EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Près de quarante ans après les deux grandes lois d'orientation souhaitées par le Général de Gaulle et Michel Debré, une nouvelle loi d'orientation agricole est soumise à l'examen du Parlement.

Si la Constitution consacre l'existence des lois de programme (l'avant-dernier alinéa de l'article 34 indique que « Des lois de programmes déterminent les objectifs de l'action économique et sociale de l'Etat » ), les lois d'orientation sont une création coutumière de la V ème République. Elles n'impliquent pas de conséquences juridiques particulières. Une loi d'orientation n'existe ainsi que par la volonté du Gouvernement de la désigner comme telle.

L'agriculture est un secteur où des mutations impressionnantes se sont succédé. Leur encadrement par de grands objectifs apparaît nécessaire.

Comme l'a rappelé le Président de la République le 2 octobre 1998 devant la Chambre d'agriculture d'Aurillac, « pour s'épanouir, une agriculture performante » a besoin « d'un cadre législatif et réglementaire qui libère les énergies » . L'objectif est bien de « sceller un nouveau pacte entre les agriculteurs et la société ».

Votre commission s'est saisie pour avis des dispositions des chapitres III, IV et V du titre II du projet de loi d'orientation agricole, ainsi que de l'article premier ter, relatif à un rapport sur les retraites.

Les mutations sociales sont en effet loin d'être les moins importantes de la « révolution paysanne » : l'agriculteur est devenu un entrepreneur, le régime de sécurité sociale agricole a préservé son autonomie mais il est fragilisé, l'emploi agricole a considérablement diminué et changé de nature mais il subsiste d'importants gisements d'emplois qu'il est nécessaire de développer.

Force est de constater que la portée des dispositions sociales du projet de loi apparaît pourtant très modeste face à ces mutations. Les modifications et les ajouts apportés par l'Assemblée nationale, à l'initiative tant du Gouvernement que des députés, donnent l'impression -étrange- qu'il s'agit de mesures d'un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social et non d'un projet de loi d'orientation.

Votre commission n'entend pas pour autant remodeler ce projet, même si elle souhaite apporter sa contribution.

Elle constate que la remise à plat de l'ensemble des règles sociales et fiscales est souhaitable. Elle observe qu'il sera tôt ou tard nécessaire de régler de manière globale la question de l'affiliation en milieu rural. Le droit de la sécurité sociale est historiquement centré sur la nature de l'activité exercée ; est-ce aujourd'hui le système le plus simple et le plus opératoire pour traiter de manière satisfaisante le problème des pluriactifs ? Le Gouvernement devra trouver une solution, avec l'accord de toutes les parties, pour résoudre ce délicat problème.

S'agissant des articles en discussion, votre commission vous proposera un dispositif d'amendements visant à définir des objectifs sans ambiguïté : évolution des retraites agricoles vers le minimum vieillesse, développement du titre emploi simplifié agricole, dans un souci de lutter efficacement contre le travail dissimulé et de participer au développement de l'emploi dans le secteur agricole, et meilleur contrôle des organismes de mutualité sociale agricole, dans le cadre d'une tutelle réellement « stratégique » et non tatillonne.

I. LA SITUATION SOCIALE DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE SUSCITE DE NOMBREUSES ATTENTES

A. LA PROTECTION SOCIALE AGRICOLE EN 1999 : DES ENJEUX IMPORTANTS QUI NÉCESSITENT UNE RÉPONSE RAPIDE

1. La question centrale des retraites

a) Une indispensable poursuite de l'effort de revalorisation

Les pensions de retraite versées aux agriculteurs sont les plus basses des régimes d'assurance vieillesse.

Faiblesse des retraites agricoles

Le montant mensuel de la retraite des bénéficiaires dont la carrière est complète s'élevait, au 31 décembre 1996 (avant les mesures de revalorisation de 1997, 1998 et 1999) à :

- 2.701 francs pour les chefs d'exploitation ;

- 1.571 francs pour les conjoints ;

- 1.519 francs pour les aides familiaux.

La moyenne des pensions de retraite agricole était de 1.935 francs par mois en 1995, contre une moyenne de 8.459 francs pour le total pension de base du régime général + pension de retraite complémentaire (INSEE synthèses, mars 1997).

Il n'est pas étonnant, en conséquence, que le tiers des bénéficiaires de l'allocation supplémentaire du FSV soit des agriculteurs.

Il convient de rappeler le double choix du départ effectué en 1952 par le monde agricole, lors de la création du régime d'assurance vieillesse : non intégration au régime général, faiblesse des cotisations versées et des prestations perçues.

Le changement d'assiette, intervenu en 1990, et qui a substitué au revenu cadastral le revenu professionnel, ne jouera à plein qu'à long terme (mécaniquement, à partir de 2028).

En conséquence, le montant minimal des retraites agricoles n'atteint pas encore le minimum vieillesse. Comme le rappelle notre excellent collègue M. Louis Boyer, dans son avis sur le BAPSA 1999 1 ( * ) , leur montant apparaissait acceptable il y a encore vingt-cinq ans, en raison de différents éléments, qui ont depuis connu une évolution importante.

Les retraites étaient, de manière générale, d'un niveau très faible : les disparités apparaissaient moins importantes entre les agriculteurs et le reste de la population.

Or, les conditions de vie des retraités ont considérablement progressé au cours des vingt dernières années. Le revenu moyen d'un retraité est désormais équivalent à celui d'un actif. Dès lors, les retraites agricoles apparaissent les seules à être très basses.

Les exploitants agricoles continuaient à travailler le plus longtemps possible .

L'abaissement de l'âge de la retraite dans le régime général a eu un effet indirect. Les exploitants agricoles arrivant à l'âge de 60-65 ans au début des années quatre-vingt-dix n'ont pas souhaité rester en activité, contrairement aux générations précédentes.

Les solidarités familiales jouaient un rôle plus important .

Du fait de l'évolution de la société, même en milieu rural, ces solidarités -sans bien sûr s'effacer- se sont affaiblies.

Les agriculteurs, comme l'ensemble des non-salariés, pouvaient bénéficier de la vente de leur exploitation.

Cette vente représentait un pécule important, permettant de pallier la faiblesse des retraites. Mais la vente de ces exploitations, en raison de la diminution du nombre d'exploitants, n'est plus possible. Les artisans et les commerçants sont d'ailleurs dans une situation peu différente.

Ces évolutions expliquent la volonté affichée depuis 1993 par les gouvernements de relever le niveau minimum des retraites agricoles. Le Gouvernement actuel a annoncé un « plan pluriannuel » correspondant la législature (1997-2002). Mais aucun échéancier pluriannuel de revalorisation n'a été formellement adopté.

L'objectif d'amener les retraites les plus basses au minimum vieillesse, pour les agriculteurs ayant cotisé 150 trimestres, apparaît un impératif. Le montant minimal pour les chefs d'exploitation est désormais de 3.000 francs, à comparer aux 3.540 francs par mois du minimum vieillesse pour une personne seule.

Le coût de cet objectif serait de 3,5 milliards de francs (en sus de la revalorisation prévue pour 1999). Il s'agit d'un coût brut, puisque -par définition- les versements du FSV seraient fortement réduits.

b) L'attente d'un régime complémentaire obligatoire

Un régime complémentaire obligatoire semble possible

A l'occasion d'un colloque du 12 octobre 1998 sur les retraites agricoles, organisé à l'Assemblée nationale, Mme Jeannette Gros, présidente de la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA), s'est prononcée pour le principe d'un régime de retraite complémentaire obligatoire.

Le rapport démographique du régime (cotisants/retraités) ne devrait guère se dégrader au cours des vingt prochaines années (il devrait passer de 0,4 à 0,37), contrairement aux rapports démographiques prévus dans le régime général et les régimes spéciaux. En effet, le nombre de retraités agricoles devrait diminuer dans les dix prochaines années.

Evolution du nombre de retraités agricoles

1977

1987

1997

2007

en million

1,8

1,8

2,1

1,8

Cette période de stabilisation démographique semble favorable à l'instauration d'un régime complémentaire obligatoire de retraite par répartition.

Selon les premiers chiffres disponibles du rapport du Plan 2 ( * ) , qui constituent de simples documents de travail, le besoin de financement du régime des agriculteurs se situerait aux alentours de 15 milliards de francs, que ce soit en 2000, 2020 ou 2040, à l'inverse des besoins de financement des régimes des salariés du régime général et des fonctionnaires, qui connaîtront une dégradation très importante.

L'Etat et la CCMSA devraient prévoir le principe d'une expertise de faisabilité, notamment financière. En effet, les charges pesant sur les agriculteurs étant importantes, il serait difficile de prévoir un financement professionnel supplémentaire de grande ampleur.

Les différents régimes complémentaires créés, chez les salariés comme chez les non-salariés (CANCAVA et ORGANIC), reposent sur le seul effort des futurs bénéficiaires. S'il était décidé d'en faire bénéficier les personnes déjà retraitées, l'Etat pourrait néanmoins contribuer à la constitution du régime et à son financement.

Des dispositions fiscales, dans le cadre d'une remise à plat de la fiscalité agricole, seraient sans doute souhaitables. Par ailleurs, la MSA pourrait dans les années à venir -par des efforts de gestion soutenus- baisser les taux complémentaires.

Le succès des contrats COREVA a montré qu'une retraite complémentaire répondait à une véritable demande des agriculteurs.

L'expérience des contrats COREVA montre qu'il existe une véritable attente des agriculteurs

Les contrats COREVA

A la suite du décret du 26 novembre 1990, la MSA avait créé un régime de retraite complémentaire facultative par capitalisation (contrats de complément de retraite volontaire agricole, dits contrats COREVA). Entre 1990 et 1996, 116.000 agriculteurs ont souscrit de tels contrats.

Après avoir saisi la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) par la voie de la question préjudicielle, le Conseil d'Etat, par un arrêt du 8 novembre 1996, a annulé la majeure partie du décret du 26 novembre 1990. La CJCE avait en effet considéré qu'un régime de base ne peut pas gérer des contrats facultatifs qui relèvent de la concurrence. Le législateur, par l'article 55 de la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures maritimes a remédié aux inconvénients de cette annulation, en prévoyant un transfert des contrats COREVA vers les acteurs du marché. Une garantie intégrale des droits acquis par les adhérents de COREVA jusqu'au 31 décembre 1996 est ainsi assurée.

Avec les contrats COREVA, la MSA avait voulu instituer, par le même instrument, le deuxième étage (régime complémentaire) et le troisième étage (régime d'épargne individuelle du type épargne-retraite). La gestion de ces contrats COREVA par la MSA présentait un grand nombre d'avantages, dont le premier était l'existence d'un interlocuteur unique.

Un régime de retraite complémentaire obligatoire par répartition semble être la seule solution pour que la MSA soit partie prenante . La création de ce régime n'est pas exclusive d'un effort individuel des agriculteurs. Il faut toutefois préciser que la très grande majorité des produits financiers présents sur le marché ne semble pas correspondre à leurs besoins.

Ce régime de retraite complémentaire obligatoire ne pourra pas améliorer sensiblement la situation des personnes déjà retraitées ou proches de la retraite. Sa création concerne avant tout les jeunes agriculteurs.

2. La nécessaire modernisation du régime de sécurité sociale agricole

a) Un régime fragilisé

La découverte par la Cour des comptes d'irrégularités graves dans la gestion de la caisse centrale de mutualité sociale agricole a conduit le ministre de l'agriculture à suspendre, le 7 juillet 1997, le précédent conseil d'administration et à nommer un administrateur provisoire pour six mois, M. Christian Barbusiaux.

Une première convention d'objectifs et de gestion, en application de l'article 1002-4 du code rural, a été conclue le 30 juillet 1997 entre l'Etat et la CCMSA. Cette convention a défini, pour les années 1997 à 1999, les objectifs prioritaires de la MSA dans les domaines clés que sont la qualité du service rendu, la participation aux actions de maîtrise médicalisée des dépenses d'assurance maladie, la gestion administrative des caisses, la prévention et l'action sanitaire et sociale des caisses. Elle a également mis l'accent -à la suite du rapport de la Cour des comptes- sur la nécessité de la mise en place ou du renforcement du service de contrôle spécialisé dans les domaines de l'assujettissement aux régimes sociaux, de la vérification de l'assiette des cotisations sociales et de la lutte contre le travail dissimulé.

Un nouveau conseil d'administration, élu en décembre 1997, et qui a porté à sa tête Mme Jeannette Gros, s'appuie désormais sur une nouvelle équipe dirigeante, animée par M. Daniel Lenoir.

Un avenant n° 1 du 5 décembre 1997 à la convention d'objectifs et de gestion comporte des dispositions particulières au fonctionnement de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole. Ces dispositions prévoient le retour à l'équilibre financier en trois ans, l'évolution des structures liées à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole et organisent les relations avec les autorités de tutelle.

b) Une modernisation en cours

Le redressement de la Caisse centrale

Le redressement de la Caisse centrale apparaît en bonne voie. Son retour à l'équilibre financier en l'an 2000 est possible. D'ores et déjà, une économie substantielle de 15 millions de francs a été réalisée sur le budget de 1998, grâce à une maîtrise des charges de fonctionnement. Cet effort important devra être poursuivi dans les années qui viennent.

Un rapport annuel d'exécution de la convention d'objectifs et de gestion a été transmis au ministre de l'agriculture le 14 septembre 1998.

L'adoption d'un nouveau règlement intérieur a permis au Conseil d'administration de retrouver la plénitude de ses pouvoirs.

L'adoption d'une nouvelle convention d'objectifs et de gestion

L'Etat et la CCMSA s'apprêtent à conclure une nouvelle convention d'objectifs et de gestion pour la période 1999/2001. Un projet a été présenté de manière très détaillée aux représentants des caisses de MSA, aux différents partenaires (organisations professionnelles agricoles, organismes de protection sociale) à l'occasion de l'Assemblée générale de la CCMSA du 4 novembre 1998, réunissant présidents, administrateurs et délégués élus de toute la France (près de 450 participants).

Cette nouvelle convention d'objectifs et de gestion vise à assurer une meilleure couverture sociale des ressortissants, à garantir les conditions favorables à leur santé, à développer l'action sanitaire et sociale, à améliorer le recouvrement des cotisations et, dans le cadre d'une ouverture internationale, à partager les expériences et le savoir-faire.

Elle vise également une meilleure efficacité du service aux ressortissants du régime agricole avec un engagement de qualité vis-à-vis d'eux tout en mobilisant les compétences internes et en modernisant la gestion des caisses de MSA.

La grande nouveauté sera sa déclinaison en contrats d'objectifs, conclus entre la CCMSA et chacune des caisses départementales, avant le 31 juillet 1999.

Une évaluation de la mise en oeuvre de la convention d'objectifs et de gestion sera effectuée à la fin de l'année 1999.

B. L'EMPLOI AGRICOLE EN 1999 : UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE

L'agriculture française a connu dans les cinq dernières années une nouvelle mutation, caractérisée par une diminution importante du nombre d'actifs agricoles 3 ( * ) . Le nombre d'exploitations agricoles est passé de 734.800 fin 1995 à 700.500 fin 1996, soit une baisse de près de 5 %. Ce mouvement de concentration s'est effectué au détriment des petites et moyennes exploitations : le quart de la superficie agricole utilisée (SAU) est détenu par des exploitations de plus de 150 hectares ; 10 % des exploitations cultivent 40 % de la SAU.

L'agrandissement de la SAU moyenne par exploitant a été accéléré.

Superficie agricole utilisée moyenne par exploitant (en hectares)

1970

1992

1997

20

35

42

La population des actifs agricoles a connu une diminution encore plus importante que celle des exploitations agricoles : 1.506.000 en 1995, soit quatre fois moins qu'en 1955. En 1995, chaque exploitation comportait en moyenne deux actifs, contre 2,6 en 1955, sur des unités plus petites et moins mécanisées. La productivité du travail agricole s'est accrue : 5,3 actifs agricoles pour 100 hectares en 1995, trois fois moins qu'en 1955. L'agriculture française a ainsi perdu depuis 1945 pas moins de 4 millions d'actifs.

Evolution de la population active agricole (1980-1997)

1980

1997

Population active agricole

1.869.000

957.000

Population active totale

23.240.000

25.581.000

Population totale

53.731.000

58.495.000

Cette diminution de la population active agricole recouvre cependant des évolutions divergentes selon qu'il s'agisse des actifs familiaux ou des salariés agricoles.

1. La forte diminution du nombre des actifs familiaux

En ce qui concerne les seuls exploitants agricoles 4 ( * ) , l'Observatoire Economique et Social de la MSA en dénombrait 758.956 en 1992 et 620.167 en 1997. Cette accélération s'explique notamment par la mise en place des mesures d'incitation à la préretraite.

La population des exploitants agricoles a très légèrement rajeuni : l'âge moyen est de 46 ans en 1997, contre 47 ans en 1992 ; la classe d'âge la plus nombreuse est désormais celle des 45-50 ans et non plus celle des 55-60 ans. En 1997, 21 % des exploitants ont plus de 55 ans, contre 31 % cinq ans plus tôt.

La baisse du nombre d'exploitations agricoles et leur agrandissement est un phénomène commun à tous les pays de l'Union européenne. Toutefois, les conditions d'évolution apparaissent différentes entre les principaux pays agricoles. Une étude récente montre que « c'est en France que, sur bien des points, l'évolution des structures est la plus marquée au cours des dernières années (1980-1995) » 5 ( * ) .

En ce qui concerne la forme juridique, la part des exploitants à titre individuel diminue au profit de celle des GAEC et des sociétés :

Forme juridique des exploitations (1992-1997)

1992

1997

Exploitants à titre individuel

79 %

70 %

Exploitants en GAEC

13 %

15 %

Exploitants en société

8 %

15 %

La diminution de la population familiale active agricole est encore plus sensible :

Population familiale agricole (1992-1997)

1992

1997

Exploitants

758.956

620.167

Conjoints participant aux travaux

226.673

138.842

Aides familiaux

32.547

19.175

Total

1.018.176

778.184

source : CCMSA/OES/COTAGRI 1997

2. La croissance fragile de l'emploi salarié

Si l'on constate une diminution rapide du nombre d'actifs familiaux agricoles, l'évolution de l'emploi salarié agricole est plus contrastée.

Certes, sur le long terme, le nombre de salariés permanents diminue sensiblement même si cette diminution a fortement ralenti depuis la fin des années 1980.

Evolution du nombre de salariés permanents

1970

1979

1988

1995

Salariés permanents

335.000

233.000

156.000

137.000

Evolution annuelle moyenne

- 4,0 %

- 4,4 %

- 1,8 %

-

Source : AGRESTE

En revanche, le nombre total de salariés agricoles -à savoir les salariés permanents et les salariés occasionnels- augmente depuis 1991.

Evolution du nombre de salariés agricoles

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1.142.942

1.133.177

1.181.459

1.176.606

1.247.690

1.273.673

1.323.302

1.332.632

1.392.398

Source : caisse centrale de la MSA

La croissance de l'emploi salarié agricole s'explique alors par un recours accru aux travailleurs occasionnels : 59.5 % des salariés agricoles travaillaient moins de 120 jours par an et plus du tiers moins de 20 jours par an en 1996.

Répartition des salariés agricoles
en fonction du nombre de jours travaillés en 1996

Nombre de jours

1 à 20

20 à 39

40 à 79

80 à 119

120 à 159

160 à 199

200 à 240

plus de 240

Part de salariés

34,5 %

10,3 %

9,1 %

5,6 %

5,0 %

4,5 %

5,6 %

25,3 %

Source : caisse centrale de la MSA

Au total, les quelque 1,4 million de salariés agricoles représentent 598.400 emplois à temps plein.

Cette évolution de l'emploi salarié agricole recouvre en réalité un double phénomène :

- l'importance soutenue du travail saisonnier,

- le développement de la pluriactivité chez les salariés agricoles.

Pourtant, le recours aux salariés agricoles reste relativement concentré. Depuis quinze ans, la proportion d'exploitations employant des salariés agricoles permanents est relativement stable : moins de 10 % en 1995. Par ailleurs, un quart d'entre elles ont recours à des salariés saisonniers et plus de la moitié font appel à de la main d'oeuvre salariée par l'intermédiaire des prestations d'entreprises de travaux agricoles ou de coopératives d'utilisation de matériel agricole.

Il semble donc que l'emploi salarié agricole n'ait pas à subir un destin inéluctable de disparition progressive. Il tend au contraire à devenir un gisement d'emplois d'appoint qu'il importe de développer.

3. Le développement de la pluriactivité

La définition de la pluriactivité est double. Au sens du régime agricole, les pluriactifs sont des exploitants assujettis exerçant une autre activité relevant d'un autre régime de protection sociale. On ajoute à cette catégorie les cotisants de solidarité considérés comme exerçant une activité agricole à titre secondaire.

Depuis la loi d'orientation de 1980, si les diverses activités sont toutes agricoles, l'exploitant n'est pas considéré comme pluriactif. Le rattachement des pluriactifs au régime agricole n'est pas automatique : il dépend de la nature de l'autre activité exercée et de son importance.

En 1992, une étude de l'Observatoire Economique et Social de la MSA dénombrait 18 % d'exploitants pluriactifs. En 1996, les pluriactifs représentaient 28 % des exploitants, soit 212.000 personnes 6 ( * ) . La pluriactivité est ainsi en forte progression .

Cette notion recouvre des situations très disparates ; certains y viennent par obligation, en raison d'un revenu trop faible, d'autres par choix de diversification. Il s'agit également d'un mode de vie adapté à l'économie des régions montagnardes.

Mais la pluriactivité concerne également de plus en plus les salariés agricoles. 61 % d'entre eux consacraient en effet moins de 200 jours par an à l'activité agricole en 1996.

* 1 Avis n° 70 (1998-1999), tome V.

* 2 Cités par le journal Le Monde daté du 7 janvier 1999.

* 3 Les différents chiffres qui suivent ont pour source l'Observatoire Economique et Social de la Mutualité Sociale Agricole.

* 4 Ce nombre inclut tous les chefs d'exploitation ou d'entreprise (personnes physiques, membres de GAEC ou de sociétés) en activité qui cotisent à l'une ou à l'ensemble des trois branches maladie, prestations familiales, vieillesse, à l'exception des cotisants de solidarité et des cotisants uniquement sur retraite.

* 5 Etude de Mme Magali DEMOTES-MAINARD, parue dans Les Cahiers du SCEES, numéro 30 juin 1998

* 6 Synthèse de l'Observatoire Economique et Social de la MSA, janvier 1998.

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