III. LA NOUVELLE ORIENTATION DE LA POLITIQUE DE LA VILLE SEMBLE RÉTICENTE À TIRER LES CONSÉQUENCES DE LA SPÉCIFICITÉ DES QUARTIERS SENSIBLES

Votre commission avait eu l'occasion de souligner dans son avis de l'année dernière combien l'attentisme du Gouvernement et l'absence d'orientations claires semblaient souvent préjudiciables, à la fois, à la pérennisation de l'idée même de la politique de la ville apparue à partir de 1981, mais aussi au succès du pacte de relance pour la ville lancé par M. Alain Juppé le 1 er janvier 1996.

On ne peut donc que se féliciter que le Gouvernement de M. Lionel Jospin, nommé le 3 juin 1997, se soit doté d'une ligne de conduite plus nettement définie au cours de cette année 1998. Trois étapes successives ont marqué cette évolution : le rapport de M. Jean-Pierre Sueur de février 1998 ; la nomination d'un secrétaire d'Etat à la ville le 30 mars dernier ; la réunion du comité interministériel des villes du 30 juin 1998.

A. LA LENTE MISE EN PLACE DE NOUVELLES ORIENTATIONS

1. Le rapport " Sueur " fait primer les considérations institutionnelles sur l'analyse de la situation des quartiers

M. Jean-Pierre Sueur, maire d'Orléans et ancien secrétaire d'Etat aux collectivités locales, a remis le 13 février son rapport intitulé " Demain, la ville " à Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Dans son introduction, M. Jean-Pierre Sueur estime que si beaucoup a été fait en vingt ans de politique de la ville, " il y a aujourd'hui plus de ségrégation et moins de mixité sociale dans bien des quartiers ".

Paradoxalement, ce rapport ne présente pas pour autant la " photographie " que l'on pourrait attendre de la situation économique et sociale dans les zones en difficulté ; rejetant le principe même du " zonage " pour lui substituer la mise en oeuvre effective du principe de l'égalité républicaine, M. Jean-Pierre Sueur privilégie l'approche institutionnelle pour répondre aux défis urbains.

a) L'agglomération est privilégiée dans les réformes institutionnelles

•  Constatant que la politique de la ville dépasse souvent les contours de la commune, M. Jean-Pierre Sueur propose de " s'orienter vers l'élection au suffrage universel direct d'une assemblée d'agglomérations ". Corrélativement, il demande que les futurs contrats concernant la politique de la ville et les politiques urbaines soient transformés en contrats signés entre l'Etat et l'agglomération et couvrent une période de dix ans .

Simultanément, il préconise une meilleure " représentation des agglomérations urbaines au sein des départements " et propose, à titre expérimental, un transfert des compétences exercées par le département en matière d'action sociale et de mise en oeuvre du RMI au sein d'une ou plusieurs agglomérations candidates.

La volonté réformatrice du rapport s'étend à la fiscalité locale : ainsi, il est proposé de mettre en oeuvre par voie législative " la taxe professionnelle d'agglomération dans l'ensemble des agglomérations de plus de 100.000 habitants ".

Comme on le voit même s'il ne s'agit pas, selon M. Jean-Pierre Sueur, de " la mise en cause de la commune qui constitue depuis deux siècles, la cellule de base de la démocratie " , les propositions du rapport aboutiraient bien, si elles étaient appliquées, à bouleverser assez sensiblement le paysage institutionnel.

•  En dessous du niveau de la commune, il est proposé de généraliser la création de conseils de quartiers associant non seulement les conseillers municipaux élus mais également " les représentants des associations ou des forces vives du quartier " .

Ils seraient dotés d'un rôle important : " outre un pouvoir de proposition sur l'ensemble du champ communal, ces conseils devraient obligatoirement être consultés pour toute décision concernant le quartier considéré, préalablement à l'inscription de ladite question à l'ordre du jour du conseil municipal ".

b) Un jugement sévère sur la politique de discrimination positive

L'idée de discrimination territoriale positive qui consiste à accorder un régime dérogatoire, notamment sur les plans fiscal et social à des zones urbaines en difficulté, est remise en question par le rapport de M. Jean-Pierre Sueur au profit de la " mise en oeuvre effective du principe de l'égalité républicaine " .

Un jugement souvent sévère est porté sur la politique, qualifiée de " politique de zonage ", qui est pourtant, en quelque sorte, à l'origine historiquement de la politique de la ville que nous connaissons aujourd'hui : c'est en 1981 qu'apparaissent les premières conventions de développement social des quartiers (DSQ) qui ont fourni le socle de la création du ministère de la ville en 1991.

M. Jean-Pierre Sueur considère que la discrimination territoriale positive à l'oeuvre à travers la géographie prioritaire de la politique de la ville est inflationniste, complexe, souvent incohérente et qu'elle provoque une stigmatisation préjudiciable des populations concernées.

En outre, le choix des territoires d'intervention serait contestable parce qu'il dépendrait des critères de sélection, reposerait sur les données dépassées du recensement de 1990 et induirait des effets de seuil : il apparaît pourtant que les critères ont été relativement affinés et diversifiés -de manière analogue au demeurant à ce qui se fait en matière de répartition de la DGF- pour aboutir à des modèles qui font l'objet d'un relatif consensus.

Enfin, il est souligné que le périmétrage isolerait artificiellement les zones cibles de la géographie prioritaire et créerait ainsi des risques de " déport ".

Partant de ce postulat, il propose de substituer le concept de rétablissement de l'égalité républicaine à celui de discrimination positive, c'est-à-dire d'assurer à l'ensemble des habitants des quartiers en difficulté les services publics auxquels ils ont droit dans les mêmes conditions que l'ensemble de la population.

Souhaitant favoriser " la sortie du zonage ", M. Jean-Pierre Sueur admet qu'il est essentiel que les engagements de l'Etat soient respectés : " cela suppose le maintien des zones de redynamisation urbaine (ZRU) et des zones franches urbaines (ZFU) jusqu'aux termes prévus dans le dispositif ayant entraîné leur création ".

Au-delà, M. Jean-Pierre Sueur pose le principe " qu'en cas de non-reconduction, les sommes afférentes seront affectées à la structure d'agglomération pour être employée à la politique de la ville ".

c) Des objectifs de financement ambitieux

Concernant les moyens financiers, le rapport " Sueur " préconise un effort financier minimum mené sur dix ans au moins " à la hauteur de celui accompli pour la mise en oeuvre des emplois-jeunes ", ce qui correspondrait à 35 milliards de francs par an.

Conscient des conséquences de l'annualité budgétaire, il propose un effort public pour la ville qui couvrirait une période de dix ans .

L'action de l'Etat irait de pair avec un engagement accru des collectivités locales dont l'effort actuel, qui est pourtant loin d'être négligeable -le jaune budgétaire en convient-, est considéré comme " très inégal et souvent insuffisant ".

En d'autres termes, les collectivités locales seraient appelées à " financer plus " et " aucun contrat de plan ne devrait être signé par l'Etat sur la base du statu quo ".

2. La nomination du ministre délégué à la ville rattaché à l'emploi et à la solidarité

La nomination de M. Claude Bartolone en tant que ministre délégué à la ville est intervenue le 30 mars dernier, soit près d'un an après la nomination du Gouvernement de M. Lionel Jospin.

Il a ainsi été donné raison à une demande de votre commission lors de la discussion du projet de budget pour 1998 : elle avait souligné que, -quelles que soient les qualités personnelles de Mme Martine Aubry-, l'emploi du temps d'un ministre chargé de l'emploi et de la solidarité était sans doute trop astreignant pour lui permettre de jouer un rôle de pilotage à part entière de la politique de la ville.

Il n'est pas inutile de rappeler qu'en janvier dernier, à la suite d'événements survenus dans les banlieues, le Président de la République avait reçu à l'Elysée onze maires de toutes tendances politiques pour faire le point sur la question de la sécurité dans les zones urbaines sensibles.

Comme le rappelle le rapport " Sueur ", plusieurs solutions institutionnelles ont été expérimentées depuis 1981 pour assurer la conduite de la politique de la ville au sein des structures gouvernementales :

- un ministre, ayant éventuellement rang de ministre d'Etat, chargé exclusivement de la ville (M. Michel Delebarre, M. Bernard Tapie) ;

- un ministre chargé de la ville dans un portefeuille plus large : ville et aménagement du territoire (deuxième ministère de M. Delebarre, 1992), affaires sociales, santé et ville (Mme Simone Veil, 1993), ministre de l'emploi et de la solidarité, " également chargé de la politique de la ville ", aux termes du décret d'attribution (Mme Martine Aubry) ;

- un ministre chargé de la ville dans un portefeuille plus large, et doublé d'un ministre délégué : aménagement du territoire, ville et intégration (M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration, et M. Eric Raoult, ministre délégué à la ville et à l'intégration) ;

- un secrétaire d'Etat à la ville, sous l'autorité du Premier ministre (M. François Loncle) ;

- un secrétaire d'Etat à la ville, sous l'autorité du ministre chargé de l'intégration et de la lutte contre les exclusions (Mme Françoise de Veyrinas, secrétaire d'Etat aux quartiers en difficulté).

Parmi les multiples évolutions connues en matière de structure gouvernementale pour la ville, la formule actuellement choisie qui consiste à rattacher la ville au ministère des affaires sociales présente l'avantage de mettre l'accent sur le caractère essentiel de la dimension sociale .

Il reste que le choix d'un rattachement au ministère de l'équipement et de l'aménagement du territoire -qui avait été celui du Gouvernement de M. Alain Juppé-, permet d'insister sur la notion d'aménagement du territoire car le traitement des quartiers urbains sensibles doit aller de pair avec le soutien aux zones rurales défavorisées .

Selon le décret n° 98-242 du 2 avril 1998, M. Claude Bartolone " exerce par délégation de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, les attributions de celle-ci relatives à la ville " . Pour cela, il dispose de la délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain.

Il dispose également " en tant que de besoin " des autres directions et services placés sous l'autorité de Mme Martine Aubry, notamment la direction de l'administration générale, du personnel et du budget, le service de l'information et de la communication, de l'inspection générale des affaires sociales, ainsi que des directions et services des autres ministères qui concourent à la préparation et à la mise en oeuvre de la politique de la ville.

3. Le comité interministériel des villes du 30 juin 1998 définit des orientations générales

Enfin, la troisième étape du lancement de " la nouvelle ambition pour les villes ", pour reprendre la terminologie gouvernementale, s'est tenue avec le comité interministériel des villes du 30 juin 1998, présidé par le Premier ministre.

Ce comité a donné lieu à l'adoption d'orientations politiques, du programme du Gouvernement et de programmes d'action pour chaque ministère. Le contenu des trois parties est largement repris dans le " jaune " budgétaire relatif à la ville. C'est pourquoi votre rapporteur ne le reprendra pas dans le détail.

L'action gouvernementale est articulée autour de quatre objectifs :

- tout d'abord, " garantir le pacte républicain " sur tout le territoire en particulier " en redonnant au service public son rôle d'intégration du corps social " tout en " réaffirmant le sens de la citoyenneté dans les droits qu'elle ouvre mais aussi dans les obligations qu'elle crée " ;

- puis, " renforcer la cohésion sociale dans les villes " par la recherche de la mixité urbaine et sociale à travers la politique de l'habitat, de l'intégration des populations et du développement économique gage du progrès social ;

- ensuite, " mobiliser l'auteur d'un projet collectif ", l'Etat affichant sa détermination à assurer l'égalité devant le service public et les collectivités locales devant être en mesure d'assurer pleinement leurs responsabilités " par un meilleur partage de la fiscalité locale, en particulier de la taxe professionnelle, une implication et un effort financier plus conséquent des conseils régionaux et généraux et un redéploiement des dotations de l'Etat " ;

- enfin, " construire un nouvel espace démocratique " avec les habitants.

Il est frappant de constater que ces déclarations de principe ne concernent pas seulement les quartiers sensibles en difficulté mais fournissent des objectifs généraux à l'action des différentes politiques ministérielles valables pour l'ensemble du territoire .

Cette démarche est confirmée dans le compte rendu diffusé par le secrétariat général du Gouvernement : on peut ainsi noter que Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité indique que " la politique de la ville ne peut plus être, seulement, celle des quartiers en difficulté " et que " les actions en faveur de la mixité sociale, de l'ouverture des quartiers en difficulté vers le reste de la ville sont aussi déterminantes ".

La même logique se retrouve dans la déclaration du ministre de l'intérieur, reprise par M. Claude Bartolone au cours de ses auditions, indiquant que " la politique de la ville ne saurait être ce qui demeure lorsque les autres politiques publiques ont échoué " et dans la synthèse finale du Premier ministre soulignant que " la politique de la ville ne peut être ni le solde de ce qui est mené lorsque les autres politiques publiques ont échoué, ni la somme de toutes les politiques publiques existantes ".

Votre rapporteur souligne que, s'il est certes commode de définir la politique de la ville par ce qu'elle n'est pas, il reste à se demander si certaines mesures spécifiques ne demeurent pas nécessaires lorsque les politiques publiques ne parviennent plus à faire la preuve de leur efficacité, notamment en matière d'emploi et de sécurité .

B. LA SPÉCIFICITÉ DES QUARTIERS EN DIFFICULTÉ JUSTIFIE TOUJOURS LA GÉOGRAPHIE PRIORITAIRE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

Il est indéniable que certaines zones présentent des indicateurs sociaux très dégradés ce qui justifie que le Gouvernement, malgré les réticences exprimées, n'ait pas démantelé les dispositifs mis en place dans le cadre de la géographie prioritaire de la politique de la ville.

1. Des quartiers qui concentrent les difficultés

a) Des indicateurs spécifiques

En 1997, la délégation interministérielle à la ville a fait réaliser par l'institut national des statistiques et des études économiques (INSEE) une exploitation particulière du recensement général de la population de 1990 pour préciser et réactualiser la situation socio-démographique des zones urbaines sensibles (ZUS), des zones de redynamisation urbaine (ZRU) et zones franches urbaines (ZFU) instituées par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville .

Il est à noter que quatre régions représentent à elles seules plus de la moitié de la population résidant dans un quartier prioritaire : l'Ile-de-France (30 % des habitants des ZUS de la métropole), le Nord-Pas-de-Calais (9,2 %), Provence-Alpes-Côte d'Azur (8,6 %) et Rhône-Alpes (8,5 %).

La population des quartiers identifiés dans les contrats de ville est de 6,5 millions de personnes , pour 17 millions d'habitants dans les communes signataires des contrats de ville.

En métropole, la population des quartiers est de 4.688.000 habitants dans les ZUS (soit 8,2 % de la population française), 3.238.000 dans les ZRU (soit 5,6 % de la population française) et 724.000 dans les ZFU (soit 1,4 % de la population française).

Le taux de chômage moyen est de 18,9 % dans les ZUS, de 20,6 % dans les ZRU et de 21,3 % dans les ZFU. Le chômage touche particulièrement les jeunes : en mars 1990, le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans s'élevait à 28,5 % dans les ZUS, 30,2 % dans les ZRU et 31,2 % dans les ZFU alors que ce même taux était de 21,1 % dans l'ensemble des agglomérations où se situent ces quartiers et de 19,9 % pour la France métropolitaine.

Taux de chômage dans les quartiers prioritaires

(En pourcentage)

 

ZUS

ZRU

ZFU

Agglomérations ayant une ZUS

Taux de chômage des 15 à 59 ans (hommes)

15,4

16,6

17,0

7,9

Taux de chômage des 15 à 59 ans (femmes

23,5

25,8

27,0

10,4

Taux de chômage des 15 à 24 ans (hommes

24,1

25,4

26,3

17,2

Taux de chômage des 15 à 24 ans (femmes)

33,5

35,6

36,1

24,7

Taux de chômage (ensemble)

18,9

20,6

21,3

11,6

Source : recensement de la population de 1990, INSEE

Enfin, la part des ménages dont la personne de référence est de nationalité étrangère est en moyenne de 16 %, soit le double du taux prévalant dans l'ensemble des agglomérations.

Toutefois, cette moyenne recouvre une grande variabilité des situations locales, allant d'une absence de surreprésentation par rapport à la réalité communale (pour environ une ZUS sur 10) à des situations où la proportion de ménages étrangers dans la ZUS est plus de trois fois plus élevée que sur l'ensemble de la commune (dans un peu plus de 10 % des cas).

b) La dimension sociale des handicaps dont souffrent les quartiers

Par ailleurs en 1993-1994, l'INSEE a réalisé une étude sur 500 quartiers dits " sensibles " qui dresse un inventaire des handicaps économiques sociaux et culturels concentrés dans ces quartiers et montrent que l'exclusion est un phénomène social avant d'être urbain 2( * ) .

Tous les indicateurs sociaux ne sont pas " alarmants " dans chacun des quartiers mais ces derniers présentent bien, en moyenne, un profil dégradé aussi bien par rapport à l'agglomération dont ils font partie qu'en comparaison de la moyenne nationale : ainsi, 45 % des jeunes de 16 à 25 ans vivent dans un ménage touché par le chômage contre 24 % en moyenne nationale ; l'habitat est souvent de médiocre qualité : la mauvaise isolation acoustique concerne 59 % des habitations dans les quartiers contre 31,6 % en moyenne nationale.

Le poids de l'aide sociale dans les revenus est particulièrement important : pour 26,1 % des ménages, les prestations sociales représentent plus du quart des revenus déclarés contre 13,6 % en moyenne nationale.

Enfin, il est frappant de constater que 66 % des habitants se sentent en sécurité dans un quartier sensible contre 86,2 % en moyenne nationale.

Dix indicateurs sur la vie dans les quartiers

(en pourcentage)

 

Quartiers prioritaires

Agglomérations incluant ces quartiers

France métropolitaine

Taux de chômage déclaré (parmi les actifs de 15 ans et plus)

24,2

15,0

13,6

Jeunes de 16 à 25 ans vivant dans un ménage touché par le chômage

45,0

24,7

24,4

Pauvreté visible de l'immeuble

17,7

6,8

6,7

Mauvaise isolation acoustique

58,8

40,3

31,6

Jugent le quartier bien desservi par les transports en commun

90,0

81,0

57,3

Aucun dépôt ou compte-chèques régulièrement débiteur (% de ménages/répondants)

18,3

11,8

12,2

Faible niveau de vie (2.500 F par unité de consommation)

11,7

5,5

6,1

Importance des prestations institutionnelles dans le revenu (prestations > 25 % parmi les déclarés)

26,1

15,3

13,6

A rendu de menus services à au moins un voisin

44,7

50,6

55,5

Se sentent en sécurité dans leur quartier

66,0

80,7

86,2

2. Les interventions graduées dans les zones relevant de la géographie prioritaire de la politique de la ville

Les 214 contrats de ville conclus dans le cadre du XI ème Plan (1994-1999), ont concerné 771 communes signataires et 1.300 quartiers, dont 930 quartiers prioritaires périphériques, 112 centres villes, 195 quartiers sensibles à traiter préventivement et 71 quartiers d'action thématique ciblée.

Le dispositif issu du Pacte de relance pour la ville a distingué trois niveaux de quartiers :

a) Les zones urbaines sensibles

Les zones urbaines sensibles (ZUS) correspondent à des grands ensembles et des quartiers d'habitat dégradé souffrant d'un déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi.

Elles sont d'abord apparues dans la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement du territoire qui faisait référence à la liste des grands ensembles et des quartiers d'habitat dégradé mentionnée par le décret du 5 février 1993 3( * ) .

Une nouvelle liste de 780 ZUS (dont 34 dans les départements d'outre-mer) situées sur le territoire de 490 communes dans 87 départements, a été sélectionnée parmi :

- les quartiers inscrits dans les contrats de ville ;

- les quartiers inscrits au décret du 5 février 1993 précité, mais ne bénéficiant pas de contrat de ville,

- quelques quartiers hors des procédures précitées, mais dont les caractéristiques sociales étaient fortement dégradées.

Cette liste résulte du décret n° 96-1156 du 26 décembre 1996 pris en application de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance.

Les habitants des ZUS bénéficient :

- des emplois de ville (article 8 de la loi n° 96-376 du 6 mai 1996 relative à la réforme du financement de l'apprentissage),

- d'une dérogation aux plafonds de ressources du PLA,

- d'une exonération du supplément de loyer de solidarité en HLM,

- d'un développement du programme " Ecole ouverte ",

- d'une extension des zones d'éducation prioritaire (ZEP).

Les entreprises peuvent y être exonérées par le conseil municipal de taxe professionnelle (exonération non compensée par l'Etat à la charge des communes).

Les fonctionnaires travaillant en ZUS bénéficient de la nouvelle bonification indiciaire (NBI). Ces zones bénéficient aussi d'avantages en termes d'équipement et d'aménagement urbain (prêts projets urbains, transformation des grands logements, ...).

b) Les zones de redynamisation urbaine

Les zones de redynamisation urbaine (ZRU) avaient été définies par la loi du 4 février 1995 précitée en ne prenant en compte que les ZUS comprises dans une commune éligible à la dotation de solidarité urbaine (DSU).

La loi du 14 novembre 1996 de mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville affine considérablement la sélection en se référant à une sélection de critères avalisés par le Parlement et tirés de plusieurs éléments représentatifs de la dégradation des conditions de vie dans les ZRU à savoir, la population , le taux de chômage , la proportion de jeunes de moins de 25 ans, la proportion de jeunes sortis du système scolaire sans diplôme et le potentiel fiscal des communes de rattachement.

Les 416 ZRU actuelles (dont 20 dans les DOM) ont été sélectionnées dans 343 communes et 76 départements parmi les 750 ZUS 4( * ) .

Le dispositif visant à conforter ou à recréer de l'activité économique dans ces quartiers très défavorisés, est constitué pour l'essentiel d'exonérations fiscales et sociales accordées aux entreprises.

Les mesures applicables en ZRU sont les suivantes :

- exonération, compensée par l'Etat, de taxe professionnelle, pour les établissements nouveaux, ou déjà existants, pendant cinq ans sur la totalité de la base imposable, plafonnée à 1 million de francs pour la création ou l'extension, et à 500.000 francs pour les établissements existants (art. 1466 A I ter, du code général des impôts),

- exonération d'impôt sur les bénéfices, totale les deux premières années puis dégressive les troisième, quatrième et cinquième années, sans plafonnement, pour les entreprises nouvelles (article 44 sexies du code général des impôts),

- exonération de taxes foncières sur les propriétés bâties, pendant deux ans, pour les entreprises nouvelles ou les établissements créés ou repris à une entreprise en difficulté (article 1383 du code général des impôts),

- exonération sur douze mois des charges sociales patronales du quatrième au cinquantième salarié pour les entreprises nouvelles ou existantes sur une fraction de salaire n'excédant pas 1,5 fois le SMIC.

Selon le " jaune budgétaire ", le coût total estimé de ce dispositif pour 1998 est de 1.267,13 millions de francs et se décline de la façon suivante :

- impôt sur le bénéfice : 530 millions de francs

- droit de mutation : 150 millions de francs

- taxe professionnelle : 525 millions de francs

- exonérations de charges patronales

pour les 50 premiers salariés 62,13 millions de francs

c) Les zones franches urbaines

Enfin, les zones franches urbaines (ZFU) ont été déterminées, après appel à projet, parmi les quartiers de plus de 10.000 habitants présentant les caractéristiques les plus dégradées en termes de chômage des jeunes, de qualification professionnelle ou de ressources des communes.

Les ZFU, qui bénéficient des exonérations fiscales et de charges sociales les plus importantes, sont au nombre de 44, dont 38 en métropole et 6 dans les départements d'outre-mer. Elles sont déterminées par le législateur qui en a fixé la liste en annexe à la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996.

La délimitation de ces zones a été fixée par deux décrets du 26 décembre 1996 4( * ) . Le périmètre d'une ZFU peut inclure une ou plusieurs ZRU en totalité ou en partie.

L'effort de l'Etat est particulièrement concentré et repose sur des mesures d'exonération fiscale et sociale renforcées :

- exonération compensée par l'Etat de taxe professionnelle pour les établissements nouveaux ou déjà existants ou étendus, pendant cinq ans, sur la totalité de la base imposable, plafonnée à 3 millions de francs (article 1466 A I quater du code général des impôts),

- exonération d'impôt sur les bénéfices totale pendant cinq ans, avec plafonnement à 400.000 francs par an, pour les entreprises nouvelles ou existantes (article 44 octies du code général des impôts),

- exonération de taxes foncières sur les propriétés bâties pendant cinq ans (article 1383 A du code général des impôts),

- exonération des charges sociales sur douze mois des charges sociales patronales du quatrième au cinquantième salarié pour les entreprises nouvelles ou existantes sur une fraction de salaire n'excédant pas 1,5 fois le SMIC.

Selon le " jaune budgétaire ", l'effort financier de l'Etat peut être estimé à 1,3 milliard de francs dans les ZFU en 1998, soit :

- exonération de l'impôt sur le bénéfice 180 millions de francs

- exonération de la taxe professionnelle 191,5 millions de francs

- exonération de la taxe foncière sur les

propriétés bâties 40,8 millions de francs

- exonération patronale 50 premiers emplois 350 millions de francs

Toutes ces exonérations font l'objet de compensations versées le cas échéant par l'Etat aux municipalités concernées et aux organismes sociaux.

d) Les grands projets urbains

En matière de grandes opérations de restructuration urbaine, il convient de souligner que 13 sites relèvent d'un grand projet urbain (GPU), c'est-à-dire d'une opération très lourde visant à transformer radicalement sur dix ou quinze ans de grands ensembles d'habitat pour améliorer le cadre de vie, réorganiser le tissu urbain, désenclaver et améliorer l'accessibilité.

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