléments au règlement intérieur de l'ASNR, sur le plan notamment de la séparation des activités, de la publication des résultats ou encore des règles de déontologie.

C'est pourquoi il a proposé sept amendements visant à :

- garantir que l'ASNR sépare ses processus d'expertise de ceux d'instruction, tant pour les décisions de son collège que pour les décisions déléguées et celles soumises à participation du public (COM-73) ;

- permettre à l'ASNR de recourir à des rapports, pour les résultats de ces travaux d'expertise, et à des décisions, pour ceux de ces travaux d'instruction (COM-74) ;

- prévoir que l'ASNR publie de manière concomitante les résultats de ses travaux d'expertise et ceux des travaux d'instruction, lorsqu'ils concernent un même objet (COM-75) ;

- consacrer des règles légales minimales de déontologie pour les activités de recherche et d'expertise de l'ASNR (COM-76) ;

- garantir que les conditions de publication des autorités de saisine de l'ASNR soient fixées par ces dernières (COM-77) ;

- prévoir que l'ASNR institue une commission d'éthique et de déontologie (COM-78) ;

- prévoir que l'ASNR puisse s'appuyer sur des groupes permanents d'experts (COM-85).

Les trois derniers amendements ont été déposés à l'identique avec le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 2 bis (nouveau) (avis)

Renforcement de la composition paritaire du collège
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Introduit par un amendement ( COM-90) présenté par le rapporteur, cet article vise à renforcer l'application, au sein du collège de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASN), des règles relatives à l'égal accès des femmes et des hommes.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

Dans le cadre de l'examen de la loi dite « Nouveau Nucléaire » du 22 juin 202331(*), le Sénat et l'Assemblée nationale ont adopté un article 25, visant à renforcer l'application des règles relatives à l'égal accès des femmes et des hommes, au sein du collège de l'actuelle Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Cet article a été censuré, tout comme l'ensemble de la réforme visant à fusionner l'ASN et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), introduite par le Gouvernement, au titre de l'article 45 de la Constitution32(*).

Le rapporteur considère que la disposition, dans un secteur encore peu féminisé, constitue un signal positif pour favoriser les recrutements et valoriser les compétences, indispensables à la relance de la filière française du nucléaire.

En l'état actuel du droit33(*), la composition du collège de l'ASN doit respecter des exigences relatives à l'égal accès des femmes et des hommes au sein des autorités administratives indépendantes (AAI), issues de l'ordonnance n° 2015-948 du 31 juillet 201534(*).

Ainsi, l'article L. 592-2 du code de l'environnement prévoit que :

- s'agissant des deux membres désignés par les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, le membre succédant à une femme est un homme et celui succédant à un homme est une femme ;

- parmi les trois membres désignés par le Président de la République, l'écart entre le nombre d'hommes et le nombre de femmes ne doit pas être supérieur à un.

Ces règles de désignation ne garantissent pas toujours une parité effective dans la composition du collège de l'ASN, qui comprend cinq membres.

Dans ce contexte, le rapporteur a présenté un amendement (COM-90) visant à reprendre la rédaction de l'article 25 de la loi « Nouveau Nucléaire », qui avait reçu un avis de sagesse de la part de la commission des affaires économiques du Sénat, afin de modifier le troisième alinéa de l'article L. 592-2 du code de l'environnement ; l'objet est d'en clarifier la rédaction et d'y inscrire des conditions de désignation visant à assurer une représentation paritaire au sein du collège de l'ASNR.

Cette nouvelle rédaction obligera le Président de la République à procéder à la désignation de ses trois candidats en tenant compte du genre des membres nommés par les présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale, de façon à ce qu'il y ait le même nombre de femmes que d'hommes, parmi les membres du collège autres que son président.

En consolidant ainsi les obligations du Président de la République, la rédaction garantira une parité effective dans la composition des membres du collège de l'ASN autre que son président. La composition actuelle du collège l'ASN, caractérisée par deux femmes et deux hommes, en plus de son président, ne sera pas affectée négativement par cette disposition.

Une telle composition paritaire est actuellement en vigueur dans plusieurs AAI, notamment au sein de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) (article L. 132-2 du code de l'énergie), mais également au sein de l'Autorité de régulation des transports (ART) (article L. 1261-6 du code des transports) ou de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) (article L. 341-1 du code des relations entre le public et l'administration).

Les règles de composition de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) comprennent également un critère d'alternance entre les membres hommes et femmes et une obligation générale de parité, décrits à l'article L. 130 du code des postes et communications électroniques.

Sollicitée par le rapporteur sur la réintroduction de la disposition, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) l'a estimé envisageable, tandis que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a indiqué ne pas avoir d'objection.

La modification de ces dispositions dans le cadre du projet de loi présente un lien avec ce dernier, car il vise à créer l'ASNR par fusion de l'ASN et de l'IRSN, modifiant ainsi la dénomination du collège de l'ASNR à l'article 14, prolongeant le mandat des membres de ce collège à l'article 5, et consolidant les missions du collège en matière d'harmonisation des règles applicables au personnel, à l'article 6.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

Article 2 ter (nouveau) (avis)

Renforcement de la reddition des comptes auprès du Parlement
de la commission des sanctions
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Introduit par un amendement ( COM-91) présenté par le rapporteur, cet article vise à renforcer la reddition des comptes de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) auprès du Parlement, s'agissant de l'activité de sa commission des sanctions.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

Dans le cadre de l'examen de la loi dite « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 202335(*), le Sénat et l'Assemblée nationale ont adopté un article 27, visant à renforcer la reddition des comptes de l'actuelle Autorité de sûreté nucléaire (ASN) s'agissant de l'activité de sa commission des sanctions.

Cet article a été censuré, tout comme l'ensemble de la réforme visant à fusionner l'ASN et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), introduite par le Gouvernement, au titre de l'article 45 de la Constitution36(*).

Le rapporteur considère que la disposition est utile pour renforcer l'information et la transparence dans le secteur sensible du nucléaire, de même que l'association du Parlement, à commencer par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst)

Depuis la loi dite « TSN », du 13 juin 200637(*), l'ASN doit rendre compte de son activité auprès du Parlement au moyen d'un rapport d'activité annuel.

L'article L. 592-31 du code de l'environnement, tel que modifié par la loi dite « Transition énergétique » du 17 août 201538(*), puis la loi dite « Statut des AAI » du 20 janvier 201739(*), prévoit ainsi :

- la transmission par l'ASN de son rapport d'activité annuel à l'Opecst ;

- la prononciation de l'ASN sur l'état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection à cette occasion40(*).

Or l'ASN est dotée d'une commission des sanctions composée de quatre membres titulaires41(*), quatre membres suppléants42(*) et un président43(*), cette commission pouvant prononcer des amendes administratives (4e et 5e alinéas de l'article L. 592-41 du code de l'environnement).

Dans le cadre de la loi « Nouveau Nucléaire »44(*), la commission des affaires économiques du Sénat a proposé de décentraliser, du collège de l'ASN vers sa commission des sanctions, les pouvoirs d'ordonner une amende, une astreinte ou une mise en demeure (premier alinéa de l'article L. 592-41 du code de l'environnement).

Eu égard à l'activité importante, et ainsi récemment renforcée, de la commission des sanctions, il est logique de consolider, dans le même temps, les modalités de reddition des comptes de cette activité auprès du Parlement.

Interrogée par le rapporteur sur la réintroduction de la disposition, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) a indiqué que les autorités administratives indépendantes (AAI) sont soumises à une obligation de rapportage en application de la loi dite « Statut des AAI »45(*), tandis que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a indiqué ne pas avoir d'objection.

C'est pourquoi le rapporteur a présenté un amendement (COM-91) visant à reprendre la rédaction de l'article 27 de la loi « Nouveau Nucléaire », afin d'inclure, dans le rapport que l'ASNR transmet et présente à l'Opecst, un compte rendu de l'activité de sa commission des sanctions.

La modification de ces dispositions dans le cadre du projet de loi présente un lien avec ce dernier, car il vise à créer l'ASNR par fusion de l'ASN et de l'IRSN, modifiant ainsi la dénomination de la commission des sanctions de l'ASNR, à l'article 14, et instituant des modalités de reddition des comptes auprès du Parlement, dont l'Opecst, aux articles 1er, 4 et 11.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

Article 3 (avis)

Précision de certaines activités de la future
Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR),
notamment en matière de formation ou de recherche

Cet article vise à préciser certaines activités de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), notamment en matière de formation, de traitement de données ou encore de recherche.

Le rapporteur a proposé trois amendements visant à :

- consacrer des règles légales minimales de déontologie pour les activités commerciales de l'ASNR ( COM-80) ;

- substituer la notion plus actuelle de « secret des affaires » à celle, de « secret en matière industrielle ou commerciale » ( COM-81) ;

- clarifier la référence au régime des installations nucléaires de base (INB) pour définir les activités nucléaires dont l'ASNR est exclue ( COM-79).

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 3 vise à préciser certaines activités de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), notamment en matière de formation, de traitement de données ou encore de recherche, issues de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Pour ce faire, il confie à l'ASNR plusieurs missions :

- la faculté d'« exercer des activités nucléaires, à l'exclusion de celles soumises au régime des installations nucléaires de base » ;

- la faculté de dispenser certaines activités commerciales, telles que la formation, la certification, la gestion de bases de données, en contrepartie de la perception de rémunérations, selon des règles de déontologie définies par son règlement intérieur ;

- l'obligation de gérer et d'exploiter les données des mesures de l'exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants et de gérer l'inventaire des sources de rayonnements ionisants.

L'article 3 définit également les dispositions relatives à l'accès et à la divulgation des données.

En particulier, il prévoit que :

- le personnel de l'ASNR (agents, collaborateurs occasionnels et cocontractants) est tenu à des règles de non-divulgation des données dosimétriques individuelles auxquelles ils ont accès ;

- les agents de l'ASNR habilités par cette dernière peuvent accéder à certaines données confidentielles nécessaires à leurs travaux, sans que puisse leur être opposé le secret industriel ou commercial ou le secret médical.

L'article 3 dispose aussi que l'ASNR apporte son appui technique au Gouvernement et aux autorités publiques, ainsi qu'aux services de santé, de prévention et de santé au travail et aux employeurs.

Enfin, l'article 3 confère également à l'ASNR la mission de recherche dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.

À cette fin, il prévoit que l'ASNR :

- soit reconnue comme un établissement public exerçant des activités de recherche, au sens de l'article L. 112-6 du code de la recherche ;

- suive les travaux de recherche et de développement menés aux plans national et international, formule des propositions sur les besoins de recherche, communiquées aux ministres et aux organismes publics concernés, et définisse des programmes de recherche menés en son sein ou dans d'autres organismes de recherche ;

- participe, notamment par ses activités de recherche, aux échanges internationaux, dans ses domaines de compétences.

Le rapporteur prend acte du transfert des compétences de l'IRSN vers celle de l'ASNR, dans des conditions comparables.

S'il salue la continuité de ces activités permise par ce transfert, il n'en soulève pas moins deux observations.

Premièrement, il s'interroge sur les conséquences de la qualification de l'ASNR en tant qu'établissement public de recherche.

Le rapporteur approuve cette qualification, dans la mesure où elle permet à la future autorité de contribuer à la recherche publique, d'offrir le même cadre de recrutement qu'un établissement public de recherche ou encore de pouvoir bénéficier des engagements financiers de l'État dont ce type d'établissement dispose.

Néanmoins il note le caractère inédit de l'assimilation d'une AAI, dépourvue de la personnalité morale en raison de son statut, à un établissement public de recherche.

Dans son avis sur le présent projet de loi, le Conseil d'État a d'ailleurs souligné que « cette assimilation ne vaut que dans la mesure où les dispositions du code de la recherche ainsi rendues applicables ne sont pas contraires à celles du code de l'environnement régissant l'ASNR ».

Deuxièmement, le rapporteur attire l'attention sur les règles de déontologie applicables aux activités commerciales de l'ASNR.

Celles-ci sont renvoyées au règlement intérieur de la nouvelle autorité.

Or, ces règles, gage de confiance et d'acceptabilité, doivent être consolidées, pour préciser le cadre d'intervention de l'autorité en matière commerciale et protéger en amont ses personnels de tout éventuel soupçon de prise illégale d'intérêts.

C'est pourquoi l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a indiqué, dans sa contribution écrite, qu'« afin de prendre en compte l'évolution du périmètre des missions exercées par la future Autorité, il paraît utile de préciser les règles de déontologie qui seront applicables aux interventions des services dans le cadre des nouvelles activités pouvant donner lieu à des rémunérations pour services rendus. »

De son côté, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) a ajouté qu'« il s'agit d'assurer la sécurité des membres de l'ASNR au regard d'un éventuel soupçon de prise illégale d'intérêt, notamment si des formations ou des opérations de mesurage sont dispensées à des opérateurs économiques par ailleurs soumis au contrôle de l'ASNR et font l'objet d'une facturation. »

Dans ce contexte, le rapporteur a proposé trois amendements visant à renforcer les règles de déontologie applicables aux activités commerciales de l'ASNR, mais aussi à clarifier plusieurs références juridiques mentionnées par l'article.

Tout d'abord, l'amendement COM-80 prévoit, pour le règlement intérieur de l'ASNR, des règles légales minimales de déontologie propres à certaines activités commerciales, notamment les formations ou opérations de mesurage dispensées à titre onéreux à des opérateurs économiques soumis à son contrôle. Il vise également à consolider la prévention des risques de conflits d'intérêts en prévoyant que le règlement intérieur veille, pour ces activités, à la séparation entre les services chargés de la mise en paiement et ceux chargés de la décision ou de l'inspection, ainsi qu'au rapportage de ces activités auprès de la commission d'éthique et de déontologie.

De plus, l'amendement COM-81 du rapporteur a pour objet de substituer la notion plus actuelle de « secret des affaires » à celle de « secret en matière industrielle et commerciale ». Cette terminologie a d'ores et déjà été mise à jour dans le code de l'environnement ainsi que dans le code des relations entre le public et l'administration, par la loi dite « Secret des affaires », du 30 juillet 201846(*).

Enfin, l'amendement COM-79 vise à clarifier la référence au régime des installations nucléaires de base (INB), prévu à l'article L. 592-1 du code de l'environnement, pour mieux définir les activités nucléaires dont l'ASNR est exclue.

Le dernier amendement a été déposé à l'identique par le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 4 (avis)

Précision des règles de transparence, d'information et de participation
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Cet article propose de préciser les règles de transparence, d'information et de participation de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

Le rapporteur a proposé trois amendements visant à :

- ajouter les commissions permanentes compétentes comme destinataires de la présentation par l'ASNR des sujets sur lesquels une association du public est organisée et de la communication par elle des principaux résultats de ses programmes de recherche ( COM-82) ;

- prévoir la présentation du projet de décision d'adoption du règlement intérieur à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), au Haut comité pour la transparence et l'information sur la sûreté nucléaire (HCTISN) et à l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (Anccli), et la transmission des projets de décisions de modification, afin de leur permettre de présenter des observations ( COM-83) ;

- associer les différentes commissions permanentes compétentes à l'élaboration des observations précitées de l'Opecst sur les projets de décision ou de modification de ce règlement intérieur ( COM-84).

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 4 prévoit que la nouvelle Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) :

- présente à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) et au Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)47(*) les sujets sur lesquels une association du public est organisée ainsi que les modalités de mise en oeuvre et de reddition des comptes ;

- communique la nature et les principaux résultats de ses programmes de recherche à l'Opecst, au HCTISN, au Haut conseil de la santé publique (HCSP) et au Conseil d'orientation des conditions de travail (COCT)48(*).

Le rapporteur approuve les règles de transparence, d'information et de participation proposées.

C'est aussi l'avis de l'Opecst49(*), qui a indiqué : « La transmission des sujets soumis à la participation du public et des programmes de recherche à l'Opecst serait utile pour lui permettre de suivre des sujets majeurs comme celui de Cigéo. Ces deux aspects pourraient aussi être intégrés au rapport annuel de la nouvelle autorité, rapport qui devra toujours être présenté et rendu public devant l'Opecst ».

Dans le même esprit, le HCTISN a précisé : « Les conditions fixées par l'article 4 imposant à la nouvelle autorité de présenter les sujets soumis à participation du public à l'Opecst et au HCTISN répondent au point 2.f de l'avis du Haut comité. Le Haut comité y est donc très favorable. Cette démarche a été mise en place avec succès par l'ASN pour que les parties prenantes participent à la définition des expertises à réaliser pour le projet Cigéo. »

Pour autant, le rapporteur retient de ses auditions qu'elles sont en retrait selon plusieurs acteurs.

Tout d'abord, le rapport d'information de l'Opecst du 11 juillet 202350(*), issu de la saisine de la commission des affaires économiques, a recommandé de renforcer le rôle du Parlement, et notamment de l'Opecst, en matière de suivi de la filière du nucléaire, en particulier sur les questions de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Dans sa contribution écrite, l'Opecst a ajouté que « concernant la séparation des activités d'expertise et d'instruction, d'une part, et d'élaboration des avis et décisions, d'autre part, ainsi que la publicité de ces activités, il serait souhaitable que le Parlement puisse avoir un droit de regard sur l'élaboration du règlement intérieur de la nouvelle autorité ».

Plus encore, l'Anccli a regretté de ne pas être expressément mentionnée parmi les autorités saisies : « Si cet article 4 rejoint les suggestions de l'ANCCLI, la fédération des 35 CLI rappelle que la France dispose du seul dispositif au monde d'organisation, de représentation et d'expression de la société civile sur les questions nucléaires. Pour autant, ce réseau riche de plus de 3 000 bénévoles, qui rayonne auprès de 3 millions d'habitants près des centrales nucléaires, qui participe à la transparence de l'information et à la pluralité d'expression sur les questions nucléaires n'est pas cité dans le projet de loi relatif à la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. L'Anccli s'interroge sur qui, comment, dans quelles circonstances, sur quels critères certains sujets feront l'objet d'une participation ou non du public. »

De son côté, France Nature Environnement (FNE) a appelé à compléter non seulement les institutions saisies, mais aussi les pratiques envisagées : « C'est un minimum minimorum. Il est utile et nécessaire que d'autres institutions, dont la qualité des avis est reconnue, soient prises en compte. Il s'agit en particulier à l'échelle nationale du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT) sans oublier la si attentive ANCCLI. Mais l'enjeu est loin de s'arrêter là. Il conviendrait que la loi et incidemment le législateur gravent dans le marbre les expérimentations et pratiques de l'IRSN pour traduire dans les faits des principes constitutionnels et l'approfondissement du droit de l'environnement. [...] Il n'est pas acceptable, selon nous, que les modalités de participation et d'information des publics soient renvoyées à un règlement intérieur sur lequel la représentation nationale ne pourra se prononcer. Il revient, au-delà des quelques mentions figurant aux articles 1 et 2 du projet de loi, de préciser ces modalités en toute conformité avec le droit européen et les conventions internationales, dont la France est signataire, sans parler de la Charte constitutionnelle de l'environnement. »

Dans la mesure où le projet de loi renvoie des éléments importants au règlement intérieur de la future autorité, tels que la distinction du processus d'expertise de celui de décision, les modalités de publication des résultats des activités d'expertise ou de décision, ou encore les règles de déontologie ou les modalités de délégation, le rapporteur estime essentiel de renforcer l'association du Parlement, et notamment des commissions permanentes, à son élaboration puis à ses modifications.

Sollicitée sur ce point, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) a indiqué préférer que l'Opecst demeure une voix unique, tandis que l'ASN a estimé qu'il revient au Parlement d'en débattre.

Dans ce contexte, le rapporteur a proposé trois amendements visant à :

- ajouter les commissions permanentes compétentes comme destinataires de la présentation par l'ASNR des sujets sur lesquels une association du public est organisée et de la communication par elle des principaux résultats de ses programmes de recherche (COM-82) ;

- prévoir la présentation du projet de décision d'adoption du règlement intérieur à l'Opecst, au HCTISN et à l'Anccli, et la transmission des projets de décisions de modification, afin de leur permettre de présenter des observations (COM-83) ;

- associer les différentes commissions permanentes compétentes à l'élaboration des observations précitées de l'Opecst sur ces projets de décision ou de modification de ce règlement intérieur (COM-84).

Le deuxième de ces amendements a été déposé à l'identique avec le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Section 2

Dispositions transitoires
Article 5 (avis)
Disposition de transition visant à permettre la création par fusion
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)

Cet article consiste en une disposition de transition visant à permettre la création par fusion de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

Le rapporteur a proposé un amendement ( COM-67) tendant à consolider les modalités de transfert des biens, des droits et des obligations envisagées dans ce cadre, en prévoyant :

- la limitation du transfert des biens, des droits et des obligations à celui « respectant » la répartition des attributions prévues par la loi, plutôt qu'en « tenant compte » ;

- la consolidation de la couverture des frais et des risques, en excluant les honoraires, aux côtés des droits, des taxes ou des contributions ;

- la faculté de recourir à une convention de transfert pour en préciser les conditions.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 5 consiste en une disposition de transition permettant :

- de transférer les biens, les droits et les obligations de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) vers l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)51(*) ou le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) à titre gratuit sans indemnisation ni droit, taxe ou contribution prévue à l'article 879 du code général des impôts ;

- de maintenir les mandats des membres du collège de l'actuelle Autorité de sûreté nucléaire (ASN) au sein de celui de l'ASNR jusqu'au terme de ces mandats.

Le rapporteur prend acte de ces dispositions transitoires, nécessaires à la mise en oeuvre de la réforme de l'ASNR.

Il approuve le maintien des membres actuels du collège jusqu'au terme de leur mandat, dans la mesure où la dernière nomination au titre du Président de la République date du 10 décembre dernier52(*).

Il relève que les modalités de transfert des biens, des droits et des obligations ne sont pas des plus claires, en particulier pour le CEA, dans la mesure où elles se combinent avec d'autres dispositions prévues aux articles 7 et 8.

Interrogée sur ce point par le rapporteur, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) a confirmé, dans sa contribution écrite, que plusieurs articles s'appliquent aux transferts précités : « Le transfert des contrats de travail et accords collectifs est régi par les articles 7 et 8, y compris pour ceux qui partent au CEA. Le transfert des autres biens, droits et obligations est régi par l'article 5. »

De son côté, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a justifié, dans sa contribution écrite, l'intérêt de ces différents articles, considérant que les transferts de personnels ne peuvent être mis sur le même plan que les autres transferts : « Les contrats de travail doivent faire l'objet d'un traitement législatif différencié par rapport aux autres droits et obligations, car ils appellent un traitement spécifique (substitution et non transfert) qui n'est par ailleurs pas identique entre les contrats transférés à l'ASNR et ceux qui le sont au CEA. »

Le rapporteur retient de ces échanges avec le CEA la nécessité de consolider les modalités de transfert des biens, des droits et des obligations, avec une triple nécessité : d'une part, le respect de la répartition des compétences prévues par la présente loi ; d'autre part, la couverture des frais et risques d'exécution ; enfin, la possibilité d'une convention de transfert pour en définir les modalités.

C'est la raison pour laquelle le CEA a indiqué : « À ce stade, le projet de loi prévoit que les biens, droits et obligations sont transférés à l'État et au CEA en tenant compte de la répartition des attributions prévues par la présente loi. Pour le CEA, il est essentiel que les biens, droits et obligations qui lui sont transférés soient strictement limités à ceux qui sont associés à l'exercice de l'activité de dosimétrie passive. Les modalités de ce transfert doivent être fixées par décret en Conseil d'État ; il nous semblerait pertinent que celui-ci laisse aux organismes le soin d'établir une convention de transfert listant précisément l'ensemble des biens, droits et obligations visés, sous le contrôle de leurs organes d'administration. Le CEA est par ailleurs favorable à toute disposition permettant de couvrir l'ensemble des frais et risques d'exécution liés à cette opération, incluant les travaux qui s'avéreraient nécessaires pour assurer le bon état de fonctionnement des installations et équipements concernés. »

Dans ce contexte, le rapporteur a proposé un amendement (COM-67) proposant de consolider les modalités de transfert des biens, des droits et des obligations, en prévoyant :

- la limitation du transfert des biens, des droits et des obligations à celui « respectant » la répartition des attributions prévues par la loi, plutôt qu'en « tenant compte » ;

- la consolidation de la couverture des frais et des risques, en excluant les « honoraires »53(*), aux côtés des « indemnité [...] droit, taxe ou contribution » ;

- la faculté de recourir à une convention de transfert pour en préciser les conditions.

Sollicitée par le Gouvernement, la DGPR a indiqué que les première et dernière modifications ne sont pas souhaitables et que la deuxième n'est pas nécessaire. S'agissant de l'ASN, elle n'a pas émis d'avis sur la première proposition, mais a estimé que la deuxième n'est pas nécessaire et la dernière n'est pas souhaitable.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

CHAPITRE II

Ressources humaines
Section 1

Dispositions modifiant le code de l'environnement
Article 6 (avis)
Fixation des modalités de recrutement
de la future Autorité de sûreté nucléaire (ASNR)
ainsi que des modalités d'organisation et de fonctionnement
de son comité social d'administration et des délégués syndicaux

Cet article propose de fixer les modalités de recrutement de la future Autorité de sûreté nucléaire (ASNR) ainsi que les modalités d'organisation et de fonctionnement de son comité social d'administration et des délégués syndicaux.

Pour mieux intégrer la jurisprudence du Conseil constitutionnel, le rapporteur a proposé deux amendements visant à préciser :

- d'une part, que les agents dont les attributions ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté ou comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique ne peuvent être de nationalité étrangère ou apatrides ( COM-86) ;

- d'une part, que les inspecteurs de sûreté nucléaire doivent être recrutés parmi les fonctionnaires et agents de droit public et que seuls les fonctionnaires peuvent exercer les missions de police judiciaire ( COM-87).

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 6 prévoit que le personnel de la future Autorité de sûreté et de radioprotection (ASNR) puisse relever de différents statuts (fonctionnaires, agents contractuels de droit public, salariés de droit privé).

Plus encore, l'article institue un comité social d'administration, présidé par le président de l'ASNR et composé de représentants de l'administration et du personnel54(*), exerçant la plupart des compétences des comités sociaux d'administration et des comités sociaux et économiques.

Il dispose de la personnalité civile et gère son patrimoine, dont un budget de fonctionnement et un budget pour les activités sociales et culturelles de l'ensemble du personnel55(*).

Ce comité comporte plusieurs formations :

- une commission des agents publics, pour les attributions56(*), concernant exclusivement les fonctionnaires et les agents contractuels de droit public ;

- une commission des salariés privés, lorsque les attributions57(*) concernent exclusivement ces personnels ;

- une formation plénière, examinant les questions intéressant l'ensemble des personnels ou non attribuées aux commissions précitées ;

- une formation spécialisée chargée des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail pour l'ensemble des personnels, des formations locales pouvant être instituées lorsque des risques professionnels particuliers le justifient.

Pour les salariés privés, l'article prévoit que des délégués syndicaux sont désignés, au niveau central, par les organisations syndicales représentatives du collège des salariés. Elles doivent satisfaire aux critères de représentativité des organisations syndicales58(*), à l'exception du critère d'audience, apprécié par le recueil d'au moins 10 % des suffrages aux dernières élections du comité social d'administration au sein du collège des salariés. Chaque organisation représentative peut constituer une section syndicale et chaque syndicat non représentatif peut désigner un représentant de la section. La validité des accords collectifs applicables aux salariés de droit privé est subordonnée à l'accord, d'une part, du président de l'ASNR et, d'autre part, d'une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli 30 % ou 50 % des suffrages au sein du collège des salariés du comité social d'administration.

Pour les agents publics, l'article prévoit que les organisations représentatives habilitées sont celles disposant d'au moins un siège au sein du comité social d'administration, au sein du collège des agents publics. La validité des accords collectifs applicables aux agents publics est subordonnée à leur signature par une ou plusieurs organisations représentatives habilitées.

Pour autant, l'article permet à l'ASNR d'inviter les représentants des salariés privés et des agents publics à participer à des négociations conjointes, donnant lieu, le cas échéant, à la conclusion d'accords collectifs distincts, applicables spécifiquement à ces deux catégories de personnels.

Enfin, l'article autorise le collège de l'ASNR à harmoniser, entre les différentes catégories de personnels, les montants et les conditions de versement des indemnités accessoires liées à des sujétions communes ainsi que les modalités de remboursement des frais de toute nature.

Le rapporteur approuve l'extension des possibilités de recrutement de l'ASNR, nécessaire dans le contexte de la relance de la filière française du nucléaire.

Au reste, le rapport d'information de l'Opecst du 11 juillet 202359(*), issu de la saisine de la commission des affaires économiques, a recommandé d'augmenter les effectifs et de renforcer les métiers au sein de la filière française du nucléaire, notamment en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.

Le rapporteur constate que les catégories de personnels visées reprennent celles prévues dans le cadre du premier projet de réforme, par l'article 24 de loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 202360(*),61(*).

Selon l'étude d'impact du projet de loi, on dénombre actuellement 1 744 salariés de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et 381 fonctionnaires, 77 agents contractuels de droit public et 28 agents mis à disposition de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

L'essentiel des salariés de l'IRSN ont vocation à rejoindre l'ASN, à l'exception des 180 salariés transférés vers le CEA, dont 140 mis à disposition d'office auprès du ministère des armées.

Les possibilités de recrutement offertes sont larges, intégrant les salariés de droit privé, à l'image de Voies navigables de France (VNF) ou des Agences régionales de santé (ARS).

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État n'a pas identifié de difficulté d'ordre constitutionnel ou conventionnel à ce choix : « L'ASNR n'étant pas dotée de la personnalité morale, c'est à travers elle l'État qui sera employeur d'un effectif important de salariés de droit privé, par l'effet de ce transfert d'environ 1 600 salariés de l'IRSN au titre de ses missions désormais confiées à cette AAI, qui seront d'ailleurs très majoritaires par rapport aux quelque 500 agents publics de l'ASN, mais aussi par celui des futurs recrutements de tels salariés, auxquels l'ASNR pourra procéder sans restriction particulière dans la loi. Le Conseil d'État n'identifie, toutefois, aucun obstacle d'ordre constitutionnel ou conventionnel à ce choix, qui relève de la compétence du législateur et est justifié en l'espèce, selon les motifs avancés par le Gouvernement, par le droit qui régit les personnes exerçant au sein de l'IRSN les missions transférées, par la technicité des qualifications qu'elles requièrent et par les tensions existant sur le marché de travail en matière de recrutements dans le secteur nucléaire ».

Pour autant, le rapporteur observe que l'extension des possibilités de recrutement de l'ASNR nécessite d'être encadrée, dans un souci de sécurité juridique.

D'une part, le Conseil constitutionnel a prohibé le recours à des personnels de nationalité étrangère pour exercer des fonctions inséparables de la souveraineté nationale, dans sa décision n° 98-399 DC du 5 mai 1998, notamment.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a rappelé que cette interdiction doit être appliquée, notamment dans les dispositions d'application de la loi : « le Conseil constitutionnel a jugé que des fonctions inséparables de l'exercice de la souveraineté nationale ne sauraient être, en principe, confiées à des personnes de nationalité étrangère (décision n° 98-399 DC du 5 mai 1998), qu'elles soient recrutées sous statut de droit public ou de droit privé. Le Conseil d'État souligne que cette exigence devra être respectée par les dispositions d'application de la loi. »

Or, l'article ne comporte aucun garde-fou reprenant cette exigence constitutionnelle.

Interrogée sur ce point, l'ASN a indiqué qu'un complément était également envisageable : « Cette exigence s'applique actuellement à l'ASN. S'il était estimé nécessaire de prévoir une disposition en R, via un des décrets d'application de la loi, celle-ci pourrait s'inspirer de la disposition prévue pour les contractuels de droit public. »62(*)

D'autre part, le Conseil constitutionnel a également prohibé, dans sa décision n° 2023-1042 QPC du 31 mars 2023 notamment, la délégation des compétences de police administrative générale inhérentes à l'exercice de la force publique à des personnes privées.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a rappelé que cette interdiction n'oblige pas pour autant à recourir à des fonctionnaires ou à empêcher toute délégation : « Le Conseil d'État relève, en premier lieu, que le Conseil constitutionnel a jugé qu'aucune exigence constitutionnelle n'impose que tous les emplois participant à l'exercice de ” fonctions régaliennes " soient occupés par des fonctionnaires (décision n° 2019-790 DC du 1er août 2019) et que des dispositions prévoyant qu'un organisme public peut employer des agents contractuels de droit privé accomplissant pour son compte des missions de police administrative n'ont ni pour objet ni pour effet de déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative générale (décision n° 2023-1042 QPC du 31 mars 2023, à propos de l'Office national des forêts). »

Actuellement, l'article L. 596-2 du code de l'environnement dispose que l'ASN désigne, parmi ses agents, des inspecteurs de la sûreté nucléaire qui sont habilités et assermentés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

Le terme d'agent de l'État est apprécié par référence à l'article L. 7 du code général de la fonction publique, qui identifie le fonctionnaire de l'État et l'agent contractuel de l'État.

Or, l'article ne prévoit pas la nature des agents qui pourront être désignés inspecteurs de la sûreté nucléaire, alors même qu'il étend les catégories de personnels de l'ASN aux salariés de droit privé.

C'est un point d'attention pour les représentants du personnel de l'ASN, qui se sont exprimés ainsi dans leur contribution écrite : « Nous sommes opposés au principe d'une Autorité exerçant des missions régaliennes dans un domaine sensible, et employant durablement et massivement des agents publics en contrats précaires (CDD) ou des salariés de droit privé n'étant pas soumis aux mêmes droits et devoirs que les agents fonctionnaires (obligations de secret professionnel, de discrétion professionnelle, de dignité, d'impartialité, de probité, de neutralité, de devoir de réserve et de se consacrer entièrement à ses fonctions). »

Sollicitée par le rapporteur, l'ASN a précisé que son intention était de conserver le système actuel : « En l'état du droit applicable, seuls les fonctionnaires et les agents contractuels de droit public sont et seront habilités pour exercer des missions de contrôle administratif en tant qu'inspecteurs de la sûreté nucléaire (en ce sens, cf. la définition de l'agent de l'État dans le code général de la fonction publique [...]). S'agissant des missions de police judiciaire (recherche et constatation des infractions), seuls les inspecteurs de la sûreté nucléaire ayant la qualité de fonctionnaire seront habilités. Un projet de décret en Conseil d'État d'application des dispositions de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes prévoit d'étendre cette qualité aux agents contractuels de droit public. Il n'y aura donc pas de différence entre le système proposé et celui actuel. »

Le rapporteur observe que les modalités de représentation sociale et de négociation collective sont complexes.

Tout d'abord, ces règles ne sont pas les mêmes entre les fonctionnaires et agents contractuels de droit public, d'un part, et les salariés de droit privé, d'autre part. Cela peut conduire à une divergence des droits sociaux, atténuée cependant par les formations plénière et spécialisée du comité social d'administration et la faculté d'harmonisation de certaines règles confiée au collège de l'ASN.

Les syndicats de l'IRSN ont insisté sur la complexité et l'hétérogénéité des règles prévues pour les différentes catégories de personnels : « Le projet aura pour conséquence de faire cohabiter des statuts de salariés qui ne sont pas soumis aux mêmes règles légales. L'organisation du dialogue social sera particulièrement compliquée et, à long terme, aucune garantie de maintien des acquis sociaux n'est donnée aux salariés de droit privé. »

Les représentants de l'ASN ont d'ores et déjà regretté la suppression d'une règle dont ils disposaient : « Concernant les acquis sociaux dont bénéficie le personnel de l'ASN, l'article 6 du projet de loi acte la suppression d'une partie de l'action sociale interministérielle pour les agents publics de l'ASN. Les améliorations hypothétiques de l'action sociale de la nouvelle autorité sont renvoyées à des négociations futures, ce qui n'apporte aucune garantie. »

Interrogé sur ce point, l'ASN a admis la possibilité de divergences des droits sociaux : « Il est possible que les élections engendrent la désignation de représentants du personnel issus d'organisations syndicales différentes entre la commission des agents de droit public et celle des agents de droit privé. Cela est renforcé par le fait que les implantations syndicales diffèrent entre l'IRSN et l'ASN aujourd'hui. Cela impliquera pour l'employeur, dans le cas de négociations communes et notamment au titre des champs couverts par l'article 222-3 du code général de la fonction publique, de prendre en compte la dualité des parties représentant le personnel de l'ASNR. Les accords pourront le cas échéant diverger pour des raisons qui tiennent aux différences statutaires entre salariés régis par le droit privé et agents de droit public. »

Plus encore, le comité social d'administration apparaît comme une instance hydride, appliquant tantôt le code général de la fonction publique et tantôt le code du travail. Pour autant, son écriture est inspirée de VNF ou de l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS).

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État, sans soulever de difficulté d'ordre constitutionnel ou conventionnel, s'est ému de la grande complexité du comité social d'administration : « Il est ainsi prévu, s'agissant du comité social d'administration (CSA) qui est mis en place au sein de l'ASNR, une formation plénière et une formation spécialisée chargée des questions de santé, de sécurité et des conditions de travail, compétentes pour les questions communes qui intéressent la situation de l'ensemble du personnel, tandis que les questions concernant de manière exclusive, respectivement les agents publics et les salariés de droit privé, relèvent de deux commissions propres à chacune de ces catégories de personnel. En dépit de la grande complexité du dispositif auquel ce choix conduit, il n'apparaît contraire à aucun principe constitutionnel, notamment au principe de participation garanti par le huitième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 ni au principe d'égalité devant la loi. »

Dans ce contexte, le rapporteur appelle à la vigilance quant à la mise en oeuvre de la réforme, qui doit protéger et mobiliser les différentes catégories de personnels.

Pour renforcer la constitutionnalité des dispositions prévues, il a proposé deux amendements visant à préciser :

- d'une part, que les agents dont les attributions ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté ou comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique ne peuvent être de nationalité étrangère ou apatrides (COM-86) ;

- d'une part, que les inspecteurs de sûreté nucléaire doivent être recrutés parmi les fonctionnaires et agents de droit public et que seuls les fonctionnaires peuvent exercer les missions de police judiciaire (COM-87).

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Section 2
Dispositions transitoires
Article 7 (avis)
Transfert des contrats de travail
de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
vers la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)
hors ceux destinés au Commissariat à l'énergie atomique
et aux énergies alternatives (CEA)

Cet article vise à transférer les contrats de travail de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) vers l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), hors ceux destinés au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

Le rapporteur prend acte d'une telle répartition, qui convient à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), à l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND) et au CEA.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article sans modification.

L'article 7 prévoit de transférer les contrats de travail de l'IRSN vers la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), hors ceux destinés au CEA.

Pour ce faire, il précise que :

- l'ASNR est substituée à l'IRSN en qualité d'employeur des salariés, les contrats lui étant transférés sans autre modification ;

- le CEA, ou l'une de ses filiales désignée par décret, est substitué à l'IRSN en qualité d'employeur des salariés de ce dernier qui exercent des missions relatives à la fourniture et à l'exploitation des dosimètres à lecture différée, les contrats lui étant transférés sans autre modification ;

- le CEA, est substitué à l'IRSN en qualité d'employeur des salariés de ce dernier qui apportent un appui technique aux autorités de l'État dans plusieurs matières63(*), les contrats lui étant transférés sans autre modification.

Dans le dernier cas, les intéressés sont d'office mis à disposition du ministre de la défense, pour y exercer leur mission pendant une durée de trois ans, renouvelable à leur demande, puis affectés au sein du CEA sur un poste correspondant à leur qualification, sans perte de rémunération.

Le rapporteur prend acte de la répartition proposée, qui convient aux différents interlocuteurs : l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND) et le CEA.

Interrogée par le rapporteur, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) a indiqué que 180 personnes seront transférées de l'IRSN vers le CEA, dont 140 seront mis à disposition d'office du ministère des armées.

Le rapporteur constate que la répartition proposée reste très dérogatoire au droit commun, avec des différences de traitement entre les salariés de l'IRSN transférés à l'ASNR et ceux transférés au CEA et des mises à disposition d'office de ce dernier vers le ministère des armées.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a toutefois admis ces dispositions, en ces termes : « Ce choix apparaît justifié par l'intérêt général qui s'attache à ce que, compte tenu des pénuries de main-d'oeuvre dans le secteur nucléaire, soit évitée toute rupture de la relation de travail des salariés concernés à l'occasion du transfert des missions qu'ils exercent. »

Le rapporteur retient de ces échanges avec le CEA que deux des observations de cet établissement ont bien été prises en compte : tout d'abord, la faculté de recourir à une filiale pour la gestion des activités de dosimétrie passive ; plus encore, la clarté des dispositions sur les transferts des contrats de travail de l'IRSN vers le CEA, mais aussi des mises à dispositions d'office du CEA vers le ministère des armées.

C'est la raison pour laquelle le CEA a indiqué : « Les propositions et observations émises par le CEA ont été globalement prises en compte. Deux points d'attention ont été en particulier soulevés par le CEA dans la mise en oeuvre des opérations envisagées : - d'une part, s'agissant du transfert de l'activité dans le domaine de la dosimétrie passive, il est important que celui-ci puisse se faire vers le CEA ou vers une filiale, compte tenu de la nature commerciale de cette activité ; - d'autre part, s'agissant des contrats de travail transférés au CEA, la nécessité de dispositions légales très claires sur, d'une part, ces transferts de droit et, d'autre part, la mise à disposition d'office du ministre de la défense s'agissant des salariés de la DEND. Il s'agit notamment de s'assurer que les conditions de mise en oeuvre de ces dispositions légales sont claires et précises pour éviter tout contentieux, notamment en cas de refus opposé par un salarié. »

En revanche, il retient de ses échanges avec l'IRSN des inquiétudes quant aux transferts de personnels vers le CEA, dont il conviendra de bien évaluer l'application.

Tout d'abord, la direction a indiqué sa réserve s'agissant du devenir de l'activité de dosimétrie, mais aussi de celle d'expertise, s'inquiétant de la capacité de réaction en cas de crise nucléaire ou radiologique : « L'ensemble des missions actuelles de l'IRSN et de l'ASN sont conservées en étant réparties entre trois acteurs : la future autorité (ASNR), le ministère des armées (autorité de sûreté nucléaire de défense) et le CEA. Les modalités d'interaction entre ces trois acteurs devront être définies. En effet, concernant le devenir de l'expertise qui était jusqu'à présent fédérée au sein de l'IRSN, la nouvelle autorité de sûreté nucléaire de défense s'appuiera sur l'expertise de sûreté de l'ASNR pour les expertises de sûreté spécialisées. La nouvelle autorité de sûreté défense (au sein du ministère des armées) fournira, quant à elle, les expertises nécessaires à l'autorité de sécurité (Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère chargé de l'Énergie). S'agissant de l'activité de dosimétrie passive, il est prévu qu'elle soit transférée au CEA, au motif principal du caractère commercial de cette activité et des questions déontologiques qu'elle soulèverait au sein de l'Autorité. [...] L'IRSN réitère son souhait de maintenir cette activité dans la nouvelle Autorité, afin de ne pas affaiblir la capacité de réponse de l'État en cas de crise nucléaire ou radiologique et de garantir l'entretien d'un stock stratégique de dosimètres et une réactivité forte en cas de crise nucléaire ou radiologique ».

Plus encore, les syndicats ont également critiqué le transfert de cette activité de dosimétrie, mais aussi de sécurité, évoquant des risques pour la sûreté et la sécurité nucléaires, mais aussi en termes de conflits d'intérêts : « Le projet de loi prévoit que les compétences d'évaluation de la sûreté des installations nucléaires civiles seront transférées dans la future autorité, alors que les compétences d'évaluation de la sécurité/malveillance des installations nucléaires civiles seront transférées au CEA avec mise à disposition du ministère des armées. Cette dispersion des compétences est en complète contradiction avec l'argument principal avancé pour justifier le projet de fusion : "Regrouper tout le monde sous une même entité pour améliorer la fluidité“. Cette dispersion va dégrader la capacité d'une expertise conjointe sûreté-sécurité alors que la protection contre la malveillance se joue de plus en plus lors de la conception des installations qui impose de faire des arbitrages entre sûreté et sécurité. Cette dispersion va isoler la France, alors qu'on observe au niveau international un rapprochement des expertises en sûreté et en sécurité [...], rapprochement dû plus particulièrement à l'augmentation de la menace malveillante et au développement des cyberattaques. Cette séparation va complexifier la gestion de crise puisque les experts à mobiliser et à entraîner seront issus de plusieurs entités. Le projet de loi prévoit de transférer dans la future autorité les compétences d'évaluation de l'exposition interne aux rayonnements ionisants (inhalation ou ingestion) et de transférer au CEA l'unité de production et d'exploitation des dosimètres permettant d'évaluer l'exposition externe. Ceci va complexifier l'évaluation de la dose globale (interne + externe) reçue en cas d'accident par les travailleurs du nucléaire ou les riverains autour d'une installation nucléaire. [...] Nous ajoutons que confier les activités d'expertise de sûreté et de sécurité à des salariés du CEA, organisme qui est lui-même exploitant nucléaire, revient à ouvrir la possibilité de conflits d'intérêts et fait revenir 20 ans en arrière, au temps de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire. »

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article sans modification.

Article 8 (avis)
Maintien, à titre transitoire, des effets
des conventions, des accords ou des engagements unilatéraux
de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) au sein
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) ou du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

Cet article propose de maintenir, à titre transitoire, les effets des conventions, des accords ou des engagements unilatéraux de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) au sein de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) ou du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

Le rapporteur a proposé un amendement ( COM-88), visant à apporter deux clarifications sur la faculté pour l'ASNR de :

- renégocier les conventions et les accords de l'IRSN, à compter du 1er janvier 2025 ;

- substituer de nouveaux engagements unilatéraux à ceux de l'IRSN.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 8 tend à préciser les effets juridiques des conventions, des accords ou des engagements unilatéraux, en prévoyant que :

les effets des conventions, des accords et des engagements unilatéraux applicables aux salariés de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) dont les contrats de travail sont transférés à la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) sont maintenus au sein de cette dernière, jusqu'à l'entrée en vigueur des conventions, des accords et des engagements unilatéraux leur étant substitués et, à défaut, jusqu'au 30 juin 2027 ;

les négociations destinées à adapter ces conventions et ces accords sont effectuées par les délégués syndicaux de l'IRSN, à compter de l'entrée en vigueur du chapitre64(*) et jusqu'à la désignation des représentants de l'ASNR ;

- les salariés de l'IRSN dont les contrats de travail sont transférés à la future ASNR bénéficient d'une garantie de rémunération, en l'absence de convention ou d'accord et à compter du 1er juillet 2027 ;

- les salariés de l'IRSN dont les contrats de travail sont transférés au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), ou à l'une de ses filiales désignée par décret, sont encadrés par la section 6 du chapitre Ier du titre VI du livre II de la deuxième partie du code du travail65(*).

Le rapporteur prend acte de ces dispositions transitoires, qui doivent garantir la continuité des droits sociaux au cours de la réforme.

Pour autant, il constate que leur rédaction n'est pas des plus claires : d'une part, la référence « à compter de la date d'entrée en vigueur du présent chapitre » pourrait être remplacée par « au 1er janvier 2025 » ; d'autre part, les « engagements » devraient être qualifiés « d'unilatéraux ».

Aussi a-t-il proposé un amendement (COM-88), déposé à l'identique avec le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (CATDD), visant à apporter deux clarifications sur la faculté pour l'ASNR de :

- renégocier les conventions et les accords de l'IRSN, à compter du 1er janvier 2025 ;

- substituer de nouveaux engagements unilatéraux à ceux de l'IRSN.

À la demande du rapporteur, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ont précisé que les engagements visés sont bien ceux unilatéraux.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 9 (avis)
Organisation à titre transitoire d'un concours réservé
pour permettre aux agents contractuels de droit public
et aux salariés de droit privé de la future Autorité de sûreté nucléaire
et de radioprotection (ASNR) d'accéder aux corps de fonctionnaires

Cet article propose d'organiser, à titre transitoire, un concours réservé pour permettre aux agents contractuels de droit public et aux salariés de droit privé de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) d'accéder aux corps de fonctionnaires.

Le rapporteur approuve une telle disposition, utile pour l'attractivité de l'autorité à long terme et l'acceptabilité de la réforme à court terme.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article sans modification.

L'article 9 propose l'organisation, pendant une durée de six ans suivant l'entrée en vigueur du chapitre66(*), de recrutements réservés exceptionnels valorisant les acquis de l'expérience professionnelle, permettant l'accès aux corps de fonctionnaires de l'État67(*) aux agents contractuels de droit public et aux salariés de droit privé.

Pour bénéficier de ce concours réservé, ces agents et salariés doivent justifier d'une durée d'ancienneté de 4 ans en équivalent temps plein (ETP) au sein de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ou de l'ASNR.

Le rapporteur approuve l'organisation d'un concours réservé, qui doit permettre de renforcer la stabilité et l'attractivité des métiers et des compétences au sein de l'ASNR.

Il constate que le procédé n'est pas inédit, puisqu'un concours réservé a été organisé pour certains corps du ministère de la justice, avec l'ordonnance dite « Transferts de personnels », du 16 mai 201868(*), prise en application de la loi dite « Justice du XXIe siècle », du 18 novembre 201669(*).

Pour autant, le rapporteur appelle à faire preuve de vigilance quant à la mobilisation et la valorisation de toutes les catégories de personnels, nécessaires à la réussite de la réforme.

Il constate que les représentants du personnel de l'ASN ont critiqué le manque de précision du concours réservé, dans leur contribution écrite : « Les conditions d'accès à certains corps de fonctionnaires réservées aux agents contractuels de droit public et aux salariés de droit privé de la future Autorité ne sont pas définies dans cet article. En particulier, des questions se posent sur le nombre d'agents concernés, les types de corps de fonctionnaires concernés (personnels administratifs inclus ?) »

Il observe également que les syndicats de l'IRSN ont relevé le manque d'attractivité de ce concours réservé, dans leur contribution écrite : « Pour les salariés de droit privé ayant plusieurs années d'expérience le passage au statut de fonctionnaire ne sera pas intéressant, notamment pour la retraite compte tenu de cotisations aux deux régimes. »

Plaidant pour appliquer le concours réservé au plus grand nombre de corps pertinents, le rapporteur estime que des négociations collectives et des ajustements réglementaires pourront permettre de répondre aux préconisations des représentants du personnel.

Sollicitées par le rapporteur, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) lui ont indiqué que les modalités d'organisation du concours réservé seront précisées par voie réglementaire.

Ils lui ont indiqué que le vivier de personnels susceptibles de présenter les conditions pour se présenter à ce concours réservé était de 2 000 personnes. Toutefois, les corps concernés ne sont pas connus, car ils feront l'objet de concertation avec leurs gestionnaires. À ce stade, le corps des fonctionnaires de catégorie A de la filière technique - ingénieurs de l'industrie et des mines (IIM) - et les cadres des deux entités sont envisagés.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article sans modification.

Article 10 (avis)
Organisation à titre transitoire de la représentation sociale
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection via
le comité social d'administration de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN)
ainsi que le comité social et économique et les délégués syndicaux
de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

Cet article propose d'organiser, à titre transitoire, la représentation sociale de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), via le comité social d'administration de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ainsi que le comité social et économique et les délégués syndicaux de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Le rapporteur a proposé un amendement ( COM-89) visant à permettre à ces comités sociaux d'obtenir, aux côtés du président de l'ASNR, la réunion de la formation conjointe en charge de connaître les sujets communs à l'ensemble des personnels.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 10 fixe les modalités d'organisation de la représentation sociale, d'ici la constitution du comité social d'administration de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) et au plus tard le 31 mars 2026.

Aussi est-il proposé :

- le maintien du comité social d'administration de l'actuelle Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et du comité social et économique de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)70(*), exerçant les missions relatives respectivement aux agents publics et aux salariés, sous la présidence du représentant de l'ASNR, et poursuivant leurs mandats, jusqu'à la désignation des représentants du personnel issus des élections ;

- le maintien des mandats des délégués syndicaux de l'IRSN au sein de l'ASNR, jusqu'à la désignation des membres du comité social d'administration ;

- la dévolution du patrimoine du comité social d'entreprise de l'IRSN vers le comité social de l'ASNR, à cette date de désignation.

Le rapporteur prend acte de la représentation sociale provisoire proposée pour l'ASNR.

Il observe que les représentants du personnel de l'ASN lui ont rappelé l'intérêt d'une représentation sociale provisoire, dans leur contribution écrite : « Nous saluons l'allongement de la période transitoire au cours de laquelle nos mandats actuels seront maintenus, avant mise en place du comité social d'administration. Cela nous permettra de préparer les élections professionnelles de manière plus sereine, après une année 2024 très chargée. Le délai reste cependant contraint. »

Il note cependant que les syndicats de l'IRSN lui ont indiqué la complexité de la représentation sociale prévue, provisoire comme pérenne, dans leur contribution écrite : « Le projet aura pour conséquence de faire cohabiter des statuts de salariés qui ne sont pas soumis aux mêmes règles légales. L'organisation du dialogue social sera particulièrement compliquée et à long terme aucune garantie de maintien des acquis sociaux n'est donnée aux salariés de droit privé. »

Soucieux de parfaire cette représentation sociale provisoire, gage de paritarisme et donc d'acceptabilité, le rapporteur a proposé un amendement (COM-89), déposé à l'identique avec le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, visant à permettre aux comités sociaux de l'ASN et de l'IRSN d'obtenir, aux côtés du président de l'ASNR, la réunion de la formation conjointe en charge de connaître les sujets communs à l'ensemble des personnels.

Sollicitées sur ce point par le rapporteur, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ont confirmé que leur intention était que la saisine de la formation conjointe puisse être effectuée par l'administration et les représentants du personnel.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 11 (avis)
Évaluation des moyens financiers et humains nécessaires à la création
par fusion de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)
et allocation de moyens par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN)
et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)
dans cette perspective

Cet article propose d'évaluer les moyens financiers et humains nécessaires à la création par fusion de l'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ANSR), l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) devant allouer des moyens dans cette perspective.

Le rapporteur a proposé deux amendements ( COM-68, COM-69) afin d'intégrer à cette évaluation :

- d'abord, les besoins du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ;

- ensuite, la faisabilité et l'opportunité de la mise en oeuvre d'un préfigurateur ;

- enfin, l'Opecst et les commissions permanentes compétentes comme destinataires.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 11 comporte plusieurs dispositions :

- l'allocation de 15 M€ par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de 0,7 M€ par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) en direction des salariés et des contractuels de droit public en 2024 ;

- l'évaluation, d'ici le 1er juillet 2024, par le Gouvernement, en collaboration avec l'actuel ASN et l'IRSN, des besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à la future ASNR en 2025, ainsi que des mesures indispensables pour assurer l'attractivité des conditions d'emploi de ses personnels par rapport au marché du travail ;

- l'évaluation, par la future ASNR, de ces moyens et de ces mesures, pour les cinq années suivant la promulgation de la loi71(*).

Le rapporteur prend acte des modifications proposées.

Pour autant, il relève que l'allocation de moyens par l'ASN et l'IRSN pose une double difficulté.

Sur la forme, il rappelle que le Conseil d'État, dans son avis sur le projet de loi, a fait part de réserves sur la constitutionnalité du dispositif : « Le Conseil d'État estime que la première de ces dispositions, qui est inédite et empiète sur les prérogatives de l'IRSN et de son autorité de tutelle ainsi que de l'ASN, ne relève pas du domaine de la loi tel qu'il est défini par l'article 34 de la Constitution et a été précisé, s'agissant des AAI, par l'article 1er de la loi organique n° 2017-54 du 20 janvier 2017 mentionnée ci-dessus, qui prévoit que la loi institue ces autorités et fixe les règles relatives à leur composition et à leurs attributions ainsi que les principes fondamentaux relatifs à leur organisation et à leur fonctionnement ».

Sur le fond, les montants proposés sont bien insuffisamment pour couvrir les coûts, nécessairement croissants, du système de sûreté nucléaire et de radioprotection.

À ce titre, le rapporteur rappelle que la direction générale de la prévention des risques (DGPR) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) ont indiqué que les mesures du projet de loi destinées à renforcer l'attractivité de l'ASNR et à équilibrer les modalités de gestion entre les statuts de personnels au sein de l'IRSN et de l'ASN iront dans le sens d'un renchérissement des coûts pour les finances publiques consacrées à la sûreté nucléaire.

Aussi est-il nécessaire, selon le rapporteur, que le Gouvernement tire les conséquences de la réforme proposée du système de sûreté nucléaire et de radioprotection sur son financement, dès le prochain projet de loi de finances initial pour 2025.

De plus, le rapporteur constate que l'évaluation prévue présente plusieurs incomplétudes.

Tout d'abord, elle ne mentionne pas les besoins humains et financiers du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), qui lui a indiqué dans sa contribution écrite que « les moyens associés doivent donc être correctement évalués et couverts, et ce, en particulier sans obérer le plan d'emplois du CEA ».

Cela d'autant plus regrettable que l'évaluation prévue dans le cadre du premier projet de réforme, par l'article 19 de loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 202372(*), intégrait bien le CEA dans le champ de l'analyse73(*).

Plus encore, elle ne prévoit pas de préfigurateur, alors que le mandat du président de l'ASN arrive à échéance le 13 novembre 2024.

Dans ce contexte, le rapporteur observe que le principe d'un préfigurateur a été accueilli positivement par le président de l'ASN, Bernard Doroszczuk74(*) : « Mon mandat se termine en novembre prochain, je ne serai donc pas présent au moment où le regroupement [pourrait être] décidé. Faut-il un préfigurateur ? Je suis mal placé pour le dire, la décision revient à ceux qui vont désigner mon successeur, mais il me semblerait effectivement de bonne méthode d'initier les démarches de sélection de mon remplaçant avant le 12 novembre, d'autant plus que la loi aurait été votée l'été prochain. »

En revanche, le directeur général de l'IRSN, Jean-Christophe Niel, a soulevé des difficultés techniques à sa mise en oeuvre : « Le président de l'ASN quittera ses fonctions en novembre 2024. Lorsque la nouvelle structure verra le jour, il serait bon que le nouveau dirigeant ait en main les options possibles et qu'il soit dépositaire du travail qui a été précédemment engagé. La notion de préfiguration n'est pas simple à mettre en oeuvre ; en effet, les nominations du président de l'ASN et du directeur général de l'IRSN doivent être approuvées par les commissions parlementaires. Il est difficile d'imaginer un préfigurateur qui ne serait pas passé par cette étape... »

Enfin, si le Parlement est mentionné comme destinataire, l'Opecst et les commissions permanentes sont omis.

Sollicitée sur ce point par le rapporteur, la direction générale de la prévention des risques a indiqué que la mesure est d'ordre réglementaire, tandis que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a précisé qu'il revient au Parlement d'en décider.

Au total, le rapporteur a proposé deux amendements (COM-68, COM-69) afin d'intégrer à l'évaluation :

- d'abord, les besoins du CEA ;

- ensuite, la faisabilité et l'opportunité de la mise en oeuvre d'un préfigurateur ;

- enfin, l'Opecst et les commissions permanentes compétentes comme destinataires.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

CHAPITRE III
Le haut-commissaire à l'énergie atomique
Article 12 (délégué)
Abrogation du Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA)

Cet article vise à abroger l'article L. 332-4 du code de la recherche constituant la base légale du Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA).

Le rapporteur a présenté un amendement ( COM-52), proposant de rétablir une base légale au HCEA, sur le modèle de l'avant-projet de loi.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Le Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) : une instance de conseil scientifique et technique placé auprès de l'administrateur général du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

A. Le CEA a été créé par une ordonnance n° 45-2563 du 18 octobre 194575(*) en tant qu'établissement à caractère scientifique, technique et industriel, doté de la personnalité morale ainsi que de l'autonomie administrative et financière.

Depuis lors, son organisation et ses missions ont été recodifiées par l'ordonnance dite « Recherche », du 11 juin 200476(*), prise sur le fondement de la loi dite de « Simplification », du 2 juillet 200377(*).

B. L'article L. 332-4 du code de la recherche a institué un Haut-commissaire au sein du CEA.

L'article dispose que ce Haut-commissaire :

- assume la charge de conseiller scientifique et technique auprès de l'administrateur général ;

- peut saisir le Comité de l'énergie atomique78(*) et l'autorité administrative compétente de ses propositions concernant l'orientation générale scientifique et technique qui lui paraît souhaitable ;

- préside un conseil scientifique.

C. Un décret du 17 mars 201679(*) est venu préciser les modalités de fonctionnement du Haut-commissaire et du conseil scientifique.

D'une part, son article 11 précise que le Haut-commissaire :

- est nommé80(*) pour une durée de quatre ans, renouvelable une fois ;

- exerce les attributions précitées et préside le conseil scientifique ;

- peut être chargé, à la demande de l'administrateur général ou d'un ministre, de diverses missions de conseil et d'expertise dans les domaines intéressant le CEA, ainsi que de missions intéressant la défense nationale et l'enseignement ;

- peut saisir les ministres intéressés de propositions relatives à l'orientation générale scientifique et technique du CEA ;

- participe au contrôle gouvernemental de la dissuasion nucléaire et à la gestion patrimoniale des matières nucléaires nécessaires à la défense ;

- est rémunéré selon des éléments fixés par décision du ministre chargé du budget, après consultation des ministres chargés de la recherche et de l'énergie.

D'autre part, son article 12 précise que le conseil scientifique :

- est composé de membres nommés pour une durée de quatre ans renouvelable une fois, pour un tiers de membres nommés par l'administrateur général sur proposition du Haut-commissaire, pour un tiers de membres nommés par les ministres chargés de l'énergie, de la recherche, de l'industrie et de la défense, et pour un tiers de membres représentant le personnel, nommés après consultation des organisations syndicales représentatives ;

- se réunit à la demande du Haut-commissaire et au moins une fois par  an ;

- assiste le Haut-commissaire dans l'exercice de ses fonctions, en formulant des recommandations sur les orientations et activités scientifiques de l'établissement ;

- émet des avis sur la pertinence des activités scientifiques et des investissements de l'établissement au regard de sa mission ;

- est informé de l'exécution de ses programmes et en évalue les résultats ;

- communique ses avis, recommandations et rapports au conseil d'administration, au Comité de l'énergie atomique et aux ministres précités ;

- est organisé selon des modalités fixées par un arrêté conjoint des ministres chargés de la recherche et de l'énergie.

D. Un décret du 27 décembre 202381(*) a permis de recodifier le cadre règlementaire applicable au Haut-commissaire et au conseil scientifique.

Les attributions du HCEA ont été placées dans un article R. 332-1 du code de la recherche, aujourd'hui abrogé82(*), et celles du conseil scientifique dans un article R. 332-2 du même code, toujours en vigueur.

E. Un décret du 30 décembre 202383(*) est venu modifier les modalités de fonctionnement du Haut-commissaire et du conseil de politique nucléaire.

Tout d'abord, il a prévu le transfert du secrétariat du Conseil de politique nucléaire (CPN) du secrétariat général de la présidence de la République (SGPR) vers le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), en précisant que ce dernier peut confier au Haut-commissaire le soin d'en préparer les délibérations et d'assurer le suivi de leur mise en oeuvre.

Plus encore, ce décret a prévu que le Haut-commissaire :

- demeure nommé pour une durée de quatre ans, renouvelable une fois, et rémunéré selon des éléments fixés par décision du ministre chargé du budget, après consultation des ministres chargés de la recherche et de l'énergie ;

- préside le conseil scientifique du CEA - mais ne participe plus au conseil d'administration, avec voix consultative ;

- puisse saisir les membres du Gouvernement de propositions concernant, pour les activités nucléaires civiles et militaires, l'orientation générale scientifique et technique dans les domaines de la politique nucléaire, de la défense et de la sécurité nationale - mais ne puisse plus les saisir de propositions relatives à l'orientation générale scientifique et technique du CEA ;

- puisse être chargé, à la demande des ministres chargés de l'énergie et de la défense et du SGDSN, de missions de conseil et d'expertise dans le domaine de la politique nucléaire, ainsi que de missions intéressant la défense et la sécurité nationale, et à la demande des ministres chargés de l'énergie, de la recherche et l'enseignement supérieur, de missions de conseil et d'expertise dans le domaine de la politique nucléaire, ainsi que de missions intéressant la recherche et l'enseignement dans ce domaine - mais ne puisse plus être chargé, par l'administrateur général du CEA, de missions de conseil et d'expertise intéressant le CEA ;

- puisse être chargé, par le SGDSN, du secrétariat du CNP, en s'appuyant sur un adjoint nommé par arrêté du ministre chargé de l'énergie issu de la direction de l'énergie de la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et la direction des affaires internationales, stratégiques et technologiques (DAIST) du SGDSN - mais ne puisse plus être assisté par le comité scientifique du CEA.

- continue de participer au contrôle gouvernemental de la dissuasion nucléaire et à la gestion patrimoniale des matières nucléaires nécessaires à la défense ainsi qu'à la protection et au contrôle des matières nucléaires non nécessaires à cette politique.

F. Des moyens humains et financiers ont été alloués au Haut-commissaire pour l'exercice de ses missions.

Sollicité par le rapporteur, le Haut-commissaire a précisé disposer des moyens humains et budgétaires suivants :

- un cabinet composé généralement d'une dizaine d'experts, pour ses missions de conseil du Gouvernement et de l'administrateur général du CEA ;

- un service dédié, la direction déléguée du contrôle gouvernemental (DDCG), pour le contrôle gouvernemental de la dissuasion nucléaire et la gestion patrimoniale des matières nucléaires.

Il gère également un budget de fonctionnement.

II. Le dispositif envisagé - Une abrogation de l'article L. 332-4 du code de la recherche constituant la base légale du HCEA

A. L'article 12 du projet de loi propose d'abroger l'article L. 332-4 du code de la recherche instituant le HCEA

B. Dans l'avant-projet de loi, le Gouvernement envisageait non seulement l'abrogation de l'article L. 332-4 du code de la recherche, mais aussi l'institution d'un nouvel article L. 141-13 du code de l'énergie.

Cet article aurait été le suivant : « Art. L. 141-13 - Un Haut-commissaire à l'énergie atomique conseille le Gouvernement en matière scientifique et technique. Le Haut-commissaire peut saisir directement le Comité de l'énergie atomique mentionné à l'article L. 332-2 du code de la recherche et l'autorité administrative compétente de ses propositions concernant, dans le domaine des activités nucléaires civiles et militaires, l'orientation générale scientifique et technique qui lui paraît souhaitable. »

C. Cependant, dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a estimé que les modifications pouvaient être réalisées sur le plan réglementaire, plutôt que sur celui législatif.

Tout d'abord, il a rappelé que « 19. Des dispositions du projet de loi visent à modifier le rôle et, par voie de conséquence, le rattachement au CEA du Haut-commissaire à l'énergie atomique. Ce dernier, aux termes de l'article L. 332-4 du code de la recherche, assume la " charge de conseiller scientifique et technique auprès de l'administrateur général " et dispose de la faculté de " saisir directement " [le Conseil de l'énergie atomique], qui " arrête ", ainsi que le précise l'article L. 332-2 de ce code, le programme de recherche, de fabrication et de travaux du Commissariat (...) et l'autorité administrative compétente " de ses propositions. À ce titre, " il préside un conseil scientifique ". Le projet de loi, tout en lui conservant la faculté de saisir directement le Comité de l'énergie atomique, entend lui confier à l'avenir une mission de conseiller du Gouvernement en matière scientifique et technique dans le domaine nucléaire et mettre fin à son rattachement à l'administrateur général. »

De plus, il a estimé que « si des dispositions législatives sont bien nécessaires pour abroger l'article L. 332-4 du code de la recherche rappelé précédemment, le recours à la loi ne s'impose pas pour définir les nouvelles missions du haut-commissaire, le Premier ministre étant libre d'user du pouvoir réglementaire qu'il détient pour organiser, comme il l'entend, le travail du Gouvernement. Le fait de mettre fin au rattachement du haut-commissaire au CEA, qui constituait l'une des règles constitutives propres à cet établissement public créé par la loi, fait du même coup disparaître la justification du niveau législatif des dispositions actuelles du code de la recherche. Le Conseil d'État considère, par suite, qu'il appartient au Gouvernement de procéder à cette évolution par voie réglementaire. »

D. Aucune observation particulière n'est mentionnée dans l'avis du Conseil national de la transition écologique (CNTE), du 29 novembre 2023, ou du Conseil supérieur de l'énergie (CSE), du 14 novembre 2023.

E. Dans son étude d'impact sur le projet de loi, le Gouvernement a précisé que son intention était de consolider les missions du Haut-commissaire et de le rattacher au Premier ministre.

Tout d'abord, l'étude d'impact précise que la relance du nucléaire rend obsolète le rattachement du Haut-commissaire au CEA : « Le positionnement du HCEA auprès de l'administrateur général du CEA a conduit à restreindre au fur et à mesure du temps la capacité d'impulsion scientifique du HCEA. Le contexte de la relance de la filière nucléaire souhaitée par le Gouvernement fait apparaître un besoin de renforcer, d'une part, la fonction de conseil scientifique et technique du Gouvernement au plus haut niveau sur les questions nucléaires, et d'autre part, la gouvernance mise en oeuvre autour CPN prévu par le décret n° 2008-378 du 21 avril 2008, sous la présidence du Président de la République. »

Plus encore, le rattachement du Haut-commissaire au Premier ministre doit lui permettre de conseiller le Gouvernement et préparer le CPN : « Ce nouveau positionnement confortera sa fonction d'expertise préexistante au profit direct des plus hautes autorités de l'État - en lui donnant une position panoramique dans la filière - et permettra en outre de lui confier une mission de préparation et de suivi des réunions du CPN. Pour mettre en oeuvre ce nouveau positionnement, il est prévu de placer le HCEA auprès de la Première ministre. »

Enfin, la mise à disposition de plusieurs équivalents temps plein (ETP) auprès du Haut-commissaire est envisagée pour lui faciliter l'exercice de ses missions : « Le HCEA disposera de cinq à six équivalents temps plein transférés du CEA. Un agent de la DGEC du ministère de la transition énergétique appuiera, en complément de ses missions exercées au sein de la DGEC et en qualité d'adjoint au HCEE, le HCEA pour l'exercice des missions relatives au secrétariat du CPN qui pourront être confiées à ce dernier. »

III. La position de la commission - Une modification plutôt qu'une abrogation du HCEA.

A. Le rapporteur partage, sur le principe, la modification du rattachement du HCEA proposée par le Gouvernement.

Le contexte de relance de la filière française du nucléaire justifie une telle évolution.

Le rapporteur observe que cette évolution intervient en application du Conseil de politique nucléaire (CPN), du 19 juillet 2023, au terme duquel il a été décidé que « pour renforcer le pilotage de la relance du nucléaire en France, le poste de Haut-commissaire à l'énergie atomique sera désormais rattaché à la Première ministre. »

Interrogé sur l'opportunité d'une telle évolution, le Haut-commissaire a indiqué au rapporteur que « la reprise du nucléaire, dans le contexte de lutte contre le réchauffement climatique et du besoin de bénéficier d'une source d'électricité massive et pilotage, en croissance, a changé la donne ».

Concrètement, le Haut-commissaire a relevé une évolution de ses missions dans ce nouveau contexte, en ces termes : « Sans entrer dans les détails, le Haut-commissaire : 1. conseille le Gouvernement en matière scientifique et technique, dans les domaines du nucléaire et dans les domaines intéressant la défense en général ; 2. conseille l'administrateur du CEA84(*) [...] ; 3. participe au contrôle gouvernemental de l'intégrité des moyens de la dissuasion - et ne relevant pas du ministre de la défense - notamment en s'en voyant confier la chaîne de sécurité [...] Cette nouvelle mission de préparation du CPN, qui n'existait pas auparavant, va incontestablement devenir une mission de tout premier plan pour le HCEA. [...] En résumé, si les missions définies ci-dessus dans leur intitulé, de facto, le poids de ces missions a changé, la mission 1 devenant beaucoup plus importante que la mission 2, alors que c'était l'inverse, la mission 3 étant inchangée. »

De plus, le Haut-commissaire a précisé ainsi que ce nouveau contexte modifie également ses moyens humains : « À ce stade, il est prévu par les services de la Première ministre d'affecter (en plus du service DDCG qui ne change pas) 7 EPT au HCEA qui seront rattachés au SGDSN (le HCEA, un directeur de cabinet, trois experts scientifiques, un assistant, un chauffeur). »

B. De plus, le rapporteur observe que l'évolution proposée des missions du HCEA est accueillie de manière positive par les acteurs économiques et plus critique par ceux environnementaux.

Le rapporteur constate que la consolidation des missions des HCEA est accueillie positivement par les acteurs économiques, qui la lient au contexte de relance de la filière française du nucléaire.

Parmi les acteurs de la production nucléaire, le groupe Orano a indiqué au rapporteur : « Cette disposition semble s'inscrire dans la logique du projet de loi visant à renforcer le rôle de coordination du Haut-commissaire, et l'exercice de ses compétences de conseil et d'expertise, souhaitables et dimensionnées pour accompagner la relance inédite de la filière nucléaire ».

Au sein des acteurs de la recherche nucléaire, le CEA a affirmé au rapporteur que « Cette évolution paraît pertinente avec la relance de la filière nucléaire, en donnant au Haut-commissaire un positionnement lui permettant de contribuer à la coordination de la politique nucléaire française, notamment au travers du Conseil de politique nucléaire, tout en poursuivant sa mission de conseil et d'expertise auprès du Gouvernement ».

Si le CEA a précisé que « cette évolution est sans conséquence directe sur le comité de l'énergie atomique », il a ajouté que « la présidence du conseil scientifique du CEA, toujours confiée au Haut-commissaire à l'heure actuelle [...] pourra être réexaminée » et que « l'administrateur général peut déjà s'appuyer, d'une part, sur le conseil scientifique dont les missions n'ont pas vocation à évoluer et, d'autre part, sur les directions opérationnelles du CEA et sur les directions scientifiques instituées en leur sein ».

Quant aux acteurs des déchets nucléaires, tels que l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), elle a précisé que « les ajustements proposés préservent l'essentiel, à savoir :

- le maintien d'une fonction de conseiller scientifique auprès du Gouvernement, sur les sujets nucléaires et énergétiques, dont l'utilité a été rappelée par la commission d'enquête sur la souveraineté et l'indépendance énergétiques de la France ;

- un positionnement assurant une vision intégrée des enjeux ».

Le rapporteur relève que le renforcement des missions du HCEA est aussi souhaité par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), acteur parlementaire majeur du nucléaire.

Aussi l'Opect85(*) a-t-il indiqué, dans sa contribution écrite : « Depuis 1945, le HCEA joue un rôle de conseil scientifique auprès de l'exécutif comme de l'administrateur général du CEA, notamment sur le sujet du nucléaire militaire et civil (parfois dans d'autres domaines). Indépendant du CEA, il siège dans toutes les instances décisionnelles du nucléaire, peut accéder à tout document du CEA et interroger n'importe lequel de ses agents. Cela lui donne une vision globale des enjeux dans ce domaine. Dans son rapport de 2009 sur l'évaluation de la stratégie nationale énergétique, l'Opecst a suggéré d'élargir le champ d'action du Haut-commissaire à l'ensemble du secteur énergétique. Cette extension viserait notamment à garantir une cohérence dans les actions de recherche entreprises dans ce domaine. »

Pour autant, le rapporteur note que l'élargissement des missions du HCEA n'est pas partagé par certains acteurs environnementaux ou liés à la transparence, au moins sur le plan de la méthode.

Certes, l'Institut de radioprotection protection et de sûreté nucléaire (IRSN) a bien rappelé que l'évolution est sans incidence sur la sûreté nucléaire : « En première approche, cette abrogation n'a pas d'effet direct sur la sûreté nucléaire, de ce point de vue, cette disposition n'appelle pas de commentaire de l'IRSN. »

Pour autant, l'Association nationale des comités et commissions locales d'information (Anccli), qui fédère les 35 CLI nationalement, s'est émue de la méthode du Gouvernement, qui a modifié le cadre réglementaire avant même celui législatif : « L'Anccli s'interroge sur la publication de 2 décrets en lien avec l'article 12, mais aussi avec les articles 3 et 7 du PJL, sur le rôle du CEA dans la recherche [...] Comment cet article 12 va-t-il s'articuler avec le décret du 30 décembre 2023 relatif au conseil de politique nucléaire et au HCEA ? »

La même interrogation est partagée par France Nature Environnement (FNE) qui s'est exprimé en ces termes : « Le Gouvernement a déjà considérablement avancé sur cette voie et cela depuis un an à la faveur du décret n° 2023-1383 du 30 décembre 2023 relatif au conseil de politique nucléaire et au HCEA. Une fois encore, le Parlement est ramené au statut de simple chambre d'enregistrement ».

S'agissant du dispositif en tant que tel, FNE a regretté le manque de « dialogue environnemental et technique qui doit accompagner les choix technologiques » et Les Amis de la Terre France (ADT-F) le fait qu'« une fonction initialement scientifique soit transformée en mission pour la défense ».

C. En revanche, le rapporteur observe qu'une nouvelle rédaction de la base légale du HCEA serait préférable à son abrogation.

En effet, le rapporteur relève que l'abrogation sèche de l'article L. 332-4 du code de la recherche, telle que proposée par le Gouvernement, pose deux difficultés :

- d'une part, elle supprime la base légale du HCEA, auquel le récent décret du 30 décembre 2023 continue de faire référence ;

- d'autre part, elle supprime la base légale du conseil scientifique du CEA, alors que celles du Comité de l'énergie atomique et du comité d'administration seraient maintenues aux articles L. 332-2 et L. 332-3 du même code.

Sollicité sur l'opportunité de proposer une nouvelle rédaction, plutôt qu'une abrogation, de cette base légale, le Haut-commissaire s'est exprimé en ces termes : « Il est possible [...] de conserver la base légale pour le HCEA dans le code de la recherche. [...] Conserver la base légale du HCEA dans le code de la recherche est la solution sans doute la plus simple [...], mais il est à noter que d'autres possibilités sont envisagées. Une base légale pour le HCEA pourrait être aussi intégrée dans le code de la défense, dans la mesure où le HCEA pourrait exerce des activités liées à la défense [...] et que les activités scientifiques et techniques qui sont les siennes sont liées au nucléaire ou à la défense en général. [...] Il me semble plus difficile de le placer dans le code de l'énergie. »

D. S'agissant de la rédaction souhaitable de la nouvelle base légale du HCEA, le rapporteur observe que la comparaison avec d'autres organismes plaide pour y inscrire cinq séries d'éléments.

En premier lieu, le rapporteur estime souhaitable de modifier le rattachement du Haut-commissaire, du CEA au Premier ministre.

Interrogé par le rapporteur, le Haut-commissaire a indiqué que « le positionnement du HCEA auprès de la Première ministre peut être prévu dans la loi. »

En deuxième lieu, le rapporteur juge indispensable de préciser les attributions du HCEA, rappelant que l'avant-projet de loi prévoyait de lui confier les missions de conseil du Gouvernement en matière scientifique et technique, ainsi que de saisine du Comité de l'énergie atomique et de toute autorité administrative compétente de ses propositions concernant, dans le domaine des activités nucléaires civiles et militaires, l'orientation générale scientifique et technique qui lui paraît souhaitable.

Sur ce point, le Haut-commissaire a indiqué que « désormais que la filière nucléaire civile fait l'objet de beaucoup d'investissement de l'État, il semble logique que cet échelon récemment négligé qu'est le Comité de l'énergie atomique reprenne son fonctionnement ».

Troisièmement, le rapporteur considère nécessaire de préciser les modalités de saisine du HCEA ; sur ce sujet, il juge utile de conserver la capacité de saisine de l'administrateur général du CEA et d'ouvrir plus largement cette saisine à d'autres autorités, à commencer par l'Opecst et les commissions permanentes compétentes.

Sollicité par le rapporteur, le Haut-commissaire a indiqué que « la manière dont sera conseillé l'administrateur général du CEA [qui] dépend fortement de la personnalité de ce dernier. Le législateur pourrait prévoir une disposition générale assez souple, de manière à s'adapter à la personnalité de l'administrateur général et à son souhait en matière de conseil scientifique et technique. Par exemple, "l'administrateur général du CEA peut saisir le HCEA pour des conseils scientifiques et techniques" ».

Le Haut-commissaire a ajouté que « la saisine par l'Opecst est un sujet beaucoup plus important, elle serait à [s]on sens très positive [...] Un important travail de synthèse des résultats scientifiques permettant d'éclairer les enjeux du nucléaire est donc à effectuer auprès des parlementaires. Rendre obligatoire ce travail permet de ne pas oublier cette nécessité : s'en affranchir promet immanquablement des lendemains difficiles avec le public. C'est un travail indispensable dans notre démocratie ».

Autre point, le rapporteur juge utile de préciser les règles de fonctionnement du HCEA, en encadrant le mandat du Haut-commissaire et en prévoyant la production d'une déclaration d'intérêts.

Sur ce sujet, le Haut-commissaire a indiqué que « le fonctionnement et les règles de transparence sont importants. Il faut les inscrire quelque part. Je fais confiance aux parlementaires pour estimer le niveau le plus adapter pour prévoir ces éléments, compte tenu des pratiques concernant des situations comparables ».

Enfin, le rapporteur appelle à prévoir une meilleure reddition des comptes auprès du Parlement, par le biais d'un rapport d'activité annuel remis notamment à l'Opecst et aux commissions permanentes compétentes.

Ici encore, le Haut-commissaire a indiqué qu'« un rapport annuel du HCEA est possible, en excluant bien entendu les activités de conseil qui sont classifiées ».

À la demande du rapporteur, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) n'a pas souscrit aux différentes évolutions estimant qu'elles relèvent actuellement du niveau essentiellement réglementaire.

Dans ce contexte, le rapporteur a présenté un amendement (COM-52), visant rétablir une base légale au Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA), sur le modèle de l'avant-projet de loi.

D'une part, il propose de renforcer les attributions scientifiques et techniques du HCEA.

Il prévoit que le Haut-commissaire conseille le Gouvernement, en matière scientifique et technique, dans le domaine de l'énergie nucléaire, et puisse saisir le Comité de l'énergie atomique et le conseil scientifique du CEA et préparer, par délégation, le CPN.

Il prévoit également que le Haut-commissaire puisse être saisi par l'administrateur général du CEA, d'une demande de conseil scientifique et technique, et par le Gouvernement ou le Parlement, d'un avis sur un texte ou une question. Sa saisine pour avis doit être automatique sur la loi quinquennale sur l'énergie et la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et facultative sur la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et le plan national intégré énergie-climat (PNIEC).

Le Parlement doit être destinataire de ces avis obligatoires, tout comme d'un rapport annuel sur l'état des activités nucléaires civiles, notamment de production et de recherche, devant mesurer le degré d'atteinte des objectifs programmatiques fixés par le Gouvernement.

D'autre part, l'amendement propose de consolider les modalités d'organisation du HCEA.

Tout d'abord, il prend acte du repositionnement du Haut-commissaire du CEA vers le Premier ministre, qui doit lui conférer une vision panoramique de la filière française de l'énergie nucléaire.

Plus encore, il limite le mandat du Haut-commissaire à une durée de 4 ans, renouvelable une fois, dans un souci de renouvellement. Il le soumet également à la production d'une déclaration d'intérêts, dans un souci de transparence.

Enfin, l'amendement propose que la désignation du Haut-commissaire intervienne par décret du Président de la République, après avis préalable du Parlement, en application de l'article 13 de la Constitution, comme c'est actuellement le cas pour l'administrateur général du CEA86(*).

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

CHAPITRE IV
Dispositions de coordination et finales
Article 13 (avis)
Disposition de coordination visant à ajuster plusieurs articles
des codes de la consommation, de l'environnement,
de la recherche et de la santé publique

Cet article consiste en une disposition de coordination visant à ajuster plusieurs articles des codes de la consommation, de l'environnement, de la recherche et de la santé publique.

Le rapporteur a proposé un amendement ( COM-70) tendant à conserver l'application de l'article L. 332-4 du code de la recherche, qui sert de base légale au Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) et au conseil scientifique du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) dans les territoires ultramarins, en cohérence avec la modification qu'il propose à l'article 12.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 13 consiste en une disposition de coordination visant à ajuster plusieurs articles des codes de la consommation, de l'environnement, de la recherche et de la santé publique.

Le rapporteur relève qu'une modification proposée au III de l'article 13 tend à abroger l'application dans les territoires ultramarins (Wallis et Futuna, Polynésie française, Nouvelle-Calédonie) de l'article L. 332-4 du code de la recherche, qui concerne le Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) et le conseil scientifique du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

Dans la mesure où le rapporteur a proposé une réécriture plutôt qu'une abrogation de l'article L. 332-4 du code de la recherche, en y maintenant la base légale du conseil scientifique du CEA87(*), il observe que la mesure de coordination dans les territoires ultramarins doit être adaptée.

C'est pourquoi il a proposé un amendement (COM-70) permettant de conserver l'application de l'article L. 332-4 du code de la recherche dans les territoires ultramarins, en cohérence avec la modification qu'il propose à l'article 12 du projet de loi.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 14 (avis)
Disposition de coordination visant à mentionner la future
Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) dans les codes
de la défense, de l'environnement, de la santé publique
et du travail notamment

Cet article consiste en une disposition de coordination visant à mentionner la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) dans les codes de la défense, de l'environnement, de la santé publique et du travail notamment.

Le rapporteur a proposé un amendement ( COM-71), tendant à corriger une référence erronée dans le code de la défense, qui prive l'ASNR de son pouvoir de consultation, s'agissant de l'importation et de l'exportation des matières nucléaires.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

L'article 14 consiste en une disposition de coordination visant à mentionner la future Autorité de sûreté et de radioprotection (ASNR) dans les codes de la défense, de l'environnement, de la santé publique et du travail notamment.

Le rapporteur observe que le I de l'article 14 comporte une référence erronée à l'article 1332-2 du code de la défense, la base légale visée par le Gouvernement étant l'article 1333-2 du même code, qui prévoit la consultation de l'actuelle Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur le décret en Conseil d'État définissant les conditions de contrôle des importations et des exportations de matières nucléaires.

Sollicitées sur ce point, la direction générale de la prévention des risques (DGPR) et l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) lui ont confirmé la difficulté.

Le rapporteur constate également que le III de l'article 14 laisse inchangée la disposition selon laquelle les commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat sont chargées d'émettre un avis public sur la désignation du futur président de l'ASNR88(*), en application de la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution : il s'agit des commissions permanentes chargées de l'énergie.

Il approuve la proposition du Gouvernement sur ce point, gage de stabilité pour la gouvernance du système de sûreté nucléaire et de radioprotection, à l'heure de la relance de la filière française du nucléaire.

Au total, le rapporteur a proposé un amendement (COM-71), déposé à l'identique avec le rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, pour rétablir le pouvoir de consultation de l'ASNR, prévue à l'article 1333-2 du code de la défense, s'agissant de l'importation et de l'exportation des matières nucléaires.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 15 (avis)
Disposition d'application fixant la création par fusion
de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR)
au 1er janvier 2025 essentiellement

Cet article consiste en une disposition d'application visant à fixer la création par fusion de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) au 1er janvier 2025 essentiellement.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article sans modification.

L'article 15 consiste en une disposition de coordination prévoyant l'entrée en vigueur :

- au 1er janvier 2025 de la création par fusion de la future Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), à l'exception des dispositions prévues par les I89(*) et II90(*) de l'article 11 ainsi que l'article 1291(*).

- à la date à laquelle les agents publics de la future ASNR bénéficient de plein droit du dispositif d'activités sociales et culturelles géré par le comité social d'administration de cette autorité, et au plus tard le 1er juillet 2027, des dispositions prévues par le IV de l'article 692(*).

Le rapporteur prend acte de la création de la future ASNR au 1er janvier 2025.

Au demeurant, le rapport d'information de l'Opecst du 11 juillet 202393(*), issu de la saisine de la commission des affaires économiques, a recommandé de faire aboutir la réforme d'ici fin 2024.

Le rapporteur constate que cette date ne fait pas consensus, parmi les représentants des personnels de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)94(*), tout comme pour l'IRSN et certaines associations environnementales ou liées à la transparence (Association nationale des comités et commissions locales d'information - Anccli, France Nature environnement - FNE, Réseau sortir du nucléaire - RSN).

C'est pourquoi le rapporteur appelle à une vigilance quant à l'application de la fusion, estimant notamment qu'elle ne doit pas avoir d'impact négatif sur l'instruction des dossiers en cours ou le niveau d'exigence de sûreté et de sécurité nucléaires et de radioprotection.

Il fait sienne la nécessité, selon le président de l'ASN, Bernard Doroszczuk95(*), de fixer un cap clair, notamment pour les personnels : « Vous m'interrogez, ensuite, sur le calendrier de la réforme. Nous sommes dans une phase de montée en charge importante de l'activité et nous allons vers un pic qui devrait se produire vers 2027-28. Pour tirer le meilleur bénéfice d'une réforme, il faut la faire maintenant, avant ce pic. Il faut aussi limiter l'incertitude, les personnels doivent savoir le plus tôt possible si la réforme va se faire. L'échéance du 1er janvier 2025 me paraît donc ambitieuse, mais nécessaire, ou bien on risque d'inciter au départ de personnels. »

Dans cette perspective, il appelle à mettre rapidement en place les éléments incontournables au fonctionnement de la nouvelle structure, rappelés par le directeur général de l'IRSN, Jean-Christophe Niel96(*) : « Pour ce qui concerne le calendrier, un regroupement de l'actuelle ASN et de l'IRSN au 1er janvier 2025 est un objectif très ambitieux. Par ailleurs, l'organisation de la nouvelle structure sera liée aux choix prévus dans la loi. Si cette date devait être retenue, le système devrait fonctionner à cette échéance, même s'il n'est pas définitif. Aussi travaillons-nous avec l'ASN pour définir les " incontournables ", c'est-à-dire les sujets qui devront être absolument traités, faute de quoi le système ne fonctionnera pas. Je citerai un exemple trivial, les rémunérations, mais aussi l'organisation hiérarchique des postes, ainsi que le partage et les délégations de responsabilités et de pouvoirs. »

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article sans modification.

TITRE II
ADAPTATION DES RÈGLES DE LA COMMANDE PUBLIQUE
AUX PROJETS NUCLÉAIRES
CHAPITRE IER
Sécurisation des procédures relatives à la commande publique
pour les porteurs de projets nucléaires
Article 16 (délégué)
Faculté pour les entités adjudicatrices et les pouvoirs adjudicateurs
de déroger à l'obligation d'allotissement
des marchés de travaux, de fournitures ou de services
pour certains projets nucléaires

Cet article vise à permettre aux entités adjudicatrices et aux pouvoirs adjudicateurs de déroger à l'obligation d'allotissement pour les marchés de travaux, de fournitures ou de services pour certains projets nucléaires.

Le rapporteur a proposé un amendement ( COM-55) visant à consolider le champ et les modalités de cette dérogation.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Une obligation d'allotissement des marchés publics ne connaissant que de rares exceptions, peu opérantes s'agissant des projets nucléaires.

A. L'allotissement des marchés publics est une obligation appliquée par le code de la commande publique aux pouvoirs adjudicateurs et aux entités adjudicatrices.

Depuis l'ordonnance « Marchés publics », du 23 juillet 201597(*), prise en application de la loi de « Simplification », du 20 décembre 201498(*), l'article L. 2113-10 du code de la commande publique dispose que les marchés sont passés sous forme séparée, sauf si leur objet ne permet pas l'identification de prestation distincte.

Cette obligation est applicable aux pouvoirs adjudicateurs, depuis 2006, et aux entités adjudicatrices, depuis 2016.

L'article L. 1211-1 du même code définit les pouvoirs adjudicateurs comme :

- les personnes morales de droit public ;

- les personnes morales de droit privé qui ont été créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial99(*) ;

- les organismes de droit privé dotés de la personnalité juridique constitués par des pouvoirs adjudicateurs en vue de réaliser certaines activités en commun.

L'article L. 1212-1 du même code définit les entités adjudicatrices comme :

- les pouvoirs adjudicateurs qui exercent une des activités d'opérateur de réseaux définies aux articles L. 1212-3100(*) et L. 1212-4101(*) ;

- lorsqu'elles ne sont pas des pouvoirs adjudicateurs, les entreprises publiques qui exercent une des activités d'opérateur de réseaux définies aux articles L. 1212-3 et L. 1212-4 ;

- lorsqu'ils ne sont pas des pouvoirs adjudicateurs ou des entreprises publiques, les organismes de droit privé qui bénéficient, en vertu d'une disposition légalement prise, de droits spéciaux102(*) ou exclusifs ayant pour effet de leur réserver l'exercice de ces activités et d'affecter substantiellement la capacité des autres opérateurs économiques à exercer celle-ci ;

Le groupe EDF est considéré comme une entité adjudicatrice103(*) tandis que l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) et le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) sont des pouvoirs adjudicateurs104(*).

B. Plusieurs dérogations à l'obligation d'allotissement des marchés publics sont reconnues par le code de la commande publique.

Ainsi, l'article L. 2213-11 du même code permet à l'acheteur, dès lors qu'il motive son choix en énonçant des considérations de droit et de fait, de ne pas allotir un marché dans plusieurs cas :

- il n'est pas en mesure d'assurer par lui-même les missions d'organisation, de pilotage et de coordination ;

- la dévolution en lots séparés est de nature à restreindre la concurrence ou risque de rendre techniquement difficile ou financièrement plus coûteuse l'exécution des prestations ;

- pour les entités adjudicatrices, lorsque la dévolution en lots séparés risque de conduire à une procédure infructueuse.

Cette dernière possibilité a été introduite par la loi dite « Industrie verte », du 23 octobre 2023105(*).

Cependant, le Conseil d'État a limité la deuxième dérogation prévue, au titre du coût, puisqu'il n'a indiqué, dans un arrêt « Nantes » du 11 août 2009106(*), que « l'impact financier de ce regroupement ne saurait justifier une absence de dévolution en lots séparés, dès lors qu'il ne représente que moins de 2 % du budget alloué à ce lot ».

Au total, les dérogations sont peu opérantes pour les acteurs économiques, tels que le groupe EDF. En effet ce dernier n'assure pas nécessairement la mission d'organisation, de pilotage et de coordination et l'allotissement n'est pas toujours de nature à rendre les prestations techniquement difficiles ou financièrement coûteuses ou encore la concurrence restreinte ou la procédure infructueuse.

C. Le droit de l'Union européenne fait de l'allotissement des marchés publics une faculté, et non une obligation, à la disposition des États membres.

D'une part, le paragraphe 1 de l'article 46 de la directive « Marchés publics », du 26 février 2014107(*), dispose que « les États membres peuvent rendre obligatoire la passation de marchés sous la forme de lots distincts dans des conditions qui seront définies conformément à leur droit national et dans le respect du droit de l'Union. »

D'autre part, le paragraphe 4 de l'article 65 de la directive « Marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux », du 26 février 2014108(*) applique les mêmes dispositions dans ces secteurs.

II. Le dispositif envisagé - Une dérogation à l'obligation d'allotissement des marchés publics pour certains projets nucléaires portés par le groupe EDF, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) notamment.

A. L'article 16 du projet de loi propose de permettre aux entités adjudicatrices et aux pouvoirs adjudicateurs de ne pas allotir un marché de travaux, de fournitures ou de service lorsqu'il est nécessaire :

- à la réalisation109(*), au sens du I de l'article 7 de la loi dite « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023110(*), d'un projet111(*) relevant du II de l'article 7 de la même loi ;

- à la réalisation d'une installation mentionnée à l'article L. 593-2 du code de l'environnement112(*), à l'article L. 512-1 du même code113(*) ou à l'article L. 512-7 du même code114(*), lorsqu'elle est destinée à assurer des activités de recherche relatives aux utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire ou à la maîtrise de ses effets ;

- à la réalisation d'une installation mentionnée à l'article L. 593-2 du code de l'environnement ou à l'article L. 512-1 du même code, lorsqu'elle est destinée à assurer des activités de gestion de déchets radioactifs ou de combustibles usés issus d'installations nucléaires de base ;

- à la réalisation de travaux souterrains relatifs à une installation mentionnée à l'article L. 542-4 du code de l'environnement115(*) ou d'opérations de réhabilitation du site après arrêt définitif d'une telle installation ;

- à la réalisation d'opérations de démantèlement d'une installation mentionnée à l'article L. 593-2 du code de l'environnement, lorsque l'installation abrite ou a abrité des matières nucléaires dont la détention est soumise à autorisation ou déclaration en application de l'article L. 1333-2 du code de la défense116(*), ou de démantèlement d'une installation mentionnée au 1° de l'article L. 1333-15 du code de la défense117(*) ;

- à la réalisation d'opérations de réhabilitation du site après arrêt définitif d'une installation mentionnée à l'article L. 511-1 du même code, lorsque l'installation abrite ou a abrité des matières nucléaires dont la détention est soumise à autorisation ou déclaration en application de l'article L. 1333-2 du code de la défense.

B. Dans l'avant-projet de loi, les projets visés étaient ceux relatifs :

- à la réalisation d'un projet entrant dans le champ d'application de l'article 7 de la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023 ;

- à la réalisation d'une installation mentionnée à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ou à l'article L. 593-2 du même code, lorsqu'elle assure ou a vocation à assurer des activités de recherche dans le domaine nucléaire ou des activités de gestion des déchets radioactifs ou des combustibles usés ;

- à la réalisation d'opérations de démantèlement d'une installation abritant des matières nucléaires dont la détention est soumise à autorisation ou déclaration en application de l'article L. 1333-2 du code de la défense.

Par ailleurs, deux autres articles figuraient dans le texte : l'article 14, qui permettait de tenir compte de la crédibilité des offres pour l'attribution des marchés et l'article 13, qui permettait de renouveler ces marchés sans remise en concurrence.

Interrogée sur ces évolutions, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a précisé que le cadre réglementaire est satisfaisant s'agissant de ces articles supprimés.

C. Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a estimé que les dérogations au droit de la commande publique sont justifiées par l'objectif poursuivi : « 21. Le projet de loi comporte des mesures destinées à sécuriser les procédures relatives à la commande publique en ce qui concerne les marchés de travaux, de fournitures ou de services nécessaires à la réalisation de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants, pour lesquelles la demande d'autorisation de création est déposée avant 2043. Ces mesures concernent également, de manière pérenne, les marchés nécessaires à la réalisation d'installations de recherche et de gestion de déchets radioactifs ou de combustibles usés, ainsi qu'aux opérations de démantèlement d'installations nucléaires et de réhabilitation des sites après arrêt définitif de telles installations. Le Conseil d'État considère que les dérogations au droit de la commande publique ainsi prévues par le projet de loi sont clairement circonscrites dans leur champ d'application matériel et peuvent être justifiées par les mêmes motifs que ceux retenus par le Conseil constitutionnel s'agissant de la loi n° 2023- 491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023118(*)). Il admet le choix du Gouvernement de ne pas codifier ces dispositions dérogatoires, en raison de la spécificité de leur champ d'application. »

S'agissant de la dérogation à l'obligation d'allotissement des projets nucléaires, il a constaté sa constitutionnalité et sa conventionalité : « 22. Le Conseil d'État considère que la nouvelle possibilité de dérogation au principe d'allotissement pour les marchés mentionnés au point 21 ne soulève pas de difficulté d'ordre constitutionnel ou conventionnel. »

Pour ce qui est du critère de crédibilité des offres, il ne l'a pas retenu, en ces termes : « 24. Le projet de loi prévoit enfin la possibilité de tenir compte de la " crédibilité " des offres dans le choix du co-contractant. Le Conseil d'État ne retient pas cette disposition. En effet, il note que l'explicitation de la notion d'offre économiquement la plus avantageuse et des critères susceptibles d'être retenus pour l'identifier a été inscrite jusqu'à présent dans la partie réglementaire du code de la commande publique et qu'aucune raison valable ne conduit à revenir sur le partage entre loi et règlement auquel il a ainsi été procédé. Le Conseil d'État relève en outre que la jurisprudence a déjà admis la possibilité de tenir compte de la crédibilité d'une offre au titre de l'offre économiquement la plus avantageuse (CE, 24 juin 2011, ministre de l'écologie, n° 347 720), de sorte que la disposition proposée ne change rien à l'état du droit. Il souligne qu'elle fait en outre peser un risque d'interprétation a contrario quant à la possibilité de tenir compte de ce critère lors de la passation de marchés relevant du droit commun de la commande publique. »

D. Aucune observation particulière n'est mentionnée dans l'avis du Conseil national de la transition écologique (CNTE), du 29 novembre 2023, ou du Conseil supérieur de l'énergie (CSE), du 14 novembre 2023.

E. Dans son étude d'impact sur le projet de loi, le Gouvernement a rappelé que la dérogation relative aux prestations coûteuses est difficile à démontrer pour les acteurs économiques, tels que le groupe EDF, dans le cadre de ses projets nucléaires : « La seule exception véritablement mobilisable dans le cas des projets nucléaires est donc généralement celle sur le " risque de rendre techniquement difficile ou financièrement plus coûteuse l'exécution des prestations ". Cette exception a cependant été interprétée restrictivement par le Conseil d'État qui a censuré le choix d'un marché non alloti au motif qu'une économie de moins de 2 % "ne saurait justifier une absence de dévolution en lots séparés ". Il n'existe pas de jurisprudence du Conseil d'État fixant le pourcentage à partir duquel le recours à l'exception deviendrait acceptable. Il n'existe pas de jurisprudence du Conseil d'État fixant le pourcentage à partir duquel le recours à l'exception deviendrait acceptable. Il peut également être difficile d'apprécier ce qu'il convient d'entendre par " l'exécution des prestations " qui deviennent plus coûteuses. Il n'est pas certain, par exemple, que l'on puisse prendre en compte l'ensemble du programme concerné. Les " prestations " renvoient, dans le code de la commande publique, à " l'objet du marché ". Mais pour prendre l'exemple d'un EPR, plusieurs centaines de marchés peuvent être conclus, ce qui crée un doute sur le périmètre auquel effectuer cette analyse. »

Il a ajouté que l'Andra et le CEA sont confrontés à des problématiques similaires : « Des considérations du même ordre s'appliquent à d'autres projets portés par EDF, par le CEA et par l'Andra. »

Enfin, il a estimé significatifs les gains permis par la dérogation à l'obligation d'allotissement des projets nucléaires : « La Délégation interministérielle au nouveau nucléaire (DINN) estime le coût d'un mois de retard pour un réacteur à environ 10 M€2020 en phase d'étude, à 50-60 M€2020 en phase de travaux de génie civil et à 25 M€2020 en phase d'essais et de montage. Le chiffrage d'impacts sur les installations de recherche et sur les opérations de fin de cycle est plus difficile au regard de leur diversité, de leur nature et de leurs interdépendances. À titre d'exemple, pour le CEA, un retard d'un mois sur l'ensemble des opérations de fin de cycle pourrait représenter un impact sur les coûts à terminaison de plusieurs dizaines de millions d'euros. Ainsi, une dérogation à l'obligation d'allotissement aura un impact positif sur les coûts des projets nucléaires concernés. »

III. La position de la commission - Une disposition utile, appelant néanmoins à être consolidée.

A. Le rapporteur constate de la disposition englobe plusieurs acteurs majeurs de la filière française du nucléaire.

Il observe que le champ proposé permet d'intégrer un grand nombre de projets nucléaires portés par le groupe EDF, le CEA et l'Andra.

Ainsi que l'a indiqué la DGEC, en réponse au rapporteur, les projets nucléaires visés seraient les suivants :

Référence de l'article 16

Type de projet concerné

Programme des EPR2 et projets de petits réacteurs modulaires (SMR) soumis au code de la commande publique

Réacteur de recherche Jules Horowitz (RJH)

Projet Cigéo de l'Andra et de piscine d'EDF

Laboratoire souterrain de l'Andra

Une trentaine d'installations nucléaires de base et une dizaine d'installations nucléaires de base secrètes

Une dizaine d'installations classées pour la protection
de l'environnement

B. Le rapporteur estime la disposition utile à la relance de la filière française du nucléaire.

Il constate que l'adaptation prévue du code de la commande publique permet de tenir compte des spécificités des projets nucléaires.

Selon le Groupement des industriels français de l'industrie nucléaire (Gifen), les projets nucléaires présentent plusieurs spécificités structurelles : leur durée, leur complexité, leur coût, leur sensibilité et leur contribution directe aux intérêts supérieurs de la Nation, l'électricité étant un bien non substituable. À ces spécificités structurelles, s'ajoute un élément conjoncturel : un programme d'ampleur inédite depuis 50 ans.

Dans ce contexte, le regroupement a indiqué que « sur le chapitre II du projet de loi dans sa globalité concernant la passation des marchés, il est important de tenir compte des spécificités des projets nucléaires », précisant que « des modalités, du type dérogations à l'allotissement, accord-cadre très longue durée, exclusion du champ de la commande publique d'installations participant aux intérêts essentiels de la Nation, prenant en compte ces spécificités [...] iraient dans le bon sens ».

Le rapporteur observe que les gains financiers induits par cet article ne sont pas marginaux.

Ainsi, selon la DGEC, la disposition doit permettre de limiter le risque de dérive des délais et des coûts, en raison de difficultés d'interface entre les différents opérateurs sur le chantier.

Pour le groupe EDF, le coût d'un mois de retard pour un réacteur est de 10 M€, en phase d'étude, 50 à 60 M€, en phase de travaux de génie civil, et 25 M€, en phase d'essais et de montage. Si la disposition n'entraîne pas en elle-même des gains de délais et de coûts, elle permet de limiter fortement les risques d'interfaces entre opérateurs distincts retenus par lot, selon le groupe.

S'agissant du CEA, le coût d'un mois de retard sur l'ensemble des opérations de fin de cycle représente un impact sur les coûts à terminaison de plusieurs dizaines de millions d'euros. Pour l'établissement, le dispositif permet de réduire les contraintes d'interface et de coordination, sources de retard, de complexité et de confusion.

Concernant l'Andra, il a indiqué devoir gérer 200 lots et 6 à 7 maîtrises d'oeuvre pour les ouvrages conventionnels. Pour l'agence, la dérogation doit lui permettre d'optimiser le schéma industriel pour le projet Cigéo, en évitant les interfaces complexes, coûteuses et génératrices de retards et de contentieux.

Quant à Orano, s'il n'est pas soumis au code de la commande publique, en tant que co-contractant, il appelle au respect des opérateurs économiques, évoquant le droit au maintien à l'équilibre économique du contrat et l'indemnisation des aléas ; pour autant, il considère que la possibilité de déroger à l'obligation d'allotissement permet de donner de la prévisibilité et de la profondeur de carnet de commandes, dans le contexte de la relance de la filière française du nucléaire.

C. Le rapporteur retient de ses échanges avec le Gouvernement que la disposition est permise par le cadre conventionnel et constitutionnel.

Tout d'abord, sur le plan conventionnel, les deux directives précitées du 26 février 2014 (articles 46 et 65) autorisent les États membres à déroger à l'obligation d'allotissement.

Plus encore, sur le plan constitutionnel, l'avis du Conseil d'État sur le projet de loi a rappelé que les dispositions proposées sont circonscrites dans leur champ d'application matériel et peuvent être justifiées par les mêmes motifs que ceux retenus par le Conseil constitutionnel s'agissant de la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023, ce dernier ayant indiqué que les dispositions visant à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires poursuivent « les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et [...] l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement ».

Au total, dans cet avis, le Conseil d'État s'est exprimé en ces termes sur la constitutionnalité et la conventionnalité de la disposition : « Le Conseil d'État considère que la nouvelle possibilité de dérogation au principe d'allotissement pour les marchés mentionnés au point 21 ne soulève pas de difficulté d'ordre constitutionnel ou conventionnel. »

Interrogée par le rapporteur, la DGEC a ainsi précisé à son tour que « le Conseil d'État considère dans son avis sur le projet de loi (§ 22) que la disposition est conforme au cadre constitutionnel et conventionnel ».

D. Cependant, le rapporteur constate que la rédaction de la disposition est perfectible.

En premier lieu, son champ appelle à être étendu.

Ainsi, le CEA a indiqué au rapporteur souhaiter intégrer les installations support nécessaires aux INB et aux ICPE destinées à assurer des activités de recherche relatives aux utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire ou à la maîtrise de ses effets (2° de l'article 16).

L'établissement s'est exprimé en ces termes : « Concernant plus spécifiquement le CEA, cette extension pourrait également porter sur l'ensemble des installations concourant indirectement à une activité de recherche dans le domaine nucléaire. En effet, le CEA souhaiterait que le champ d'application de ces dispositions prenne en compte ses besoins pour l'ensemble des installations nécessaires à ses activités de recherche dans le domaine nucléaire, incluant les INB et ICPE destinées à assurer la recherche dans le domaine nucléaire, mais aussi les installations apportant un support indispensable à ces installations de recherche. De fait, les installations nucléaires de recherche nécessitent pour leur fonctionnement des installations “ supports ” qui peuvent s'avérer sur le chemin critique de la réalisation ou de l'exploitation de l'installation principale. »

De plus, l'Andra a affirmé au rapporteur souhaiter intégrer la phase de fonctionnement des INB et des ICPE destinées à assurer des activités de gestion de déchets radioactifs ou de combustibles usés issus d'installations nucléaires de base (3° de l'article 16).

C'est pourquoi l'agence a formulé la demande suivante : « S'agissant de viser d'autres catégories de projets nucléaires, il serait intéressant de se poser la question d'étendre cette dérogation aux phases de fonctionnement des installations mentionnées à l'article L. 593-2 du code de l'environnement ou à l'article L. 512-1 du même code, lorsqu'elles sont destinées à assurer des activités de gestion de déchets radioactifs ou de combustibles usés issus d'installations nucléaires de base. Le nucléaire exige en effet une haute attention à la capitalisation des connaissances et expériences dans le temps, ce que ne facilite pas une obligation de remise en concurrence trop régulière. Par exemple, pour un accord-cadre de 4 ans en durée maximale, la 1re année sera dédiée à mettre en place le nouveau fonctionnement et la dernière année à mener les opérations de remise en concurrence de l'accord-cadre. Par ailleurs, dans le cas particulier de Cigéo, la construction et le déploiement de l'installation se poursuivront en parallèle de son exploitation proprement dite ».

Enfin, le rapporteur a souhaité échanger avec le projet de réacteur thermonucléaire expérimental ITER, qui lui a indiqué que les différentes mesures de simplification prévues en matière de commande publique pour les projets nucléaires étaient utiles sur le principe, mais non pertinentes dans son cas de figure.

Aussi a-t-il indiqué : « Ces dispositions ne sont pas applicables à l'Organisation ITER du fait de son statut, mais toutes propositions d'allègement des procédures de marché public sont toujours bienvenues. »

En second lieu, les modalités de la disposition doivent être ajustées.

D'une part, l'article 16 ne reprend pas les mêmes définitions que la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023.

Tout d'abord, l'article 16 ne vise que les projets de réacteurs électronucléaires, dont les SMR, prévus au II de l'article 7 de la loi précitée, et non les projets d'installations d'entreposage de combustibles nucléaires liées, mentionnées au III du même article 7.

De plus, l'article 16 ne reprend la définition de la « réalisation », issue du I de l'article 7 de la loi susmentionnée, que dans le cas des projets de réacteurs électronucléaires et non pour les autres projets nucléaires, dont les INB et les ICPE liées aux activités de recherche ou aux activités de gestion des déchets radioactifs ou de combustibles usés.

Or, la définition de la « réalisation » est adaptée aux porteurs de projets, car elle permet de couvrir notamment « l'ensemble des constructions, des aménagements, des équipements, des installations et des travaux liés à sa création ou à sa mise en service, ainsi que les ouvrages de raccordement de réseau de transport d'électricité et les installations ou les aménagements directement liés à la préparation des travaux en vue de la réalisation de celui-ci. »

De plus, l'article 16 ne reprend pas non plus la notion de marchés « relatifs » aux projets nucléaires, qui existe à l'article 16 de la loi précitée.

D'autre part, l'article 16 ne précise pas les INB et les ICPE auxquelles s'appliqueraient effectivement les souplesses prévues.

Or, les installations de recherche prévues au 2° de l'article ne concernent que les INB mentionnées « aux 1° à 4° » de l'article L. 593-2 du code de l'énergie119(*) et les installations de gestion des déchets radioactifs ou de combustibles usés les INB prévues « aux 2°, 3° ou 5° » du même article120(*).

Enfin, si le cas des marchés de travaux, de fournitures ou de services sont bien prévus, les marchés « mixtes » poursuivant plusieurs de ces objets, au sens de l'article L. 1111-5 du code de la commande publique, ne sont pas prévus.

En dernier lieu, la codification des dispositions dans une section dédiée du code de la commande publique apparaît utile, dans la mesure où ces dispositions sont pérennes, et non provisoires ou expérimentales.

Au total, la mention dans le dispositif des marchés « relatifs », des marchés « mixtes » et de la notion de « réalisation » est accueillie favorablement par le groupe EDF, le CEA, l'Andra, mais aussi la DGEC et la DINN121(*).

En revanche, la DGEC ne considère pas nécessaire l'extension des INB et ICPE liées à des activités de recherche couvertes.

Dans ce contexte, le rapporteur a présenté un amendement (COM-55) visant à consolider le champ et les modalités de la dérogation à l'obligation d'allotissement prévue pour certains projets nucléaires.

Il propose d'étendre la dérogation à d'autres types de marchés : d'une part, ceux « relatifs » aux projets nucléaires, plutôt que ceux « nécessaires » ; d'autre part, ceux « mixtes », au-delà de ceux centrés sur les seuls travaux, fournitures ou services.

Il prévoit d'intégrer certains projets nucléaires omis : tout d'abord, les projets liés à la relance de l'énergie nucléaire doivent comprendre les installations de stockage ; plus encore, les projets liés à la recherche nucléaire doivent intégrer les activités nécessaires ; enfin, les projets liés à la recherche et au stockage doivent viser les INB appropriées.

Dernier point, l'amendement propose de préciser la notion de « réalisation », sur le même modèle que la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023, afin de couvrir les différentes étapes des installations nucléaires : les constructions, les aménagements, les équipements, les installations et les travaux liés à leur création, leur mise en service ou leur extension, ainsi que les installations ou les aménagements directement nécessaires à leur préparation.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 17 (délégué)
Faculté pour les entités adjudicatrices et les pouvoirs adjudicateurs
d'étendre la durée maximale des accords-cadres
des marchés de travaux, de fournitures ou de services
pour certains projets nucléaires

Cet article vise à permettre aux entités adjudicatrices et aux pouvoirs adjudicateurs d'étendre la durée maximale des accords-cadres des marchés de travaux, de fournitures ou de services pour certains projets nucléaires.

Le rapporteur a présenté un amendement ( COM-56) proposant de conforter le périmètre et les conditions de cette dérogation.

La commission des affaires économiques propose à la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Une durée limitée entre 4 et 8 ans des accords-cadres ne connaissant que de rares exceptions, peu opérantes pour les projets nucléaires

A. Le code de la commande publique fixe la durée maximale des accords-cadres à quatre ans pour les pouvoirs adjudicateurs et huit ans pour les entités adjudicatrices.

Depuis l'ordonnance « Marchés publics », du 23 juillet 2015122(*), prise en application de la loi « Simplification », du 20 décembre 2014123(*), l'article L. 2125-1 du code de la commande publique aux entités adjudicatrices et pouvoirs adjudicateurs de recourir à plusieurs techniques d'achat : l'accord-cadre, le concours, les systèmes de qualification et d'acquisition dynamique, les systèmes de catalogue et d'enchères électroniques.

L'accord-cadre permet de présélectionner un ou plusieurs opérateurs économiques en vue de conclure un contrat établissant tout ou partie des règles relatives aux commandes à passer au cours de la période donnée.

Sa durée ne peut dépasser 4 ans, pour les pouvoirs adjudicateurs, et 8 ans, pour les entités adjudicatrices, sauf dans des cas exceptionnels dûment justifiés, notamment par leur objet ou par le fait que leur exécution nécessite des investissements amortissables sur une durée supérieure ou par un risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse dans le cadre de la procédure de passation d'un accord-cadre engagée par une entité adjudicatrice.

Cette dernière condition, relative au risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse, a été introduite par la loi dite « Industrie verte », du 27 octobre 2023124(*).

Dans les faits, les accords-cadres sont exécutés, soit par la conclusion de marchés subséquents, s'ils ne fixent pas toutes les stipulations contractuelles, soit par l'émission de bons de commandes, s'ils fixent toutes ces stipulations (article R. 2162-2 du code de la commande publique).

Ces marchés subséquents ou bons de commande ne peuvent être conclus ou émis que sur la période de la validité de l'accord-cadre. Leur durée d'exécution est fixée conformément aux conditions habituelles d'exécution des prestations faisant l'objet de l'accord-cadre. Elle ne peut se prolonger au-delà de la date limite de validité de l'accord-cadre dans des conditions qui méconnaissent l'obligation de remise en concurrence périodique (article R. 2162-5 du code de la commande publique).

B. De récents assouplissements ont été apportés à la durée maximale des accords-cadres pour les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices.

Tout d'abord, depuis la loi « Industrie verte », du 27 octobre 2023, les entités adjudicatrices peuvent déroger à la durée maximale de 8 ans pour les accords-cadres, dès lors que leur exécution est caractérisée « par un risque important de restriction de concurrence ou de procédure infructueuse dans le cadre de la procédure de passation d'un accord-cadre » (article L. 2125-1 du code de la commande publique).

Dans le même esprit, à l'initiative de la commission des affaires économiques du Sénat, depuis la loi « Accélération des énergies renouvelables », du 10 mars 2023125(*), les entités adjudicatrices et pouvoirs adjudicateurs peuvent recourir à des contrats de la commande publique pour leurs besoins en électricité ou en gaz renouvelables dans le cadre d'opérations d'autoconsommation individuelle ou collective ou de contrats de vente directe à long terme, étant précisé que la durée de ces contrats « est définie en tenant compte de la nature des prestations et de la durée d'amortissement des installations nécessaires à leur exécution » (articles L. 331-5 et 441-6 du code de l'énergie).

C. Le droit de l'Union européenne fixe la durée maximale des accords-cadres à quatre ans pour les pouvoirs adjudicateurs et huit ans pour les entités adjudicatrices, sauf cas exceptionnels dûment justifiés.

D'une part, le paragraphe 1 de l'article 33 de la directive « Marchés publics », du 26 février 2014126(*),127(*), dispose que « les pouvoirs adjudicateurs peuvent conclure des accords-cadres pour autant qu'ils appliquent les procédures prévues par la présente directive. Un accord-cadre est un accord conclu entre un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d'établir les conditions régissant les marchés à passer au cours d'une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées. La durée d'un accord-cadre ne dépasse pas quatre ans, sauf dans des cas exceptionnels dûment justifiés, notamment par l'objet de l'accord-cadre. »

D'autre part, le paragraphe 1 de l'article 51 de la directive « Marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux », du 26 février 2014128(*),129(*) dispose également que « les entités adjudicatrices peuvent conclure des accords-cadres pour autant qu'elles appliquent les procédures prévues par la présente directive. Un accord-cadre est un accord conclu entre une ou plusieurs entités adjudicatrices et un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d'établir les conditions régissant les marchés à passer au cours d'une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées. La durée d'un accord-cadre ne dépasse pas huit ans, sauf dans des cas exceptionnels dûment justifiés, notamment par l'objet de l'accord-cadre. »

II. Le dispositif envisagé - Une dérogation à la durée maximale de 4 à 8 ans pour les accords-cadres de certains projets nucléaires portés par le groupe EDF, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) notamment.

A. L'article 17 du projet de loi propose de permettre aux entités adjudicatrices et aux pouvoirs adjudicateurs de conclure des accords-cadres de travaux, fournitures ou service qui concernent un ou plusieurs projets mentionnés à l'article 16 sur une durée allant jusqu'à celle du ou des projets concernés, fixée en tenant compte des aléas inhérents à leur réalisation.

B. Dans l'avant-projet de loi, le dispositif tenait compte :

- de l'objet du marché ;

- de la nature des prestations.

Sollicitée sur ces changements, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a indiqué que la nature des prestations devra être mise en oeuvre pour justifier du recours à la dérogation, sans qu'il soit nécessaire d'y faire référence ici.

C. Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a admis la constitutionnalité et la conventionnalité de la dérogation à la durée maximale des accords-cadres prévue pour les projets nucléaires : « 23. Le projet de loi prévoit que, lorsqu'ils mettent en oeuvre l'exception à la durée maximale prévue au 1° de l'article L. 2125-1 du code de la commande publique, les accords-cadres de travaux, fournitures ou services qui concernent un ou plusieurs des projets mentionnés au point 21 sont conclus pour une durée qui peut aller jusqu'à celle du ou des projets concernés, fixée en tenant compte des aléas inhérents à leur réalisation. Le Conseil d'État considère que la détermination d'une durée maximale aux accords-cadres qui dérogent, dans des cas exceptionnels dûment justifiés, à la durée fixée par les directives à quatre ans pour les pouvoirs adjudicateurs et à huit ans pour les entités adjudicatrices, ne se heurte à aucun obstacle d'ordre constitutionnel ou conventionnel dès lors que les directives comme les textes nationaux pris pour leur transposition, qui permettent une telle dérogation, ne lui fixent pas de durée maximale. Il observe cependant que cette disposition ne modifie le droit en vigueur que par l'introduction d'une limite qui n'y figure pas, de sorte qu'elle va au-delà de ce qu'impose la transposition du droit de l'Union européenne, et qu'elle impose en outre aux acheteurs de prévoir dans les accords-cadres concernés par la mesure une durée plus longue, par la prise en compte des aléas, que celle annoncée par ailleurs pour la réalisation du projet. »

D. Aucune observation particulière n'est mentionnée dans l'avis du Conseil national de la transition écologique (CNTE), du 29 novembre 2023, ou du Conseil supérieur de l'énergie (CSE), du 14 novembre 2023.

E. Dans son étude d'impact sur le projet de loi, le Gouvernement a rappelé que la durée maximale de 8 ans n'est pas adaptée aux projets nucléaires des acteurs économiques, tels que le groupe EDF, dans le cadre de ses projets nucléaires : « Il est par ailleurs important dans le cas particulier d'EDF de pouvoir conclure des accords-cadres d'une durée correspondant à celle du programme de construction de six réacteurs porté par l'entreprise, puisque c'est la condition de la standardisation des réacteurs. L'enjeu principal de ces accords-cadres pour EDF n'est pas l'achat groupé ou massifié de matériels courants (pour lesquels la durée de 8 ans semble suffisante), mais un objectif de standardisation d'équipements industriels complexes, produits dans l'industrie nucléaire en petites séries (par opposition à l'aéronautique et à l'automobile où on peut commander par centaines ou milliers des équipements comme les trains d'atterrissage ou les moteurs). Dans ce contexte, un accord-cadre de longue durée apporte deux bénéfices : - la garantie que le même équipement sera installé sur toutes les installations du programme avec les gains en exploitation et en maintenance (pièces de rechange par exemple) qui en découlent ; - la possibilité pour un industriel d'engager une fabrication en ” mini-série ” qu'il peut automatiser, sécuriser en qualité et rentabiliser au mieux induisant des coûts moins élevés. Les équipements visés peuvent être par exemple de la robinetterie, des pompes, des vannes ou électrovannes, de la tuyauterie, des servomoteurs, etc. Dans chaque cas, il peut exister, même pour les EPR futurs, des dizaines voire des centaines de références (par exemple 571 modèles différents de robinets, 351 modèles d'électrovannes ou 91 modèles de portes). »

Le Gouvernement a également indiqué que la durée maximale de 4 ans n'est pas adaptée aux projets nucléaires du CEA et de l'Andra : « Les mêmes considérations peuvent concerner les projets portés par le CEA et l'Andra, pour lesquels, aux termes des dispositions de l'article L. 2125-1 du code de la commande publique, la durée maximale est de quatre ans s'agissant de pouvoirs adjudicateurs, avec des possibilités de dérogation équivalentes. (...) S'agissant du CEA, l'enjeu du recours aux accords-cadres est majeur, notamment pour des prestations d'ingénierie dans le cadre de la réalisation d'ouvrages destinés à la recherche et au développement dans le domaine nucléaire. Ces accords-cadres ont notamment pour avantage de massifier des prestations des différents domaines de l'ingénierie du CEA, de développer des référentiels et pratiques métiers indispensables à la professionnalisation des acteurs et de bénéficier de l'investissement des parties prenantes bénéficiant d'une stabilité contractuelle et d'une visibilité adaptées aux activités. Les enjeux pour un projet comme le RJH se comptent donc en années et en centaines de millions d'euros. S'agissant de l'Andra, l'agence utilise actuellement le mécanisme d'accords-cadres pour les travaux souterrains au laboratoire souterrain et doit conclure des avenants pour assurer la continuité de chantier et des études de maitrise d'oeuvre. C'est en particulier le cas lorsque le programme se définit en fonction de l'avancée d'expérimentations, ou de réponses administratives attendues. L'accord-cadre de maîtrise d'oeuvre qui y est associé ne peut être découpé sans risques pour le suivi de la prestation. Des enjeux similaires apparaîtront pour le projet Cigéo. Pour de la fourniture, l'enjeu d'accord-cadre adapté à la durée de réalisation est d'éviter d'avoir plusieurs fournisseurs successifs pour une même fonction de pièce très spécifique en raison des spécificités des projets nucléaires. »

Enfin, le Gouvernement a précisé que les durées de 4 ou 8 ans ne sont pas adaptées aux chantiers de démantèlement : « Les chantiers de démantèlement sont des projets longs avec des enjeux forts de financement, de gestion des aléas et de compétences. La décision d'arrêter une installation nucléaire ouvre une période dite de préparation du démantèlement, durant laquelle l'exploitant évacue une partie des substances radioactives et effectue les opérations préparatoires au démantèlement, qui peut durer de 5 à 10 ans. Elle est suivie de la phase de démantèlement des équipements et d'assainissement proprement dite. Il faut retirer la radioactivité résiduelle sur les parois, dans des kilomètres de tuyauterie, dans des cuves, avec différents procédés chimiques, mécaniques, thermiques... Il s'agit de la phase la plus longue et la plus susceptible d'aléas, qui peut durer plusieurs décennies. Sa durée exacte dépend néanmoins, entre autres, de l'installation. Enfin, après contrôle, les autorités de sûreté nucléaire procèdent au déclassement de l'installation. »

Au total, le Gouvernement a estimé que la disposition peut concourir à la maîtrise des coûts des projets nucléaires : « La disposition vise notamment à éviter des dérives de délais et de coûts liés à d'éventuels changements de fournisseurs à l'issue de l'accord-cadre, et donc en cours de chantier. L'atténuation des risques de dérives des délais (et donc des coûts) des projets de réacteurs électronucléaires aura une incidence sur le coût complet de l'électricité produite, en limitant le coût du financement en phase de construction. En ce qui concerne les installations de recherche et les opérations de fin de cycle, cette disposition est également de nature à contribuer indirectement à la baisse du coût complet de l'électricité produite par les réacteurs, quelle que soit leur phase de vie. Les recherches conduites par le CEA contribuent à la baisse du coût complet de l'électricité, car elles portent sur des éléments de nature à optimiser la construction et le fonctionnement des réacteurs, notamment, sur la durée de fonctionnement des centrales en service, sur les réacteurs du futur, sur les performances des combustibles nucléaires ou encore sur les déchets radioactifs. Cet effet ne peut néanmoins pas faire l'objet d'une quantification précise. »

III. La position de la commission - Une disposition pertinente, devant cependant être confortée.

A. Le rapporteur estime la disposition utile à la relance de la filière française du nucléaire.

Il observe que le champ proposé du dispositif permet d'englober un grand nombre de projets nucléaires portés par le groupe EDF, le CEA et l'Andra.

Comme l'a indiqué la DGEC, à la demande du rapporteur, la durée des projets nucléaires peut aller jusqu'à 20 ans - pour le programme de construction de 6 EPR2 du groupe EDF et le programme de réacteur de recherche Jules Horowitz (RJH) du CEA -, ceux de l'Andra ou de démantèlement et de réhabilitation pouvant être plus longs.

Le rapporteur constate que les gains financiers permis par cet article ne sont pas marginaux.

Ainsi, selon la DGEC, la disposition doit permettre un gain de plusieurs années et de plusieurs centaines de millions d'euros pour le programme RJH du CEA.

Le groupe EDF a indiqué que la disposition doit permettre de réduire, outre les risques du programme liés aux interfaces, les coûts, en permettant la standardisation des équipements et les délais, en permettant des effets d'apprentissage.

S'agissant du CEA, il a précisé que la disposition fait sens, sur le plan technique, calendaire et financier, pour le programme RJH, une remise en concurrence conduisant, a contrario, à une rupture de continuité et de connaissance de 15 mois tous les 4 ans.

Concernant l'Andra, il a spécifié que la disposition permet d'introduire un délai maximal adapté à chaque projet nucléaire, ce qui doit permettre de définir une stratégie industrielle, de mobiliser les parties prenantes et de maintenir l'attractivité de cette technique d'achat.

Quant au groupe Orano, il a réitéré la nécessité de garantir l'équilibre du contrat et l'indemnisation des aléas et précisé que la conjonction de la dérogation à l'allotissement, prévue à l'article 16, et de l'allongement des accords-cadres, prévu à l'article 17, n'est pas aisée, notamment pour intégrer les aléas inhérents à la réalisation du contrat.

B. Le rapporteur retient de ses échanges avec le Gouvernement que la disposition est permise par le cadre conventionnel et constitutionnel.

D'une part, sur le plan conventionnel, les deux directives précitées du 26 février 2014 (articles 33 et 51) autorisent les États membres à déroger à la durée des accords-cadres.

D'autre part, sur le plan constitutionnel, l'avis du Conseil d'État sur le projet de loi a rappelé que les dispositions proposées sont circonscrites dans leur champ d'application matériel et peuvent être justifiées par les mêmes motifs que ceux retenus par le Conseil constitutionnel s'agissant de la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023, ce dernier ayant indiqué que les dispositions visant à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires poursuivent « les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et [...] l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement ».

Au total, dans cet avis, le Conseil d'État s'est positionné ainsi sur la constitutionnalité et la conventionnalité de la disposition : « Le Conseil d'État considère que la détermination d'une durée maximale aux accords-cadres qui dérogent, dans des cas exceptionnels dûment justifiés, à la durée fixée par les directives à quatre ans pour les pouvoirs adjudicateurs et à huit ans pour les entités adjudicatrices, ne se heurte à aucun obstacle d'ordre constitutionnel ou conventionnel dès lors que les directives comme les textes nationaux pris pour leur transposition, qui permettent une telle dérogation, ne lui fixent pas de durée maximale. »

Sollicitée par le rapporteur, la DGEC a dans ce contexte rappelé que « dans son avis (§23), le Conseil d'État a considéré que cette disposition était conforme aux cadres constitutionnel et conventionnel ».

C. Cependant, le rapporteur constate que la rédaction du dispositif peut être améliorée.

Tout d'abord, il apparaît utile de viser, comme pour l'article 16, les accords-cadres « mixtes » de travaux, de services ou de fournitures.

C'est la raison pour laquelle le groupe EDF a indiqué : « cette précision supplémentaire serait en effet bienvenu, de tels accords-cadres mixtes pouvant être envisagés dans certaines étapes des projets ».

De son côté, la DGEC a précisé que « l'ajout des accords-cadres mixtes pourrait être considéré ».

Plus encore, il semble opportun de viser, comme pour l'article 16, les entités adjudicatrices et les pouvoirs adjudicateurs.

Sur ce sujet, le groupe EDF a estimé que « la référence à l'article 16 dans cet article 17 avait pour objet d'harmoniser les dispositions de cet article 17 avec les principes déjà définis dans l'article 16 », et la DGEC que « le renvoi à l'article 16 semble suffisant pour les besoins d'harmonisation ».

Autre point, il semble intéressant de maintenir une référence explicite à l'exigence de justification, dans un souci de meilleure conformité avec le droit de l'Union européenne.

En effet, les deux directives précitées du 26 février 2014 (article 33 et 51) imposent des « cas exceptionnels dûment justifiés ».

Enfin, comme l'article 16, l'article 17 pourrait être codifié, dans un souci d'intelligibilité et d'exhaustivité130(*).

Au total, le rapporteur a présenté un amendement (COM-56) visant à conforter le périmètre et les conditions de la dérogation à la durée maximale des accords-cadres prévue pour certains projets nucléaires.

Tout d'abord, il prévoit d'étendre la dérogation aux marchés « relatifs » aux projets nucléaires et aux marchés « mixtes » de travaux, fournitures ou services, sur le même modèle que proposé à l'article 16.

De plus, il propose de viser les « entités adjudicatrices » et les « pouvoirs adjudicateurs », à l'instar ici aussi de la rédaction prévue à l'article 16.

Enfin, l'exigence de justification, issue des directives « Marchés publics » du 26 février 2014, peut être mentionnée de manière plus explicite, dans un souci de conformité avec le droit de l'Union européenne.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

Article 17 bis (nouveau) (délégué)
Faculté pour les entités adjudicatrices et les pouvoirs adjudicateurs
de recourir à la crédibilité des offres
comme critère d'attribution des marchés publics
pour certains projets nucléaires

Introduit par un amendement ( COM-57) présenté par le rapporteur, cet article vise à permettre aux entités adjudicatrices et aux pouvoirs adjudicateurs de recourir à la crédibilité comme critère d'attribution des marchés pour certains projets nucléaires.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

Depuis l'ordonnance « Commande publique » du 23 juillet 2015131(*), prise en application de la loi « Simplification » du 20 décembre 2014132(*), l'article L. 2152-7 du code de la commande publique dispose qu'un marché public est attribué au soumissionnaire présentant l'offre économiquement la plus avantageuse.

Cette offre est déterminée sur la base du critère du prix ou du coût, ou d'une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, parmi lesquels celui du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux.

L'article R. 2152-7 du code de la commande publique précise que ces autres critères peuvent être :

la qualité, y compris la valeur technique et les caractéristiques esthétiques ou fonctionnelles, l'accessibilité, l'apprentissage, la diversité, les conditions de production et de commercialisation, la garantie de la rémunération équitable des producteurs, le caractère innovant, les performances en matière de protection de l'environnement, de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture, d'insertion professionnelle des publics en difficulté, la biodiversité, le bien-être animal ;

les délais d'exécution, les conditions de livraison, le service après-vente et l'assistance technique, la sécurité des approvisionnements, l'interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles ;

l'organisation, les qualifications et l'expérience du personnel assigné à l'exécution du marché lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d'exécution du marché.

Ce même article R. 2152-7 du code de la commande publique précise que « d'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés par l'objet du marché ou ses conditions d'exécution ».

La crédibilité des offres ne figure pas parmi les critères précités.

C'est une difficulté pour les acteurs économiques impliqués dans la relance du nucléaire, tels que le groupe EDF, dans la mesure où la construction de réacteurs électronucléaires suppose de pouvoir distinguer les prestataires selon ce critère.

Si ce critère a été admis par le Conseil d'État, dans un arrêt du 24 juin 2011133(*), et par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), dans son arrêt du 16 avril 2015134(*), les contentieux d'acteurs économiques, tels que le groupe EDF, relèvent de la Cour de la Cassation ; la jurisprudence n'a donc pas permis de définir une application homogène du critère de crédibilité des offres pour les projets nucléaires.

Or l'avant-projet de loi comprenait un article 14, qui disposait : « Les critères d'attribution des marchés concourant à un ou plusieurs projets visés à l'article 11 de la présente loi peuvent comprendre la crédibilité des offres des soumissionnaires ou en tenir compte ».

Les travaux préalables n'ont pas conduits à retenir cette rédaction.

C'est pourquoi le rapporteur a présenté un amendement (COM-57) visant à proposer une nouvelle version de cette rédaction.

Le dispositif permettrait d'appliquer un critère de crédibilité des offres pour les seuls projets de réalisation de réacteurs électronucléaires, au sens du I de l'article 7135(*) de la loi dite « Nouveau Nucléaire » du 22 juin 2023136(*), dans la mesure où la jurisprudence du Conseil constitutionnel et la doctrine du Conseil d'État admettent des dispositions spécifiques dès lors qu'elles sont circonscrites dans leur champ matériel et motivées par un motif d'intérêt général.

Dans sa décision sur la loi précitée137(*), le Conseil constitutionnel a en effet indiqué : « Il résulte des travaux préparatoires que, en adoptant des mesures propres à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires, le législateur a entendu créer les conditions qui permettraient d'augmenter les capacités de production d'énergie nucléaire afin notamment de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il a ainsi mis en oeuvre les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement. »

De son côté, dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a précisé : « Le Conseil d'État considère que les dérogations au droit de la commande publique ainsi prévues par le projet de loi sont clairement circonscrites dans leur champ d'application matériel et peuvent être justifiées par les mêmes motifs que ceux retenus par le Conseil constitutionnel s'agissant de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023). »

Plus encore, le dispositif proposerait une définition précise de la crédibilité des offres, qui pourrait s'apprécier « en fonction de la faisabilité et de la maturité des solutions techniques ou de l'adéquation des délais, des moyens ou des méthodes », ce qui le distinguerait de l'article 14 de l'avant-projet de loi, que le Conseil d'État a considéré comme satisfait par le droit existant.

En effet, dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a précisé, s'agissant de cet article 14 : « Le Conseil d'État relève en outre que la jurisprudence a déjà admis la possibilité de tenir compte de la crédibilité d'une offre au titre de l'offre économiquement la plus avantageuse (CE, 24 juin 2011, ministre de l'écologie, n° 347 720), de sorte que la disposition proposée ne change rien à l'état du droit ».

Ainsi proposé, le dispositif s'inscrirait dans le cadre fixé par le droit de l'Union européenne qui admet, comme critère d'attribution des marchés, outre le prix ou le coût, des aspects qualitatifs, environnementaux et/ou sociaux.

D'une part, le paragraphe 2 de l'article 67 de la directive « Marchés publics », du 26 février 2014138(*), dispose que « l'offre économiquement la plus avantageuse du point de vue du pouvoir adjudicateur est déterminée sur la base du prix ou du coût, selon une approche fondée sur le rapport coût/efficacité, telle que le coût du cycle de vie, conformément à l'article 68, et peut tenir compte du meilleur rapport qualité/prix, qui est évalué sur la base de critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux et/ou sociaux liés à l'objet du marché public concerné. »

D'autre part, le paragraphe 2 de l'article 82 de la directive « Marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux », du 26 février 2014139(*), applique les mêmes dispositions dans ces secteurs.

Au total, la disposition serait pertinente dans le cadre de l'accélération de la construction des nouveaux réacteurs électronucléaires.

En effet, le groupe EDF a indiqué au rapporteur être favorable à la disposition, en ces termes : « EDF souhaite effectivement voir réintroduite dans le projet de loi la disposition relative à la prise en compte de la crédibilité des offres dans les critères de sélection des soumissionnaires. L'objectif est de valoriser les aspects qualitatifs des offres. Cette exigence de qualité (cohérence des solutions proposées, maturité technologique, savoir-faire, etc.) contribue à la sûreté et est un enjeu majeur pour la construction, l'exploitation et la maintenance aussi bien du parc nucléaire existant que du nouveau nucléaire français. »

De leur côté, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) n'ont pas demandé le rétablissement de ce critère dans leur contribution écrite transmise au rapporteur, mais ont indiqué ultérieurement que son application à leur cas de figure pourrait être considérée.

S'agissant du Gouvernement, la Direction interministérielle au nouveau nucléaire (DINN) a indiqué être favorable à l'évolution, tandis que la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a estimé qu'elle est satisfaite par le droit existant.

La modification de ces dispositions dans le cadre du projet de loi présente un lien avec ce dernier, dans la mesure où l'avant-dernier chapitre porte sur « la sécurisation des procédures relatives à la commande publique pour les porteurs de projets nucléaires ».

Au reste, les règles de la commande publique applicables aux projets de réalisation de réacteurs électronucléaires sont modifiées tant par l'article 16, s'agissant de la dérogation à l'obligation d'allotissement, que par l'article 17, en ce qui concerne la dérogation à la durée maximale des accords-cadres. Certains de leurs éléments les plus sensibles sont également visés par la dérogation aux règles de la commande publique, à l'article 18.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

Article 17 ter (nouveau) (délégué)
Faculté pour les entités adjudicatrices et les pouvoirs adjudicateurs
de recourir à des avenants pour modifier les marchés publics
sans nouvelle procédure de mise en concurrence
pour certains projets nucléaires

Introduit par un amendement ( COM-58) présenté par le rapporteur, cet article vise à permettre aux entités adjudicatrices et aux pouvoirs adjudicateurs de recourir à des avenants pour certains projets nucléaires, afin de modifier sans nouvelle procédure de mise en concurrence les marchés afférents à ces projets.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

Depuis l'ordonnance « Commande publique » du 23 juillet 2015140(*), prise en application de la loi de « Simplification » du 20 décembre 2014141(*), l'article L. 2194-1 du code de la commande publique dispose qu'un marché public peut être modifié sans nouvelle procédure de mise en concurrence et sans changer la nature globale du marché lorsque :

- les modifications ont été prévues dans les documents contractuels initiaux (1°) ;

- des travaux, fournitures ou services supplémentaires sont devenus nécessaires (2°) ;

- les modifications sont rendues nécessaires par des circonstances imprévues (3°) ;

- un nouveau titulaire se substitue au titulaire initial du marché (4°) ;

- les modifications ne sont pas substantielles (5°) ;

- les modifications sont de faible montant (6°).

Les articles R. 2194-1 à 2194-9 du code de la commande publique précisent les modalités d'application de ces modifications autorisées.

En application du 1° de l'article L. 2194-1, le marché peut être modifié lorsque les modifications, quel que soit leur montant, ont été prévues dans les documents contractuels initiaux sous la forme de clauses de réexamen, dont des clauses de variation du prix ou d'options claires, précises et sans équivoque. Ces clauses indiquent le champ d'application et la nature des modifications ou des options envisageables, ainsi que les conditions dans lesquelles il peut en être fait usage (article R. 2194-1).

Conformément au 2° de l'article L. 2194-1, le marché peut être modifié lorsque des travaux, fournitures ou services supplémentaires sont devenus nécessaires et ne figuraient pas dans le marché initial, à la condition qu'un changement de titulaire soit impossible pour des raisons économiques ou techniques tenant, notamment, à des exigences d'interchangeabilité ou d'interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre du marché initial. Lorsque le marché est conclu par un pouvoir adjudicateur, le montant de la modification ne peut être supérieur à 50 % du montant du marché initial. Lorsque plusieurs modifications successives sont effectuées, cette limite s'applique au montant de chaque modification et ces modifications successives ne doivent pas avoir pour objet de contourner les obligations de publicité et de mise en concurrence. Pour le calcul de cette limite, l'acheteur tient compte de la mise en oeuvre de la clause de variation des prix (articles R. 2194-2 à 2194-4).

Comme prévu au 3° de l'article L. 2194-1, le marché peut être modifié lorsque la modification est rendue nécessaire par des circonstances qu'un acheteur diligent ne pouvait pas prévoir. La même limite est applicable (article R. 2194-5).

En application du 4° de l'article L. 2194-1, le marché peut être modifié lorsqu'un nouveau titulaire se substitue au titulaire initial du marché, en application d'une clause de réexamen ou d'une option conformément ou dans le cas d'une cession du marché, à la suite d'une opération de restructuration du titulaire initial, à la condition que cette cession n'entraîne pas d'autres modifications substantielles et ne soit pas effectuée dans le but de soustraire le marché aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Le nouveau titulaire doit remplir les conditions qui avaient été fixées par l'acheteur pour la participation à la procédure de passation du marché initial (article R. 2194-6).

Tel que prévu au 5° de l'article L. 2194-1, le marché peut être modifié lorsque les modifications, quel que soit leur montant, ne sont pas substantielles. Une modification est substantielle, notamment, lorsqu'elle introduit des conditions qui, si elles avaient été incluses dans la procédure de passation initiale, auraient attiré davantage d'opérateurs économiques ou permis l'admission d'autres opérateurs économiques ou le choix d'une offre autre que celle retenue, qu'elle modifie l'équilibre économique du marché en faveur du titulaire d'une manière qui n'était pas prévue dans le marché initial, qu'elle modifie considérablement l'objet du marché ou qu'elle a pour effet de remplacer le titulaire initial par un nouveau titulaire (article R. 2194-7).

Enfin, conformément au 6° de l'article L. 2194-1, le marché peut être modifié lorsque le montant de la modification est inférieur aux seuils européens qui figurent dans l'avis annexé au présent code et à 10 % du montant du marché initial pour les marchés de services et de fournitures ou à 15 % du montant du marché initial pour les marchés de travaux, sans qu'il soit nécessaire de vérifier si les conditions précitées sur les modifications non substantielles sont remplies. Pour le calcul de cette limite, l'acheteur tient compte de la mise en oeuvre de la clause de variation des prix. Lorsque plusieurs modifications successives sont effectuées, l'acheteur prend en compte leur montant cumulé (articles R. 2194-8 et R. 2194-9).

Les projets de réalisation de réacteurs électronucléaires ne bénéficient pas de dispositions spécifiques en matière d'avenants.

C'est une difficulté pour les acteurs économiques impliqués dans la relance du nucléaire, tels que le groupe EDF, dans la mesure où la construction de réacteurs électronucléaires, compte tenu de sa durée longue et de sa complexité avérée, nécessite de reposer sur des contrats à même d'intégrer les évolutions techniques nécessaires.

Or l'avant-projet de loi comprenait un article 13, qui disposait : « Les marchés concourant à un ou plusieurs projets visés à l'article 11 de la présente loi peuvent donner lieu à des modifications dans les cas prévus à l'article L. 2194-1 du code de la commande publique ou dans les cas suivants :

1° Des travaux, services ou fournitures supplémentaires sont devenus nécessaires, compte tenu le cas échéant de la complexité inhérente aux projets concernés et des évolutions de leur conception, et un changement de cocontractant est impossible ou entraînerait un inconvénient majeur ou une augmentation substantielle des coûts pour l'acheteur. L'impossibilité de changer de cocontractant peut tenir à des raisons économiques ou techniques telles que l'obligation d'interchangeabilité ou d'interopérabilité avec les équipements, logiciels, services ou installations existants achetés dans le cadre du marché initial ;

2° Des compléments, précisions, évolutions techniques ou autres modifications sont devenus nécessaires du fait de circonstances qu'un acheteur raisonnablement diligent ne pouvait pas prévoir, compte tenu le cas échéant de la complexité inhérente aux projets concernés et des évolutions de leur conception, à condition que les modifications ne modifient pas la nature globale du marché. Ces modifications peuvent intervenir quelle que soit leur valeur ou, lorsque le marché est conclu par un pouvoir adjudicateur, dans le respect du plafond fixé par les dispositions de l'article R. 2194-3 du code de la commande publique dans sa rédaction en vigueur à la date de publication de la présente loi. »

Les travaux préalables n'ont pas conduit à retenir cette rédaction.

C'est pourquoi le rapporteur a présenté un amendement (COM-58), visant à proposer une nouvelle version de cette rédaction.

Le dispositif permettrait de faciliter le recours à certains avenants pour les seuls projets de réalisation de réacteurs électronucléaires, au sens du I de l'article 7142(*) de la loi dite « Nouveau Nucléaire » du 22 juin 2023143(*), dans la mesure où la jurisprudence du Conseil constitutionnel et la doctrine du Conseil d'État admettent des dispositions spécifiques dès lors qu'elles sont circonscrites dans leur champ matériel et motivées par un motif d'intérêt général.

Dans sa décision sur la loi précitée144(*), le Conseil constitutionnel a en effet indiqué : « Il résulte des travaux préparatoires que, en adoptant des mesures propres à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires, le législateur a entendu créer les conditions qui permettraient d'augmenter les capacités de production d'énergie nucléaire afin notamment de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il a ainsi mis en oeuvre les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement. »

De son côté, dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a précisé : « Le Conseil d'État considère que les dérogations au droit de la commande publique ainsi prévues par le projet de loi sont clairement circonscrites dans leur champ d'application matériel et peuvent être justifiées par les mêmes motifs que ceux retenus par le Conseil constitutionnel s'agissant de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023). »

Plus précisément, le dispositif tendrait à clarifier l'accès des projets de réalisation de réacteurs électronucléaires à la faculté d'avenants prévue, dans le cas des travaux, fournitures ou services supplémentaires devenus nécessaires, au 2° de l'article L. 2194-1 du code de la commande publique.

Pour ce faire, il proposerait de préciser que le caractère nécessaire de ces travaux, fournitures ou services peut s'apprécier « en fonction de l'évolution de la conception du projet ».

Le dispositif permettrait ainsi à des acteurs économiques de la relance du nucléaire, tels que le groupe EDF, de disposer d'une interprétation solide de l'application du recours aux avenants pour les projets de réalisation de réacteurs électronucléaires, à même d'éviter des applications administratives hétérogènes et, au-delà, de prévenir les risques de recours contentieux.

Ainsi proposé, le dispositif s'inscrirait dans le cadre fixé par le droit de l'Union européenne, dont il reprendrait explicitement les conditions liées à l'absence de changement de la nature globale du projet ou à l'impossibilité du changement du co-contractant pour des raisons économiques ou techniques, telles que l'obligation d'interchangeabilité ou d'interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre de le marché initial145(*),146(*).

D'une part, le paragraphe 1 de l'article 72 de la directive « Marchés publics », du 26 février 2014147(*), dispose que « les marchés et les accords-cadres peuvent être modifiés sans nouvelle procédure de passation de marché conformément à la présente directive dans l'un des cas suivants : [...] b) pour les travaux, services ou fournitures supplémentaires du contractant principal qui sont devenus nécessaires et ne figuraient pas dans le marché initial, lorsqu'un changement de contractant : i) est impossible pour des raisons économiques ou techniques telles que l'obligation d'interchangeabilité ou d'interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre de le marché initial ; et ii) présenterait un inconvénient majeur ou entraînerait une augmentation substantielle des coûts pour le pouvoir adjudicateur. Toutefois, toute augmentation de prix ne peut pas être supérieure à 50 % de la valeur du marché initial. Lorsque plusieurs modifications successives sont effectuées, cette limite s'applique à la valeur de chaque modification. Ces modifications consécutives ne visent pas à contourner les dispositions de la présente directive ; [...] c) lorsque toutes les conditions suivantes sont remplies : i) la modification est rendue nécessaire par des circonstances qu'un pouvoir adjudicateur diligent ne pouvait pas prévoir ; ii) la modification ne change pas la nature globale du marché ; iii) toute augmentation de prix n'est pas supérieure à 50 % de la valeur du marché ou de l'accord-cadre initial. Lorsque plusieurs modifications successives sont effectuées, cette limite s'applique à la valeur de chaque modification. Ces modifications consécutives ne visent pas à contourner les dispositions de la présente directive ; »

D'autre part, le paragraphe 1 de l'article 89 de la directive « Marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux », du 26 février 2014148(*), dispose que « les marchés et les accords-cadres peuvent être modifiés sans nouvelle procédure de passation de marché conformément à la présente directive dans l'un des cas suivants : [...] b) pour les travaux, services ou fournitures supplémentaires du contractant principal, quelle qu'en soit la valeur, qui sont devenus nécessaires et qui ne figuraient pas dans le marché initial, lorsqu'un changement de contractant : i) est impossible pour des raisons économiques ou techniques telles que l'obligation d'interchangeabilité ou d'interopérabilité avec les équipements, logiciels, services ou installations existants achetés dans le cadre du marché initial ; et ii) présenterait un inconvénient majeur ou entraînerait une augmentation substantielle des coûts pour l'entité adjudicatrice ; c) lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies : i) la modification est rendue nécessaire par des circonstances qu'une entité adjudicatrice diligente ne pouvait pas prévoir ; ii) la modification ne change pas la nature globale du marché ; »

En définitive, la disposition serait utile dans le cadre de l'accélération de la construction des nouveaux réacteurs électronucléaires.

Ainsi, le groupe EDF s'est positionné auprès du rapporteur en faveur de la disposition : « Cette possibilité permettrait pour pouvoir tenir compte de la durée longue et de la complexité inhérente aux projets de nouveau nucléaire et des évolutions nécessaires de leur conception, lorsque des travaux, services ou fournitures et des modifications sont nécessaires et qu'un changement de titulaire entrainerait un inconvénient majeur pour EDF. Ce type de projets peut appeler des évolutions techniques dans la mesure où il n'est pas toujours possible d'emblée et ab initio de figer les spécifications et le périmètre exact du marché. Cela implique donc de pouvoir modifier ces marchés publics, et ce quel qu'en soit le montant, sans pour autant en changer la nature globale. »

Pour ce qui les concerne, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) n'ont pas demandé le rétablissement de ce critère dans leur contribution écrite transmise au rapporteur, mais ont indiqué ultérieurement que son application à leur cas de figure pourrait être considérée.

Concernant le Gouvernement, la Direction interministérielle au nouveau nucléaire (DINN) a indiqué être favorable à l'évolution, tandis que la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a estimé qu'elle est d'ordre règlementaire.

La modification de ces dispositions dans le cadre du projet de loi présente un lien avec ce dernier, dans la mesure où l'avant-dernier chapitre porte sur « la sécurisation des procédures relatives à la commande publique pour les porteurs de projets nucléaires ».

Au reste, les règles de la commande publiques applicables aux projets de réalisation de réacteurs électronucléaires sont modifiées tant par l'article 16, s'agissant de la dérogation à l'obligation d'allotissement, que par l'article 17, en ce qui concerne la dérogation à la durée maximale des accords-cadres. Certains de leurs éléments les plus sensibles sont également visés par la dérogation aux règles de la commande publiques, à l'article 18.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi rédigé.

CHAPITRE II
Mesures destinées à renforcer la protection des intérêts fondamentaux
de la Nation en matière de nucléaire
Article 18 (délégué)
Application au seul titre II du livre V du code de la commande publique aux marchés de travaux, de fournitures ou de services
pour certains projets nucléaires

Cet article vise à appliquer le seul titre II du livre V du code de la commande publique aux marchés de travaux, de fournitures ou de services pour certains éléments de projets nucléaires.

Le rapporteur a présenté un amendement ( COM-59) ajustant la définition et l'application de cette dérogation, en prévoyant en sus une obligation de reddition des comptes sur son utilisation par le Gouvernement auprès du Parlement.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.

I. La situation actuelle - Des exonérations possibles aux procédures de publicité et de mise en concurrence accordant peu de place aux projets nucléaires.

A. Le code de la commande publique prévoit plusieurs régimes de marchés publics excluant les procédures de publicité et de mise en concurrence.

Depuis l'ordonnance « Commande publique », du 26 novembre 2018149(*), instituée en application de la loi « Modernisation de la vie économique », du 9 décembre 2016150(*), le titre II du livre V de la deuxième partie du code de la commande publique regroupe les régimes des contrats exclus du champ d'application du code des marchés publics ou des ordonnances équivalentes avant la création de l'actuel code.

Ces régimes comprennent notamment :

- les relations internes au secteur public, telles que la quasi-régie (article L. 2511-1 du code de la commande publique), la coopération entre pouvoirs adjudicateurs (article L. 2511-6), les entreprises liées (article L 2511-7) ou les coentreprises (article L. 2511-9) ;

- certains marchés publics, comme ceux conclus en application de règles internationales (article L. 2512-1), liés à la sécurité ou à la protection d'intérêts essentiels de l'État (article L. 2512-3), de service de sécurité nucléaire (article L. 2512-5), pour l'achat d'énergie ou de combustibles destinés à la production d'énergie (article L. 2514-2) ;

- les marchés de défense et de sécurité (article L. 2515-1).

À titre d'illustration, l'article L. 2512-3 du code de la commande publique dispose que « sont soumis aux règles définies au titre II les marchés publics qui exigent le secret ou dont l'exécution doit s'accompagner de mesures particulières de sécurité conformément aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ou pour lesquels la protection des intérêts essentiels de l'État l'exige, à condition que cette sécurité ou cette protection ne puisse pas être garantie par d'autres moyens. »

B. La jurisprudence interne admet l'exonération de certains marchés publics aux règles de publicité et de mise en concurrence.

Dans sa décision du 3 décembre 2030151(*), le Conseil constitutionnel a admis la constitutionnalité des articles L. 2122-2 et L. 2322-1 du code de la commande publique, issus de la loi dite « ASAP », du 7 décembre 2020152(*), qui permettent à l'acheteur de passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalable pour « un motif d'intérêt général. »

Depuis lors, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 21 juin 2023153(*), sur la loi dite « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023154(*), a estimé qu'en adoptant des mesures propres à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires, « le législateur a mis en oeuvre les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement. »

C. Le droit de l'Union européenne admet l'exonération de certains marchés publics aux règles de publicité et de mise en concurrence.

D'une part, le paragraphe 2 de l'article 15 de la directive « Marchés publics », du 26 février 2014155(*), dispose, pour les marchés publics et concours organisés dans le domaine de la défense et de la sécurité, que « la présente directive ne s'applique pas aux marchés publics ni aux concours (...) dans la mesure ou` la protection des intérêts essentiels de la sécurité d'un État membre ne peut être garantie par des mesures moins intrusives, par exemple en imposant des conditions en vue de protéger la confidentialité des informations que le pouvoir adjudicateur met à disposition dans le cadre d'une procédure d'attribution de marché prévue par la présente directive. En outre [...], la présente directive ne s'applique pas aux marchés ni aux concours [...] dans la mesure où l'application de la présente directive obligerait un État membre à fournir des informations dont il estimerait la divulgation contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité. »

D'autre part, le paragraphe 2 de l'article 24 de la directive « Marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux », du 26 février 2014156(*) applique les mêmes dispositions dans ces secteurs157(*).

La jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a admis la dérogation aux règles de publicité et de mise en concurrence, sur le fondement des intérêts essentiels de l'État, dans le cas de construction et d'exploitation d'un terminal de gaz naturel liquéfié en Lituanie158(*) ou à l'impression de documents en Pologne159(*). De son côté, la Commission européenne l'a appliqué au terminal lituanien précité160(*), mais aussi à celui des marchés publics d'une centrale nucléaire en République tchèque161(*),162(*).

De plus, la jurisprudence de la CJUE a admis l'attribution directe dérogeant au principe de transparence pour des raisons impérieuses d'intérêt général163(*), un motif énoncé à l'article 52 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE)164(*),165(*) ou des considérations prises en compte par le droit de l'Union166(*).

D. Le droit international admet l'exonération de certains marchés publics aux règles de publicité et de mise en concurrence.

Tout comme le droit européen, le droit international réserve le cas de la protection des intérêts essentiels de la sécurité des États s'agissant des marchés publics.

L'article III de l'accord sur les marchés publics de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)167(*) prévoit ainsi que « rien dans le présent accord ne sera interprété comme empêchant une Partie quelconque d'entreprendre une action ou de ne pas divulguer des renseignements si elle l'estime nécessaire à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité, se rapportant aux marchés d'armes, de munitions ou de matériel de guerre, ou aux marchés indispensables à la sécurité nationale ou aux fins de la défense nationale ».

II. Le dispositif envisagé - Une dérogation aux règles de publicité et de mise en concurrence pour certains éléments des installations nucléaires soumises à l'autorisation de détention des matières nucléaires prévue par le code de la défense.

A. L'article 18 du projet de loi propose de soumettre les marchés publics relatifs à une ou plusieurs installations abritant ou ayant vocation à abriter des matières nucléaires, dont la détention est soumise à autorisation en application de l'article L. 1333-2 du code de la défense168(*), au régime prévu par le titre II du livre V de la deuxième partie du code de la commande publique169(*) lorsqu'ils concernent :

- d'une part, la conception, la construction, le fonctionnement ou le démantèlement des bâtiments destinés à recevoir des matières nucléaires, y compris leurs fondations et structures ;

- d'autre part, la conception, la qualification, la fabrication, la modification, la maintenance ou le retrait des structures, équipements, systèmes, matériels, composants ou logiciels contribuant à la protection contre les actes de malveillance ou à la sûreté nucléaire, au sens de l'article L. 591-1 du code de l'environnement171(*).

B. Dans l'avant-projet de loi, le dispositif :

- visait les marchés concourant au cycle de vie des installations ;

- prévoyait de tenir compte des dispositions du code de la défense applicables à l'acheteur relatives à la défense civile, à la défense économique et aux régimes de défense d'application permanente voire des mesures additionnelles de protection de l'information ;

- réservait le cas d'une attribution des marchés sans publicité ni mise en concurrence ;

- prévoyait l'attribution des marchés sans publicité après mise en concurrence dans les conditions définies par l'acheteur qui veille à choisir une offre pertinente en tenant compte, le cas échéant, de la pluralité d'offres susceptibles de répondre au besoin ;

- prévoyait la modification des marchés sans nouvelle procédure de mise en concurrence.

Sur ces différents ajustements, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) a indiqué, à la demande du rapporteur, que la plupart de ces dispositions restent possibles, sans qu'il soit nécessaire de le préciser ici.

C. Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d'État a admis la conventionnalité de la dérogation aux règles de publicité et de mise en concurrence prévue pour les projets nucléaires : « 25. Le projet de loi prévoit que les marchés publics relatifs à la conception, à la construction, au fonctionnement ou au démantèlement, des bâtiments destinés à recevoir des matières nucléaires dont la détention est soumise à autorisation en application de l'article L. 1333-2 du code de la défense, ainsi qu'à la conception, la qualification, la fabrication, la modification la maintenance ou le retrait des structures, équipements, systèmes, matériels, composants ou logiciels contribuant à la protection contre les actes de malveillance ou à la sûreté nucléaire au sens de l'article L. 591-1 du code de l'environnement, sont soumis au titre II du livre V de la deuxième partie du code de la commande publique, à l'instar des marchés publics, mentionnés à l'article L. 2512-3 de ce code, qui exigent le secret ou dont l'exécution doit s'accompagner de mesures particulières de sécurité conformément aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ou pour lesquels la protection des intérêts essentiels de l'État l'exige. Le Conseil d'État relève que les articles 15 de la directive 2014/24 et 24 de la directive 2014/25 prévoient une exclusion de leur application pour des raisons de sécurité, notamment "dans la mesure où la protection des intérêts essentiels de la sécurité d'un État membre ne peut être garantie par des mesures moins intrusives". La Cour de justice de l'Union européenne a ainsi récemment admis le recours à l'exception tirée de la protection des intérêts essentiels pour l'attribution directe des marchés portant sur l'impression de certains documents présentant un niveau de sensibilité particulièrement élevé, au point qu'une éventuelle divulgation des informations qu'ils contiennent pourrait avoir des conséquences irréparables pour la sécurité nationale (CJUE 7 septembre 2023, aff. C-601/21). Le Conseil d'État estime que la disposition envisagée ne se heurte à aucun obstacle d'ordre conventionnel, dès lors que les marchés mentionnés par le projet de loi, dont l'objet est précisément défini et qui portent sur la construction, la sécurité et la sûreté des infrastructures nucléaires les plus sensibles, peuvent être considérés comme hors du champ de la directive au titre de la protection des intérêts essentiels de l'État, sans que des mesures moins intrusives ne puissent, en l'espèce, garantir la protection de ces intérêts. »

D. Aucune observation particulière n'est mentionnée dans l'avis du Conseil national de la transition écologique (CNTE), du 29 novembre 2023, ou du Conseil supérieur de l'énergie (CSE), du 14 novembre 2023.

E. Dans son étude d'impact sur le projet de loi, le Gouvernement a rappelé que la dérogation envisagée vise les éléments des installations nucléaires les plus sensibles : « Elle s'appliquera aux installations abritant ou ayant vocation à abriter des matières nucléaires soumises au régime prévu par le code de la défense afin d'assurer leur protection contre tout acte de malveillance (notamment dans le but d'éviter la prolifération nucléaire et de prévenir tout risque ou inconvénient pour la santé, la salubrité, la sécurité publiques, et l'environnement). Au sein de ces installations, seuls seront concernés les marchés qui concourent au cycle de vie des bâtiments destinés à recevoir des matières nucléaires ou les marchés relatifs aux éléments contribuant à la protection contre les actes de malveillance ou à la sûreté nucléaire telle que définie à l'article L. 591-1 du code de l'environnement (structures, équipements, systèmes, matériels, composants, logiciels ou systèmes d'information). »

Il a estimé que la dérogation est conforme au cadre européen : « La mesure est conforme au droit européen en vigueur tel qu'interprété par la Cour de justice. »

Il a ajouté que ce même dispositif est conforme au cadre constitutionnel : « La liberté et l'égalité d'accès à la commande publique sont des principes de valeur constitutionnelle. Ils doivent être combinés avec les autres principes à valeur constitutionnelle, notamment la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique (Conseil constitutionnel, décision n° 2015-713 DC du 23 juillet 2015 ; Conseil constitutionnel, décision n° 2022-843 DC du 12 août 2022). Le Conseil constitutionnel a spécifiquement confirmé à cet égard que les réacteurs électronucléaires à construire participent de ces éléments essentiels du potentiel économique (Conseil constitutionnel, décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, § 28), dont font partie à plus forte raison les réacteurs existants. »

Pour le Gouvernement, les autres options envisageables n'auraient pas été souhaitables : « Le code de la commande publique permet déjà aujourd'hui (notamment à son article L. 2512-3) d'écarter son application sur le fondement des intérêts essentiels de l'État. L'option de ne pas légiférer a cependant été écartée parce qu'il importe que l'État définisse lui-même ce qui apparaît essentiel à la protection des intérêts fondamentaux de la Nation et le niveau de protection à atteindre. Une mise en concurrence à des conditions définies par l'acheteur permettant la consultation d'opérateurs fiables demeurera toutefois possible dans la mesure compatible avec la protection de nos intérêts essentiels. Il est en effet utile et nécessaire de continuer à faire jouer la concurrence au sein de la filière, qui fait intervenir plusieurs milliers d'entreprises, issues en grande partie de France, mais également de nos partenaires européens et de nos alliés. L'option consistant à soumettre l'intégralité des intervenants au régime d'habilitation au titre du secret de la défense nationale a été envisagée et écartée. Cette procédure créerait une charge administrative disproportionnée et incompatible avec le fonctionnement au quotidien de l'activité. Au demeurant, tous les intervenants n'ont pas nécessairement accès au secret de la défense nationale dans le cadre de l'exécution de leur marché, et la mesure vise plus à prévenir le risque d'actes hostiles qu'à renforcer la protection du secret défense, déjà assurée par d'autres régimes. L'option d'exclure l'ensemble des bâtiments des installations abritant ou ayant vocation à abriter des matières nucléaires dont la détention est soumise à autorisation en application de l'article L. 1333-2 du code de la défense n'a pas été retenue : au sein d'une installation, tous les éléments ne revêtent pas le même niveau de sensibilité, et il est apparu adéquat de cantonner ce dispositif à la partie la plus sensible des installations, même si la Commission ou la jurisprudence européenne ont déjà admis par le passé une application des exceptions à la totalité de centrales sans distinguer entre leurs différents éléments. L'option de fixer une liste d'achats courants exclus du dispositif a été envisagée, mais écartée : la nécessité d'interpréter la mesure de manière à assurer sa conformité au droit de l'Union a été vue comme suffisante pour éviter qu'elle soit utilisée pour des marchés dépourvus de tout lien avec la protection des intérêts essentiels de l'État (par exemple ceux portant sur des fournitures usuelles sans spécificité, contribution à la sécurité, ni intégration à l'installation). »

Enfin, il a considéré que la disposition n'a pas d'impact macroéconomique, mais peut conduire à écarter certaines acteurs économiques : « La mesure n'a, par elle-même, aucune incidence macroéconomique. Elle aura néanmoins une contribution indirecte au titre de l'amélioration de la défense économique de la Nation, notamment concernant la sécurité d'approvisionnement. La mesure n'a, par elle-même, aucune incidence générale sur les entreprises. Elle pourra entraîner dans certains cas des restrictions à la liberté d'accès à la commande publique, justifiées par la protection des intérêts essentiels de la Nation et limitées par le maintien du principe d'une mise en concurrence et la nécessité de tenir compte de la pluralité d'offres susceptibles de répondre au besoin. »

III. La position de la commission - Une dérogation justifiée, pouvant toutefois être ajustée.

A. Le rapporteur estime la disposition utile à la relance de la filière française du nucléaire.

Il observe que le champ de la disposition permet d'exclure de l'application des règles de la commande publique les éléments les plus sensibles des installations nucléaires.

La DGEC a ainsi rappelé que le dispositif vise, dans l'exemple d'une centrale nucléaire, l'« îlot nucléaire » des réacteurs existants ou futurs, leur enceinte de sécurité ou leur système d'information.

De son côté, le groupe EDF a précisé que le dispositif concerne les marchés relatifs à l'« îlot nucléaire », c'est-à-dire les éléments les plus sensibles des installations nucléaires (bâtiment réacteur, bâtiment combustible, structures, équipements, systèmes, matériels, composants ou logiciels contribuant à la protection contre les actes de malveillance ou à la sûreté nucléaire notamment).

Le rapporteur constate que la disposition n'englobe pas l'intégralité des installations nucléaires, contrairement aux cas tchèque ou hongrois, pour des raisons juridiques, mais aussi pratiques.

C'est pourquoi le groupe EDF a indiqué : « Il a été retenu de focaliser cette disposition sur les éléments des centrales en lien avec la pérennité de la disposition et la sûreté nucléaire, enjeu essentiel pour la Nation ».

Dans le même esprit, la DGEC a précisé que « la raison essentielle est, qu'à la différence des cas tchèques et hongrois, EDF n'achète pas les réacteurs ”clé en main" à un opérateur, mais achète elle-même tous les lots en jouant le rôle d'ensemblier. Il est donc possible de chercher à distinguer au sein de la centrale pour faciliter la démonstration de la bonne conciliation entre les principes constitutionnels (liberté d'accès à la commande publique d'un côté, préservation des intérêts essentiels de l'État de l'autre). »

Le rapporteur relève que le régime dérogatoire ainsi ouvert par la disposition autorise l'absence d'application des règles de publicité ou de mise en concurrence.

Aussi le groupe EDF a-t-il indiqué : « La disposition pose un principe de liberté en ce qui concerne les règles de passation des marchés publics aux parties les plus sensibles des futures installations. Elle permettra, selon les cas, d'organiser une mise en concurrence à des conditions définies par EDF, de consulter des fournisseurs potentiels fiables et sélectionnés sans publicité, voire dans certains cas spécifiques de conclure sur la base d'un gré à gré. »

Pareillement, le DGEC a précisé : « Ils devraient le plus souvent être attribués sans publicité, mais avec mise en concurrence, et dans les cas les plus sensibles, sans publicité ni mise en concurrence. »

Le rapporteur note que la disposition n'a pas pour objet de réaliser des gains financiers.

La DGEC lui a indiqué que le dispositif ne vise pas à réaliser des gains en termes de coûts ou de délais.

Partageant le même point de vue, le groupe EDF a ajouté que le dispositif vise à sécuriser l'exécution des marchés et à garantir la sécurité et la sûreté des installations. Pour le groupe, le gain en termes de coûts ou de délais ne peut être qu'indirect, du fait de la qualité des fournisseurs retenus.

Quant à l'Andra, elle a précisé que l'intérêt du dispositif est de préserver la confidentialité des données propres de telles installations, quelle que soit la nature de l'opération projetée, y compris celles visant leur protection au titre de la sûreté nucléaire ou de la protection contre les actes de malveillance.

B. Le rapporteur retient de ses échanges avec le Gouvernement que la disposition est permise par le cadre conventionnel et constitutionnel.

D'une part, sur le plan conventionnel, les deux directives précitées du 26 février 2014 (articles 15 et 24) autorisent les États membres à déroger à l'application des règles de la commande publique dans la mesure où la protection des intérêts essentiels de la sécurité d'un État ne peut être garantie par des mesures moins intrusives et dans les cas où ils seraient obligés à fournir des informations dont la divulgation serait contraire aux intérêts essentiels de la Nation.

D'autre part, sur le plan constitutionnel, l'avis du Conseil d'État sur le projet de loi a rappelé que les dispositions proposées sont circonscrites dans leur champ d'application matériel et peuvent être justifiées par les mêmes motifs que ceux retenus par le Conseil constitutionnel s'agissant de la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023, ce dernier ayant indiqué que les dispositions visant à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires poursuivent « les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et [...] l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement ».

Au total, dans cet avis, le Conseil d'État s'est exprimé en ces termes sur la conventionnalité de la disposition : « Le Conseil d'État estime que la disposition envisagée ne se heurte à aucun obstacle d'ordre conventionnel, dès lors que les marchés mentionnés par le projet de loi, dont l'objet est précisément défini et qui portent sur la construction, la sécurité et la sûreté des infrastructures nucléaires les plus sensibles, peuvent être considérés comme hors du champ de la directive au titre de la protection des intérêts essentiels de l'État, sans que des mesures moins intrusives ne puissent, en l'espèce, garantir la protection de ces intérêts.

Interrogée par le rapporteur, la DGEC a précisé à son tour que « l'avis du Conseil d'État le confirme pour le cadre conventionnel. Il ne fait pas référence au cadre constitutionnel, sans soulever de difficulté à ce propos. La mesure paraît conforme à la Constitution, la protection des intérêts fondamentaux de la Nation étant un objectif de valeur constitutionnelle et le principe de l'exception étant par ailleurs déjà prévu dans le code de la commande publique. »

C. Cependant, le rapporteur constate que la rédaction de la disposition peut être ajustée.

En premier lieu, il importe de préciser le champ de la disposition, sur le même modèle que la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023.

En effet, cette loi identifie comme des éléments essentiels à la réalisation des nouveaux réacteurs électronucléaires, ne pouvant faire l'objet de travaux anticipés, « la construction des bâtiments, y compris leurs fondations, destinés à recevoir des combustibles nucléaires ou à héberger des matériels de sauvegarde » (II de l'article 11).

Or les « bâtiments de sauvegarde » ne sont pas compris dans le périmètre de la disposition

Sur ce point, le groupe EDF a indiqué que « la notion de "bâtiment" pourrait être ajoutée à la liste pour clarifier cette interprétation ».

De son côté, la DGEC a précisé que « la notion de "structures" a été considérée comme plus large que celle de "bâtiments", qui fait l'objet d'une définition dans le code de la construction et de l'habitation ».

En second lieu, il convient de répondre aux manques d'exhaustivité des équipements visés en matière de protection contre les actes de malveillance ou de sûreté nucléaire, en visant ceux y « contribuant directement ou indirectement ».

Le groupe EDF a plaidé en ce sens auprès du rapporteur : « D'autres éléments, tels que les systèmes et équipements, de la source froide, d'ultime secours ou la turbine contribuent à la sûreté bien que n'étant pas situés dans le bâtiment nucléaire. EDF souhaiterait par conséquent préciser que seront concernés par ce régime spécifique aussi bien les éléments concourant directement à la protection contre les actes de malveillance ou à la sécurité nucléaire que ceux y contribuant indirectement. Cette précision permettrait d'éviter tout risque d'interprétation restrictive, susceptible de porter préjudice à l'exigence de sûreté nucléaire et à la protection des intérêts essentiels de la Nation. Ce complément est nécessaire, tant au regard de l'enjeu de sécurité (impact potentiel sur la sûreté d'une attente à cette installation) qu'à celui des enjeux de sécurité d'approvisionnement électricité (indisponibilité d'une installation) ».

Sollicitée sur ce point, la DGEC a estimé qu'un tel ajout n'aurait « aucun effet normatif ».

Une autre difficulté est le manque de précision de la protection contre les actes de malveillance ; en effet, le premier article L. 1333-3 du code de la défense, qui lui sert de base légale, n'est pas visé, au contraire de la sûreté nucléaire, dont l'article 591-1 du code de l'environnement est visé.

Le groupe EDF a insisté en ces termes sur l'importance de la protection contre les actes de malveillance : « Le texte vise la sûreté nucléaire (et permet de renvoyer au rapport de sûreté) et la protection contre les actes de malveillance, deux des composantes de la sécurité (qui inclut en sus la radioprotection et les actions de sécurité civile en cas d'accident). Il est important de conserver les deux. »

S'agissant de la DGEC, elle a indiqué les éléments suivants : « Le texte mentionne la sûreté nucléaire [...] et la protection contre les actes de malveillance, qui sont deux des composantes de la sécurité nucléaire (laquelle inclut également la radioprotection et les actions de sécurité civile en cas d'accident). »

Une dernière difficulté renvoie au manque de contrôle du dispositif : si l'allègement des règles de publicité et de mise en concurrence est compréhensible, une meilleure reddition des comptes doit être faite auprès du Gouvernement et du Parlement, afin de pouvoir garantir l'absence de dérive des coûts et des délais, par le truchement d'un contrôle a posteriori.

Enfin, comme les articles 16 et 17, l'article 18 pourrait être codifié, dans un souci d'intelligibilité et d'exhaustivité172(*).

En définitive, le rapporteur a présenté un amendement (COM-59), tendant à ajuster la définition et l'application de la dérogation prévue aux règles de la commande publique pour certains éléments de projets nucléaires.

Il propose d'étendre doublement la dérogation : d'une part, les bâtiments hébergeant les matériels de sauvegarde seraient mentionnés aux côtés des « îlots nucléaires », afin de reprendre la définition des bâtiments présentant de forts enjeux de sûreté, excluant leur réalisation avant la délivrance de l'autorisation de création, issus de la loi « Nouveau Nucléaire », du 22 juin 2023 ; d'autre part, les équipements concourant indirectement à la protection contre les actes de malveillance et à la sûreté nucléaire seraient aussi visés, dans un souci d'exhaustivité, mais aussi de sûreté et de sécurité.

En contrepartie de cette dérogation, et pour prévenir tout risque de dérive des délais et des coûts des projets industriels, l'amendement propose que les entités adjudicatrices et les pouvoirs adjudicateurs notifient le recours à la dérogation à l'État et que le Gouvernement en rende compte au Parlement, dans un rapport annuel, sous réserve des secrets protégés par la loi.

La commission propose à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable d'adopter l'article ainsi modifié.


* 1 Son contrôle exclut les installations et activités nucléaires en matière de défense pour lesquelles l'Autorité de sûreté nucléaire de défense (ASND) est compétente.

* 2 Loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (article 4).

* 3 Contrairement à l'ASN, l'IRSN intervient en matière d'activités nucléaires militaires (expertise nucléaire de défense) et exerce des activités commerciales (fourniture et exploitation de dosimètres) notamment.

* 4 Loi n° 2001-398 du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale (article 5).

* 5 Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), Les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, 11 juillet 2023, consultable ci-après.

* 6 Source : Assemblée nationale, rapport d'information n° 1306 sur l'évaluation du système dual en matière de sûreté nucléaire garanti par l'indépendance entre la fonction de régulateur assurée par l'Autorité de sûreté nucléaire et celle d'expertise assurée par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, déposé le 1er juin 2023 par Mme Alma Dufour et M. Sébastien Rome, consultable ci-après.

* 7 Aujourd'hui dénommé Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

* 8 Aujourd'hui dénommé Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

* 9 Dans l'étude d'impact annexée au projet de loi, le Gouvernement reconnaît que « le système actuel a donné satisfaction au cours de la précédente décennie ».

* 10 En matière de sûreté nucléaire, la responsabilité première revient à l'exploitant. Il s'agit d'un principe notamment défini à l'article 9 de la Convention de la sûreté nucléaire, signée le 20 septembre 1994.

* 11 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 12 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, Loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 13 En particulier l'article 7 de la Convention sur la sûreté nucléaire, signée le 20 septembre 1994.

* 14 En particulier l'article 5 de la directive 2009/71/Euratom du 25 juin 2009 du Conseil.

* 15 Sources : site institutionnel de la NRC consultable ci-après  ; éléments de législation nationale (notamment Energy Reorganization Act de 1974 consultable ci-après et dispositions du Titre 42 du Code des États-Unis consultable ci-après) ; rapport précité de l'Opecst du 11 juillet 2023, consultable ci-après.

* 16 Sources : site institutionnel de la NRA consultable ci-après et document de présentation disponible ci-après.

* 17 Sources : site institutionnel de la CNSC consultable ci-après.

* 18 Sources : sites institutionnels de l'ONR consultable ci-après.

* 19 Sources : sites institutionnels de l'AFCN consultable ci-après et de Bel V consultable ci-après ; éléments d'information de The European Nuclear Safety Regulators Group (ENSREG) consultables ci-après.

* 20 Sources : site institutionnel du CSN consultable ci-après  ; éléments d'information de l'ENSREG consultables ci-après ; fiche de l'Agence pour l'énergie nucléaire (AEN) consultable  ci-après.

* 21 Sources : sites institutionnels du BMUV consultable ici, du BASE consultable ici, du BfS consultable ici  ; éléments d'information de l'ENSREG consultables ci-après ; fiche de l'AEN consultable  ci-après.

* 22 Sources : site institutionnel de l'OAH consultable ci-après  ; éléments d'information de l'ENSREG consultables ci-après ; fiche de l'AEN consultable  ci-après.

* 23 Sources : sites institutionnels de l'IFSN consultable ci-après et de l'Office fédéral de l'énergie (OFEN) consultable ci-après.

* 24 Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), Les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et technologiques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, 11 juillet 2023, consultable ci-après.

* 25 Les avis sur les projets de décrets et d'arrêtés ou les décisions à caractère règlementaire sont exclus de cette possibilité de délégation.

* 26 Les avis sur les questions relevant de sa compétence, rendus à la demande du Gouvernement, des commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat ou de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) sont rendus publics dans les conditions définies par leur destinataire.

* 27 Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst), Les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et techniques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, 11 juillet 2023, consultable ci-après.

* 28 Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst), Conclusions de l'audition publique du 28 février 2023 : La réforme de l'organisation du contrôle et de la recherche en sûreté nucléaire et en radioprotection, consultable ci-après.

* 29 En l'espèce, le sénateur Stéphane Piednoir et le député Jean-Luc Fugit.

* 30 Ces représentants ont aussi indiqué que « l'éventualité d'une absence de publication des avis d'expert (telle que réalisée actuellement par l'IRSN) est cependant perçue comme une régression de la transparence ».

* 31 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (ancien article 25).

* 32 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, Loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 33 Le rapporteur Patrick Chaize reprend ici certains développements faits par le rapporteur Daniel Gremillet dans son rapport législatif sur le projet de loi « Nouveau Nucléaire », consultable ci-après (p. 136 à 138).

* 34 Ordonnance n° 2015-948 du 31 juillet 2015 relative à l'égal accès des femmes et des hommes au sein des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

* 35 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (ancien article 27).

* 36 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, Loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 37 Loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (article 7).

* 38 Loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (article 123).

* 39 Loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes (article 33).

* 40 Complémentairement, l'article L. 592-30 du code de l'environnement dispose qu'« à la demande de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, le président de l'Autorité de sûreté nucléaire leur rend compte des activités de celle-ci ».

* 41 Deux membres du Conseil d'État désignés par le vice-président du Conseil d'État et deux membres de la Cour de cassation désignés par le premier président de la Cour de cassation.

* 42 Quatre membres suppléants, désignés selon les mêmes règles que les membres titulaires.

* 43 Élu pour trois ans par les membres titulaires de celle-ci.

* 44 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (article 23).

* 45 Loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes (Article 21).

* 46 Loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires.

* 47 Celui-ci peut émettre un avis.

* 48 En fonction de leurs domaines de compétence respectifs.

* 49 En l'espèce, le sénateur Stéphane Piednoir et le député Jean-Luc Fugit.

* 50 Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst), Les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et techniques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, 11 juillet 2023, consultable ci-après.

* 51 Et donc vers l'État.

* 52 Décret du 10 décembre 2023 portant nomination d'un membre de l'Autorité de sûreté nucléaire - Mme GUENOT BRESSON (Stéphanie).

* 53 Ces « honoraires » sont couramment mentionnés dans les transferts de biens, droits ou obligations, comme dans le cas des établissements intercommunaux, prévu à l'article 1043 du code général des impôts.

* 54 Ces derniers prennent part aux votes.

* 55 Certaines dispositions relatives à l'action sociale interministérielle ne s'appliquent pas aux agents publics de l'ASNR.

* 56 Orientations stratégiques sur les politiques de ressources humaines ; lignes directrices de gestion en matière de mobilité, de promotion et valorisation des parcours professionnels ; enjeux et politiques d'égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations.

* 57 Présentation à l'employeur des réclamations individuelles ou collectives relatives aux salaires, à l'application du code du travail et des autres dispositions légales concernant notamment la protection sociale, ainsi que des conventions et accords applicables dans l'entreprise ; promotion de la santé, de la sécurité et de l'amélioration des conditions de travail dans l'entreprise et réalisation des enquêtes en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel ; délégation du personnel ; commission de formation ; commission de l'égalité professionnelle.

* 58 Respect des valeurs républicaines ; indépendance ; transparence financière ; ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de négociation ; influence, prioritairement caractérisée par l'activité et l'expérience ; effectifs d'adhérents et cotisations.

* 59 Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst), Les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et techniques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, 11 juillet 2023, consultable ci-après.

* 60 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 61 Pour mémoire, cet article a été censuré par le Conseil constitutionnel, tout comme l'ensemble de la réforme visant à fusionner l'ASN et l'IRSN, introduite par le Gouvernement, au titre de l'article 45 de la Constitution (Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023).

* 62 L'ASN a cité l'article 3-1 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, qui dispose : « Les agents contractuels de nationalité étrangère ou apatrides ne peuvent être recrutés pour pourvoir des emplois dont les attributions soit ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique. »

* 63 Sûreté nucléaire et radioprotection pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense mentionnées à l'article L. 1333-15 du code de la défense ; sûreté des installations et transport des matières nucléaires ou des sources de rayonnements ionisants mentionnées à l'article L. 1333-1 du code de la défense ; non-prolifération, contrôle et comptabilité centralisée des matières nucléaires ; interdiction des armes chimiques, pour l'application des dispositions du chapitre II du titre IV du livre III de la deuxième partie du code de la défense.

* 64 Soit le 1er janvier 2025.

* 65 C'est-à-dire des règles de droit commun de mise en cause des conventions et accords en cas de modification de la situation juridique de l'employeur. Elles prévoient notamment que ces conventions et ces accords continuent de produire leurs effets jusqu'à l'entrée en vigueur d'une nouvelle convention ou d'un nouvel accord ou, à défaut, pendant une durée d'un an à l'expiration d'un préavis de trois mois.

* 66 Soit le 1er janvier 2025.

* 67 Selon une liste fixée par décret en Conseil d'État.

* 68 Ordonnance n° 2018-359 du 16 mai 2018 fixant les modalités de transfert des personnels administratifs des juridictions mentionnées au 1° du I de l'article 109 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et celles de leur accès aux corps des services judiciaires ou aux corps communs du ministère de la justice (article 8).

* 69 Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle (article 109).

* 70 Les comités pouvant siéger en formation conjointe pour connaître des sujets communs à l'ensemble du personnel.

* 71 Des propositions devant être faites au Gouvernement et au Parlement.

* 72 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 73 Pour mémoire, cet article a été censuré par le Conseil constitutionnel, tout comme l'ensemble de la réforme visant à fusionner l'ASN et l'IRSN, introduite par le Gouvernement, au titre de l'article 45 de la Constitution (Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023).

* 74 À l'occasion des auditions du président de l'ASN et du directeur général de l'IRSN, conjointes aux commissions des affaires économiques et de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 75 Ordonnance n° 45-2563 du 18 octobre 1945 instituant un commissariat à l'énergie atomique (article 1er).

* 76 Ordonnance n° 2004-545 du 11 juin 2004 relative à la partie législative du code de la recherche (annexe).

* 77 Loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit (article 33).

* 78 L'article L. 322-2 du code de la recherche dispose que « le Comité de l'énergie atomique, dont la composition est fixée par voie réglementaire, arrête le programme de recherche, de fabrication et de travaux du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives ».

* 79 Décret n° 2016-311 du 17 mars 2016 relatif à l'organisation et au fonctionnement du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives.

* 80 Le décret n° 59-587 du 29 avril 1959 relatif aux nominations aux emplois de direction de certains établissements publics, entreprises publiques et sociétés nationales (annexe) est venu préciser que la nomination du Haut-commissaire, tout comme celle du Commissaire général, intervient par décret.

* 81 Décret n° 2023-1321 du 27 décembre 2023 portant partie réglementaire du code de la recherche.

* 82 Par le décret n° 2023 1383 du 30 décembre 2023 relatif au conseil de politique nucléaire et au haut-commissaire à l'énergie atomique.

* 83 Décret n° 2023-1383 du 30 décembre 2023 relatif au conseil de politique nucléaire et au haut-commissaire à l'énergie atomique.

* 84 Le Haut-commissaire ajoutant : « ce qui l'amène notamment à présider le conseil scientifique du CEA, le conseil d'enseignement de l'INSTN, à être membre du Conseil d'Administration du CEA, avec voix consultative, membre du Conseil scientifique du CEA/DAM ».

* 85 En l'espèce, le sénateur Stéphane Piednoir et le député Jean-Luc Fugit.

* 86 En cohérence avec la modification ici proposée, le rapporteur a déposé des amendements de coordination aux articles 1er et 2 du projet de loi organique et à l'article 13 du projet de loi ordinaire.

* 87 Celle du Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA) serait déplacée vers l'article L. 141-13 du code de l'énergie.

* 88 Dans le tableau annexé à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.

* 89 Visant à ce que l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l'actuelle Autorité de sûreté nucléaire (ASN) consacrent respectivement 15 M€ et 0,7 M€ à l'augmentation des salariés et des contractuels de droit public en 2024.

* 90 Tendant à ce que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1#er juillet 2024, un rapport élaboré avec le concours de l'ASN et de l'IRSN sur les besoins prévisionnels humains et financiers nécessaires à la future ASNR en 2025, ainsi que les mesures indispensables pour assurer l'attractivité des conditions d'emploi de ses personnels par rapport au marché du travail dans le domaine du nucléaire.

* 91 Proposant l'abrogation de l'article L. 332-4 du code de la recherche conférant une base légale au Haut-commissaire à l'énergie atomique (HCEA).

* 92 Prévoyant l'octroi au comité social d'administration de la future ASNR de la personnalité civile et de la gestion de son patrimoine, de son budget de fonctionnement et du budget des activités sociales et culturelles de l'ensemble du personnel.

* 93 Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (Opecst), rapport sur les conséquences d'une éventuelle réorganisation de l'ASN et de l'IRSN sur les plans scientifiques et techniques ainsi que sur la sûreté nucléaire et la radioprotection, 11 juillet 2023, consultable ci-après.

* 94 Les représentants de l'ASN comme de l'IRSN l'ont qualifiée de non réaliste, dans leurs contributions écrites adressées au rapporteur.

* 95 À l'occasion des auditions du président de l'ASN et du directeur général de l'IRSN, conjointes aux commissions des affaires économiques et de l'aménagement du territoire et du développement durable.

* 96 Idem.

* 97 Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics (article 33).

* 98 Loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises (articles 42 et 58).

* 99 Soit leur activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur ; soit leur gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur ; soit leur organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur.

* 100 L'article L. 1212-3 du code de la commande publique fait figurer parmi les activités de réseaux « la mise à disposition, l'exploitation ou l'alimentation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d'électricité ».

* 101 L'article L. 1212-4 du code de la commande publique exclut des activités de réseaux « l'alimentation en électricité des réseaux destinés à fournir un service au public par une entreprise publique ou un organisme de droit privé bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs, lorsque sont réunies les deux conditions suivantes : a) la production d'électricité par l'entité concernée est rendue nécessaire par une activité autre que celles mentionnées à l'article L. 1212-3 ; b) la quantité d'électricité utilisée pour l'alimentation du réseau public ne dépasse pas 30 % de la production totale d'énergie de l'entité en prenant en considération la moyenne de l'année en cours et des deux années précédentes ».

* 102 Ne sont pas considérés comme des droits spéciaux ou exclusifs les droits d'exclusivité accordés à l'issue d'une procédure permettant de garantir la prise en compte de critères objectifs, proportionnels et non discriminatoires.

* 103 Société anonyme détenue par l'État, le groupe EDF est assujetti aux entités adjudicatrices en tant qu'entreprise publique exerçant une activité d'opérateur de réseaux en matière d'électricité.

* 104 Établissements publics à caractère industriel et commercial, l'Andra et le CEA sont assujettis aux pouvoirs adjudicateurs en tant que personnes morales de droit public.

* 105 Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte (article 26).

* 106 Conseil d'État, 11 août 2009, Communauté urbaine Nantes métropole, n° 319 949.

* 107 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.

* 108 Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE.

* 109 Le I de l'article 7 de la loi précitée dispose que « la réalisation d'un réacteur électronucléaire comprend l'ensemble des constructions, des aménagements, des équipements, des installations et des travaux liés à sa création ou à sa mise en service ainsi que ses ouvrages de raccordement au réseau de transport d'électricité. La réalisation d'un réacteur électronucléaire comprend également les installations ou les aménagements directement liés à la préparation des travaux en vue de la réalisation de celui-ci. »

* 110 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations nucléaires existantes.

* 111 Le II de l'article 7 de la loi précitée dispose que « le présent titre s'applique à la réalisation de réacteurs électronucléaires, y compris de petits réacteurs modulaires, dont l'implantation est envisagée à proximité immédiate ou à l'intérieur du périmètre d'une installation nucléaire de base existante mentionnée aux 1° à 3° de l'article L. 593-2 du code de l'environnement et pour lesquels la demande d'autorisation de création mentionnée à l'article L. 593-7 du même code est déposée au cours des vingt ans qui suivent la promulgation de la présente loi. »

* 112 L'article L. 593-2 du code de l'environnement dispose que « les installations nucléaires de base sont : 1° les réacteurs nucléaires ; 2° les installations, répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État, de préparation, d'enrichissement, de fabrication, de traitement ou d'entreposage de combustibles nucléaires ou de traitement, d'entreposage ou de stockage de déchets radioactifs ; 3° les installations contenant des substances radioactives ou fissiles et répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État ; 4° les accélérateurs de particules répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État ; 5° les centres de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs mentionnés à l'article L. 542-10-1. »

* 113 L'article L. 512-1 du code de l'environnement dispose que « sont soumises à autorisation les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1. »

* 114 L'article L. 512-7 du code de l'environnement dispose que « sont soumises à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées. »

* 115 L'article L. 542-4 du code de l'environnement dispose que « les conditions dans lesquelles sont mis en place et exploités les laboratoires souterrains destinés à étudier les formations géologiques profondes où seraient susceptibles d'être stockés ou entreposés les déchets radioactifs à haute activité et à vie longue sont déterminées par les articles L. 542-5 à L. 542-11. »

* 116 L'article 1333-2 du code de la défense dispose que « les obligations prescrites par le présent chapitre peuvent être étendues à des établissements mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ou comprenant une installation nucléaire de base visée à l'article L. 593-1 du code de l'environnement quand la destruction ou l'avarie de certaines installations de ces établissements peut présenter un danger grave pour la population. Ces établissements sont désignés par l'autorité administrative. »

* 117 L'article 1333-15 du code de la défense dispose que « les installations et activités nucléaires intéressant la défense sont : 1° les installations nucléaires de base secrètes, qui font l'objet d'un classement et dont la création est soumise à autorisation dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'État ; 2° les systèmes nucléaires militaires, définis dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'État ; 3° les sites et installations d'expérimentations nucléaires intéressant la défense, définis dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'État ; 4° les anciens sites d'expérimentations nucléaires du Pacifique ; 5°les transports de matières fissiles ou radioactives liés aux activités d'armement nucléaire et de propulsion nucléaire navale. Un décret en Conseil d'État définit l'obligation de contrôle appliquée aux installations et activités nucléaires intéressant la défense selon des modalités conciliant les principes d'organisation de la sûreté nucléaire et de la radioprotection avec les exigences liées à la défense nationale. »

* 118 Pour mémoire, dans cette décision, le Conseil constitutionnel a estimé, dans son considérant 28 : « Il résulte des travaux préparatoires que, en adoptant des mesures propres à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires, le législateur a entendu créer les conditions qui permettraient d'augmenter les capacités de production d'énergie nucléaire afin notamment de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il a ainsi mis en oeuvre les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, au nombre desquels figurent l'indépendance de la Nation ainsi que les éléments essentiels de son potentiel économique, et poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement. »

* 119 Les réacteurs nucléaires ; les installations, répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État, de préparation, d'enrichissement, de fabrication, de traitement ou d'entreposage de combustibles nucléaires ou de traitement, d'entreposage ou de stockage de déchets radioactifs ; les installations contenant des substances radioactives ou fissiles et répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État ; les accélérateurs de particules répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État.

* 120 Les installations, répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État, de préparation, d'enrichissement, de fabrication, de traitement ou d'entreposage de combustibles nucléaires ou de traitement, d'entreposage ou de stockage de déchets radioactifs ; les installations contenant des substances radioactives ou fissiles et répondant à des caractéristiques définies par décret en Conseil d'État ; les centres de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs mentionnés à l'article L. 542-10-1.

* 121 De même, la codification n'appelle pas de commentaire particulier pour le groupe EDF, le CEA et l'Andra.

* 122 Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics (article 33).

* 123 Loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises (articles 42 et 58).

* 124 Loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte (article 27).

* 125 Loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables (article 86).

* 126 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.

* 127 En outre, son considérant 62 établit qu'« il convient aussi de préciser qu'il pourrait exister des cas exceptionnels où la durée des accords-cadres eux-mêmes devrait pouvoir être supérieure à quatre ans. De tels cas, qui devraient être dûment justifiés, en particulier par l'objet de l'accord-cadre, pourraient par exemple se présenter lorsque les opérateurs économiques ont besoin de disposer d'équipements dont la durée d'amortissement est supérieure à quatre ans et qui doivent être disponibles en tout temps pendant toute la durée de l'accord-cadre. »

* 128 Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE.

* 129 En outre, son considérant 72 précise également qu`« il convient aussi de préciser qu'il pourrait exister des cas où la durée des accords-cadres eux-mêmes devrait pouvoir être supérieure à huit ans. De tels cas, qui devraient être dûment justifiés, en particulier par l'objet de l'accord-cadre, pourraient par exemple se présenter lorsque les opérateurs économiques ont besoin de disposer d'équipements dont la durée d'amortissement est supérieure à huit ans et qui doivent être disponibles en tout temps pendant toute la durée de l'accord-cadre. Dans le contexte particulier des services d'utilité publique fournissant des services essentiels au public, il se peut qu'il soit nécessaire, dans certains cas, que la durée des accords-cadres ainsi que celle des différents marchés soit plus longue, par exemple lorsqu'il s'agit d'accords-cadres visant à assurer la maintenance ordinaire et extraordinaire de réseaux pouvant nécessiter des équipements coûteux destinés à être utilisés par un personnel qui a reçu une formation ad hoc hautement spécialisée, afin d'assurer la continuité des services et de réduire autant que possible les interruptions éventuelles. »

* 130 Pour rappel, la codification n'appelle pas de commentaire particulier pour le groupe EDF, le CEA et l'Andra.

* 131 Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics (article 52).

* 132 Loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises (articles 42 et 58).

* 133 CE, 24 juin 2011, ministre de l'écologie, n° 347 720.

* 134 CJUE - Arrêt du 16 avril 2015 dans l'affaire n° C-173/14 P.

* 135 Le I de l'article 7 de ce texte dispose qu' « au sens du présent titre, la réalisation d'un réacteur électronucléaire comprend l'ensemble des constructions, des aménagements, des équipements, des installations et des travaux liés à sa création ou à sa mise en service ainsi que ses ouvrages de raccordement au réseau de transport d'électricité. La réalisation d'un réacteur électronucléaire comprend également les installations ou les aménagements directement liés à la préparation des travaux en vue de la réalisation de celui-ci. ».

* 136 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 137 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, Loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 138 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.

* 139 Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à` la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE.

* 140 Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics (article 52).

* 141 Loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises (articles 42 et 58).

* 142 Le I de l'article 7 de ce texte dispose qu'« au sens du présent titre, la réalisation d'un réacteur électronucléaire comprend l'ensemble des constructions, des aménagements, des équipements, des installations et des travaux liés à sa création ou à sa mise en service ainsi que ses ouvrages de raccordement au réseau de transport d'électricité. La réalisation d'un réacteur électronucléaire comprend également les installations ou les aménagements directement liés à la préparation des travaux en vue de la réalisation de celui-ci. ».

* 143 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 144 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, Loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 145 S'agissant de la condition liée au fait que le changement de co-contractant « présenterait un inconvénient majeur ou entraînerait une augmentation substantielle des coûts pour le pouvoir adjudicateur », elle ne serait pas reprise par la rédaction proposée, dans la mesure où elle est nécessairement couverte par la condition liée à « l'impossibilité du changement du contractant pour des raisons économiques ou techniques tenant notamment à des exigences d'interchangeabilité ou d'interopérabilité avec les équipements, services ou installations existants achetés dans le cadre du marché initial ». La Direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère chargé de l'économie, dans le document ci-joint, a en ainsi indiqué : « il a en effet été considéré que la réalisation de la première condition, à savoir l'impossibilité de changer de titulaire, entraînait nécessairement la réalisation de la seconde » ; cela explique pourquoi l'article R. 2194-2 du code de la commande publique, ne prévoit que la première condition et pas la seconde.

* 146 Concernant les conditions liées à l'absence d'évolution du montant du marché supérieur à 50 % de la valeur du marché initial, en tenant compte de la clause de variation des prix, et à l'interdiction de contourner les obligations de publicité et de mise en concurrence, elles demeureraient bien entendu applicables, aux articles R. 2194-2, R. 2194-3 et R. 2194-4 du code de la commande publique.

* 147 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.

* 148 Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à` la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE.

* 149 Ordonnance n° 2018-1074 du 26 novembre 2018 portant partie législative du code de la commande publique (annexe).

* 150 Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (article 38).

* 151 Décision n° 2020-807 DC du 3 décembre 2020, Loi relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 152 Loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique (article 131).

* 153 Décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, Loi d'accélération et de simplification de l'action publique.

* 154 Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

* 155 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE.

* 156 Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE.

* 157 S'agissant des concessions, le b) du paragraphe 6 de l'article 10 de la Directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession dispose que « les concessions pour lesquelles l'application de la présente directive obligerait un État membre à fournir des informations dont il estimerait la divulgation contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité', ou les concessions dont l'attribution et l'exploitation sont déclarées secrètes ou doivent être assorties de mesures particulières de sécurité, conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives en vigueur dans un État membre, pour autant que ledit État membre ait établi que la protection des intérêts essentiels concernés ne peut être garantie par des mesures moins intrusives, telles que celles visées, par exemple, au paragraphe 7. »

* 158 CJUE, 29 avril 2021, affaire C-847/19 P.

* 159 CJUE 7 septembre 2023, affaire C-601/21.

* 160 Décision SA.36 740, §229 et suivants.

* 161 Décision SA.58 207, §169 et suivants.

* 162 En outre, elle a clos une procédure en manquement s'agissant de l'attribution de gré à gré d'une centrale nucléaire en Hongrie.

* 163 CJUE, 14 novembre 2013, Belgacom, aff. C-221/12, §38.

* 164 Des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique.

* 165 CJUE, 14 novembre 2013, Belgacom, aff. C-221/12, §38.

* 166 CJUE 28 janvier 2016, CASTA, aff. C-50/14, §51 et s.

* 167 Le document est consultable ci-contre.

* 168 L'article L. 1333-2 du code de la défense dispose que « les obligations prescrites par le présent chapitre peuvent être étendues à des établissements mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ou comprenant une installation nucléaire de base visée à l'article L. 593-1 du code de l'environnement quand la destruction ou l'avarie de certaines installations de ces établissements peut présenter un danger grave pour la population. Ces établissements sont désignés par l'autorité administrative. »

* 169170 Qui fixe les règles applicables aux marchés publics mentionnés au titre Ier du même livre V.

* 171 L'article L. 591-1 du code de l'environnement dispose que « la sûreté nucléaire est l'ensemble des dispositions techniques et des mesures d'organisation relatives à la conception, à la construction, au fonctionnement, à l'arrêt et au démantèlement des installations nucléaires de base ainsi qu'au transport des substances radioactives, prises en vue de prévenir les accidents ou d'en limiter les effets. »

* 172 Pour rappel, la codification n'appelle pas de commentaire particulier pour le groupe EDF, le CEA et l'Andra.

Partager cette page