TITRE II

FINANCEMENT DE LA CRÉATION ET DU DÉVELOPPEMENT D'ENTREPRISES

CHAPITRE II

PARTICIPATION DES PERSONNES PHYSIQUES AU CAPITAL DES ENTREPRISES EN CRÉATION

ARTICLE 9

Incitation fiscale à l'apport en fonds propres des particuliers aux entreprises en création

A l'heure actuelle, comme il a déjà été vu, deux dispositifs existent en faveur de la participation directe des personnes physiques au capital des sociétés en création. Ces deux dispositifs, créés par la loi Madelin, sont complémentaires mais non cumulables :

- le premier encourage, par une incitation fiscale significative, les personnes physiques à entrer dans le capital de sociétés non cotées soumises à l'impôt sur les sociétés, soit à l'occasion de leur création, soit à l'occasion d'augmentations de capital (article 199 terdecies -O A du CGI) ; le bénéfice de la réduction d'impôt de 25 % n'est définitivement acquis que si le contribuable conserve ses parts dans la société pendant cinq ans ;

- le second, codifié à l'article 163 octodecies A du CGI, permet aux investisseurs de déduire de leurs revenus imposables les pertes en capital qu'ils pourraient subir si la société se trouvait en cessation de paiement dans les huit ans qui suivent sa constitution ou l'augmentation de son capital, et ceci dans une limite de 100.000 F pour les célibataires et de 200.000 F pour les couples soumis à imposition commune ; il s'agit en quelque sorte d'une garantie contre l'échec de la société.

Les deux dispositifs ne sont pas cumulables mais un investisseur peut choisir in fine celui des deux dispositifs qui lui est le plus favorable.

Le présent article propose de créer un nouveau dispositif de garantie contre les pertes que pourrait enregistrer une personne physique au titre des parts qu'elle détiendrait dans une société nouvellement créée. Ce dispositif se décompose en deux volets :

Le premier volet du dispositif consiste à rendre possible l'option d'une SARL pour le régime fiscal des sociétés de personnes, c'est-à-dire pour la " transparence " fiscale.

En effet, pour permettre l'imputation des pertes d'une société sur le revenu imposable de ses associés, il convient que ces pertes puissent remonter du compte d'exploitation de la société vers ses associés, ce qu'interdit en principe la constitution d'une entreprise sous forme de société à responsabilité limitée (SARL), l'entité imposable étant alors la société.

Une telle remontée des résultats est en revanche possible au sein des sociétés de personnes qui sont dites fiscalement " transparentes " ou " translucides ". Le bénéfice réalisé par une société de personne (sociétés en nom collectif, sociétés civiles, sociétés en participation, sociétés civiles de participation...) est en effet taxé entre les mains de ses associés à proportion de leurs droits dans la société (article 8 du CGI).

Seules les SARL familiales, c'est-à-dire les SARL formées uniquement entre personnes parentes en ligne directe ou entre frères et soeurs ainsi que les conjoints, peuvent opter pour le régime fiscal des sociétés de personnes (article 239 bis AA du CGI). L'option ne peut être exercée qu'avec l'accord de tous les associés.

Le présent article propose d'étendre cette possibilité aux SARL exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole dont le capital est majoritairement détenu par des personnes physiques.

Cette option ne pourrait être exercée que pendant un délai de trois ans suivant la création de l'entreprise et avec l'accord de tous les associés. Elle cesserait de produire ses effets aussitôt que l'une des conditions posées viendrait à faire défaut.

Le second volet du dispositif consiste à permettre à un contribuable d'imputer ses déficits industriels et commerciaux non professionnels sur ses revenus de toute nature .

Il convient de rappeler que la législation fiscale en vigueur proscrit depuis 1996 l'imputation de déficits provenant d'activités relevant des bénéfices industriels ou commerciaux sur le revenu imposable global, lorsque ces activités ne comportent pas la participation personnelle, continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité. Ces déficits peuvent toutefois être imputés sur des bénéfices tirés d'activités de même nature. C'est ce que l'on appelle la " tunnélisation " des déficits industriels et commerciaux non professionnels, effectuée par l'article 72 de la loi de finances pour 1996 dans un but de moralisation fiscale.

Auparavant en effet, le régime des bénéfices industriels et commerciaux connaissait des règles d'imputation des déficits moins strictes que dans les autres catégories de revenus, compte tenu de la responsabilité personnelle et indéfinie des exploitants ou associés pour les risques pris au titre de l'activité exercée.

Cette souplesse ayant parfois été utilisée à des fins d'optimisation fiscale, le législateur a décidé d'y mettre fin en décembre 1995. Le montage consistait à recourir simultanément à la possibilité de dégager des déficits importants par le truchement de la loi Pons, et à l'option pour la transparence fiscale, afin de contourner le taux marginal de l'impôt sur le revenu.

Votre commission des finances avait émis des réserves à l'époque sur une réponse qu'elle estimait sans véritable nuance à certains abus bien réels. Alain Lambert, alors rapporteur général, écrivait : " S'il préserve les entrepreneurs " actifs ", le dispositif adopté traite toutefois de façon indifférenciée les personnes participant à des opérations contestables et celles qui assument un risque d'entreprise sans intervenir directement dans la gestion de cette dernière. Il ignore ainsi tout un plan de la réalité économique " . Tel est le cas notamment des investisseurs qui restent indéfiniment responsables des risques pris par l'entreprise sans participer à sa gestion.

L'imputation des déficits industriels et commerciaux reste toutefois possible sur le revenu imposable global pour les contribuables qui exercent directement et continûment les actes nécessaires à l'activité de l'entreprise. L'interdiction ne vaut en effet que pour les contribuables qui ne sont pas personnellement impliqués dans la gestion de l'entreprise à un titre ou à un autre.

Le présent article propose de rendre possible l'imputation des déficits industriels et commerciaux des associés " passifs " d'une SARL ayant opté pour la transparence fiscale, sur leur revenu global. Une telle possibilité serait cependant plafonnée à 100.000 F par foyer fiscal, et soumise à la condition que le contribuable conserve pendant cinq ans ses droits dans la société.

Un tel dispositif part du postulat selon lequel une entreprise est souvent déficitaire au cours de ses premières années d'existence. C'est donc au moment où l'entreprise en a le plus besoin que les investisseurs potentiels sont les plus réticents à investir dans le capital.

Compte tenu des possibles abus que peut induire ce dispositif, votre commission des finances s'est interrogée sur l'opportunité de l'encadrer en le réservant aux associés des seules SARL localisées dans les zones économiquement fragiles du territoire. Elle y a finalement renoncé pour ne pas rendre plus complexe une mesure déjà encadrée par un plafond.

Il reste à espérer que la possibilité de rendre les pertes potentielles de l'entreprise déductibles de leur revenu imposable pourra parvenir à surmonter la réticence initiale des investisseurs, sans conduire aux abus qui ont été constatés avant la " tunnélisation " des déficits industriels et commerciaux non professionnels. Le plafonnement de l'avantage fiscal susceptible d'être obtenu est un moyen de limiter les possibilités d'optimisation fiscale pour les investisseurs peu scrupuleux.

Décision de la commission : votre commission vous propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article.

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