AUDITION DE M. ANTOINE THIARD,
REPRÉSENTANT DE L'UNION NATIONALE
DES ASSOCIATIONS DE DÉFENSE
DES FAMILLES ET DE L'INDIVIDU

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M. Antoine Thiard a indiqué que les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale pour la dissolution des groupements à caractère sectaire lui paraissaient satisfaisantes.

Il a relevé que la procédure judiciaire, choisie par l'Assemblée nationale de préférence à la procédure administrative pour la dissolution des groupements à caractère sectaire, correspondait à la formule des articles 3 et 7 de la loi du 1 er juillet 1901 relative au contrat d'association, prévoyant la dissolution par le tribunal de grande instance de toute association fondée sur une cause ou en vue d'un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes moeurs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement.

M. Antoine Thiard a fait valoir que les difficultés ne provenaient généralement pas de l'objet des associations tel qu'il était défini par leur statut, mais plutôt de leur comportement.

Relevant qu'une formule de dissolution judiciaire était plus conforme à la tradition républicaine, et comportait l'avantage d'être contradictoire, il a considéré, en revanche, que celle-ci serait plus longue qu'une procédure administrative qui serait, de ce fait, plus efficace.

M. Antoine Thiard a marqué son accord avec les dispositions de la proposition de loi concernant l'extension à certaines infractions de la responsabilité pénale des personnes morales, remarquant que l'action des groupements sectaires ne résultait généralement pas de la volonté d'une seule personne.

Il a également approuvé les dispositions insérées par l'Assemblée nationale pour limiter l'installation ou la publicité des groupements sectaires, en particulier à proximité des établissements scolaires.

M. Antoine Thiard a exprimé son accord sur la nécessité de réprimer de manière spécifique la manipulation mentale par des groupements sectaires, considérant toutefois que les termes de manipulation mentale, retenus par l'Assemblée nationale, pourraient prêter à des difficultés d'interprétation puisqu'ils ne se rapportaient pas exclusivement à des comportements sectaires.

Exposant à titre d'exemple que certaines formes de publicité commerciale pouvaient aussi être assimilées à de la manipulation mentale, il a souligné que celle pratiquée par les groupements sectaires, en s'attaquant à la liberté de pensée et d'action des personnes et à la dignité humaine, affectait d'une manière définitive la personnalité de l'individu.

M. Antoine Thiard a évoqué ensuite la proposition de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme d'utiliser, pour réprimer les comportements délictueux des groupements sectaires, les dispositions en vigueur du code pénal relatives à l'abus de faiblesse, plutôt que de créer un délit de manipulation mentale.

M. Antoine Thiard a considéré que la manipulation mentale, telle qu'elle était définie par le texte adopté par l'Assemblée nationale, consistait d'abord en la mise d'une personne en état de faiblesse, puis à l'abus de cette faiblesse, et ne pouvait donc pas être analysée uniquement comme un abus de faiblesse.

M. Antoine Thiard a enfin évoqué deux orientations possibles pour mieux définir les comportements délictueux des groupements sectaires.

En premier lieu, il s'est interrogé sur la possibilité de trouver une qualification correspondant plus précisément au texte prévu par l'Assemblée nationale pour l'article 9 de la proposition de loi, en remplaçant le terme de manipulation mentale par celui de mise sous dépendance, de mise sous influence, d'emprise sectaire, de mise en danger ou d'embrigadement sectaire.

En second lieu, il a exposé que les dispositions en vigueur du code pénal concernant l'abus de faiblesse pourraient être étendues à la mise en état de faiblesse.

Enfin, M. Antoine Thiard s'est interrogé sur les conséquences d'une répression qui serait excessive et pourrait conférer aux sectes la posture de victime ou les pousser à la clandestinité.

En réponse à M. Nicolas About, rapporteur, M. Antoine Thiard s'est demandé s'il était opportun de confier aux tribunaux judiciaires une compétence pour dissoudre les associations. Il a considéré que le mérite d'une procédure judiciaire résidait dans son caractère contradictoire, de ce fait plus acceptable par le citoyen, que la procédure de dissolution administrative qui, en revanche, pourrait paraître plus efficace.

Il a, en définitive, estimé préférable une extension à la mise en état de faiblesse des dispositions actuelles du code pénal sur l'abus de faiblesse, ce qui reviendrait à redéfinir un délit existant, plutôt que de créer un nouveau délit de manipulation mentale qui suscitait, d'ores et déjà, des interrogations, en raison de sa conception trop large.

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